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Critiques de Willa Cather (145)
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Mon Antonia

Il y a quelques temps déjà je quittais les Grandes plaines, ces terres rebelles colonisées dès la seconde moitié du 19ème siècle par les pionniers européens venus par trains entiers s’installer dans le Middle West. Ils ont du louer à n’en pas douter les immigrants ukrainiens, des Mennomites, qui introduirent à cette époque une variété de blé d'hiver résistant au froid … car au-delà du centième méridien ou à ses approches les terres de l'espérance avaient aussi un goût d'enfer .



Mais aujourd’hui encore je reste ancrée sur ces terres du Nébraska avec Mon Antonia de Willa Cather. Je ne peux oublier la vision de ces plaines infinies, ondoyantes et rougeoyantes, âpres et vierges que l'auteure a su peindre, des tableaux magnifiant les grands espaces aux immenses prairies couvertes d'herbes rouges parfois zébrées de traînées jaunes, les tournesols semés sur leur passage par les Mormons mais où indiens et bisons ne sont déjà plus qu’un souvenir.

Mon Antonia, une histoire d'amitié, d'amour inconditionnel mais aussi l'histoire d'un pan de la colonisation de l'Amérique, un hommage aux pionniers, à ces fermiers des Grandes Plaines, à leur labeur, leur solidarité et leur capacité d'adaptation.



Oui, j'ai aimé cette rencontre ou plutôt ces rencontres.

Rencontre avec Jim Burden, le narrateur, orphelin, à peine âgé de 10 ans, venu de Virginie rejoindre la ferme de ses grands parents proche de Black Hawk, bourgade du Nébraska. Découvrir à travers son regard ce Nouveau Monde dur et vide en compagnie de sa grande amie, Antonia Shimerda ou Tony, la jeune fille de Bohême, fille d'immigrés tchèques, de quatre ans son aînée, comme lui en exil. Epier leurs escapades automnales pour explorer un terrain de jeu inconnu, sans limites, en observant minutieusement leur nouvel environnement. Et bien sûr suivre le destin de cette jeune femme solaire au mental d'acier malgré les nombreuses turpitudes de la vie.



Rencontre avec les différentes communautés d'immigrants européens, Allemands, Scandinaves, Français, Russes, Tchèques qui devaient surmonter la barrière linguistique, en découvrant leur quotidien, des conditions de vie souvent rudimentaires au début de leur installation, leur acharnement à vaincre les épreuves quelles soient météorologiques (blizzard, canicule, tornade) ou économiques (endettement) et leurs efforts parfois transformés en exploit.

J'ai aimé partager la vie des amies d'Antonia, ces autres jeunes femmes volontaires, indépendantes, aux caractères bien trempés et aux trajectoires différentes, gravitant autour de notre héroïne, qui se sont affranchies des codes d’une société étriquée. Des portraits très réalistes.



Et pour finir rencontre avec une auteure, Willa Cather, admiratrice de l’un de ses contemporains, Gustave Flaubert, qui avec son écriture m' a réellement enveloppée d'ondes bienveillantes et réconfortantes à travers des vagues successives d'émotions et de sensations en sublimant entre autre la communion de deux âmes devant un paysage à couper le souffle.



Ecrit en 1918, Mon Antonia est une œuvre avec une facette nature writing, un classique de la littérature américaine mais pour moi une vraie découverte. Née en 1873 en Virginie dans une famille de fermiers, Willa Cather, est partie elle-même enfant vers les Grandes Plaines du Nébraska pour Red Cloud. Une œuvre donc gorgée de sa propre expérience et enrichie par les nombreux souvenirs et les histoires de son entourage. Dans l'introduction de Mon Antonia, l'auteure déclare s'être inspirée des confidences de James Burden, un ami d’enfance, qui notait sur un carnet toutes les réminescences de cette époque là, instants partagés avec Tony, son Antonia.



Marie-Claude Perrin-Chenour qui la qualifie d'écrivaine de la Frontière dit à propos de son style que « D’une certaine façon, c’est Mark Twain écrivant comme Henry James ».

Willa Cather a obtenu le Prix Pulitzer en 1923.



Un roman féminin et dans un sens féministe mais un roman aussi spirituel et poétique.

Un coup de coeur inattendue. Une belle surprise



Adapté au cinéma en 1995 par Joseph Sargent j'aurai bien imaginé pour ma part une version de Mon Antonia par Terrence Malick. Il est toujours bon de rêver...
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Mon Antonia

Antonia est une héroïne magnifiée dans ce splendide roman que les mots de Willa Cather mettent dans la narration réalisée par un autre héros du livre, Jim. L'histoire s'étend sur plus d'une trentaine d'années, débutant dans l'enfance et l'adolescence des deux protagonistes jusqu'à leur quarantaine.



C'est la première partie qui est la plus développée avec l'arrivée des deux jeunes dans le Nebraska : Antonia immigrée tchèque avec sa famille, Jim jeune orphelin venant vivre chez ses grands-parents.



Dès le début, le lecteur est saisi par leurs personnalités. Est-ce celle de Jim qui s'affirme le plus? Pour certains, peut-être car c'est bien lui seul qui raconte cette immense tranche de vie en la peuplant de ses analyses, sentiments, rêves, illusions, rencontres diverses. Mais, c'est lui aussi, en présentant Antonia, en la décrivant depuis l'enfance jusqu'à l'âge mûr, en faisant référence à sa présence indispensable pour lui, même lorsqu'ils éloignés l'un de l'autre, quelquefois pour des années, en l'admirant, en l'aimant finalement, les deux se réunissant dans une amitié indissoluble qui lie leurs parcours respectifs, c'est lui qui lui confère son titre d'héroïne de ce très beau roman.



Les saisons et les années s'écoulent, Willa Cather les observant par les yeux de Jim et traduisant dans une écriture poétique toutes les beautés de la nature au fil du temps. L'hiver pèse lourd pour les jeunes héros, ils attendent un printemps tellement long à venir qu'ils ne manquent pas d'admirer les beautés et douleurs hivernales, à travers la campagne figée du Nebraska, les ornières gelées, les lacs engloutis sous la neige s'accumulant sur l'épaisseur de la glace qui les enserre. Mais, dès le printemps, ce sont les milliers de fleurs explosant dans la nature qui sont déployées dans le roman, ajoutant encore à toute sa dimension poétique tant les descriptions sont soignées et parfaitement évocatrice de l'environnement des deux jeunes. L'été et l'automne, saisons des fruits, des récoltes, du maïs cultivé en tant que nourriture essentielle pour hommes et bêtes, développent encore la richesse de l'écriture de Willa Cather.



D'autres jeunes filles apportent les aspects de leurs personnalités au roman, particulièrement Lena, la frivole lucide, devenue riche, dont Jim développe longuement les traits, partage avec elle une intimité diffuse, la présence ou l'absence d'Antonia demeurant au coeur de toutes leurs relations.



Et puis, il y a les plus anciens qui ne sont pas des figurants, qu'il s'agisse des parents d'Antonia ou des grands-parents de Jim. Les deux figures de proue sont le père d'Antonia, immigré malgré lui dans un pays où sa femme croyait trouver la fortune, le dépossédant de ses racines tchèques. Il est l'homme bon, celui qu'Antonia aima par-dessus tout, qui ne sera jamais oublié, et que Jim reconnaît aussi comme le père par excellence, l'homme honnête qui sait distinguer le bien du mal. La grand-mère de Jim est une grande dame, généreuse, capable de se déposséder de certains biens pour les donner aux plus pauvres, la famille d'Antonia en l'occurence, même si la mère, elle, ne cherche que profit et dissension.



"Mon Antonia", c'est le cri d'adieu du père à sa fille aînée, c'est aussi celui de Jim qui reconnaît en elle, dès l'enfance, la femme à aimer, à préserver et il l'aide de son mieux dans les difficultés si nombreuses qu'elle rencontre dans sa jeunesse.



La relation de Jim et d'Antonia est une vraie relation d'amitié et d'amour au sens le plus noble du terme, d'admiration réciproque, de besoin de se retrouver, de partager leurs univers et, en ce sens, les dernières pages du roman sont vraiment magnifiques et doivent se savourer lentement car elles reflètent l'essence de la relation de Jim et d'Antonia, cette possession du passé qui les unit pour toujours.
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Mon Antonia

"Mon Antonia" c'est Antonia racontée par Jim, son meilleur ami, puis son amoureux. Antonia, c'est la conquête de l'Ouest, le temps des pionniers, ces Européens venus s'installer dans la Prairie pour la défricher, la cultiver, en vivre, voire peut-être s'en enrichir. Des temps durs, faits de souffrance, de désillusions mais aussi de joies simples.

Antonia a une petite dizaine d'années quand elle quitte la Bohème. Jim est un peu plus jeune, et quitte le Mississippi pour rejoindre ses grands-parents à la mort de ses parents.

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Une histoire d'amitié entre deux feux-follets adorables avec découverte de la nature environnante, des animaux qui la peuplent.

Une histoire qui se mue en histoire d'amour quand Jim observe Antonia de loin.

La vie à la campagne, puis la vie dans la petite ville. Un monde les sépare, une hiérarchie se fait entre habitants. Et le regard des autres, déjà, toujours.... Surtout quand il s'agit de surveiller les jeunes filles.

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Une autrice dont je n'avais jamais entendu parler, que je découvre grâce au challenge solidaire. Une mine ce challenge solidaire : une bonne oeuvre pour une association, des découvertes littéraires pour les participant(e)s. Moi clairement j'ai fait un beau voyage dans le temps, dans une nature sauvage qui n'existe plus, aux côtés de Jim et surtout d'Antonia.
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L'un des nôtres

L’histoire de ces jeunes Américains venus, de si loin, se battre sur le sol français a toujours été pour moi un des épisodes les plus poignants de l’Histoire. L’un des nôtres raconte admirablement celle de l’un d’eux.



Claude est coincé dans une vie qui ne lui convient pas. Et quand il prend une décision, elle s’avère soit impossible à réaliser, soit catastrophique. Pas simple d’être soi-même quand on est fils de fermier. La guerre gronde, mais loin, en Europe. L’occasion pour Claude de changer sa vie ?



Le roman comporte de longues descriptions qui vous plongeront dans la vie d’une ferme du Nebraska au début du siècle dernier. L’auteur ne vous épargnera aucune fleur, aucun arbre, aucune nuance de lumière. Mais c’est dans la deuxième partie — celle que j’ai préférée — que ces descriptions prennent tous leurs sens. Vous connaissez peut-être la Première Guerre mondiale grâce à des livres tels que Le feu (Henri Barbusse) ou Les croix de bois (Roland Dorgelès). Mais c’est la guerre en France vue par de jeunes Américains qui est racontée dans L’un des nôtres, avec leur méfiance vis-à-vis des Français, leur émerveillement, mais aussi la différence de culture, très subtilement dépeinte.


Lien : https://dequoilire.com/lun-d..
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Mon Antonia

Dans la fournaise d’un été, un train traversant les plaines de l’Iowa abritait la rencontre de Willa Cather avec Jim Burden, un ami d’enfance. Leur conversation s’arrêtait autour d’une fille qu’ils avaient connue tous deux. Elle venait de Bohême. Jim avait avoué noter depuis quelques temps ses souvenirs d’Antonia que Willa Cather était bien curieuse de lire. Elle les a depuis réécrits sous forme de ce récit porté par la voix de Jim et, la curiosité étant contagieuse, il me fallait les découvrir à mon tour.



Bien des années avant, alors orphelin à seulement dix ans, un autre train avait convoyé Jim vers le Nebraska où ses grands-parents pourraient l’aider à grandir. En tête du train, une voiture était dédiée aux immigrants. Parmi eux, une famille tchèque devait également faire halte à Black Hawk et devenir les plus proches voisins de la ferme isolée des grands-parents de Jim.

Un grand champ de maïs, un plus petit terrain planté de sorgho, quelques érables nains et, au-delà de ces terres cultivées, un paysage mouvant sous les ondulations de grandes herbes rouges qui tapissent l’immensité de cette prairie à conquérir. Des chemins se bordent de tournesols hérités d’un passage des Mormons sur ces terres vierges. Voilà le paysage qui va s’offrir aux yeux du garçon.

Les Tchèques, avec leurs trois mots d’anglais, arrivent à la recherche d’une nouvelle vie plus prospère, mais c’est une misérable habitation enfoncée dans le flanc d’une ravine et une concession bien cher payée, demandant beaucoup de sueur pour en tirer profit, qui seront les points de départ de leur rêve américain. La famille d’Antonia doit refouler d’aigres désillusions au cœur de cette Amérique sublimée avant le départ. La terre de richesses et d’avenir prometteur laisse plutôt germer la détresse. Le père d’Antonia, ancien tisserand et joueur de violon, pas du tout préparé au dur travail de la ferme, aura bien du mal à faire taire son mal du pays.

Mais Antonia, quatorze ans, est bien décidée à mettre toute sa jeunesse, son énergie, sa volonté et sa force à s’épanouir dans cette nouvelle vie et Jim l’y aidera avec l’appui bienfaisant de ses grands-parents. Entre l’apprentissage de l’anglais, les vagabondages dans la prairie, les rencontres avec les autres déracinés venus de Russie, de Norvège, d’Autriche, nos deux jeunes noueront une belle amitié, et même peut-être un peu plus dans le cœur de Jim. Son portrait d’Antonia en fait ressortir son caractère tonique, spontané, passionné, et sa beauté de fille de la campagne, tout à la fois vigoureuse et chaleureuse.



Willa Cather sublime ces prairies perdues dans l’immensité du Nebraska, parlant du vent qui s’amuse dans ces grands espaces, donnant à Jim les bons mots pour nous faire goûter toutes les merveilleuses teintes du premier automne qu’il passât là-bas avec les reflets cuivrés des herbes s’étendant à l’infini. Et lorsque l’hiver fait son entrée, se réchauffant dans la paille et les peaux de bison, Jim arrive tout aussi bien à nous décrire la neige modifiant subitement les prairies devenues aveuglantes de blancheur.

Par de petits chapitres, à la plume simple et chaleureuse, les souvenirs de Jim s’équilibrent harmonieusement entre rencontres humaines et perception de son environnement avec toutes ses variations climatiques, entre la campagne avec son dur travail des champs et la petite ville de Black Hawk.



La chaleur du vieux fourneau qui fournissait la nourriture réconfortante préparée par la grand-mère alors que les hommes rentraient gelés et harassés nous envahit tandis que les coyotes hurlent au loin. L’histoire glaçante de deux Russes qui ne pouvaient plus que fuir leur pays s’écoute, tremblotant, alors que le vent secoue les fenêtres de leur cahute. La veille du premier Noël se vit, en tirant de la malle de cow-boy d’Otto les éclatantes images autrichiennes pour orner le sapin.



Et puis, la vie s’écoule, nos deux jeunes grandissent, l’âge adulte les rattrape et leurs chemins suivent des axes différents. De petites déceptions finissent par être gommées par la grande admiration que Jim vouera toujours pour Son Antonia.

Ce très beau récit déploie délicatement le quotidien que fut celui de Jim sur ces étendues ouvertes des Grandes Plaines. Il a de doux accents nostalgiques, la chaleur des yeux bruns d’Antonia, la beauté de « la matière dont sont faits les paysages » et toute l’affection que des êtres peuvent se porter quels que soient leurs destins.

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Mon Antonia



Mon Antonia, oui, "mon" Antonia... Et je gage que ce sera la vôtre, tout autant, si je parviens avec cette critique à vous donner envie de lire ce livre.







Quand nous rencontrons les personnages de ce récit, ils sont dans le même train pour "aller vers une autre vie" : Jim, qui a perdu ses parents, va vivre chez ses grands-parents qui possèdent une ferme au Nebraska et Antonia et sa famille, émigrés Tchèques, rejoignent le même bourg pour y démarrer une nouvelle existence, dans la maison qu'ils ont acquise avant leur départ de Bohême.





Trente ans vont s'écouler au fil des pages, sous la plume de Jim qui se souvient, et c'est leur vie, la vie de tous ceux qui les entourent qui nous est racontée : les joies, les peines, les déconvenues, le désespoir...

Le père d'Antonia , joueur de violon, n'avait pas les mains d'un fermier. Personne ne parlait la langue du pays qui les accueille sauf Antonia qui ne sait dire qu'une phrase pour répéter leur destination, la maison n'était pas celle rêvée...



Jim et ses grands parents se lient d'amitié pour ces expatriés, leur venant en aide devant toutes les adversités, se souvenant des premiers temps d'incertitude qui ont été les leurs quand eux-mêmes sont arrivés sur cette terre où tout était à faire.



Et le lien tissé entre ces deux enfants perdurera toute leur vie.









C'est un très beau récit sur la vie des fermiers venus s'installer dans cet état, l'entraide qui était la condition pour rester en vie, l'écoute pour ne pas se sentir seul. Même si les deux employés de la ferme des grands-parents de Jim rêvent de découvrir, pour l'un et de retourner pour l'autre, prospecter ce métal qui peut vous rendre riche, ils sont conscients de la richesse présente, celle des sentiments d'affection que leur prodiguent leurs employeurs qui les traitent comme des membres de la famille.



C'est la présence d'une nature pas toujours clémente, le dur quotidien des êtres qui vivent de leur terre, le travail harassant des champs et aussi le bonheur du plaisir des récoltes, les joies qui naissent du partage de ceux qui ont peu mais donnent tout, des rencontres improbables que permet le monde sauvage...



Tandis que Jim fait des études, Antonia se loue pour travailler : son seul défaut sera de "toujours faire confiance à ceux qu'elle aime", sa vie sera éprouvante mais ce sera une vie de liberté, une vie conforme à ses aspirations, au milieu des saisons qui transfigurent cette terre de campagne qu'elle aime tant...









Je ne veux pas tout vous raconter, le bonheur distillé par ces pages est trop intense, trop bienfaisant. Il faut vous le laisser découvrir et en jouir pleinement.











Une lecture fabuleuse que je regrette presque d'avoir faite parce que la magie de ces pages lues ne sera plus pour moi mais je souhaite qu'elle soit intensément vôtre.

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L'un des nôtres

Quelle belle découverte et quelle belle écriture que celle de Willa Cather...!



Ecrit en 1922, ce roman témoigne de cet enthousiasme et de cette recherche d'un idéal qui a poussé de jeunes hommes américains, fermiers pour la plupart ou issus d'un milieu rural, à s'engager pour la France lors de la première guerre mondiale.

On y lit la permanence du monde face à la fragilité de nos vies, les cycles des saisons évoqués avec tant de délicatesse, labours, semences, récoltes se succédant au Nebraska comme en France, et cette lune éternelle qui a vu des millénaires de civilisations face à ces garçons d'à peine vingt ans qui souffrent d'ennui et d'impuissance, qui voient en la guerre une manière d'être vivants, enfin, et utiles.

Claude Wheeler est l'un de ceux-là ( L'un des Nôtres: à quelle famille appartient-il vraiment, semble demander le titre): jeune homme frustré, complexe, passionné qui dépérit de cette existence toute tracée par son père et ses origines, et que rien ne prédestinait à partir ainsi en Europe, ce continent tellement lointain qu'il semble d'une autre galaxie.



Willa Cather dépeint merveilleusement cette énergie de la jeunesse et ce besoin impérial qu'on peut ressentir à s'accomplir. Pauvre génération qui le fera sous les bombes, dans les tranchées et le sang, et qu'on finira par oublier, loin des leurs..
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Mon Antonia

Jim, vers la cinquantaine, se remémore sa jeunesse au Nebraska, dans une ferme puis une petite ville ; et surtout son amitié d’enfance avec Antonia, la fille des voisins venus de Bohême.

Au travers du récit de cette amitié, c’est surtout une évocation de la vie rurale fin 19ème début 20ème siècle, notamment l’installation de familles venues de tous les coins de l’Europe : Tchèques, Suédois, Norvégiens…

On oublie souvent à quel point l’Europe a été au 19ème une terre d’émigration : c’est par dizaines de millions que les Européens ont fui les persécutions religieuses ou politiques, la misère, voire la famine dans le cas des Irlandais.

C’est l’époque où de petites communautés se bâtissent dans des conditions très précaires, sur des territoires "vierges" - c’est-à-dire volés aux nations indiennes, qui ne sont jamais citées dans ce roman.

De même, les séquelles de l’esclavage ne sont même pas effleurées, sinon au travers d’un seul personnage noir dont la description est très déshumanisante, animalisante même. (Dans "Playing in the dark", c’est une œuvre de Willa Cather qui est analysée par Toni Morrison pour expliquer la construction raciste du Noir dans la littérature américaine.)

La ténacité, l’ardeur au travail des colons sont louées sur un ton plutôt moralisateur, en mode "la terre ne ment pas", encore que quelques personnages féminins aient un destin plus intéressant (mais vite survolé) : celle qui monte seule sa petite entreprise, bien décidée à se passer des hommes ; celle qui fera fortune en cuisinant pour les chercheurs d’or au Klondike.

Reste une narration agréable au style fluide, dans une bonne traduction de Robert Ruard. Et puis c’est un témoignage intéressant sur les transformations des paysages au tournant du siècle : "l’ancienne terre à pâture disparaissait progressivement pour faire place à des champs de blé et à des champs de maïs (…) Il y avait des maisons en bois là où se dressaient jadis les abris de terre battue."

Malgré le mépris dont ils sont victimes de la part des "Américains de souche" (des familles arrivées un siècle ou deux plus tôt) , c’est bel et bien des mains de ces migrants qu’est née la puissance économique des États-Unis ; il n’est peut-être pas inutile de le rappeler dans l’Europe d’aujourd’hui.

"Le grand-père de Lena Lindgard était un homme d’église très respecté en Norvège (…) Quelle importance ? Tous les étrangers étaient des ignorants qui ne parlaient même pas anglais."



Challenge Solidaire 2023

Challenge USA : un livre, un État (Nebraska)
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La Maison du professeur

À partir d’un fait de prime abord anecdotique – un professeur d’université, Godfrey St Peter, emménage dans la maison qu’il s’est fait construire avec l’argent de sa réussite –, bien qu’il donne son titre au roman (y compris en version originale), Willa Cather va déployer une intrigue bien plus profonde que cela, aux diverses ramifications, pour nous proposer un roman psychologique plutôt bien fait.



Cette fameuse maison donc, est pour le professeur St Peter la concrétisation d’un statut social enviable, les professeurs d’université ne s’en sortant financièrement pas tous si bien dans le roman (occasion d’ailleurs pour Willa Cather de critiquer le système universitaire de l’époque, qui devenait de plus en plus une entreprise commerciale plutôt qu’intellectuelle). En effet, Godfrey St Peter a épousé une femme un peu fortunée mais quelque peu snob, et ses filles Rosamond et Kathleen ont conclu, surtout la première, de beaux mariages.



Godfrey St Peter aurait donc tout pour être heureux, mais curieusement, cette maison marque le début d’une prise de conscience de sa part, celle d’être sur un chemin non pas ascendant, mais au contraire descendant : son mariage n’est plus ce qu’il était – après plusieurs décennies de passion, Lillian et lui semblent évoluer différemment et ne plus se comprendre –, son chef d’œuvre est publié, sa famille ni même ses étudiants ne l’intéressent plus comme auparavant, en tout cas de moins en moins depuis la mort de son protégé Tom Outland il y a quelques années de cela…



Ce Tom Outland n’est pas qu’un simple souvenir pour le professeur, ni d’ailleurs pour la famille St Peter : ancien fiancé de Rosamond, il lui a légué le brevet qu’il avait mis au point avant sa mort, et que Louie Marsellus, qui a épousé Rosamond entretemps, a commercialisé, faisant leur fortune… et créant jalousies et rancœur dans la famille St Peter. Scott McGregor, le mari de Kathleen, l’autre sœur, se place constamment dans une position de concurrence vis-à-vis de Louie, tandis que cette dernière regrette que la mémoire de Tom ait été ainsi pervertie par l’argent. Opinion que Godfrey St Peter partage, lui qui a bien connu Tom et qui sait que celui-ci était un garçon désintéressé, humble, passionné, en somme loin de l’image qui reste de lui, celle d’un scientifique au brevet valant des millions de dollars.



C’est pourquoi la dernière entreprise littéraire de Godfrey St Peter sera de publier une version annotée du journal de Tom Outland, qui ne porte pas du tout sur son brevet, mais sur la déception de sa jeune et courte vie, survenue avant de connaître les St Peter : la découverte d’une cité indienne autochtone au Nouveau-Mexique, qu’il tentera en vain de faire reconnaître par des organisations culturelles gouvernementales.



Ce journal constitue la partie centrale du roman, et crée de manière surprenante une véritable différence de ton, non pas parce que la plume est donnée subitement à un autre personnage que le professeur St Peter, mais parce que le roman passe d’un roman naturaliste à un roman de style nature writing : Tom Outland y décrit sa découverte, faite en tandem avec son ami Rodney Blake (leur relation étant décrite dans des termes assez ambigus), de cette cité indienne mystérieusement abandonnée telle quelle, en insistant sur le cadre naturel américain dans laquelle elle se trouve et ses beautés. Paysage, histoire et nature sont célébrées par Tom qui souhaitait les préserver, loin de toute préoccupation pécuniaire.



J’ai vraiment été surprise dans un premier temps de ce virage adopté par Willa Cather, et me suis demandé d’abord pourquoi il était là, quel était son sens, d’autant plus que la troisième et dernière partie revient sur un Godfrey St Peter las de tout, y compris de sa vie. En faisant quelques recherches pour ma chronique, j’ai appris que Willa Cather avait rédigé la partie sur le journal de Tom Outland en premier, et que les deux autres parties n’avaient qu’une fonction de cadrage. Mais à la réflexion, ce choc entre ces parties si dissemblables est assez malin, puisqu’il vient illustrer ce que Willa Cather nous explique dès le début avec le symbole qu’offre cette maison dont Godfrey St Peter ne veut finalement pas : les idéaux ne sont pas toujours faits pour se confronter à la réalité. Et on tombe souvent de haut quand on s’en rend compte, ce qui semble être le cas du professeur St Peter. Que valent la réussite, le rang social, quand on comprend que c’est du vent ?



À travers cette histoire de brevet, il y a aussi l’idée que trop d’argent pervertit même les choses les plus pures et belles : les relations de famille se distendent, comme le montrent les relations désormais difficiles entre Rosamond et Kathleen, des gens deviennent intéressés, à l’instar du professeur qui a aidé Tom Outland à accoucher de son brevet et qui, une fois qu’il rapportera de l’argent, voudra sa part d’un gâteau qu’il a longtemps dédaigné.



« La maison du professeur » est ma première rencontre avec Willa Cather, que je ne connaissais pas avant de m’inscrire au challenge solidaire et de lire il y a quelques mois « Un dernier été » d’Elin Hilderbrand (son personnage principal aimant tellement cette autrice qu’elle donna son prénom à l’une de ses filles). J’ai été séduite par cette plume certes classique, mais qui creuse de manière perspicace et pertinente ses personnages, pour proposer une intrigue beaucoup plus profonde que ce qu’elle avait l’air. Je poursuivrai donc ma lecture de cette autrice avec plaisir.

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Pionniers

Publié en 1913, premier volet de la trilogie de la Prairie, Pionniers de Willa Cather est fortement inspiré par son enfance dans le Nebraska, d'abord à la ferme puis dans une petite ville où son père monte une agence immobilière et une compagnie d'assurances.

A la mort de son père John Bergson, Alexandra se retrouve chef de famille. A elle de décider pour sa mère, ses 2 frères ainés, Lou et Oscar et pour le benjamin Emil. La vie est dure, très dure. La terre ne se laisse pas faire. Il lui faudra inventer, s'adapter , changer les habitudes malgré le regard désapprobateur de la communauté suédoise de cette région La Ligne; Il faudra attendre 16 ans pour que ses efforts soient récompensés que opulence et prospérité soient au rendez-vous. les années ont passé, Emil est allé à l'université, ses frères se sont mariés, ont fondé une famille et sont restés envieux, ombrageux ...

Alexandra est seule , l'âge s'en vient et son ami Carl est parti au loin...

Découvert par hasard ce roman m'a vraiment plu. L'écriture de Willa Cather est agréable, coule de source, hommes et paysages sont bien croqués , Willa Cather aime ces Grandes plaines , elle le proclame haut et fort, sa plume sait se faire poétique devant les paysages qui la touchent. Une bien jolie découverte grâce à un challenge une fois encore!
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Saphira, sa fille et l'esclave

Saphira, sa fille et l'esclave de Willa Cather, lu dans le cadre du Challenge Solidaire de Babelio



Willa Cather (1876-1947) est une écrivaine américaine, spécialisée dans les romans de pionniers. Ce livre est le dernier livre écrit en 1940. Elle abandonne les grands espaces de l'ouest pour nous raconter une histoire familiale qui se passe dans un conté rural de Virginie en 1856, peu avant la guerre de Sécession.



Sans doute inspirée par le succès du livre et du film Autant en emporte le vent de Margaret Mitchell, Willa Cather a voulu raconter "son" sud, bien loin des grandes plantations de coton de Georgie. Saphira, bien qu'invalide suite à une maladie, continue à diriger d'une main de fer sa maisonnée et ses esclaves, bien qu'elle soit mariée à un meunier qui ne partage pas ses convictions. Sa fille Rachel, veuve et elle-même mère de deux filles partage les convictions de son père. Elle n'hésite pas à aider Nancy, la femme de chambre de sa mère à fuir vers le Canada quand celle-ci est sur le point de se faire violer par un des neveux de Saphira.
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Destins obscurs

Les trois nouvelles de ce recueil nous plongent dans une Amérique d’un autre temps où le rythme de la vie était bien plus lent. Les personnages sont bien ancrés dans leur présent et dans une vie aux joies simples. Cet univers qui n’existe plus est dépeint à merveille.

"Le Père Rosicky" est le portrait d’Anton Rosicky et de sa famille ; c’est un immigré tchèque, ancien garçon tailleur ayant choisi de quitter la ville pour devenir fermier dans le Midwest.

"La Vieille Madame Harris" dépeint par petites touches une grand-mère sudiste, qui a suivi sa fille, Victoria, son gendre et ses petits-enfants dans l'Est des Etats-Unis. Le regard d’une voisine compréhensive permet de mesurer les écarts culturels entre Nord et Sud, et la difficulté à s’adapter à une époque nouvelle.

"Deux Amis" montre, vue par le regard d’un enfant, une amitié profonde et sincère entre deux hommes très différents, un banquier et un gros éleveur de bétail dans une petite ville du Kansas. Et la fin brutale de cette amitié à cause d’une querelle politique.

J’ai beaucoup aimé les deux premières nouvelles, centrées sur des gens très ordinaires. Il y a quelque chose d’élégant et de délicat dans l’écriture de Willa Cather ainsi que dans la manière dont elle nous fait découvrir ses personnages.
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Mon Antonia

J'avais déjà adoré L'un des Nôtres, je récidive avec ce roman reçu grâce à la dernière Masse Critique, donc un grand merci à Babelio et Archipoche.

Ce roman s'inscrit clairement dans la grande tradition de la littérature américaine classique, avec ses paysages lumineux, ses couleurs changeantes au fil des saisons, ses grands espaces encore vierges et naturels. Jim, jeune orphelin originaire de la Virginie, et Antonia, son aînée de quelques années fraîchement émigrée de la Bohême tchèque avec sa famille, débarquent tous les deux le même soir d'un train à destination du Nebraska. Une nouvelle vie commence pour chacun, voisins de quelques kilomètres et très vite très proches. A l'époque, les terrains ne sont pas tracés ni clôturés, les routes parfois à peine tracées, la petite ville la plus proche - Black Hawk, ne date que de quelques dizaines d'années. Tout est à faire, et pour ça on a besoin de bras. Si Jim grandit dans un environnement affectueux et sécurisant auprès de ses grands-parents et de leurs hommes, Antonia et sa famille, eux, se retrouvent à vivre dans une hutte à flanc de coteaux dans une grande misère. Ce roman très naturaliste et chaleureux évoque cette Amérique du Midwest avec une certaine affection mais n'omet pas les difficultés de ces pionniers venus s'installer sur cette terre pauvre, ni les comportements très puritains et moralisateurs de ses citoyens, protestants scandinaves pour la plupart. Nul doute qu'Antonia et sa famille dénotent dans cet environnement.

Encore une fois, j'ai goûté à l'écriture lumineuse de Willa Cather avec un grand bonheur, devinant en elle une belle ouverture d'esprit et de l'amour pour les siens. J'ai bien sûr adoré le personnage d'Antonia, belle fille vivace et courageuse que Jim admirera toute sa vie, tout comme elle.

Des lectures comme ça, j'en rêve.
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Mon ennemi mortel

La narratrice rencontre Myra Henshawe, une amie de sa tante qu'elle a rencontré à plusieurs moments de sa vie. Myra a renoncé au riche héritage de son oncle pour se marier avec son fiancé. Willa Cather décrit avec beaucoup de détails la personnalité de cette Myra, très attachée aux conditions de vie, la sienne mais aussi celle d'autrui. L'auteur n'hésite pas à montrer ses côtés plus obscures : sa relation assez particulière avec l'argent, son entourage... Un portrait de femme sur quelques années, sans beaucoup d'actions et d'entrain.

Le style est assez agréable dans l'ensemble, je lirai un de ses autres romans, Pionniers.
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L'un des nôtres

L'auteur nous livre une histoire de vie, celle de claude Wheeler, jeune paysan d'une petite ville du Nebraska, au début du vingtième siècle. Là où le protestantisme est très présent et tient une place importante dans la communauté. L'écriture est « carré », sans superflu. L'histoire est simple et questionne sur les destinées de chacun, sur la part de volonté propre qui commande nos actes. Enfin ; le genre de livre qui pourrait paraître ennuyeux mais qui au final, nous a raconté une histoire, avec des personnages forts, de l'émotion, un réalisme touchant.
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Le chant de l'alouette

Me voilà bien songeuse. J'ai apprécié ma lecture de Pionniers le premier roman de Willa Cather, je me suis donc plongée sans a priori dans son second roman le chant de l'alouette publié en 1915.

Moonstone est une ville nichée au fin fond du Colorado, nous sommes dans les années 1880. Théa Kronborg est une enfant au caractère bien trempé. Née et élevée dans une famille méthodiste, entourée par six frères et soeurs, elle est convaincue que toute difficulté doit être surmontée. Encouragée par sa mère, elle suit des cours de piano sous la houlette d'un vieux professeur. Elle ne trouve une oreille attentive qu'auprès du Dr Archie, le médecin de la ville et de Ray Kennedy un cheminot qui s'est promis de l'épouser ...Elle n'a que douze ans , il patientera.

Sa passion pour la musique, l'envie de devenir une grande pianiste et l'occasion inattendue , elle part pour Chicago

De rencontre en rencontre , du piano au chant, Théa se fait femme puis trouve sa place dans le monde lyrique . Elle restera entourée par ceux qui ont cru en elle dès le premier jour. La jeune fille attachante et idéaliste est devenue une jeune femme intransigeante, prête à tous les sacrifices pour réaliser son rêve.. Faut il s'en réjoiur ou en pleurer?

Que dire de cette lecture? Disons que je n'ai pas retrouvé la lumière des Pionniers, hormis de splendides passages sur la nature , le désert du Colorado, les troglodytes de San Francisco,. J'ai trouvé les pages sur l' apprentissage musical souvent fastidieuses, Théa m'a hérissé le poil plus souvent qu'à mon tour.

Un roman fleuve , un roman aux connotations sociales intéressantes mais une héroïne par trop antipathique.

Déception donc
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Le pont d'Alexander

J'avais eu deux gros coups de coeur pour L'un des nôtres et Mon Antonia, mais il faut croire que cette fois-ci la pioche a été moins bonne.

Nous sommes dans un contexte très différent. Les deux premiers se passaient dans l'Amérique des pionniers et des grands espaces, tandis que celui-ci se partage entre New York et Londres, et le personnage principal, Alexander, est un ingénieur de renom. Happily married, comme on dit, très amoureux de son épouse, une femme belle, intelligente et d'une grande force vitale avec laquelle il partage ses ambitions et ses doutes.

Alexander fait également des allers-retours à Londres, où il retrouve au hasard d'une représentation théâtrale son amour de jeunesse, Hilda, une actrice irlandaise qu'il a abandonné pour se marier à Winnifred. Après quelques jours d'hésitation, il décide d'aller à sa rencontre, et leur histoire recommence, leurs sentiments intacts.

Au cours des chapitres, Willa Cather dépeint le dilemme qui fait souffrir Alexander à chacun de ces allers-retours, tout en esquissant ces questionnements propres à la fameuse crise de la quarantaine portant sur les ambitions passées et la revendication de son vrai moi. Elle est sur ce coup-là dans une modernité absolue.

Ce que je reprocherais à ce court roman - le premier de Willa Cather, ce qui explique ces maladresses - se rapporte en grande partie aux ellipses entre les chapitres qui m'ont gênée et qui empêchent l'émotion du lecteur de se développer. Je me suis peu attachée aux personnages, notamment à Hilda qui promettait d'être intéressante d'après les premières descriptions mais s'avère finalement plutôt fade et peu réactive.

En revanche, l'écriture précise et réaliste de Willa Cather est bien présente, notamment dans ses descriptions des éléments naturels qui sont à mon avis, son gros point fort.

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Une dame perdue

Marian a épousé le capitaine Forrester, son aîné de vingt-cinq ans, un veuf qui a réussi dans les affaires et plus particulièrement dans la construction du chemin de fer de la Burlington, dans l'esprit d'une conquête de l'ouest, en cette fin de XIXème siècle. Suite à une chute de cheval du capitaine, le couple emménage à Sweet Water, leur domaine reculé des Plaines noires. Marian Forrester d'abord isolée, réussit tout de même à se créer un cercle de relations amicales. Après plusieurs infarctus, les affaires du capitaine périclitent et Mme Forrester aidée par le jeune Niel, neveu du juge local tente de maintenir le statut social qui lui échappe peu à peu, mal conseillée par un affairiste qui s'attelle à racheter des parcelles du domaine du couple.



Une dame perdue est un roman court, un classique de la littérature américaine qui reprend des thèmes chers aux américains : conquête de l'Ouest, réussite sociale, vie mondaine, notables puissants et qui brosse le portrait d'une femme que j'ai trouvé difficile à cerner, à la fois tournée vers les autres, généreuse, fine et intelligente, mais également assez superficielle, détachée des réalités, peu fiable avec le seul soutien qu'elle finira par décevoir. C'est surtout la peinture d'un déclin lent et inexorable d'un style de vie où les capitaines d'industrie ferroviaire sont rattrapés et surpassés par les financiers.

Au delà de cette descente, c'est donc un portrait en demi-teinte, une étude psychologique assez fine mais déroutante, écrit dans un style assez plaisant qui m'a fait découvrir Willa Cather, cette écrivaine importante dans la littérature américaine.
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Mon Antonia

Paru en 1918, ce classique des lettres américaines est un beau roman sur la perte et ce qu'on appellerait aujourd'hui la "résilience". Racontée après coup par Jim Burden, un jeune garçon qui vient de perdre sa mère, l'histoire se passe dans les grandes plaines du Nebraska où il est recueilli par ses grands-parents. Son arrivée coïncide avec celle de la famille Shimerda, immigrants tchèques et catholiques, dont l'une des filles, Ántonia (avec un A accentué) devient bientôt son amie. Le livre raconte comment ces êtres transplantés sur une terre rude et encore peu exploitée parviennent à s'y reconstruire - ou pas, à l'image du père d'Ántonia que la nostalgie du pays perdu pousse au suicide.

Si son style est simple, presque naïf, le regard que porte l'auteur sur cette Amérique de la seconde génération (les terres appartiennent déjà aux premiers colons protestants) ne paraît jamais simpliste. Ce Nouveau monde qui nous est ici dépeint est tout sauf égalitaire : malgré l'attirance qui les pousse l'un vers l'autre, Jim n'épousera pas son amie d'enfance ; il ira à l'université tandis qu'Ántonia mènera la vie beaucoup plus modeste des immigrants de fraîche date.

Une histoire toute simple donc, presque banale, mais que W. Cathers parvient à magnifier en la situant dans le décor grandiose des grandes plaines, que son écriture dépouillée restitue de manière quasi charnelle.
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Mon ennemi mortel

Que voilà un bien étrange roman.



Publié en 1927 , l'histoire qui nous est contée débute dans les années 1880 . C'est à cette époque que Nellie, la narratrice , rencontre Myra Henshawe et son époux Oswald, de passage à Parthia, dans le sud de l'Illinois. Myra, née Driscoll, a fui la ville pour épouser Oswald , depuis ils vivent à NewYork dans le quartier de Madison, c'est là que Nellie et sa tante Lydia passent des fêtes de fin d'année inoubliables même si elles assisteront à une violente dispute dans le couple..Qui est réellement Myra?



Dix ans plus tard, Nellie a vingt-cinq ans et vit très modestement sur la côte Ouest. Pour subvenir à ses besoins, elle enseigne dans un collège et a trouvé un tout petit logement ...ô surprise elle y retrouve les Henshawe désargentés; Myra est malade et aigrie ..



Ce court roman m'a , je l'avoue, fort déconcertée. Si j'y ai retrouvé la qualité de la plume de Willa Cather, la description précise de ses personnages, physique et psychologique, je n'ai pas retrouvé le plaisir pris à la lecture de Pionniers.

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