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EAN : 978B0017XLJ2W
(30/11/-1)
4.8/5   5 notes
Résumé :
C’est davantage à ses contes que Joyce Mansour doit sa (fragile) renommée – Les Gisants satisfaits (1958) reste indiscutablement son recueil le plus célèbre, et l’on goûte davantage, dans la presse notamment, ses récits que ses poèmes. Or, sans doute y a-t-il là un malentendu, dont Michel Leiris pourrait se faire le porte-parole : « Si la prose se trouve être mon moyen d’expression, c’est toujours la poésie que j’ai visée. »


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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
En maillot de bain sur la plage, télescope en main, l’assassin, par un heureux hasard, repéra Marie et sauta dans une barque de location. Il approcha à grands coups de rame, les yeux globuleux de plaisir, la bouche pleine d'un clapotis animal, un lourd serpent noir pendant hors de son nombril.
Marie crut qu’il était envoyé de Dieu. "Je me noie", gargouilla-t-elle. L'assassin se jeta à l'eau et répondit avec tristesse : « Tu es mon ombre, ma lumière. A nous deux. — Je me noie », hurla Marie, son âme singulière adossée à une peur immense. Elle flottait entre deux eaux, les membres mous, résignée à une mort précoce.
"Je me noie," répéta-t-elle faiblement aux mains de l’assassin qui erraient sur son corps comme des crabes.
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« Je te tuerai », dit-il, car les seins de la femme se dressaient sous ses doigts. Une main glissa le long de sa cuisse et elle valsa dans l'eau comme une souris savante. Elle mordit le nez ponctué de pores dilatés, elle enfonça son genou dans le ventre moelleux, appela au secours, puis sombra dans une féroce jouissance sous l'œil de l'assassin. Son sexe éclairait les sables mouvants où tremblaient des bizarreries moustachues. Elle gémit d'abord, puis sa voix monta. Il écarta ses lèvres dans un sourire de gloire et leurs corps communiquèrent leur incandescence aux replis reptiliens des flots. Elle parla aux mamelons de l'assassin : « Je ne veux pas mourir, je te donne ma vie, mais, de grâce, pas encore aujourd'hui ! » Sa langue courait hors de sa bouche, telle une limace. L'homme lâcha le cou meurtri et réfléchit. « Tu vivras près de moi dans ma chambre sur le port, tu me serviras et, un jour, je te tuerai. — J'accepte », dit Marie et la mer, devenue incertaine, l'entendit. « Sauve-toi, si tu peux », dit l'assassin, qui sauta dans sa barque et s'éloigna en ricanant. Marie but une gorgée, qui la suffoqua. Ses pieds aussi la faisaient souffrir, tant ils aspiraient à toucher terre. « La mer est une monstrueuse mécanique de mort », se dit-elle. Elle devint vague à son tour car son cœur se brisait. « Je vis », dit-elle. Et elle but.
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Le coq en bronze qui servait de girouette au clocher de l'église se laissa tomber du haut de sa folie et se brisa en plusieurs morceaux. "C'est la volonté de Dieu", dit le curé et il enterra les restes de l'oiseau, furtivement, à la croisée des chemins, entre le suicidé de l'année et l'avorton de la bonne.
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L'assassin dansait sur la pointe des pieds. Sa tête tombait, tantôt à droite, tantôt à gauche, comme une fleur morte au bout de sa tige ; son corps tournait, les bras en croix, et le temps, moite de tension, semblait tourner aussi.
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Au début, quand Dieu habitait un trou dans la terre et que son frère jumeau dormait au ciel, que l'univers était sans forme et vide, seuls quelques restes d'huma- nité vivaient au fond des profondeurs brouillées par la pensée créatrice, dans un hôtel de Nord-Africains avec vue sur la mer.
Marie avala ses lèvres et cessa de mobiliser les astuces de son sexe pour observer la rue. Elle passait sa vie accoudée au balcon entre son grand-père Jérémie et sa sœur Anne qui était aussi incohérente qu'un poisson dans un bocal et aussi provocante. Prisonnière de sa longue attente, Marie ne parlait guère ; sa bouche cousue de fils blancs souriait au monde et le monde tendait avidement son cou pour mieux la surveiller. Elle était plus fascinante qu'une morte pour les voisins.
Jérémie ferma les volets de son cœur et accrocha une girouette dans la plaie qui ornait son front; de la sorte le vent s'agitait au milieu de son visage effaçant la tristesse, troublant les rides. « Cirque », dit Anne avec mépris.
Dans la rue, la foule désœuvrée se glissait dans les herbages des trottoirs. Un homme avança majestueusement. Affalé sur le dos d'un chameau, il tournait un œil noir dans la vase marécageuse de son orbite, puissamment présent pour toutes les femmes cachées derrière les persiennes chaudes et le blason de l'infini brillait sur son front comme une fleur de chair.
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Vidéo de Joyce Mansour
Joyce MANSOUR – La femme surréaliste (France Culture, 2005) L’émission « Poésie sur parole », par André Velter, diffusée le 4 septembre 2005.
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