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EAN : 9782363740298
330 pages
13e Note Editions (06/03/2013)
3.78/5   23 notes
Résumé :
Recueil regroupant des chapitres inédits des romans de l'auteur, des récits de voyages et des articles. Ses textes constituent notamment un témoignage sur la guerre du Viêtnam.

Kent Anderson, auteur du mythique Sympathy for the devil, est de retour. Ce recueil foisonnant, mêlant fiction et « non-fiction», regroupe des chapitres inédits de ses romans, des articles et des récits de voyage. Ce matériau est présenté en trois grandes parties : Totems (nat... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
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AVANT-PROPOS DE KENT ANDERSON
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Venir à bout de ce livre n'a pas été simple pour moi. Si je n'avais pas promis de m'y coller, je ne l'aurais pas fait, j'aurais carrément tout envoyé bouler. En tant qu'écrivain, j'ai progressé, et pas mal de ces pages me semblent aujourd'hui maladroites, du boulot d'amateur. J'ai envie de les flanquer à la poubelle, de les réécrire entièrement ou d'en faire un tout autre livre. Mais si je m'amusais à ça, sans être précisément un mensonge, ce ne serait pas la vérité. Je me souviens vaguement des gens avec qui je traînais quand j'ai écrit ces textes, potes de l'armée ou flics perdus de vue au fil des ans. Il m'arrive de me demander où ils se trouvent, ce qu'ils sont devenus. Peut-être morts, en taule, en chambre d'isolement quelque part au fond d'un hôpital psychiatrique, ou bien riches et malheureux à L.A. Ils ont en tout cas disparu de ma vie pour de bon.

Hier soir, j'ai bloqué sur quelque chose, serré comme un moteur en surchauffe, mal huilé, à réécrire, affûter ma prose, tenter d'insuffler du rythme aux phrases. J'ai dit à Dennis : « C'est nul, ce machin. En guise de préface, on n'a qu'à mettre : “La plupart de ces textes sont écrits avec les pieds ; néanmoins, si par le plus grand des hasards des universitaires s'intéressent un jour sérieusement à l'oeuvre d'Anderson, peut-être y trouveront-ils quelque intérêt. Peut-être que ma petite existence de série B hantée par la terreur pourra servir de gagne-pain à une armée de profs pacifistes qui passeront les quarante prochaines années à se gausser de trucs dont ils auront entendu parler, trucs que j'aurais peut-être bien commis pour de vrai…” » Non. Qu'on me laisse crever dans l'ombre. Sous une pluie glaciale. À minuit et dévoré par des charognards honnêtes.

Ce matin, je ne trouve pas ça si mauvais. Certains passages m'amènent à réfléchir sur le monde et sur moi-même. D'autres me font même marrer. C'est un peu comme se trouver à bord d'un autocar qui remonterait le temps.

Et c'est bon de prendre le car parfois. J'oublie que des gens sont forcés d'y voyager de nuit. Quand je commence à me prendre pour un autre, ou quand je perds de vue que je ne suis qu'un minable petit Blanc qui, la chance aidant, a juste été assez solide pour tenir bon, ça me fait du bien de me retrouver dans un car Greyhound parmi tous ces losers, ces cinglés et autres crétins, tous ces enfoirés de guignards dont j'aurais pu faire partie. En débarquant dans la chaleur poisseuse du petit matin à Reno, L.A., Richmond ou devant le bouiboui encore fermé d'un arrêt de bus de l'Idaho, lorsque les portes s'ouvrent avec leur chuintement pneumatique et que je descends chargé du carton qui me sert de valise, j'y vois de nouveau plus clair. Je ne suis qu'un passager parmi d'autres – ni plus, ni moins. À la seule différence que moi, j'ai les mots pour l'écrire.

C'est mon boulot.

Tucson, juillet 1998


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« Regardez le mec de vingt-quatre ans que j'étais alors. Observez ses yeux. Vous voyez ? Il est passé de l'autre côté du miroir et ne pourra plus revenir.
Aujourd'hui je fais semblant d'être revenu, je n'ai pas le choix. En réalité je vis toujours dans ces yeux-là. Je les habite à volonté, je n'ai qu'à me laisser aller et je me sens bien, comme si j'étais rentré à la maison. »
Comme Sympathy for the Devil et Chiens de la nuit, ses deux romans parus en France à ce jour en attendant Green Sun, annoncé ici pour le mois d'octobre, Pas de saisons pour l'enfer, recueil de nouvelles, d'articles, de préfaces et de chutes des deux premiers romans de l'auteur, parle de l'impossible retour à la vie civile de ce jeune homme de vingt-quatre ans en photo sur la couverture parti en 1968 au Vietnam faire ce qu'on lui avait appris : tuer des gens.
En dédicace de ce livre acheté à l'occasion du festival Quais du polar en 2013, Kent Anderson a écrit « Please read the story "Lambs" first ». de fait, c'est certainement dans Les agneaux qu'Anderson se livre le plus. Après avoir parcouru cinquante kilomètres de nuit sur une route verglacée pour échapper à la foule de la ville dans laquelle il craint de ne plus pouvoir vivre sans tuer quelqu'un, il rejoint la ferme isolée d'un vieil homme au coeur de l'Idaho. le vieil homme est là, auprès du feu, et confie à Anderson deux agneaux prématurés. À charge pour lui de prendre soin d'eux pendant la nuit et de les accompagner peut-être dans leur dernier voyage. Cette nouvelle, tout comme l'ensemble de la première partie de ce recueil intitulée « Totems » incarne la difficulté de Kent Anderson à se dépouiller du voile de mort qui semble l'accompagner depuis son retour du Vietnam. Cela passe essentiellement par la rencontre avec les animaux. Les agneaux, donc, mais aussi un taureau durant une corrida, des coqs de combat, un loup dans la steppe mongole ou la rencontre qui relève presque de l'histoire d'amour avec les chevaux. C'est certainement dans cette partie que Kent Anderson se livre de la manière la plus intime qui soit, avec une sensibilité extrême mais sans niaiserie ou trait forcé. Les deux autres partie, « Vietnam » et « Loi et hors-la-loi » présentent un Kent Anderson plus familier aux lecteurs de ses deux premiers romans, ne serait-ce que parce que chacune d'entre elles comporte des chutes de, respectivement, Sympathy for the Devil et Chiens de la nuit . Signalons au passage que chutes ne signifie pas déchets et qu'elles constituent ici autant de nouvelles indépendantes pour ceux qui ne connaitraient pas l'oeuvre d'Anderson, que d'instructifs compléments à celle-ci pour les autres.
S'y ajoutent en particulier des articles étonnants sur un rassemblement de survivalistes d'extrême-droite, une convention de mercenaires ou une concentration de Hell's Angels qui valent amplement le détour, sublimés par la plume incisive, mi-rigolarde mi exaspérée, d'un Anderson obligé de s'immerger dans une société fascinée par la violence sans vraiment la connaître.
Le tout constitue, sous une apparence hétéroclite, un ensemble tout à fait cohérent et surtout un concentré du talent d'Anderson pour dire l'absurdité du monde et la difficulté à s'y fondre après y avoir plongé trop profondément. Une raison de plus pour regretter la disparition des éditions 13ème Note, une des plus audacieuses expériences éditoriales de la dernière décennie.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Kent Anderson est un vétéran du Vietnam. Sergent d'opération et de renseignement dans les Forces Spéciales (les célèbres "bérets verts"), il en est revenu avec le sentiment d'y avoir laissé une part de lui, "un brave gosse, qui faisait comme il pouvait, perdu dans des ténèbres d'une dimension diabolique, un petit frère (qu'il a abandonné, et qui) ne rentrera jamais au bercail".
Pour autant, "Pas de saison pour l'enfer" n'est pas à proprement parler un récit sur le Vietnam, ou du moins, il n'est pas que ça. Kent Anderson n'est d'ailleurs pas qu'un vétéran. Il a exercé durant huit ans comme officier de police dans les quartiers noirs de Portland et d'Oakland, puis comme professeur de littérature en faculté.

"Pas de saison pour l'enfer" est un recueil de textes, de bribes d'existence, d'anecdotes, à caractère autobiographique. On y trouve aussi quelques extraits, jamais exploités, de romans publiés par l'auteur, mettant en scène Hanson, personnage fortement inspiré de son expérience en tant que policier. Comme point commun entre ces différents textes, on pourrait citer une récurrence de la violence, sous diverses formes : ritualisation -légale ou non- de la maltraitance animale (corrida, combats de coqs), brutalité manifestée par certains des participants à une réunion d'anciens mercenaires à laquelle s'est rendu Kent Anderson, ou encore violence sous-jacente induite par la promiscuité qu'impose la vie urbaine...

Et, bien que la guerre du Vietnam ne soit pas le sujet principal de ce récit, elle y est également omniprésente, par le truchement des souvenirs qui s'immiscent dans la prose de l'auteur, convoqués par un événement qui lui rappelle un épisode vécu sur le front, ou par les réflexions que lui inspire le comportement des individus.
D'ailleurs, le rapport à l'écriture de l'auteur, ainsi qu'il nous l'explique, est lui-même fortement déterminé par son expérience du Vietnam. Écrire a d'abord été un impératif dicté par le besoin de témoigner à l'attention de ceux qui, pro ou anti guerre, jugent et expliquent sans avoir aucune idée de son horrible et démentielle réalité. Car ses concitoyens, hypocritement protégés par les oeillères d'une morale facile, refusent de voir la brutalité sanglante de cette réalité, l'ampleur de la violence avec laquelle elle traumatise les individus.
Ainsi, il insiste sur sa volonté, dans ses écrits, de se montrer direct et sincère, de ne rien édulcorer. le contexte politique, idéologique n'a aucune place dans son témoignage : Kent Anderson s'intéresse aux hommes sur le terrain, à la façon dont le quotidien de sauvagerie et d'absurdité que leur fait vivre la guerre les transforme, et les révèle, parfois.
Écrire est ensuite devenu comme une obsession, un moyen de payer sa dette à ce "brave gosse laissé au Vietnam", rapporter son histoire étant une manière de le maintenir, en quelque sorte, vivant...

Si la guerre est omniprésente, c'est aussi parce qu'elle fait partie intégrante de l'homme qu'est devenu Anderson. Il a gardé en lui un sombre désespoir, qu'il exprime parfois par des idées suicidaires, ainsi qu'une nette tendance à la paranoïa, lui faisant imaginer en permanence la possibilité d'un danger. Il donne le sentiment de vivre sur un fil, tenaillé par une peur sourde, la moindre agression (imaginée ou non) pouvant le faire basculer à nouveau dans la violence.

Kent Anderson ne porte pas de jugement, ne s'apitoie jamais, ni sur lui-même ni sur les autres. Il énonce des faits, et tente de comprendre, à leur lumière, les mécanismes qui poussent l'homme à la cruauté, à la barbarie. Il est sans illusion sur ses semblables, mais il s'y intéresse profondément, et semble même leur porter une certaine tendresse.

"Pas de saison pour l'enfer" se lit comme on écouterait un vieil ami marqué par la souffrance de ses expériences passées, touché par sa capacité à dire des choses terribles avec autant de franchise que de poésie.
Lien : http://bookin-ingannmic.blog..
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Lecteurs sensibles s'abstenir. Pas de saison pour l'enfer de Kent Anderson est réservé aux amateurs de romans noirs et violents. Après avoir écrit le mythique Sympathy for the devil, roman réaliste sur la guerre du Vietnam, l'auteur est de retour avec un recueil autobiographique.

Et cela s'avère passionnant. Car en effet, notre ami Kent Anderson a eu une vie trépidante. Né en 1945, il grandit en Caroline du Nord. Il s'engage dans la marine marchande à 19 ans, avant d'entrer dans les Forces Spéciales durant la guerre du Vietnam, qui le marquera durablement. Il sera ensuite agent de police dans plusieurs villes et finira par une carrière de professeur d'anglais. Malgré cette multitude d'activités, il a eu le temps de suivre un cursus d'écriture à l'Université du Montana.

Ainsi, il a pu écrire sur chacun des épisodes de sa vie, au moment où l'action se passait. Vous l'aurez compris, Pas de saison pour l'enfer est une compilation de différents textes. Ces passages ne sont pas classés chronologiquement, mais par thèmes, en trois parties : Totems, Vietnam et Loi & Hors-la-loi. On y retrouve pèle-mêle des histoires sur les corridas, sur les combats de coq au Mexique, sur la chasse au loup en Mongolie, sur les conventions de milices d'extrême droite ou encore, sur le rassemblement des Hell's Angels.

L'auteur a été tellement bouleversé par la guerre du Vietnam qu'il y revient sans cesse dans ces textes, sous forme de flash-backs notamment. de même, l'ensemble de la 2e partie est consacrée à cette période, tout comme l'était son roman Sympathy for the devil.

Bref, Pas de saison pour l'enfer de Kent Anderson est un livre sur fond de violence, basé sur des faits réels et quelques fictions, où se mélangent des passages de romans, des articles et des récits de voyage. Une écriture très sombre qui ne correspondra cependant pas à tous nos lecteurs. Vous trouverez ce livre sur le site 13enote.com, le site de l'édition 13e Note, spécialisée dans la littérature américaine beat, post-beat et underground.
Lien : http://www.conso-mag.com/rev..
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un tres bon recueil de textes et de tres bonnes retrouvailles avec Hanson dans les morceaux coupés de simpathy for the devil et des chiens de la nuit ...
Anderson est un grand ecrivain americain a redécouvrir ou tout simplement découvrir bien que certaines parties s'adressent plutot a ceux qui ont déjà lus ses 2 romans précédents
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critiques presse (1)
Liberation
22 avril 2013
Une langue sèche, brute, hyperréaliste, non domesticable : s’il s’est dans les années 90 un peu posé, devenant (après avoir été flic) prof de littérature à la fac, l’autodidacte Anderson [...] semble pour toujours traversé par un courant électrique disproportionné. Irradié, fusibles entamés.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
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(...)
Regardez les yeux de ce type sur cette photo ( de la couverture, et c’est lui) : pendant la Seconde Guerre mondiale, on appelait ça « le regard à mille mètres ». Il pourrait marcher éternellement, ayant franchi la barrière de la fatigue.

Toute peur l’a quitté. Sans passé ni avenir, déjà mort et jamais né, il évolue dans un espace dénué d’amour comme de peur. Libre de souci, de doute, d’espoir et où n’ont de sens ni la victoire ni la défaite.

Un espace que peu de gens visitent mais qui, une fois visité, sera toujours là, prêt à accueillir quiconque souhaitera y retourner. Il suffit de savoir regarder et on est à la maison. Home sweet home.

Santa Fe (Nouveau-Mexique), été 2012


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Regardez le mec de vingt-quatre ans que j’étais alors. Observez ses yeux. Vous voyez ? Il est passé de l’autre côté du miroir et ne pourra plus revenir.
Aujourd’hui je fais semblant d’être revenu, je n’ai pas le choix. En réalité je vis toujours dans ces yeux-là. Je les habite à volonté, je n’ai qu’à me laisser aller et je me sens bien, comme si j’étais rentré à la maison.
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Videos de Kent Anderson (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Kent Anderson

Bande-annonce de PAS DE SAISON POUR L'ENFER - Kent Anderson
Kent Anderson, auteur du roman culte Sympathy for the devil, est de retour avec un recueil autobiographique inédit. Il a beau essayer d'oublier la guerre du Vietnam en se ressourçant dans...
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