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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le travail ne doit pas rendre malade et encore moins vous tuer.
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Ce tome fait suite à La Venin, tome 2 : Lame de Fond (2020) qu'il faut avoir lu avant car les cinq tomes forment une histoire complète. Sa publication originale date de 2020. Il a été réalisé par Laurent Astier pour le scénario et les dessins, et par Stéphane Astier pour les couleurs. Il comporte cinquante-six pages de bande dessinée. Il comprend un dossier de six pages à la fin : la reproduction des carnets d'Emily, tels que l'auteur les a découverts lors de ses recherches, relatant ses observations sur Galveston, agrémentés de photographies d'époque. le lettrage de la bande dessinée est assuré par Jean-Luc Ruault, la calligraphie des carnets par Jeanne Callyane. Une carte des États-Unis occupe la deuxième de couverture et la page en vis-à-vis : y figure le tracé des voyages d'Emily.

En Alabama, en septembre 1900, la nuit, Emily mène ses deux chevaux qui tirent la carriole, avec la jeune Claire assise à ses côtés. La fillette lui demande quand est-ce qu'on s'arrête car elle commence à avoir froid. La jeune femme lui demande de ne plus l'appeler Ma soeur, car elle n'en est pas vraiment une. Pour autant, elle admet que Claire a raison et qu'il faut qu'elle trouve un endroit tranquille pour bivouaquer. Il y a une forêt droit devant qui semble assez dense pour servir d'abri. Un gris déchirant retentit dans la nuit. Emily remet un revolver à Claire en lui indiquant de tirer en l'air si elle lui en donne l'ordre, et elles se mettent à approcher discrètement de l'endroit d'où est venu le cri. Sept membres du Ku Klux Klan finissent de pendre un afro-américain à une haute branche, tout en empêchant sa femme Susan d'intervenir. Puis ils lancent des torches enflammées sur la maison qui s'embrase très rapidement. Leur chef ordonne de tuer la femme. Un autre demande s'il n'est pas possible de lui laisser un souvenir brûlant entre les cuisses d'abord. le chef commence à dire qu'ils ne sont pas là pour ça se soir, mais une balle l'atteint dans le bras gauche. Emily les canarde avec sa carabine. Claire tire en l'air pour donner l'impression d'un groupe nombreux. Les membres du Klan prennent la fuite sur leurs chevaux.

Claire descend la première vers Susan qui est fort étonnée de voir une petite fille, suivie peu de temps après par Emily. Cette dernière propose de décrocher le mari pour lui donner une sépulture décente. Susan lui répond de le laisser là. Elle aurait bien voulu le placer dans une terre consacrée, mais elle veut que tout le monde voit ce que ces hommes font aux gens comme eux. En réponse à une question d'Emily, elle explique qu'elle n'a nulle part où dormir. Ils s'étaient installés ici il y a peu. Ils voulaient vivre heureux, semer leurs champs et vendre leur blé et leurs légumes. Elle n'a plus personne et la famille de son époux Tom est à plusieurs jours de route. Mais elle ne veut pas y retourner. Ils n'étaient pas d'accord qu'il parte avec elle. Si elle revient sans lui, ils ne voudront jamais la reprendre. Claire lui propose de venir avec elles. Emily explique qu'elles se rendent à Oil Town où un poste d'institutrice l'attend.

Le cycle reprend : au temps présent du récit, en septembre 1900, Emily se dirige vers la prochaine cible de sa vengeance, au temps passé en 1890/1891 la jeune Emily va d'un oncle à une tante pour être recueillie. En toile de fond, elle parcourt l'ouest américain, en revenant parfois vers la côte Est à New York, et en traversant ou vivant des événements ou des conditions de vie typique de l'ouest américain. Tout commence ainsi avec une scène de lynchage : une dizaine d'hommes cagoulés contre un seul afro-américain, une exécution sommaire, même pas une justice expéditive, juste l'expression du racisme à l'état pur nourrie par la peur de l'autre, la peur de la différence, le besoin de se sentir supérieur, de justifier sa suprématie (purement imaginaire). Une mise en scène qui montre la lâcheté du groupe d'assaillants face à une unique victime, la lâcheté d'individus agissant à visage couvert, leur prétendue force entièrement dépendante du nombre et la seule hauteur qu'ils prennent c'est en montant sur le dos de leur cheval. Dans son journal en fin de tome, à propos de ce meurtre, Emily note que même si les Américains croient tous que les afro-américains ont gagné leur liberté, en réalité ils ne vivent pas beaucoup mieux qu'avant.

L'auteur a choisi de donner un nom très littéral à la ville suivante : Oil Town, parce qu'une entreprise y exploite un champ de pétrole avec des derricks en bois. L'arrivée du trio de femmes fait l'objet d'une case occupant les quatre cinquièmes d'une page : une vue en élévation de la ville depuis le panneau d'entrée. L'artiste excelle pour donner à voir les paysages : la route en terre bien boueuse, la maison de maître avec ses deux étages et son jardin bien vert, les barraques de bois des ouvriers, les grandes citernes mal étanchéifiées, la vingtaine de derricks répartis sur le territoire, une profonde vallée en arrière-plan, et des petites montagnes derrière, sous un ciel gris chargé en pluie. Emily se lance dans une explication du terme Or noir avec une condamnation de l'avidité des hommes. Susan en ajoute une couche pour montrer à quel point ce terme est mal choisi : l'or brille comme le soleil, là, c'est la crasse et les ténèbres (ce qui donne lieu à une répartie savoureuse d'Emily : on trouve peut-être de la lumière sous la surface noire, faisant le parallèle avec la couleur de peau de Susan).

Lors du séjour d'Emily dans Oil Town, un accident survient : dans une case de la largeur de la page occupant deux cinquièmes de la hauteur, le dessinateur montre la rupture d'un derrick. La construction de bois s'effondre et le pétrole jaillit à gros flot. le cadrage un peu éloigné le réduit à un simple incident d'exploitation, la rupture d'une installation un peu fragile. Mais les trois cases du dessous d'une hauteur bien moindre montrent les conséquences pour les conséquences pour trois ouvriers. La petitesse des cases les réduit à pas grand-chose : une mise en scène symbolique de leur importance insignifiante par rapport celle du derrick et de l'exploitation du champ de pétrole. Lorsqu'Emily revient de donner la classe en pleine nature (une forme de classe verte avant l'heure), elle enjoint les travailleurs en train de boire un coup à la taverne, à s'unir pour exiger des conditions de travail en sécurité. Elle évoque l'existence de syndicats d'ouvriers. La réponse ne se fait pas attendre : ils ont déjà essayé, mais le propriétaire M. Drake y a vite mis le holà. La séquence se déroule à la tombée de la nuit dans ce bar mal éclairé par de faibles ampoules, comme si cette misère sociale ne pouvait être exprimée qu'entre eux dans un lieu, sans pouvoir être exposée en public au grand jour. Dans la séquence suivante, l'auteur oppose la douleur des femmes endeuillées, refusant d'accepter les risques mortels comme une fatalité, à l'apathie des hommes qui ont déjà essayé

Intercalé avec le temps présent du récit, la jeune Emily continue à aller de famille en famille de tante en oncle. Lors d'un voyage en diligence, le lecteur peut même jeter un coup d'oeil par-dessus l'épaule d'Emily et prendre la connaissance de la liste de ces parents éloignés pouvant l'accueillir. Elle se rend d'abord en Floride auprès de Camelia, le dessinateur apportant un soin remarquable à la faune et la flore, un magnifique papillon et l'évocation du sapotier blanc. Puis en Arizona dans la zone désertique de Brisbee : un beau bâtiment unique en bois, d'abord sous le dur soleil de septembre, puis sous la neige de décembre. Quand elle y arrive, le propriétaire en est absent, et le lecteur se surprend à sourire en voyant Emily faire le ménage, la vaisselle, le linge, puis essayer de fumer. La jeune Emily reçoit une forme d'éducation différente à chaque fois, lui apportant de nouvelles compétences que le lecteur a pu constater au temps présent du récit, en 1900. Au temps présent, le récit se termine par quatre courtes scènes : une à New York, deux à Oil Town, une dans une riche demeure du New Jersey, le lecteur savourant la générosité de la description de chacun de ces environnements.

Ce tome constitue le milieu du récit, et le scénariste introduit et développe de nouveaux éléments de son intrigue. Certes, Emily répète le cycle de la recherche d'un des meurtriers de sa mère pour accomplir sa vengeance, mais pour la troisième fois le plan ne se déroule pas comme prévu, et pour une raison différente des deux premières. Comme dans les tomes précédents, le personnage principal fait preuve d'autonomie, de courage, de compétences et d'une ténacité peu commune, voire d'un acharnement. Une fois encore, son salut ne survient que par l'intervention d'autres personnages, des femmes, mais aussi des hommes. Comme dans le tome précédent, Emily n'est pas de toutes les séquences, l'auteur continuant de révéler que d'autres individus intriguent dans son sillage ou en amont de son arrivé : les chasseurs de prime bien sûr (dont le terrible Sergent raciste et phallocrate), mais aussi des individus dont elle a déjà croisé la route.

Outre les champs de pétrole et le Ku Klux Klan, se trouvent d'autres marqueurs temporels comme Butch Cassidy (Robert LeRoy Parker, 1866-1908) et le Sundance Kid (Harry Alonzo Longabaugh, 1867-1908) et les deux inspecteurs de l'agence Pinkerton Tom Horn (1860-1903) et Charlie Siringo (1855-1928). le lecteur relève également que l'auteur intègre à son récit des thématiques actuelles comme la lutte des classes, le syndicalisme, l'ultralibéralisme qui réduit les individus à l'état de marchandises traitées sans égard, sans respect ni même préoccupation de leur santé et sécurité au travail, le comportement des ultra-riches traitant la main d'oeuvre comme des esclaves, des préoccupations écologiques comme la sensibilisation des enfants à la nature (la classe verte) ou l'approvisionnement de nourriture en circuit court (la leçon de tante Camelia). L'intervention d'Emily auprès des travailleurs est servie par une belle éloquence militante : Ce pays est tenu par les politiciens de Washington, les banquiers, les capitaines d'industrie, les gros propriétaires terriens. La légende du self-made-man est là juste pour faire rêver le peuple et le faire taire. Ce sont eux qui tiennent les cordons de la bourse. Quand ils ne la font pas s'effondrer pour s'enrichir un peu plus. Et ce sont toujours les mêmes qui trinquent : le peuple ! le seul moyen est de lutter pour ses droits. […] Ces pour ces raisons-là qu'il faut se battre. le travail ne doit pas rendre malade et encore moins tuer.

L'horizon d'attente du lecteur est déjà très élevé en entamant ce troisième tome : il doit être aussi bien, et même mieux, que les deux précédents en termes de vengeance, de suspense, de coups fourrés, de beaux paysages, de reconstitution historique visuelle, de personnages attachants, complexes et faillibles. le créateur tient toutes ces promesses, et plus encore son intrigue prenant de l'ampleur, Emily étant toujours aussi autonome mais ne réussissant que grâce l'aide d'autres, et en prenant une dimension sociale et politique qui montre plutôt que de prêcher. Formidable.
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Retour d'Emily dans ce troisième tome comme les précédents, excellent. C'est le Far-West violent et sans pitié que Laurent Astier dessine. Et pourtant, malgré sa terrible vengeance et ses accès de fureur, Emily est une femme attachante qui n'hésite pas se mettre en danger pour sauver plus malheureuse qu'elle. Anarchiste sans forcément le savoir, sa seule idée de venger sa mère guide sa vie. Cependant, elle prend du temps pour défendre les forçats des puits de pétrole et leurs épouses qui survivent dans une atmosphère puante et polluée.

Laurent Astier scénarise dans la pure ligne des westerns classiques. Mais une femme héroïne et les minorités -comme on dit élégamment- brimées, exploitées et spoliées ne font que rarement partie du genre. Les femmes y sont généralement absentes ou objet du désir des hommes et les noirs et les Indiens sont souvent les méchants de service. C'est là, une des grandes forces de son histoire que de les mettre en avant.

En résumé, ce tome 3 est aussi bon que les précédents et y rajoute même une dose de suspense et d'émotion. Vivement le 4 !
Lien : http://www.lyvres.fr/
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Laurent Astier poursuit cette belle série prévue en 5 tomes, faisant évoluer son héroïne Emily à la fin du XIXème et au début du XXème siècle aux Etats-Unis, en quête de vengeance.
Le lecteur parcourt donc ce pays avec des femmes qui n'hésitent pas à dégainer et à hausser le ton pour se faire respecter. La belle mise en couleur valorise le superbe dessin de Astier et ne fait qu'accroitre le plaisir de poursuivre ce road trip direction l'ALabama et l'Ohio, alors en plein développement grâce à l'extraction de l'or noir.

La série ne faiblit absolument pas, dessin, scénario et couleurs restent au niveau dans ce troisième tome !
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Bonsoir,
Un western féminin en roman graphique La venin de Laurent Astier aux Éditions Rue de Sèvres. Pour l'instant 3 tomes constituent cette série où nous faisons connaissance avec Emily, jeune femme du début des années 1900. Elle va connaitre différentes péripéties dans cette Amérique et se battre pour différentes causes. Tout d'abord venger sa mère, puis le territoire des indiens, la pédophilie, l'esclavage…. Une héroïne passionnée et passionnante. J'ai beaucoup aimé.
Quatrième de couv T1 : Un premier tome intitulé Déluge de feu pour une série baptisée La Venin. Bienvenue dans les intrigues sans fin du Far West de 1900 ! On y découvre une jeune héroïne dont les petits et gros ennuis s'accumulent... Entre chasseurs de primes, patrons de saloon malhonnêtes et politiciens aux dents longues, mieux vaut être futée pour passer entre les mailles du filet !
T2 Emily est recherchée et sa tête est mise à prix. Poursuivant sa fuite en tenue de nonne, elle est Soeur Maria quand elle arrive à Galveston, au Texas. Elle n'est pas là par hasard, elle cherche le révérend Alister Coyle, celui-là même qui dirige l'orphelinat pour jeunes filles de la ville. Sous couvert de cette nouvelle identité, elle est hébergée quelques jours au sein de son institution. le décès d'une pensionnaire et surtout la tentative de suicide de l'une d'elles ne laissent aucun doute sur le comportement malsain et les sévices commis par le révérend. Il est temps de rendre justice ! Emily s'en chargera et Dieu en sera témoin !
T3Ohio, octobre 1900. Emily, toujours traquée par les deux Pinkerton, continue son chemin de vengeance. Accompagnée de la petite Claire et de Susan, une esclave affranchie qu'elle a sauvée des griffes du Klan, elle arrive à Oil Town, une ville-chantier où l'on fore la terre à la recherche du précieux or noir. Mais après deux meurtres qui ont défrayé la chronique, les choses risquent bien de se compliquer pour elle... Et la rage qui secoue ses entrailles ne va-t-elle pas lui faire perdre pied ?
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Une série qui tient ses promesses. Voilà ce que je souhaitais. Et. Arrivé au tome 3 mon souhait se réalise.
Western des temps modernes où le héros est une héroïne qui réglé ses compte et don't le prix de son " Wanted " commence à battre des records. Les chasseurs de primes se font de plus en plus nombreux.
Elles arrive à 'Oil town' dans l'Ohio en compagnie de la petite Claire (voir T. 2) et de Suzan, Black esclave affranchie qu'elle a sauvée des griffes du Klan.
Elle s'y présente comme institutrice mais les choses vont rapidement s'envenimer et c'est le magnat du pétrole local qui va payer les frais.
Cinq noms cinq vengeances cinq épisodes. En route vers le quatrième.
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Laurent Astier continue à nous tenir en haleine avec un scénario plein de rebondissements et la qualité de son dessin qui en fait un auteur majeur de la nouvelle génération.
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