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3,5

sur 110 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je me réjouissais de lire un autre Banville après avoir apprécié Infinis et je n'ai pas été déçu. Bien sûr, cet auteur ne dévoile aucun mystère nébuleux, ne déroule aucune enquête haletante, pas plus qu'il n'imagine de péripéties palpitantes ou vaudevillesques. Il s'attache à saisir des scènes, des sensations, des moments furtifs remontés à la mémoire qu'il prolonge somptueusement en croquant gestes, expressions, non-dits, frissons même, avec un crayon précis, tendre ou cruel et toujours intelligent. Je le vois comme un peintre ou un photographe enrichi de toute la gamme des évocations que permet l'écrit. Ce n'est sans doute pas un hasard si la peinture (avec Bonnard) et la photographie pointent leur nez dans ce roman.

La puissance de la mémoire est la ligne de force de cette histoire. Les souvenirs vont et viennent comme le ressac de la mer et submergent le lecteur d'un bain trouble et exaltant, doux et chargé d'écume amère. L'impression générale faite de dunes et de vent, de douleurs sourdes et de pulsions en herbe, m'a tant pénétré que j'en garderai sans doute un souvenir inoubliable. Mon séjour sur la côte de la Mer du Nord durant la lecture contribue certainement à renforcer ce sentiment. Et la proximité d'âge que je dois avoir avec cet homme écrivant les effluves de sa mémoire le rend naturellement attachant à mes yeux... Je suis assez déçu des critiques molles que j'ai trouvées sur les sites de lecteurs, car je comprends mal qu'on puisse passer à côté de cette perle.

Le récit tient en peu de choses, mais les sublime toutes: un homme au soir de sa vie revient sur des événements de vacances à la mer pendant sa jeunesse. Son épouse vient de mourir d'un cancer (...l'imprévu suprême lui avait fondu dessus) et désemparé, il retourne sur le lieu de vacances de son adolescence, de ses premiers émois sensuels, là où il a vécu un autre drame révélé tout à la fin du roman au terme d'une progression adroite de la tension. Ce n'est pas un livre triste du tout: il est poignant et m'a parfois serré la gorge, c'est vrai, mais ce texte apporte autre chose d'enveloppant et d'indicible, qui n'est pas de désespoir ni de mélancolie. N'est-ce pas simplement cela l'art, la beauté de l'art ?
La Mer, en définitive: une aquarelle où se côtoient l'initiation et la mort, mouillé sur mouillé.

Je ne suis pas très compétent pour juger de la traduction et je peux me tromper, mais je tiens à noter que j'avais senti une écriture (encore) plus raffinée avec la traduction d'Infinis par Pierre Emmanuel Dauzat qu'avec celle-ci d'Albaret-Maatsch, qui soit dit en passant a pratiquement traduit tout ce qui existe de Banville en français et n'a de compte à rendre à personne. Il se peut aussi que Banville ait écrit La Mer d'un trait plus spontané, avec toujours, et pour mon grand plaisir, ces changements de rythme, alternant phrases courtes et longues dans un rythme élégant.

Un bref extrait: Puis, soudainement, non, pas soudainement, mais dans une sorte de houle impérieuse, toute la mer s'est soulevée, ce n'était pas une vague, mais un rouleau paisible qui avait surgi des grandes profondeurs, à croire qu'un énorme quelque chose avait bougé là en-dessous, et j'ai été soulevé et emporté un peu plus loin vers le rivage, puis reposé sur mes pieds comme auparavant, comme s'il ne s'était rien passé. Et en effet il ne s'était rien passé, juste un formidable rien, juste un haussement d'épaules indifférent du vaste monde.
Si vous le pouvez un jour, retrouvez ce passage à la fin du livre et constatez que situé dans son contexte, il prend une dimension supérieure. Comprenez-en toute la portée ontologique et John Banville aura peut-être gagné un lecteur, une lectrice.

Le livre a connu un gros succès outre-manche et il a été largement traduit. Booker prize 2005.

En poche 10/18, 247 pages, traduction de Michèle Albaret-Maatsch

Lien : http://marque-pages.over-blo..
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Encore ébranlé par la perte de son épouse, des suites "d'une longue maladie", un sexagénaire s'installe dans une pension tenue par une vieille fille, dans une petite ville sur la côte. Plus qu'une mise au vert c'est une forme de retour aux sources. Ni la bourgade, ni la demeure, ne lui sont en effet inconnues. Un demi-siècle plus tôt, dans cette modeste station balnéaire, il y a tissé des liens avec une famille d'un milieu plus aisé que le sien, occupant la dite bâtisse pour leur villégiature. C'est sur trois temporalités que se déroule ce roman absolument sublime, jouant tel un pianiste concertiste virtuose, sur toute la gamme des émotions. On partage le désarroi d'un vieil homme face à l'inéluctabilité de la maladie de son épouse, son séjour morose d'homme veuf dans une maison transformée en pension pour troisième âge, et toutes les réminiscences que ce lieu et cette mer éveillent en lui, à l'époque reculée et incertaine de l'enfance, riche en émois, où les émotions laissent de profondes marques sur le cachet de cire de l'âge tendre qui prend en se refroidissant.

Récompensé par le très prestigieux et ô combien mérité Booker price en 2005, ce roman est tout simplement époustouflant. Spirituel, subtil, très souvent désopilant, il désarme aussi par sa dimension tragique. On passe par tous les états. Digne de figurer dans les "Livres pour une île déserte" de notre bien-aimé site. Rien lu d'aussi jubilatoire depuis un beau brin de temps. Difficile de ne pas verser dans le dithyrambe. L'oeuvre qu'on voudrait écrire avant de refermer sur soi le caveau familial. Lisez-le. Vite.
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Après la mort de sa femme, un homme, Max, éprouve le besoin de retourner dans le lieu où il a passé un été déterminant dans sa vie. Ballyless, petite station balnéaire familiale. Eté de son enfance durant lequel il s'est éveillé à l'amour et à la sensualité.

Le narrateur entremêle le passé, son enfance pauvre et lourde avec des parents malheureux ; son travail et celui de sa femme, leur rencontre et la vie qu'ils ont menée jusqu'à cette année de souffrance. le présent hanté par le chagrin et la douleur causés par la perte de sa femme Anna, qu'il a du mal à accepter. Les relations tendues avec sa fille unique inquiète pour son papa, les autres pensionnaires des Cèdres et leur histoire tourmentée. Mais surtout les souvenirs de cet été qui remontent à la surface.

L'auteur parvient à faire naviguer le lecteur entre ses trois espaces temps avec grâce par le choix d'un vocabulaire riche et harmonieux, qui bénéficie d'une traduction remarquable.

Le narrateur se retire aux Cèdres, cette même maison bourgeoise qui fut louée cet été là par une riche famille bourgeoise dont il a fait rapidement connaissance des Jumeaux mystérieux, Chloé et Myles, un garçon énigmatique, considéré comme muet. Ils ont sensiblement le même âge que lui. Il y a aussi leur gouvernante, Rose, une jolie jeune fille et les parents, Carlo et Constance Grace, femme pulpeuse et séduisante.

Max le narrateur, se remémore au plus près les lieux, les sensations, la lumière, les sons, les paroles et les gestes échangés avec les membres de la maisonnée jusqu'à élucider la raison tragique pour laquelle cet été lui a laissé une empreinte indélébile et a façonné l'homme qu'il est devenu.

Un livre magnifique, qui laisse au lecteur conquis, un parfum tendre, mélancolique et nostalgique.
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Immense. Enfin un grand écrivain.c'est original,émouvant.Après la mort de sa femme Anna, Max revient dans le village où enfant, il a passé tous ses étés. Ce retour dans la petite station balnéaire de Ballyless est une retraite contre le chagrin, la colère et la douleur de la vie sans Anna. Mais c'est aussi un retour sur les lieux où, cinquante ans plus tôt, il rencontra la riche famille bourgeoise avec laquelle il expérimenta, pour la première fois, l'étrange soudaineté de l'amour et de la mort mêlés
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Suite au décès de sa femme Anna, Max revient cinquante ans après sur les lieux de son enfance. Il s'installe aux Cèdres, une maison qu'il a bien connue à l'époque, et qui aujourd'hui est tenue par Melle Vavasour.
Autrefois "Les Cèdres" était une maison qu'on louait aux vacanciers. La famille Grace est venue y passer quelques semaines durant un été qui marqua à jamais le narrateur.

Tel le flux et le reflux, le narrateur et le lecteur sont entrainés dans un mouvement incessant de va et vient entre passé et présent, rêve et réalité, calme et tempête, espoir et désespoir. Comme lors d'un véritable travail psychanalytique, les associations s'enchaînent, les évidences s'imposent et les liens se tissent.
La fin du récit est assénée comme un coup de théâtre et laisse face à l'immensité de l'horizon. Comme quand la vie s'impose devant la mort, il faut malgré tout continuer à naviguer.

C'est un texte magnifique et d'une richesse telle que l'écriture se dispute à la peinture ces évocations tour à tour tendres et douloureuses de la mémoire.


Lien : http://moustafette.canalblog..
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Ah! quel magnifique roman! Écriture superbe, plongée dans les souvenirs, surprises multiples!

À relire pour en savourer la beauté!
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