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Michèle Albaret-Maatsch (Traducteur)
EAN : 9782221274347
368 pages
Robert Laffont (04/01/2024)
3.62/5   39 notes
Résumé :
Irlande, 1957. Après la découverte du cadavre émasculé d’un prêtre très respecté dans la majestueuse bibliothèque de Ballyglass House – le manoir de l’énigmatique famille Osborne –, le Detective Inspector Strafford, prénom Saint John (à prononcer « Sinjun »), est appelé de Dublin pour enquêter.
Alors que la neige tombe sans discontinuer sur la campagne irlandaise, Saint John, un protestant dégingandé loin des clichés de la profession, est bien déterminé à le... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Un roman policier, vraiment ? Plutôt un roman criminel, plus proche de Crime et châtiment que du Meurtre de Roger Ackroyd. Pourtant, au départ, Banville brouille les pistes : un manoir à la campagne sous la neige, une famille gentiment dysfonctionnelle et...un cadavre dans la bibliothèque comme dans le roman d'Agatha Christie. Un colonel en retraite (o mânes du Colonel Bantry, de St Mary Mead, royaume de Miss Marple !), qui rappelle aussi le colonel Prothero, de l'Affaire du même nom, (comme le colonel Osborne, le colonel Prothero en est à son second mariage et il a eu du premier une fille prénommée Lettice),*un meurtre dans un cercle fermé.
On trouvera aussi un clin d'oeil appuyé au Crime de l'Orient-Express, auquel l'un des enquêteurs fait référence sans le nommer.
Mais si nous sommes bien dans les années 50, comme souvent chez Agatha, nous ne sommes plus dans son aimable Angleterre, dernier avatar de la Merry Old England (enfin, pas tout à fait dernier, on la retrouve encore aujourd'hui dans les Cosy Mysteries) mais dans une Irlande toujours pas remise de la Guerre Civile et de ses haines inexpliables et soumise à l'implacable tutelle du clergé catholique. Ah le clergé catholique ! Banville ne l'aime visiblement pas. Et pour compliquer les choses, la victime, le Père Tom, est un prêtre catholique habitué du manoir du Colonel Osborne, protestant comme l'enquêteur. Ils appartiennent tous les deux d'ailleurs au même milieu, une petite aristocratie protestante ruinée, qui s'accroche à l'Irlande et à ses manoirs en ruine.
Le Père Tom, donc. Il est familier de la maison, où pourtant on ne l'apprécie guère. le lecteur non plus, qui voit croître son animosité à son égard au cours du livre.
Pourquoi ? Je n'en dirai pas plus, de crainte de vous spoiler.
Quant aux autres personnages, y compris l'enquêteur, ils se débattent dans leurs problèmes personnels, au sein de la société étouffante et misérable où ils vivent, à mille lieues de nos clichés sur une Irlande qui, même si les choses s'y sont sans doute arrangées depuis, ne ressemble pas vraiment au Connemara de Michel Sardou. Ce qui apparaît du Connemara dans le livre, ce n'est pas "l'église en granit de l'île Mary " mais l'orphelinat de Carricklea, auquel est consacré un passage abominable, et le Père Tom, qui y a exercé son ministère, y a sans doute mérité son sort.
Ce n'est pas gai ? Oui, ce n'est pas gai.
Crime et châtiment non plus
Le traducteur n'a pas toujours été très avisé. Était-il bien nécessaire de faire apparaitre un baroque "Ordre du Service Distingué" ?
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Mine de rien, ce polar psychologique décoiffe !!!

L'atmosphère y est lourde, pesante. Les divers individus rencontrés au fil des pages semblent d'un premier abord, ne pas être vraiment très net au point de vue psychologique, et, comportemental, mais, peu à peu, ils dévoient, à leurs corps défendant, des failles, des secrets enfuis au plus profond d'eux même, et, cela même si ils font preuve d'un caractère hors du commun.

Il faut avouer que la saison - l'hiver, et, plus particulièrement Noël - choisi par John Banville est peut-être plus propice à certaines confidences. Sans oublier le détective inspector Saint John Strafford. Ce dernier est un personnage atypique, dégingandé ainsi que cynique. Il donne l'impression d'être totalement incompétent. En fait, ce n'est qu'une image qu'il se donne pour mieux aboutir à ses fins. Par sa façon de penser, de se comporter, il ressemble au lieutenant Colombo.

John Banville évoque d'une façon subtile les rapports tendus entre les catholiques et les protestants ainsi que le problème de la pédophilie au sein de l'église catholique.

En bref, un excellent roman policier qui se laisse dévorer sans que l'on s'en rende compte.
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C'est un genre que John Banville, qui a abandonné l'alias Benjamin Black et son personnage fétiche le Dr Quirke, a inventé. Appelons cela le whodunit littéraire. Il l'a non seulement inventé mais il le porte, sans trace d'effort, dans son style magnétique, aux images fascinantes, à un niveau de quasi-perfection.

Who did it ? le Whodunit est le modèle déposé par Agatha Christie. Dans Neige sur Ballyglass House, le « it » désigne le meurtre (par couteau) et l'émasculation consécutive (on y voit un message non ?) d'un prêtre dans une sorte de manoir lugubre à la fin des années 50 en Irlande.

Alors voilà. On est à Noël. Il neige sans discontinuer. Il fait un froid à fendre les pierres. Il n'y a pas de guerre en Ukraine mais à l'époque on se chauffe comme on peut - c'est à dire entre pas du tout et très mal. Dans le pays, les protestants, minoritaires, font ce qu'ils peuvent sans que les catholiques, y compris les plus hauts dignitaires de leur religion, puissent réellement faire ce qu'ils veulent. Tout paraît lent et lourd - ouaté, triste, sous cloche.

Le Détective inspector Strafford est protestant, parfaitement éduqué, filiforme et flottant ; il se demande en permanence ce qu'il fait là, non seulement à Ballyglass House mais aussi dans la vie. Il nous donne l'impression que l'enquête progresse sans lui, dans un décor de théâtre où s'affronteraient des personnages incroyables : ils donnent tous l'impression de jouer un rôle. Quel rôle ? Que cachent-ils ? Un meurtre par exemple ? Un deuxième arrivera, une autre mort encore, et ce sera la fin. Rassurons-nous : Straffrord avait tout compris.

Neige sur Ballyglass House est déconseillé à ceux qui se shootent aux rebondissements incessants, à l'action trépidante, à l'adrénaline. On est dans un polar qui n'en pas un (et qui fait peu d'efforts pour en être un), mais qui est un grand livre atmosphérique, magnifiquement écrit et qui se révèle, au final, poignant.
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Comme toujours avec John Banville,  écrivain de roman noir, on est dans l'Irlande des années 50. L'histoire se déroule précisément entre l'été 1947, l'hiver 1957 essentiellement et se clôture brièvement à l'été 1967. 20 ans. Et l'obesssion du 7. Je me suis également interrogée.
L'inspector detective Saint John Strafford est dépêché par un temps neigeux et glacial jamais vu depuis longtemps, dans le manoir du colonel Osborne, dans un coin paumé du Wexford. Un prêtre, père Tom Lawless, a été retrouvé mort dans la bibliothèque.  On pense tout de suite à Un cadavre dans la bibliothèque d'Agatha Christie. Il n'y a pas grand chose à dire de plus à ce sujet, si ce n'est qu'on débute avec un cadavre - dans une bibliothèque -  et que l'histoire voudrait qu'on cherche le meurtrier. C'est ce qu'a bien l'intention de faire Strafford. Vivent au manoir, le colonel en retraite,  sa 2e épouse Sylvia, sa fille Lettice, son fils Dominic, en visite, étudiant en médecine à  Trinity. La cuisinière,  Mme Duffy. Un palfrenier marginal Fonsey, occupe une caravane. Il y a un pub qui est aussi un hôtel où Strafford a loué une chambre.
Comme Stafford, les Obsorne sont protestants. C'est assez étrange qu'un prêtre catholique soit retrouvé chez eux. Mais on apprend que le prêtre était un ami de la famille. Soit disant un amoureux des chevaux...
Nous savons qu'en plus d'avoir été égorgé,  Lawless a été émasculé. Bien évidemment,  les autorités ne diront pas l'entière vérité. Pensez donc !  Strafford interroge les différents personnages. Mais on ne peut pas dire qu'il mène vraiment une enquête.  Il est dérangé par cette impression de théâtre en carton-pâte. Tout lui paraît artificiel,  jusqu'aux vêtements du colonel. C'est un peu comme si les personnages étaient sortis d'un roman. C'est plutôt l'adjoint de Strafford,  Ambrose Jenkins qui s'occupe en réalité de l'enquête, jusqu'au moment où.... il disparaît !
Je me suis beaucoup amusée, j'ai jubilé de voir de brèves allusions au docteur Quirke, me demandant s'il allait entrer en scène.  Il était parti en lune de miel. Je ne sais plus vraiment où je l'ai laissé la dernière fois, mais des petites allusions à la fameuse série que seuls les vrais amateurs de littérature irlandaise auront lue, était tout à fait plaisante ! On retrouve également, en arrière plan, le Detective Chief Superintendant Hackett...

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Ça commence comme une partie de Cluedo: un cadavre poignardé dans la bibliothèque. Comme l'écrit le New York Times Book Review, Banville reprend les codes d'une Agatha Christie, avant de les faire voler en éclats de main de maître. En effet, le décor nous transporte au sein de la petite aristocratie terrienne et bourgeoise, quelque part sur la côte irlandaise. Mais très vite, le malaise s'installe: la victime est un prêtre... Et l'église catholique est quasi omnipotente dans le pays.

Comme dans tout bon polar, on croit avoir compris qui est l'assassin, et même le mobile. Jusqu'à la scène finale. Non, celle-ci n'est pas à l'image d'un Hercule Poirot plein de suffisance, réunissant tous les suspects, dans un manoir victorien... À l'opposé de l'orgueilleux et omniscient détective belge, l'inspecteur Strafford trimballe son pesant de doutes et de faiblesses. C'est à une Agatha Christie capable d'ironie et de dérision que l'on a affaire.

Et surtout, comme dans tout bon polar (bis), on assiste à une peinture de la société de l'époque. En demi-teinte, l'auteur nous dévoile les rancoeurs entre catholiques et protestants, ainsi que les séquelles de la guerre d'indépendance, qui reste dans les mémoires : le livre se situe dans les années cinquante, la République est encore très jeune. Les raisons du meurtre, quant à elles, sonnent furieusement actuelles.

Le livre est aussi une interrogation sur la liberté, à travers le choix de vie de certains des personnages, influencés par leur milieu et leurs parents. Deux possibilités: se révolter, ou se plier au conformisme. Sans pour cela garantir l'accès au bonheur. Une histoire beaucoup plus amère que douce.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
« Votre métier. Il m’intrigue. Pour mettre toutes les pièces ensemble, cerner un canevas et ainsi de suite, ce doit être comme tenter d’assembler un puzzle particulièrement compliqué… ?
- Je pense que oui, en un sens, répondit Strafford. Le hic, c’est que les pièces ne restent pas en place. Elles ont tendance à bouger et à créer des canevas à elles, ou quelque chose d’analogue. Tout est trompeur. On croit avoir évalué les choses, et puis tout change. En fait, on dirait surtout qu’on assiste à une représentation théâtrale, où l’intrigue ne cesse de se modifier… »
Il se tut et se tapota vivement les dents de devant, avec ses ongles. Oui, songea-t-il, oui, c’était ce qui le turlupinait depuis son arrivée à Ballyglass House. Tout le monde paraissait déguisé, vêtu conformément à un rôle à tenir. Ils lui évoquaient une troupe d’acteurs qui se present en coulisses et attendent de dire leur texte. Il y avait le colonel Osborne - il avait dû passer une heure à se préparer devant son miroir pour être conforme à ce qu’il était ou à l’image qu’il souhaitait renvoyer -, gentilhomme campagnard, héros de Dunkerque, encore séduisant malgré le passage des ans, jouant franc-jeu, direct, carré et prudemment bas de plafond. Et, là, il y avait son fils, habillé pour lui ressembler le plus possible de tweed et de sergé, brogues marron et chemise à carreaux; le cheveu bien rejeté en arrière en un style militaire. Il y avait aussi Lettie, affublée, lorsque Strafford l’avait rencontrée pour la première fois, d’un jodhpur et d’une veste d’équitation, alors qu’elle ne montait pas. Et il y avait Mme Osborne, qui jusqu’ici avait joué au moins deux rôles, d’abord celui de la folle du grenier, puis, lors de cette absurde pantomime de goûter, celui d’une jeune effrontée membre de la famille royale, avec les perles de la reine Elisabeth, sa robe bleue et son accent précieux.
Tiens, même Mme Duffy et ses joues de pomme incarnait de manière bien trop plausible la domestique du tableau.
Mais pour qui s’étaient-ils attifés afin d’être si totalement convaincants que, à l’égal des meilleurs comédiens eux-mêmes, ils ne convainquaient pas vraiment ? Et qui les avait réunis pour leur attribuer leurs rôles respectifs dans ce théâtre de faux-semblants ?
Ou bien était-ce lui qui imaginait tout ça ? Dans son job, on risquait toujours de voir des choses qui n’existaient pas et de discerner un canevas là où il n’y en avait pas. Le policier tient beaucoup à ce qu’il y ait une intrigue. Or, la vie elle-même en est dénuée.
Pourtant, un homme avait été tué, et quelqu’un l’avait tué. C’était un fait. Et le ou la coupable se cachait quelque part ici, au vu de tous. (p. 131-132)
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« Des créatures interessantes, les moutons, fit remarquer Jeremiah Reck. « Leur cri n’a pas changé depuis l’Arcadie » - je pense ne pas me tromper. Puis-je vous demander, monsieur, si vous aimez lire ?
- Je lis quand j’ai le temps.
- Ah, mais vous devriez prendre le temps. Le livre est une des grandes inventions de notre espèce. » (p. 93-94)
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Strafford ne répondit pas. Au ton du patron, il avait compris que tous les éléments requis pour étouffer l’affaire étaient déjà en place, tels des accessoires sur une scène dé théâtre. Strafford n’était pas seul à se projeter dans le rôle de chef décorateur. Pour ce qui était de peindre des paysages factices et d’altérer l’intrigue mine de rien, il avait de la concurrence, plus déterminée et autrement plus douée que lui. (p. 54)
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Ce n'est qu'en regagnant la cuisine que Strafford prit vraiment conscience du froid qui régnait dans le hall. Ici, la cuisinière marchait, l'air vibrait de chaleur et il flottait une bonne odeur de viande rôtie. Assis à la table, le colonel Osborne tambourinait des doigts contre le plateau en bois, tandis que l'agent Jenkins, debout, s'appuyait contre l'évier, les bras étroitement croisés sur le torse, les trois boutons de sa veste bien fermés. Jenkins était très à cheval sur la manière dont, selon lui, il fallait se tenir.
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Il tira sa cigarette en émettant une sorte de sifflement, puis se tourna vers le cadavre. Strafford se demanda en passant comment quelqu’un, qui que ce fût, pouvait bien avoir suffisamment de castrations à son actif pour être considéré comme un professionnel. Y avait-il donc des châtreurs de métier en-dehors des élevages de bétail ? (p. 34)
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