Citations sur L'Enchanteur (164)
Viviane n'avait dit son nom à personne, et les servantes, qui l'adoraient, le nommaient "beau-trouvé" et "fils-de-roi", sans savoir qu'il en était vraiment un, mais parce qu'il était très beau, et déjà décidé et fier, même en marchant à quatre pattes. Et puis elle le nommèrent en riant "Lancelot", à cause de son sexe enfantin qui parfois, quand elles lui faisaient sa toilette, pointait en avant comme une menue lance. Et Viviane elle-même, amusée, lui donna ce nom, qui lui resta.
-Je viens d'Egypte. C'est un royaume d'Afrique, en haut à droite.
-Encore un pays de sauvages !
-Tous les hommes sont des sauvages.
Elle se maria l'année suivante. Elle aimait son mari, mais elle n'oublia jamais l'ange qui l'avait sauvée du dragon.
Le jour de son mariage Merlin lui fit un cadeau : il cré pour elle une fleur qui porte depuis lors son nom. On la nomme passiflore et aussi Fleur de la Passion. Au grand soleuil elle grimpe le long des murailles. En infusion elle calme les chagrins, et ses fruit sont une bonne confiture.
Le Diable est unique, et en même temps légion. A chacun de ses pas, un autre lui-même surgissait de lui et se mettait à le suivre. Et comme il allait de plus en plus vite, il y eut bientôt une multitude de Diables qui tourbillonnaient sur les places et les avenues d'enfer, emplissaient les immeubles cubiques, en coulaient par les fenêtres, se grillaient sur le sable, grouillaient dans la mer de Capri à Vladivostok.
Qui ne connait Merlin ? Il se joue du temps qui passe, reste jeune et beau, vif et moqueur, tendre, pour tout dire enchanteur.
Depuis qu'il avait vu Viviane, il (Merlin) savait qu'elle pouvait être pour Arthur, sur le chemin du Graal, un obstacle plus haut que les montagnes du pays des Saines dont le sommet gratte la plante des pieds de Saint Pierre à la porte du Paradis.
- Tes devins sont des ânes, dit Merlin. Mais ce n'est pas leur faute s'ils se sont trompés, un âne ne sait que braire.
Le corps de Merlin avait disparu. Il s'était fondu dans la forêt, confondu avec elle, il était devenue bois vif, écorces, racines, feuilles vertes et feuilles mortes, graines germées, sèves montantes, odeurs mouillées, couleurs lavées que le soleil revenu chauffait et caressait. Il était dans tous les arbres, de tous âges et de toutes tailles, dans leurs branches et leurs feuilles, leurs fruits et leurs bourgeons. La bienveillance tranquille de la forêt et sa force sans limites l'emplissaient, et il emplissait la forêt de sa compréhension, de sa gratitude et de son amour.
Ils se rapprochèrent encore, lentement, et des pieds à la tête leurs corps se touchèrent. Ce fut comme s'ils recevaient le ciel et la terre. Ils entraient dans la joie de l'amour absolu où la chair et l'esprit se rejoignent, se confondent et emplissent l'univers. Merlin murmura à Viviane le mot qu'il ne lui avait jamais dit, Viviane le répéta et la chambre du lac et la terrasse et le petit jardin, la source et la fontaine et l'arbre bleu sont venus avec eux, mêlés à l'herbe et aux rosiers de l'île. L'air a tourné lentement et s'est refermé autour d'eux, les dérobant aux regards du monde. Ils vivent depuis ce jour dans la chambre invisible, la chambre d'air, la chambre d'amour, que le temps promène. Elle est là-bas, elle est ailleurs, elle est ici... Un jour, elle s'ouvrira. Comme une graine.
— Pourquoi m'as-tu fait sauver cet enfant ? demanda Viviane.
Merlin, qui était très loin d'elle, en train de s'occuper de Perceval, lui répondit :
— A cause de son nom. Il a reçu en baptême le nom de Galaad, qui signifie « le plus fort ». Si tu l'éduques bien, il deviendra peut-être aussi le plus intelligent et le plus vertueux. Le tout réuni pourrait faire de lui « le meilleur ! ». Pour l'instant, il a l'air d'être seulement le plus affamé !…