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sur 608 notes
Je suis en veine ces derniers temps : après avoir découvert Pamuk, voici Vladimir Bartol et son magistral « Alamut »
L'action, basée en partie sur des faits historiques, se passe à la fin du XIème siècle, dans le Nord de l'Iran. Seïduna (Hassan Ibn Saba), l'impitoyable tyran, a conquis la citadelle d'Alamut, et à partir de là, va tenter de faire triompher sa secte des Ismaïliens (chiïtes) et de combattre les sunnites du sultan de Bagdad, amis des Turcs Seldjoukides. Mais contrairement à ses ennemis, il ne possède ni armée, ni population favorable. Il va donc établir un plan à long terme, véritable machination. Née d'un cerveau dérangé ? Bien au contraire !
Il crée une « école » de fedayins, jeunes hommes vite convaincus que leur chef est un prophète, et qui sont prêts à tout pour lui obéir. On leur prodigue un enseignement physique. très dur, et aussi intellectuel (dont le Coran bien sûr). On croirait lire un article sur les camps d'entraînement des djihadistes du XXIème siècle. le bouquin a été écrit en 1938 !
Parallèlement à la création de cette « école », Seïduna transforme ses jardins tout proches en un véritable paradis, fidèle en tout point à l'image qu'en donne le Coran. Un véritable décor de théâtre, habité par une nuée de jolies demoiselles qui ne se rendent pas compte qu'elles sont en fait emprisonnées.
C'est ici que démarre le plan démoniaque de Seïduna. Il annonce à ses fedayins qu'il possède les clés du paradis, les drogue et les transporte dans ces jardins où ils vivront quelques heures inoubliables. Seconde tournée de haschish et ils retrouvent la citadelle, convaincus à tout jamais qu'ils ont bien vu l'eden et n'ont plus qu'un souhait : sacrifier leur vie pour retrouver ce monde merveilleux, pour le plus grand bien de la cause qu'ils défendent.
L'auteur slovène dénonce ici les horreurs de toute dictature. Il songeait sans doute surtout au fascisme qui commençait à envahir l'Europe, mais utilise l'Islam pour effectuer sa démonstration. Quelle prémonition !
Hassan Ibn Saba est un monstre de cruauté, mais est aussi un homme cultivé et intelligent. C'est là le gros problème. Comme tout dictateur, il estime que le peuple est trop ignorant pour comprendre quoi que ce soit et que seuls quelques initiés ont droit à connaître sa « philosophie ». C'est donc à ses deux grands amis qu'il explique sa vision du monde : tout n'est qu'illusion (même le Coran) et dès lors « rien n'est vrai, tout est permis » deviendra sa devise. Il n'empêche que l'on a froid dans le dos quand on le voit ordonner de décapiter son fils, qui a osé transgresser les lois paternelles.
le seul (petit) reproche que l'on pourrait faire à Vladimir Bartol, ce sont quelques longueurs, d'autant plus qu'elles concernent le plus souvent des personnages secondaires dont les noms arabes sont impossibles à retenir, sans parler de leurs titres : difficile de différencier clairement émirs, califes, vizirs, sultans, deys etc.
Un grand roman historique, agréable à lire car l'aventure est omniprésente. Je ne risque pas de l'oublier de sitôt
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Un roman historique de caftan et de cimeterre. Pas un roman jeunesse, pourtant. Derriere le roman d'aventures affleure discretement le roman a these. J'ai savoure les divers episodes, les descriptions de lieux et d'actions, j'ai apprecie l'ecriture, fluide et sans trop d'efforts de style, j'ai fini repu, habite des pensees que ce livre suscite.


Dans la citadelle d'Alamut, nid d'aigles inexpugnable, un meneur d'hommes charismatique, Hassan Ibn Sabbah, prepare une poignee de combattants a renverser les turks Seldjoukides qui sont au pouvoir en Perse. A l'aide de drogues et surtout de la promesse d'un paradis auquel il les a fait illusoirement gouter, il en fait des fedayin, qui n'ont plus peur de mourir, mais au contraire cherchent une mort glorieuse pour leur cause, qui leur permettra d'acceder ipso-facto a ce que le Coran a promis aux pieux exemplaires et aux morts en defense de la foi: “jardins et vignes, et belles aux seins arrondis, d'une egale jeunesse, et coupes debordantes" (sourate 78, an-naba). Avec ses fedayin endoctrines, fanatises, manipules en fait, il seme la terreur chez les Seldjoukides. Ce seront les Hashashiyun, la secte chiite-ismailite des Assassins, qui arboreront le fanatisme comme instrument de pouvoir, la terreur comme arme de conquete. Je cite quelques phrases que l'auteur met dans la bouche de Hassan Ibn Sabbah: “Mon plan est gigantesque. J'ai besoin de croyants qui aspireront à la mort au point de n'avoir peur de rien. Ils devront être littéralement épris de la mort! Je veux qu'ils courent à elle, qu'ils la cherchent, qu'ils la supplient de les prendre en pitié, comme ils feraient d'une vierge dure et peu généreuse”. “Mais la force de toute institution repose essentiellement sur l'aveuglement de ses adeptes ! … Plus bas est le niveau de conscience d'un groupe, plus grande est l'exaltation qui le meut. …la mystification et la ruse sont de toute façon indispensables à celui qui veut mener les foules vers un but clair à ses yeux mais que celles-ci seront toujours incapables de comprendre”. “Penses-tu que la grande majorité des gens se soucie de la vérité ? … pour atteindre le but élevé qui est le nôtre, et qui sert aussi bien son intérêt… mais qu'elle est incapable de comprendre! J'ai frappé à la porte de la bêtise et de la crédulité humaine. J'ai misé sur l'appétit de jouissance et les désirs égoïstes des hommes. Les portes se sont ouvertes toutes grandes devant moi. Je suis devenu un prophète populaire…”. Quel but eleve? La domination du monde!: ” Aussi la suprématie appartiendrait-elle à celui qui tiendrait tous les souverains du monde enchaînés par la peur. Mais pour être efficace la peur doit se donner de grands moyens”.


Vladimir Bartol brosse le tableau d'un fanatisme, d'un totalitarisme, qui sert un homme, ou une poignee d'hommes, a tenir sous leur coupe de nombreux autres, qui ne sont qu'instruments a leurs yeux, et dont ils se servent sans scrupules pour atteindre un pouvoir supreme. Il choisit comme cadre et comme epoque la Perse de la fin du XIe siecle, ou se meuvent d'illustres hommes d'etat comme Nizam el Moulk, de grands lettres et poetes comme Omar Khayyam, et aussi le sinistre Hassan qui, ayant fait d'Alamut son repaire, fut connu comme “le vieux de la montagne". Il a de belles pages pour decrire ces hommes, leurs pensees, leurs actes et leurs destins. Il decrit magnifiquement les lieux ou ils se meuvent, villes et campagnes, detaillant specialement Alamut et ses environs. L'endoctrinement, le lavage de cerveau des jeunes fedayin est longuement suivi, en plusieurs chapitres. D'autres sont consacres a l'etablissement de jeunes esclaves vierges dans le jardin cache derriere la forteresse, pour qu'elles servent de “houris" paradisiaques aux fedayin drogues. le tout sert tres elegamment la trame du livre, et son message, habilement masque par un passe historique et geographique lointain, peut etre lu comme une critique, une attaque, aux endoctrinements de son temps (le livre est publie en 1936), nazisme, fascisme, communisme, qui s'avereront tres vite encore plus funestes que l'ismailisme du vieux de la montagne.


Mais these ou pas these, message ou pas message, ce livre est d'une lecture prenante. de belles descriptions, des dialogues interessants, et beaucoup d'action, de peripeties, de rebondissements. Oui, un captivant roman historique de caftan et de cimeterre. Pour adultes (pour que les vieux adultes se sentent jeunes adultes).

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Arrivée à la moitié du pavé je rends mon tablier ! Je me suis accrochée à ce conte philosophique noir espérant je ne sais trop bien quoi ... mais rien n'est arrivé. Il me pèse tant que c'en est insupportable ! Si les personnages sont plutôt bien campés et les connaissances de l'auteur sur l'époque extrêmement approfondies je trouve que l'ensemble manque de réalisme, ce qui pour moi est rédhibitoire. J'en suis bien désolée car le bouquin est vanté comme un chef-d'oeuvre.
Je suis passée à côté !
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Lu sur le conseil insistant d'un proche, ce roman est avant tout une leçon d'histoire. Les vraies origines des fameux assassins qui ont inspirés certains jeux vidéos et autres personnages de comics de notre temps. Un roman visionnaire écrit en 1938 qui nous rappelle fortement l'islamisme radical auquel est confronté le monde d'aujourd'hui. Un islam travesti pour les besoins d'un groupuscule avide de pouvoir et autres. Bref le sujet est compliqué et nécessite des heures de recherches pour le comprendre. Ce roman d'aventure oublié pendant plus de 50 ans est d'une densité et d'un intérêt culturel extraordinaire et mérite largement d'être plus reconnu. J'ai été plus que conquis et je le recommande à tous les férus d'histoire du Moyen-Orient.
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Énorme ce livre ! Énorme réflexion sur l'imposture de l'idéologie et la laideur de la démagogie qui anéantit les humains dans un projet d'aliénés et de soumis. Manipulation des masses et les gaver d'illusions qu'ils croient la vérité. Essentiel et indispensable.
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Totalement ignoré à sa sortie, ce livre a fini par avoir du succès. Il traite du fanatisme religieux islamiste. Et ajoute quelques pages romancées de lesbianisme. Aujourd'hui, nul n'ignore les ravages que peuvent faire la doctrine religieuse extrémiste y compris chez ceux qui sont prêts à mordre la main qui les a nourri. Sur le même thème, je préfère nettement le très fin "Comment Baptiste est mort" d'Alain Blottière.
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Alamut. forteresse réputée inexpugnable. sorte d'antithèse de la démocratie. Où vivent ceux qui se sacrifient.

Alamut. Roman d'aventure initiatique. Récit historique. Conte philosophique. Manifeste politique.

Vladimir Bartol n'a pas voulu, dans ce roman, paru en 1938, verser dans la caricature. Si les parallèles avec le monde politique dont est témoin l'écrivain slovène à la fin des années trente sont nombreux, il n'en demeure pas moins que c'est en Iran que Bartol plante le décor (décor qui sera d'ailleurs repris par les concepteurs des jeux vidéo Assassin's Creed et Prince of Persia !).

L'ismaélisme, secte iranienne dissidente de Hassan Ibn Sabbâh, installée au nord de Téhéran à l'aube du XIIème siècle, n'est pas qu'un faire-valoir, l'auteur s'attache à faire revivre cette culture perso-musulmane avec son savoir encyclopédique, le raffinement de sa poésie, l'ébullition de sa théologie, la sensualité enivrante de ses harems et son contexte géopolitique complexe sur fond de rivalité entre perses chiites, turcs, calife du Caire et arabes sunnites réunis autour du sultanat de Badgad et son grand vizir Nizam al-Mulk.

Les guerriers d'Alamut ont semé le trouble pendant près de 150 ans en Iran puis en Syrie, ont croisé le fer avec les sunnites mais aussi avec les croisés, Marco Polo lui-même rapporte l'existence de soldats fanatiques, de jardins paradisiaques, de loi du Talion sans pitié. Machiavélique avant la lettre, Seiduna n'hésitait pas, selon la légende, à user de stupéfiants si la ferveur religieuse ne suffisait pas.
D'ailleurs c'est aux fidèles disciples de l'ismaélisme que nous devons le mot « assassin » qui vient de « Hashīshiyyīn » en arabe. Péjorativement désignés par les chroniqueurs ennemis de l'époque comme des fumeurs de haschichs, les assassins sont entrés dans la légende et nous leur devons l'étymologie du terme.

« Rien n'est vrai, tout est permis. » le personnage de Seïduna me rappelle fortement le propos de l'écrivain anglais Jonathan Swift à qui l'on attribue le court ouvrage « l'art du mensonge politique » et qui met en garde, tel un Machiavel à son Prince, le politicien de ne surtout pas croire à son propre mensonge. C'est à coup sûr, pour Seïduna, le moyen de le mettre en oeuvre le plus librement, le plus ambitieusement. Pas de foi sans mauvaise foi.

« En fait, la force de notre organisation repose sur l'aveuglement de ses partisans ». Ceux qui dirigent, qui font les lois juridiques et morales d'une société ne peuvent s'y conformer eux-mêmes, c'est vieux comme le monde. Les prêtres prêchent la chasteté, les conservateurs la fidélité, les socialistes le partage, les économistes l'austérité, les juristes la légalité, les généraux le sacrifice, force est de constater à travers l'histoire que des Borgia à Louis XIV, de Mao à Pétain la vie privée des grands donneurs de leçons du monde était un peu désaxée voire diamétralement opposée à la coercition imposée aux populations par l'usage associé de la force et de la propagande.

Pour Seïduna, qui ne croit pas à l'hérédité (il prend l'exemple du catholicisme, l'élection du Pape est bien plus pérenne pour lui que les diverses dynasties monarchiques héréditaires), il convient, afin de pouvoir mettre ses plans à exécution d'avoir toujours une longueur d'avance, « il suffit de savoir quelque chose de plus que ceux qui doivent croire » pour instrumentaliser leur foi.

De même que le fascisme du XXème siècle, ou les macabres tueurs soi-disant au nom d'Allah du XXIe siècle, la théocratie des disciples d'Ali fait la propagande de la puissance de la volonté. Cette volonté de se dépasser, d'organiser l'avènement d'un homme nouveau, implémenté de qualités viriles et supérieures tout en étant irrévocablement soumis à son chef.

Néanmoins, comme le dit le jeune fédayin Ibn Tahir : « la volonté existe, mais l'intelligence résiste ». Toute l'oeuvre est tendue entre ces deux pôles que sont l'aveuglement, « l'orgueil d'obéir » comme disait Cioran, et l'intelligence critique. Extrémités entre lesquelles nous vacillons encore aujourd'hui, au péril de nos libertés individuelles.

« le savoir est effrayant ». Pourtant, une transcendance est possible. Redoutée aussi, car l'ignorance est rassurante, on préfère souvent un mensonge qui conforte, qui donne du sens, qu'une vérité qui ébranle, et nous laisse pris de vertige sur les cimes de l'angoisse. Seuls quelques privilégiés peuvent dépasser le monde des illusions, et par-delà le bien et le mal devenir « aaraf ».

C'est toute l'ambivalence de la personnalité du « vieux fou de la montagne ». Elle n'est pas celle d'un tueur sadique et paranoïaque.
Ainsi, charismatique et éclairé, ami du poète Omar Khayyâm, il a « compris que le peuple est nonchalant et paresseux et qu'il ne mérite pas que l'on se sacrifie pour lui » et loin de vouloir la vérité, le peuple veut « des fables » pour nourrir son imagination. Quant à la justice, « il s'en moque, si tu satisfais à ses intérêts particuliers ». Partant, autant utiliser la faiblesse et l'aveuglement du peuple pour le guider, malgré lui, vers la meilleur gouvernance et organisation sociale possible selon son chef.

« La fin justifie les moyens. Mais qu'est ce qui justifie la fin ? » Albert Camus. Ainsi donc tous les plans, et tous les stratagèmes de Seiduna sont sous-tendus par un motif final impérieux ? Pas du tout : « mais si vous me demandiez quel sens a toute cette action et pourquoi elle est nécessaire, je ne saurais vous répondre. Nous croissons en effet parce que les forces pour le faire sont en nous. Comme la graine qui germe dans le sol et sort de terre, qui fleurit et donne des fruits. Soudain nous sommes ici et soudain nous n'y sommes plus. »

Plus on en sait et plus on est seul. C'est ce que je retiens d'Alamut. le savoir fait peur, c'est un vertige, et plus la connaissance du monde s'accroit, plus le sachant prend ses distances d'avec les autres hommes, et se retrouve isolé, dans la forteresse de la clairvoyance, à envier l'illusion des autres, leur foi inébranlable, leurs paradis artificiels (au sens propre…).

Savoir c'est pouvoir. Dans la polysémie du terme : pouvoir agir et détenir le pouvoir.

Ces réflexions ne doivent pas pour autant donner l'image d'une oeuvre statique ou réflexive. Surtout pas ! le récit est très fluide et se lit comme un roman d'aventure, avec ses faits d'armes, ses stratégies, ses intrigues, sa progression narrative et son suspense. l'immersion dans la forteresse d'Alamut est totale.

Une fois le livre refermé, comme sous l'effet des boulettes de Seiduna, les images se troublent, le souvenir d'Alamut se dissipe comme si la légende l'avait déjà repris dans ses bras de brume.

Qu'en pensez-vous ?
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« Lorsque tu croyais, tu étais au ciel ! Maintenant que tu vois, que tu doutes, te voilà en enfer ! »
A croire qu'il est préférable d'être un pantin articulé de fils sans fin, manipulé de point en point, armé pour sourire une fois devant le rideau noir, que d'être conscient d'être ridicule et misérable face à l'incommensurable, de n'être soi-même qu'un esclave, celui de l'espace et du temps, égaré avec des yeux lucides…

Les étoiles demeurent muettes au-dessus de nous, autant fermer le grand livre des questions sans réponse. Nous ne savons rien alors permettons-nous, laissons libre cours à notre désir le plus ardent, celui de libérer le trône d'Iran des hérétiques. Devenons ce maître de l'espace et du temps, principaux obstacles à l'essor de grands empires. Faisons de la forteresse d'Alamut un creuset de miracles, soumettons les esprits, berçons nos victimes d'illusions. Déployons les narcisses d'un effrayant rêve d'enfer, devenons la terreur des puissants et des tyrans étrangers quels qu'ils soient. Devenons le nouveau prophète, populaire, disposons des clefs du paradis, des jardins des illusions… selon les termes d'un plan, calculé et mesuré tout le long d'une vie, qui a bien pu inspirer Machiavel…

Vladimir Bartol traite avec une délicieuse volupté de l'éternelle quête de la vérité. Notre vérité, celle dictée par nos sens, ne serait-elle pas préférable à celle, inacceptable et insupportable, qui nous est simplement inaccessible ? Il évoque et inspire cette fascination devant cet être d'exception qu'est Hassan Ibn Saba, le Vieux de la Montagne, fondateur de la tristement célèbre secte des Assassins.

Alamut, inexpugnable forteresse, est à l'image du chef d'oeuvre de Vladimir Bartol : inébranlable sur des bases historiques solides. L'auteur joue mille et une nuits sur autant de harpes sensibles, exalte de mille et un poèmes et autres arts raffinés, enivre de mille et une couleurs et parfums. Alamut est un roman qui éveille les sens et la raison à une humaine cruauté. Fascinant.
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Alamut, la montagne des Assassins menés par le Vieux de la Montagne. ... la secte redoutée à travers l'Europe et l'Orient, qui frappe et tue, renversant les trônes ... Mes élèves connaissent l'histoire grâce à Assassin's creed, le jeu vidéo et le film ! mon rôle de prof d'HG au lycée (et avant en 3°, mais plutôt avec @Harry Potter et l'ordre du phoenix) est de leur parler des clés et sens cachés ! j'évoque le roman en classe et ainsi deux -trois lycéens lisent Alamut chaque année et pardon mais j'en suis assez fière !
Bartol démonte scrupuleusement les rouages de l'embrigadement des jeunes, un B-A-BA de la transformation de jeunes gens pauvres à la recherche d'un absolu en guerriers fanatiques à la redoutable efficacité. En le lisant aujourd'hui, on ne peut penser qu'à al Qaïda et surtout à Daesh/ISIS/l'EI, qui aidés aussi par les progrès des télécommunication et du militaire, ont généré une même terreur et exercent sur certain(e)s une attractive fascination ...
Pourtant Bartol n'est pas un "visionnaire" et la part de la fiction est finalement relativement mince dans son roman. Ce serait oublier que comme Montesquieu a dénoncé Louis XIV en transposant ses critiques de la cour française en l'Orient dans ses Lettres Persanes, Bartol ici transpose aux XI°-XII°s ce qu'il observe alors en URSS, mais aussi en Allemagne et en Italie, en 1937-1938 ! ce "roman" est en fait une brillante dénonciation des totalitarismes, dont l'embrigadement de la jeunesse est une des clés ! ce sont ces multiples résonances et donc quelque part malheureusement son intemporalité qui en font une lecture au début ardue mais finalement fascinante et impressionnante de part son sens de l'analyse psychologique et sociologique et l'art de critiquer sans en avoir l'air ! c'est tout simplement magistral !
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Etonnante réussite que celle de Vladimir Arbol, un seul roman dont la renommée ne faiblit pas depuis les années 1930. Il faut donc que Alamut présente des qualités universelles et intemporelles. Et bien c'est le cas grâce à un contexte historique et politique complexe, un héros sorte de génie malfaisant mais charismatique, de l'aventure, du suspens et l'exotisme oriental.
Vers 1200 le schisme sunnites/chiites est plus fort que jamais et la secte des ismaéliens tente de tirer son épingle du jeu, faible numériquement elle doit trouver des moyens originaux pour s'affirmer. Son mentor Hassan ibn Sabbah saura fanatiser ses combattants pour leur faire aimer la mort plus que la vie.
Évidemment le roman est en forte résonance avec l'actualité, il est éclairant sur l'endoctrinement des esprits jeunes et avides d'en découdre, sur la façon dont la politique instrumentalise la religion. On peut reprocher un début traînant, un peu trop "délices de l'orient" et une fin relâchée mais ça reste un modèle de roman historique, et une leçon sur la soif du pouvoir. Au coeur de la forteresse de Alamut à la fois paradis et enfer, décor magique et inquiétant.
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