Le premier essai nucléaire français fut réalisé en 1960 dans le Sahara sous le nom de code "Gerboise bleue".
C'est joli une petite gerboise, c'est mignon tout plein... mais ce qui s'est passé lors de cet essai l'est nettement moins.
Des hommes ont servi de cobayes humains pour étudier les effets de l'exposition aux radiations.
Ils ont été envoyés tout près de là où l'explosion devait avoir lieu, et naturellement sans qu'on les ait informés des dangers potentiels.
Pas de la chair à canon, mais de la chair à bombe.
À travers son personnage de fiction,
Christophe Bataille donne la parole à tous les sacrifiés, à tous ceux à qui on a menti et dont on a détruit les vies.
"Quand tout a commencé, j'avais vingt et un ans." : le rédacteur anonyme du journal que le lecteur a sous les yeux était un tout jeune homme. Il avait la vie devant lui ou du moins, il aurait dû l'avoir, mais la Grande Muette en a décidé autrement.
Naïf au début, le malheureux cobaye deviendra pleinement lucide : "À vingt et un ans, je suis devenu un résultat."
Ce court ouvrage (moins de quatre-vingt pages) est saisissant.
Il se compose de tout petits paragraphes et le narrateur alterne le récit de la journée de l'explosion, des souvenirs du passé et diverses réflexions.
Christophe Bataille donne une description très imagée de l'explosion : les couleurs, les lumières, les sensations. C'est très beau, et cette beauté contraste cruellement avec l'horreur produite.
La concision du texte lui donne une grande force et j'ai terminé cette petite heure de lecture toute secouée.
Je ne veux pas clore cette "critique" sans ajouter une réflexion personnelle qui me semble indispensable sur le sujet.
La bombe qui explosa lors de l'essai dont il est question dans ce livre développa une puissance de 70 kilotonnes. Une folie inventée par l'homme, hélas peu en manque d'imagination pour concevoir des moyens de destruction.
Cette utilisation militaire du nucléaire n'a rien à voir avec ce que l'on nomme le "nucléaire civil" et qui nous sert à produire de l'électricité à bas coût.
Ce nucléaire civil est, en France, rigoureusement encadré et contrôlé en permanence. de multiples niveaux de sécurité existent, fonctionnant comme des couches de protection qui seraient superposées.
Les terribles accidents de Tchernobyl et Fukushima sont à la base liés à des défaillances matérielles mais surtout humaines : manquements aux règles élémentaires de sécurité, prise à la légère des risques potentiels, volonté de faire des économies au détriment de la sécurité...
Il fut un temps où la France était à la pointe dans le domaine du nucléaire civil, où les Français bénéficiaient d'une électricité peu onéreuse, où la France était indépendants énergétiquement et où elle exportait une partie de sa production, ce qui lui rapportait des bénéfices non négligeables : grâce à nos ingénieurs, à leur travail, à leur savoir-faire, la France était dans ce domaine leader mondial.
Ce temps-là est, hélas, révolu parce que des politiciens qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez et qui ne prennent des décisions qu'à l'aune du nombre de voix qu'elles peuvent leur rapporter ont jugé bon de fermer des centrales et de tout bonnement saborder la filière nucléaire.
Tout ça pour engranger les votes écolos alors que l'argument écologique ne tient pas debout : l'énergie nucléaire est non polluante et totalement décarbonée, tandis que depuis ces choix honteux nous importons de l'électricité produite dans des centrales à charbon, immenses sources de pollution et de CO2.
Tapez dans un moteur de recherche "Qui est responsable de la fermeture des centrales nucléaires françaises ?" et vous saurez à qui vous devez actuellement vos délirantes factures d'électricité !