Oh je sais bien, il ne s’ensuit pas forcément, lorsque deux êtres sont ensemble – (la voix se brise) – de cette façon – (voix normale) – parce que l’un voit l’autre que l’autre voit l’un, la vie m’a appris ça… aussi.
Chante comme le merle ou l'oiseau de l'aurore, sans souci de profit, ni pour soi ni pour autrui.
Et tu t'es déjà bien assez dépensé, pour le moment, détends-toi à présent, repose-toi, je ne t'embêterai plus, à moins d'y être acculée, simplement te savoir là à portée de voix et sait-on jamais sur le demi-qui-vive, c'est pour moi...c'est mon coin d'azur
Heure exquise
Qui nous grise
Lentement,
La caresse,
La promesse
Du moment,
L'ineffable étreinte
De nos désirs fous,
Tout dit, Gardez-moi
Puisque je suis à vous.
"Quelqu'un me regarde encore. (Un temps.) Se soucie de moi encore. (Un temps.) [...] Des yeux sur mes yeux."
"Je parle de temps tempérés et de temps torrides, ce sont des mots vides."
Et toi ? dit-elle. Toi, tu rimes à quoi, tu es censé signifier quoi ? Est-ce parce que tu tiens encore debout sur tes deux panards plats, ton vieux baise-en-ville bourré de caca en conserve et de caleçons de rechange, me traînant d'un bout à l'autre de ce fumier de désert...
Winnie.- (Regardant devant elle, toque à la main, ton de fervente réminiscence.) Charlot Chassepot ! (Un temps.) Je ferme les yeux – (elle enlève ses lunettes et ferme les yeux, toque dans une main, lunettes dans l’autre) – et suis de nouveau assise sur ses genoux, dans le clos à Fougax-et-Barrineuf, derrière la maison, sous le robinier. (Un temps. Elle ouvre les yeux, chausse ses lunettes, taquine la toque.) Oh les beaux jours de bonheur !
Et quand ça sonne. (Un temps.) Ça fait mal, comme une lame. (Un temps.) Une gouge. (Un temps) On ne peut pas rester sourd. (Un temps.) Que de fois j'ai dit...(un temps)...je dis, que de fois j'ai dit, Reste sourde, Winnie, t'occupe pas, dors et veille, dors et veille, comme ça te chante, ouvre et ferme les yeux, comme ça te chante, ou comme ça t'arrange le mieux. (Un temps.) Ouvre et ferme les yeux, Winnie, ouvre et ferme, toujours ça. (Un temps.) Mais non. (Sourires.) Plus maintenant. (Sourire plus large.) Non non. (Fin du sourire. Un temps.)
Ah oui, les choses ont leur vie, voilà ce que je dis toujours, les choses ont une vie. (Un temps.) Ma glace, par exemple, elle n'a pas besoin de moi.
Les éditions de minuit, p.67