Mais qu'est-ce donc que « Guerilla » ? Un roman ? Un ouvrage philosophique ? Un recueil de poésie ? Peut-être l'auteure, Véronique Bergen a-t-elle voulu tout cela à la fois… le résultat est une soupe assez indigeste où j'ai le sentiment que par moments seule l'auteure se comprend : « Finir enseveli dans les grands fonds pélagiques ne me cartouche pas la chanterelle… »
Vous pouvez toujours essayer de placer ce genre de phrase au cours d'une soirée, les mieux intentionnés penseront que c'est un message codé tel que ceux distillés par la BBC à destination de la France occupée…
Si quelqu'un peut déchiffrer l'énigme suivante, je l'invite à se présenter à l'examen d'entrée des décodeurs de la CIA (c'est mieux payé qu'au FSB) : « je bugs bunny des scénarios épicés menthe au sperme » !
Encore une petite pour la route ? Je vois que vous en crevez d'envie : « Les éviscérant dans un rituel guérilléro-aztèque, j'ouvrirai grand le coeur et le sexe de ceux qui nous font saigner. Un jour n'est pas un jour si la lune ne s'y couche. »
L'éditeur nous promet : « Les guerres provoquées par la débâcle écologique ont dévasté la Terre. Une galerie de personnages se relèvent pourtant : un écoguerrier, une femme-chamane ou encore un enfant muet. […] Guerilla, écothriller d'un genre nouveau, se déploie au milieu des explosions de grenades pour entonner un vibrant appel en faveur de notre planète. » Ah ? J'ai dû louper quelques épisodes car pour ce qui est des explosions de grenades, elles sont à peine évoquées… Quant à l'enfant muet, il finit par parler même si, à l'image du restant du bouquin, il reste plutôt incompréhensible. Et pour ce qui est de l'écothriller, j'ai déjà lu bien plus consistant.
A force de chercher à montrer sa culture pour se distinguer des écrivaillons qui racontent de façon simple et agréable des histoires que la plupart comprennent, Véronique Bergen en lassera plus d'un. Je ne doute pas que vous sachiez tous qui est Gucumatz ou Huracan. Grâce à Wikipédia, il m'est possible d'élargir vos connaissances !
« Kukulkannote est le nom de la divinité pan-mésoaméricaine du serpent à plumes dans la religion maya. Kukulkan vient, selon la légende, de l'océan et y retournera peut-être un jour. Selon une légende maya, il reviendra sur terre lors de la fin du monde. Kukulkan est son nom au Yucatan, mais au Guatemala, on l'appelle plutôt Gucumatz. »
« La Lamborghini Huracán est une supercar du constructeur automobile italien Lamborghini. » Heu… Je vais continuer à chercher… Ah ! Je crois que j'ai trouvé, mais pas facile : « Huracan ! Huracan est, dans la mythologie maya, le dieu quiché du vent, de la tempête et du feu. Il fait également partie des divinités ayant participé aux trois tentatives de la création du monde. Son nom qui, en maya peut se comprendre comme Jun Raqan, signifie « une jambe ». Il a également provoqué le déluge du deuxième monde lorsque les hommes étaient en colère contre les dieux. »
Alors, ne me demandez pas ce qu'ils viennent faire dans le roman… Je cherche encore…
Bien entendu, vous connaissez Antinoüs… Antinoüs ? M'enfin, Antinoüs ! Antinoüs, quoi ! Je vous rafraîchis la mémoire ? Antinoüs est un jeune homme originaire de Bithynie ayant vécu au II e siècle apr. J.-C., plus connu comme favori et amant de l'empereur romain Hadrien. Il meurt âgé de 20 ans environ, noyé dans le Nil, dans des circonstances qui restent mystérieuses. On dit « merci » qui ? Wikipédia, bien sûr !
Et puis, subtile allusion au film « Orange mécanique » de
Stanley Kubrick: « Une pincée de Kafka dans mon café et mes pulsions tournent à l'orange, à l'orange mécanique, sans même le concours de la Neuvième symphonie de Beethoven. »
En clair, Véronique Bergen étale sa culture comme vous et moi notre confiture, mais en quoi cela fait-il avancer le « roman » ? En quoi, cela aide-t-il à la compréhension ? J'ai le sentiment que l'auteure aligne de belles phrases, utilise des mots rares, exhume des noms mystérieux issus de mythes, cite des personnages historiques oubliés de quasi tout le monde, et, au besoin, fabrique son propre vocabulaire pour tenir son rang d'académicienne (elle est élue le 10 février 2018 à l'Académie Royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique au siège de Philippe Jones).