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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Si un jour on m'avait dit que j'en pincerais pour Sarah Bernhardt...
Comme souvent j'aime farfouiller dans les bouquineries et un samedi matin je tombe sur ce livre, Ma double de vie de Sarah Bernhardt, récit de ses mémoires d'actrice. Double surprise, d'une part j'ignorais que cette grande dame du théâtre avait écrit sa biographie et d'autre part j'ai découvert une écriture qui se tient merveilleusement dans les pages, belle, simple, nue, incisive, rythmée, inventive, drôle, généreuse. C'est l'écriture d'une grande autrice.
Ma double de vie, c'est bien sûr une autobiographie, mais c'est bien autre chose aussi. Sarah Bernhardt nous dévoile et partage ici sa vie publique et son ressenti sur des plans rapprochés de cette existence. Ici, ne venez pas chercher quelques pans intimes de sa vie qui furent j'imagine presque aussi riches que sa vie publique, mais elle n'en parle jamais, ne les évoque même pas, jamais un mot à ce sujet. Tout juste elle évoque parfois l'existence d'un fils, qu'on découvre brusquement au détour d'une page, je me suis surpris, revenant en arrière sur ma lecture, me demandant si j'avais raté un épisode, qui donc est ce fils ? qui donc en est le père ? dans quel endroit secret, dans quelle étreinte éperdue et furibonde fut-il conçu ? Sarah Bernhardt n'évoque jamais ce jardin secret de sa vie et c'est ainsi qu'il faut accepter ce mystère, s'en faire une raison.
Sans doute a-t-elle séduit, fait tourner bien des têtes d'hommes... Mais si elle fait silence sur ses amours, c'est autant par pudeur, que pour mieux se protéger, protéger les siens des griffes d'un univers impitoyable.
Elle a cependant beaucoup de choses à raconter sur sa vie publique. Tant de choses et surtout qui peuvent nous toucher, nous lecteurs insatiables, follement épris de la justesse et de l'émotion des mots qui nous font parfois accéder à l'invisible, à l'inaccessible...
De Sarah Bernhardt, j'ai l'image d'une vieille comédienne à la voix lyrique et chevrotante, presque ampoulée. Ce récit m'oblige à revoir cette image, - j'en suis presque honteux, je découvre la jeunesse fougueuse de Sarah Bernhardt, son esprit facétieux, irrévérencieux, intelligent sans cesse tout au long de son propos.
Ici le récit porte sur les quatre premières décennies de vie...
Dans ce récit échevelé, elle m'a tenu en haleine, me prenant par la main pour m'entraîner à folle allure dans cette période confuse et tumultueuse du Second Empire.
Elle dévoile ainsi son enfance bretonne lorsqu'elle fut élevée par une nourrice de Quimperlé qui ne parlait que le breton, son adolescence au couvent où elle rêvait de devenir nonne, ses débuts au théâtre, la guerre de 1870 et la Commune, son entrée à la Comédie-Française où elle débute à l'âge de dix-huit ans et d'où elle part avec fracas après avoir giflé un sociétaire, - ce qui ne lui fut jamais pardonnée, son départ pour les États-Unis à la faveur d'une tournée triomphale qui dura sept mois, son retour en France où elle pouvait dès lors affronter son destin...
Sans doute elle ment parfois, comme un comédien ment sur une scène de théâtre. Sans doute elle ment à force de jouer la comédie ou la tragédie... Sans doute elle enjolive certains traits, les rendant follement épiques, occultant par ailleurs ses amours, ses amants... Sans doute s'est-elle mise en scène à son tour, façonnant ce personnage à l'esprit indépendant, rebelle et batailleur ?
Ce qui m'importe ce ne sont pas les faits qu'elle raconte, c'est son ressenti, c'est l'imaginaire qu'elle convoque et étreint au royaume de sa vie comme un amant magnifique et infatigable.
Ce qui compte ici c'est le désir d'une femme rêvant de conquérir le monde et elle le réussit avec rage.
Si Sarah Bernhardt nous parle d'une époque où le théâtre connaissait ses heures de gloire, elle nous fait visiter les coulisses d'un monde qui déborde de loin le domaine des planches et elle nous en apprend de belles sur le pouvoir et l'argent qui gouvernent aussi les milieux artistiques.
Mais c'est son aventure personnelle qui nous touche avant tout, tissant dans ce récit déjà sa légende.
Turbulente, excentrique, cherchant à imposer les caprices de ses désirs, elle est souvent celle des scandales.
Ma double vie, c'est le récit d'une femme qui rêve de conquérir le monde, un vieux monde encore façonné par les hommes, les politiques, les financiers, les écrivains, les journalistes, ceux qui font la pluie et le beau temps, elle réussit par la grâce de son art, par le caprice de ses désirs, par une volonté indestructible, à conquérir ce monde.
Ce qui m'a frappé tout d'abord, c'est la virulence de l'époque, la violence à laquelle elle fut confrontée, celle des jalousies, des rebuffades, des mesquineries, l'hypocrisie des uns, la fatuité des autres, celle des chausse-trappes qu'on lui tendait sans cesse sur son chemin de gloire... Elle démontre un caractère entier et indomptable qui l'a sans doute aidé à tenir debout et triompher avec panache.
Je découvre qu'elle ne fut pas seulement une comédienne - sans doute la plus grande de son temps -, elle fut également une sculptrice talentueuse, une peintre aussi et l'autobiographie dont je vous parle ferait rougir de honte bien des célébrités qui se sont livré avec fadeur à cet exercice.
Plus qu'une artiste, elle fut l'inspiratrice d'une époque ainsi que des auteurs qui la mettaient en scène. George Sand, Victor Hugo, Alexandre Dumas le père et le fils, Théophile Gautier, Gustave Flaubert... Elle a côtoyé les plus grands, mais ne pourrait-on pas inverser la perspective et dire que ces auteurs ont eu la chance de côtoyer et mettre en scène l'éblouissante, la sublime Sarah Bernhardt. Ne se contentant pas de poser sa voix sur des textes entrés dans la légende, - Hernani, Ruy Blas, Lorenzaccio, Hamlet, La Dame aux Camélias, l'Aiglon -, d'habiter avec passion des rôles qu'on croirait taillés pour elle, elle a posé sa voix, ses gestes, son âme comme une lumière drapant la médiocrité du monde...
Le livre que j'ai entre les mains contient aussi des photos de l'artiste, montrant sa beauté éblouissante et farouche, drapée dans des robes amples, dans des costumes parfois exotiques, sur l'une d'elle elle pose nue dévoilant des seins de porcelaine tandis que son regard espiègle perce l'éventail qui tente de cacher son visage. J'ai eu l'impression qu'elle me regardait...
D'une maigreur presque maladive, son physique androgyne récusait les canons de la beauté féminine qui arrondissaient le monde de cette époque et dont les hommes voulaient s'enivrer à souhait, derrière cette silhouette fragile elle impose vite un style qui la rendra célèbre...
Si parfois je l'ai trouvée bien trop complaisante avec un certain Napoléon III qui le lui rendait bien et fort méprisante à l'égard des Communards, cela ne l'a pas empêché de conquérir mon coeur par sa grande humanité, sa présence fidèle près des soldats blessés durant le siège de Paris alors que la capitale était cernée bombardée par les forces prussiennes, sa révolte contre la peine de mort, son attention auprès d'émigrants en détresse qui rejoignaient l'Amérique sur ce navire en partance du Havre, sa compassion pour des condamnés à mort comme cet anarchiste nommé Vaillant dont elle assista fracassée de douleur à l'exécution capitale, son engagement au côté de Zola dans l'affaire Dreyfus...
Ce récit dont je vous parle représente le premier volume de ses souvenirs. Inutile de vous dire que je vais courir très vite vers le second volume, tant la lecture du premier fut un régal. Retourner dans les pas du fantôme de Sarah Bernhardt enchante déjà mon coeur.
« Ma vie, que je croyais d'abord devoir être si courte, me paraissait maintenant devoir être très, très longue ; et cela me donnait une grande joie malicieuse, en pensant à l'infernal déplaisir de mes ennemis.
Je résolus de vivre.
Je résolus d'être la grande artiste que je souhaitais être.
Et, dès ce retour, je me vouai à ma vie. »
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Sarah Bernhardt est sans doute - avec Joséphine Baker - l'artiste de scène française la plus connue et la plus méconnue à la fois.

Figure dominante du théâtre dans la seconde moitié du XIXème siècle et ma première moitié du suivant, Sarah Bernhardt fut non seulement une grande actrice, tragédienne et comédienne, mais encore une artiste aussi complète qu'on puisse l'imaginer : sculpteuse, peintre, exploratrice, dramaturge mais aussi écrivain. "Ma double vie" est son autobiographie.

La vie de Sarah Bernhardt, qui fut sans doute la femme la plus populaire de son époque, en France comme à l'étranger, est stupéfiante, captivante, impressionnante d'événements et de talent. Telle une star hollywoodienne avant l'heure, elle fut - contre son gré - la proie des journalistes et des hommes d'affaires. Egérie de la France, elle fut son ambassadrice des arts jusqu'aux Etats-Unis où elle effectua plusieurs tournées aussi aventureuses qu'épuisantes. de constitution fragile, blâmée et raillée pour sa maigreur en un temps pas si lointain où l'embonpoint allié à une taille de guêpe représentait le canon féminin par excellence, Sarah Bernhardt fut une femme de tête au tempérament bien trempé qui affronta l'opinion publique pour imposer ses vues, ses idées et ses projets. Amoureuse du public qui lui rendait son amour au centuple, elle devint rapidement une véritable mascotte médiatique unanimement adulée.

Issue d'un milieu bourgeois nanti, sa vocation lui a été imposée par son entourage afin de suppléer à une impossibilité d'hériter des biens paternels et sa carrière d'actrice eut donc d'abord un objectif pragmatique : celui de subvenir à ses propres besoins et à ceux de sa parentèle. Mais la jeune Sarah a une voix unique, une spontanéité inégalée, un tempérament de diva ou de reine, un charme enjôleur, une présence sur scène qui émeut. Elle se distingue et le succès est au rendez-vous malgré son indépendance et sa fantaisie affichées et assumées.

Ses mémoires sont un régal à lire de par leur style et leur contenu narratif. Humour, facétie, introspection, opinions politique, économique et sociale, Sarah Bernhardt confie tout par le menu avec un sens aigu de l'analyse, ne passant sous un silence pudique qu'un seul aspect de son existence : sa vie sentimentale et la naissance de son fils naturel.

Je retiendrai de cette découverte littéraire un très grand plaisir de lectrice, doublé du sentiment de fierté qu'une égérie française telle que Sarah Bernhardt témoignât en son temp de la volonté d'indépendance et de l'intelligence féminines, si longtemps niées et bafouées par les hommes.


Challenge MULTI-DEFIS 2023
Challenge PLUMES FEMININES 2023
Challenge PAVES 2023
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Née dans un milieu très mondain, élevée entre une nourrice bretonne et un couvent versaillais, résolue à entrer dans les ordres avant d'être envoyée au Conservatoire pour devenir comédienne, entrée deux fois à la Comédie Française qu'elle quitta deux fois avec pertes et fracas, devenue entre temps une étoile montante de la scène, dont l'éclat ne cessera plus jamais de croître pour mieux éblouir ou exaspérer ses contemporains, artiste accomplie, sculpteur, peintre, tragédienne jusqu'au bout des doigts, Sarah Bernhardt est un des personnages les plus fascinants de sa fascinante époque.
Ses mémoires sont passionnantes de bout en bout. Certes, ceux qui cherchent la vérité historique, factuelle, du personnage, feront bien de se méfier : les aspects plus demi-mondains que mondains de sa famille et de sa vie sont soigneusement gommés, et Sarah Bernhardt, non sans pudeur, ne donne d'elle-même que l'image qu'elle veut bien montrer. Soigneusement contrôlée, sans doute, mais avec un art consommé de la mise en scène - c'est la moindre des choses - et un naturel indéniable dans le ton. On y découvre un caractère exalté jusqu'à la violence, audacieux, généreux, très conscient de ses défauts, mélange d'artifice raffiné et de spontanéité parfois ravageuse, de fragilité physique et de force d'esprit. Une personnalité pleine de vie, et extrêmement attachante.
Seul regret : que ces mémoires soient incomplètes, et s'arrêtent aussi tôt dans sa carrière, après sa première tournée américaine. J'aurais adoré la voir parler de la suite, de ses collaborations ultérieures, et particulièrement d'Oscar Wilde qui n'a droit ici qu'à une ligne assez triste. Mais telle quelle, cette Double Vie est un parfait plaisir : exquis, et qui vous laisse insatisfait. What more can one want ?

Une biographie documentaire, peut-être, pour remettre les choses en perspective. J'en ai lu une, il y a longtemps : j'ai bien envie de la rouvrir.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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La seule chose qu'on pourrait reprocher à cet ouvrage, c'est de ne pas nous raconter la fin de l'histoire (et pour cause !) qui est aussi passionnante que le début...
J'ai été stupéfiée par la modernité de l'écriture de Sarah Bernhardt. ça se lit comme on engloutit une tablette de chocolat : avec une facilité déconcertante.
Son témoignage sur la Commune est, à mon goût, le meilleur passage du livre.
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Je ne connaissais pour ainsi dire rien de cette actrice dont tout le monde sait plus ou moins un petit quelque chose.
J'ai eu l'heur de tomber sur cette autobiographie (et oui, elle l'a écrite elle-même !) sur Amazon à petit prix. Je l'ai lue d'une traite car c'est un petit bijou ! Outre le fait que l'on apprend à (mieux) connaître ce personnage, on y fréquente le tout-Paris de cette période et l'on se rend compte que cette femme est une icône incroyable ce qui m'a permis de comprendre pourquoi on en parle encore aujourd'hui. Il y a 2 tomes à cet ouvrage, je me suis empressé de télécharger le second et j'attends avec impatience de m'y replonger.
Je vous encourage à lire ce petit chef-d'oeuvre qui nous offre un fabuleux voyage dans le temps.
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Une lacune de comblée ! Faire con naissance de Sarah Bernhardt, que Cocteau désigna comme « le monstre sacré ».
Une star mythique de son siècle, « reine adorée des étudiants », dont la renommée a largement dépassé son époque et dont le nom est toujours prononcé avec un immense respect. Aujourd'hui encore.
Voilà l'autobiographie d'une femme volontaire, talentueuse et indépendante qui assume ses choix, sa vocation artistique, où l'on apprend que le théâtre fut un des hasards de la vie, où elle résolut finalement « d'être la grande artiste que je souhaitais être » ; où l'on entrevoit son siècle avec ses rencontres, son expérience de la guerre, ce que lui inspire la Commune dans une belle plume directe et spontanée.
A noter les photos incluses dans l'édition de poche et un glossaire biographique des noms propres qui complète l'édition.
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J'ai lu les mémoires de Sarah Bernhardt et j'ai adoré. Cet ouvrage se lit comme un roman.
Elle y raconte son enfance, son adolescence quant elle voulait coûte que coûte devenir religieuse ! Au grand jamais comédienne !
Puis la découverte du théâtre et la montée vers le succès.
Sarah Bernhardt ne savait rien faire à moitié. D'un tempérament exalté, violent, audacieux, elle incarnera les plus grands rôles de son temps.
Son entêtement (elle ne veut faire que ce qu'elle a décidé) conjugué à son talent est à l'origine de son succès ! mais aussi de déconvenues.
Elle a su se faire adorer autant que détester ! Ce qui la définit : résolument libre !

C'est aussi une femme très cultivée qui tient la plume ! Une femme ouverte sur son temps et qui fut amie avec les grands artistes.

Tout s'entremêle, la petite et la grande Histoire. C'est passionnant (elle raconte ce qu'ont vécu les parisiens pendant la guerre de 1870 ; la Commune). le tout avec des mots simples et directs du vécu.

Ma double vie, existe aussi en version ebook (ci-dessous).


AH IMPORTANT : pour ceux qui s'intéressent à Sarah Bernhardt, il y a une émission sur France Culture samedi 3 mars 2013 http://www.franceculture.fr/emission-concordance-des-temps-actualite-de-sarah-bernhardt-2013-03-02
Lien : http://www.amazon.fr/gp/prod..
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Ces mémoires auraient pu avoir pour titre :
« La vie vaut la peine qu'on y entre sérieusement, mais gaiement. » Mais Sarah Bernhardt, actrice française (1844-1923), qui aimait cette maxime de M. Auber, son directeur au Conservatoire, en a décidé autrement… parce que c'est justement ce qui la caractérisait : décider autrement, suivre sa voie ; non pour aller contre les autres, non pour écraser les autres, mais seulement pour vivre sa vie pleinement et à sa manière. Peut-être parce que sa santé fragile lui faisait penser que sa vie serait courte, ce que finalement elle ne fut pas, certainement parce qu'elle avait une forte personnalité, trop forte pour certains.
La devise de Sarah était : « Quand même » « Ce n'était pas un fait du hasard, mais bien la suite d'un vouloir réfléchi. À l'âge de neuf ans, j'avais choisi cette devise, après un saut formidable au-dessus d'un fossé que personne ne pouvait sauter et auquel mon jeune cousin m'avait défiée ; je m'étais abîmé la figure, cassé un poignet, endolori le corps. Et pendant qu'on me transportait je m'écriais, rageuse : « Si, si, je recommencerai, quand même, si on me défie encore ! Et je ferai toute ma vie ce que je veux faire ! »
Sarah est travailleuse mais ne laisse personne la déranger si elle a décidé de dormir une heure ; elle est volontaire jusqu'à l'obstination, têtue mais sachant écouter les personnes sensées ou intelligentes ; elle est égoïste et généreuse ; elle vit pour elle-même, mais elle est aussi très concernée par le monde dans lequel elle vit ; elle aime une vie riche de plaisirs, et s'entoure de belles choses, mais est capable de voyager dans un wagon à bestiaux pour aller retrouver son fils ; elle aime être adulée par le public, mais organise un hôpital dans son théâtre pendant la guerre Franco-prussienne du terrible hiver de 1870 ou elle soigne et nourrit des centaines de blessés. Sarah devient une actrice célèbre par son talent et sa voix d'or, et quand elle fait de sa vie une aventure, les trente-deux personnes (femme de chambre, majordome, impresario, actrices et acteurs) qu'elle emmène avec elle dans sa tournée américaine, profitent comme elle d'une expérience inoubliable en péripéties, déconvenues et émerveillements.
Sarah est une femme complexe, intelligente, inspirante, forte, admirable selon moi.
Ce que Sarah n'aime pas :
La guerre : elle trouve que c'est une grande et macabre bêtise des hommes.
La peine de mort : bien qu'elle soit elle-même forte, qu'elle ait bataillé contre sa famille et son entourage pour se faire la place qu'elle s'est choisie, elle est indulgente envers ceux qui se sont trompés de route et finissent à l'échafaud : qui sait s'ils ne valaient pas la peine d'être sauvés ?
La viande : elle fera pourtant, à Chicago, une visite surprenante… !
L'immobilité : elle ne visite ni les églises ni les musées. Elle monte à cheval, conduit son propre attelage, vogue en bateau vers l'Angleterre ou l'Amérique, sillonne l'Europe en train, et même… surprise !
Qu'on coiffe sans ménagement ses cheveux frisés et aussi indomptables qu'elle.
La soumission et la bien-pensance : dans un monde dirigé par des hommes, une femme libre d'esprit et de corps doit être d'une force mentale incroyable pour garder ce qu'elle aime par-dessus tout :
Son indépendance.
On en apprend beaucoup sur cette femme à part. Mais ce texte ne se résume pas à cela… si on peut appeler ma critique un résumé ! Il y a nombre de pensées intéressantes et de jolies phrases :
« L'hospitalité est faite de saveur primitive et de grandeur antique. »
« La vie est courte, même pour ceux qui vivent longtemps. Il faut vivre pour quelques-uns qui vous connaissent, vous apprécient, vous jugent et vous absolvent, et pour lesquels on a même tendresse et indulgence. le reste est la « fouletitude », joyeuse ou triste, loyale ou perverse, de laquelle on n'a rien à attendre que des émotions passagères, bonnes ou mauvaises, mais qui ne laissent aucune trace. Il faut haïr très peu, car c'est très fatigant. Il faut mépriser beaucoup, pardonner souvent et ne jamais oublier. le pardon ne peut entraîner l'oubli ; pour moi, du moins. »
« … nous logeons en nous notre plus terrible ennemi : « la pensée », laquelle est sans cesse en contradiction avec nos actes ; laquelle se dresse parfois, terrible, perfide, méchante, et que nous essayons de chasser sans y réussir. Nous ne lui obéissons pas toujours, grâce à Dieu ! Mais elle nous poursuit, nous lancine, nous fait souffrir. Que de fois les plus mauvaises pensées nous assaillent ! Et quel combat il faut livrer contre ces filles de notre cerveau !
La colère, l'ambition, la vengeance, font naître les plus détestables pensées, dont on rougit comme d'une tare, qui ne sont pas nôtres, car nous ne les avons pas appelées, mais qui souillent quand même, et qui nous laissent désespérés de n'être pas seuls maîtres de notre âme, de notre coeur, de notre corps et de notre cerveau. »
L'écriture est surprenante : on a plutôt l'impression d'écouter Sarah Bernhardt : elle écrit peut-être comme elle parlait, librement, avec un langage à elle et des mots de son invention parfois, ce qui est très attachant.
Sarah est réaliste sur elle-même; elle connaît ses qualités; elle connaît aussi ses défauts, ne s'en cache pas, mais ne tente pas toujours de les corriger parce qu'ils ont fait d'elle ce qu'elle était: une femme forte et inoubliable.
Lien : https://www.gabrielle-dubois..
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Sarah Bernhard était une femme libre, indépendante, bien avant l'arrivée de la journée de la femme ! :D
Elle ne s'est jamais opposée aux hommes, mais elle a su naturellement s'imposer .... par la force de sa personnalité entière, énergique, intransigeante avec elle même et avec les autres.
Elle ne se soumet jamais si cela va à l'encontre de ses propres choix !
C'est une bonne idée de proposer les mémoires de Sarah Bernhard en version numérique. L'édition est bien illustrée et c'est plus intéressant de la lire sur un écran de liseuse que sur un smartphone.
Lien : http://www.amazon.fr/double-..
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