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3,9

sur 2685 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Après m'avoir bouleversé avec son excellent roman autobiographique « Arrête avec tes mensonges », Philippe Besson profite de cette rentrée littéraire 2022 pour m'inviter à bord d'un train de nuit entre Paris et Briançon.

A bord de l'Intercités de nuit n°5789, il fait tout d'abord les présentations : un médecin, une mère de famille, un hockeyeur, un VRP, un couple de sexagénaires retraités et une bande de cinq étudiants… sans oublier de mentionner un certain Giovanni Messina, qu'il présentera plus tard. Il annonce également d'entrée de jeu que tous les personnages n'arriveront pas vivant à destination. Ne sachant pas trop si je vais assister à un remake du crime de l'Orient- Express d'Agatha Christie, je décide de monter à bord…

Me voilà au coeur d'un huis-clos, entouré de personnages que rien ne relie et filant vers les montagnes alpines à bord d'un train-couchettes plutôt désuet. Étonnamment, cette ambiance nocturne, combiné à la difficulté de trouver le sommeil, semble inciter les gens à faire connaissance, à nouer des liens, voire même à se confier et à partager quelques secrets. Allez hop, je m'installe confortablement, j'enlève mes chaussures et j'allonge mes jambes sur la banquette… merci de m'avoir invité Philippe, je suis très bien là !

Philippe Besson a l'art de brosser des personnages attachants et de décortiquer leurs sentiments avec minutie. Au fil d'échanges profondément humains il met ses personnages à nu, tout en soulignant la fragilité de nos vies en abordant les thèmes de la fatalité et du hasard. Au-delà du suspense qui nous maintient éveillé durant tout le trajet, tout en nous tenant en haleine jusqu'à la dernière seconde, l'auteur nous oblige à faire le deuil de certains passagers, transformant ce qui s'annonçait être un bon polar…en petit coup de coeur émouvant !
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Ils sont une dizaine d'inconnus, que les hasards de la vie ont réunis dans la même voiture du train de nuit Paris-Briançon. le temps de traverser la France endormie, le huis clos crée quelques proximités, et les conversations prennent d'autant plus facilement un tour personnel qu'elles n'auront pas de lendemain. Se révèlent ainsi brièvement différentes trajectoires de vie, chacune marquée par les maux ordinaires de notre époque. Personne ne se doute alors que certaines d'entre elles vont bientôt s'interrompre tragiquement, avant même d'arriver à destination...


Hasard ou fatalité, il suffit de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment pour que le destin bascule. Alors quand se produit une catastrophe, l'on ne peut songer qu'avec un certain trouble à l'enchaînement de circonstances qui a mené les acteurs, parfois tout à fait incidemment, sur le théâtre de leur drame. L'auteur nous ayant prévenu d'entrée de jeu que la mort est montée à bord de ce train, c'est donc tout à la fois suspendu au développement du récit et étreint par anticipation d'un sentiment d'impuissance désolée, que l'on fait connaissance avec une poignée d'inconnus ordinaires, des gens comme vous et moi emportés sur le fleuve banalement si peu tranquille de leur existence. Entre préoccupations diverses, notamment familiales et professionnelles, mille violences, petites et grandes, viennent perturber le cours de ces vies, empoisonnant ce qu'il conviendrait pourtant d'en apprécier chaque minute, tant le temps nous est compté et tant tout cela, au final, ne tient qu'à un fil.


Parmi ces destins bientôt brisés, il en est un qui va encore plus que les autres provoquer notre émotion, en tout cas qui semble à ce point tourmenter Philippe Besson qu'il resurgit ça et là dans son oeuvre, comme dans son récit autobiographique Arrête avec tes mensonges. Au-delà de la catastrophe et des réflexions désabusées qu'elle suscite en passant chez l'auteur, sur l'indécence d'une époque où tout est spectacle et où rumeurs et accusations se propagent plus vite que la lumière, le vrai coeur du drame est ce qui révolte le plus l'écrivain : la peur du rejet et le refus de soi-même qui empêchent encore tant d'homosexuels à assumer leur identité, et qui les enferment dans une existence intolérablement douloureuse. Face à l'implacable brièveté et aux inéluctables cruautés de la vie, quel plus grand gâchis que de s'empêcher de la vivre en la sacrifiant aux apparences et aux conventions, de la subir en se contraignant à en rester à jamais à la marge ?


Avec la justesse et la sobriété qui lui sont coutumières, Philippe Besson réussit dès les premières phrases à suspendre le lecteur à son récit, l'embarquant, à l'occasion du dramatique télescopage de quelques vies ordinaires, dans un émouvant plaidoyer pour le droit à être soi-même : la vie est bien trop fragile et bien trop fugitive pour, en plus, se la laisser voler !

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La voix de Simone Hérault susurre dans le haut-parleur, « Voie 7, le train Intercités n° 5789 à destination de Briançon, va partir. Prenez garde à la fermeture automatique des portes. Attention au départ. »
Il dessert les gares de la fuite, l'angoisse, la solitude, la haine, l'affirmation de soi, la quête d'identité, du hasard, et de la destinée. Terminus à 8h18 en gare d'un petit bonheur de lecture.

Alors, je suis montée en voiture comme Simone me l'avait si gentiment intimé pour un court voyage de 200 pages. Trop court mais fort agréable. D'ailleurs, je n'ai pas eu trop le temps de voir défiler le paysage. le paysage de toute façon, je n'aurais pas pu en voir grand-chose, car la spécificité de l'Intercités n°5789 est que c'est l'un des rares trains de nuit qui circule encore en France.
J'ai préféré discuter avec mes voisins, compagnons de voyage et d'infortune.
Compagnons de voyage qui m'ont permis de retrouver les souvenirs et des sensations d'enfance liées au train de nuit, la couchette inconfortable, le crissement des freins, les arrêts intempestifs en rase campagne. Compagnons qui se sont livrés à moi en toute franchise, sans les barrières qu'ils érigent habituellement méticuleusement autour d'eux.
Jeunes et moins jeunes vont oser se livrer à des inconnus. La nuit, la parole se libère, le train offre une parenthèse, un entre-deux propice aux confessions. Ne pas connaître l'interlocuteur amène à de nombreuses audaces dont on ne se serait pas cru capable en temps normal, exactement comme lorsque que dans un pays étranger, des choses s'avèrent plus faciles à dire dans une langue qui n'est pas maternelle, comme si les langues osaient enfin se délier de leurs secrets.
Pourquoi sont-ils à bord de ce train, qu'espèrent-ils de leur voyage ? Qui les attendra sur le quai à Briançon ? Y a aura-t-il même quelqu'un pour les attendre ?
Compagnons d'infortune, car contrairement à moi qui m'en suis miraculeusement tirée sans une égratignure, ce voyage ne s'est pas bien terminé pour tout le monde… car certains d'entre eux n'ont pas pris un billet pour Briançon, mais directement pour l'au-delà …
Cependant, savoir qui s'en sortira ou non, n'est pas l'essentiel à mes yeux, ce livre n'est pas un thriller, mais un voyage dans nos pensées, les virages, les décisions que nous prenons ou pas à certains moments de nos vies.
Dommage, je crois bien que vous avez loupé votre arrêt, trop le nez dans le bouquin, vous n'avez pas entendu la voix du contrôleur… Bon voyage à bord du Paris-Briançon ! J'espère que vous aussi vous ferez partie des vivants à l'arrivée …
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C'est un jour de départ en vacances, c'est une gare coincée entre un métro aérien et des immeubles futuristes. Bientôt le train s'élancera pour un voyage de plus de onze heures de Paris à Briançon, il va traverser la nuit française. Pour le moment les passagers montent à bord, joyeux, épuisés, préoccupés ou rien de tout cela. Parmi eux, certains seront morts au lever du jour.

Comme dans un roman d'Agatha Christie, Philippe Besson nous présente les voyageurs les uns après les autres à mesure de leur montée dans le train, et nous découvrons les raisons de leur voyage. Ces passagers vont partager la même voiture pendant ce long périple et faire peu à peu connaissance, on s'épanche, on se rapproche, alors l'étranger devient confident, et dans cet espace hors du temps chacun se révèle aux autres, mais aussi à soi-même, derrière les apparences, se révèlent des êtres vulnérables. Une communauté va se former.

Si dès les premières phrases l'auteur sait susciter la curiosité de son lecteur et ménager le suspense, pour moi, l'intérêt de ce récit est ailleurs. Philippe Besson nous offre un roman sociologique, un microcosme dans ce huis clos ferroviaire, des tranches de vie, une galerie de portraits miroir de notre société, une jeunesse turbulente et insouciante, la difficulté à assumer sa sexualité, les violences conjugales, la peur du chômage, la vieillesse et la maladie. Ce sont des petits chapitres qui défilent le long des kilomètres de voies ferrées. La plume est légère, souvent sensible, parfois teintée d'un humour très fin, les phrases simples. Un conseil montez dans l'Intercités n° 5789, vous ne regretterez pas votre voyage.


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À bord de ce train de nuit qui relie Paris à Briançon se côtoient des personnes qui ne se connaissent pas et qui vont, le temps d'un voyage, partager bien plus qu'un compartiment-couchette. Des confidences, des parties de cartes, un baiser, une accolade, des secrets. Des moments d'autant plus précieux que, parmi ces voyageurs, certains seront morts au lever du jour...

Bienvenue à bord de ce train Intercités où l'on fait la connaissance d'Alexis, un médecin qui va vider la maison de sa maman, Victor, un jeune hockeyeur, Julia, une assistante de production accompagnée de ses deux enfants, le couple Jean-Louis et Catherine qui s'offrent une semaine de vacances, Serge, un commercial, et cinq étudiants en psycho. Des personnes qui, à la faveur de la nuit, propice aux confidences, et à la promiscuité vont lier connaissance. Des personnes hétéroclites qui semblent n'avoir que peu de choses en commun mais que le destin va immanquablement rapprocher. L'on sent le drame poindre et l'on aimerait ralentir l'allure de ce train qui file pourtant droit devant. En de courts chapitres et en tout juste 200 pages, Philippe Besson nous invite à un voyage pour le moins intimiste. Il brosse en peu de mots le portrait de chaque voyageur, réussissant tout de même à nous les rendre attachants, de par leur fragilité, leur drame personnel, leur poids devenu trop lourd à porter, leur blessure. Un roman émouvant, d'une simplicité efficace et d'une profonde tendresse.
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Je suis enfin montée à bord de ce train
Un train de nuit, comme on n'en voit plus beaucoup.
Je ne vous y ai pas trouvés.
Heureusement d'ailleurs, puisque tous n'arriveront pas.
C'est l'auteur qui nous le dit dès le départ.
Un médecin, un hockeyeur, une mère de famille et ses deux enfants, un VRP sous antidépresseurs, un couple de retraités récents, 5 jeunes étudiants, on dirait un inventaire à la Prévert.
Tous réunis dans un wagon couchettes, un peu désuet
Des gens qui ne se connaissent pas, qui ne se reverront pas
Des liens qui se nouent, des confidences murmurées, des rapprochements improbables
Jusqu'au moment où ...

Un très (trop) court roman. le décor en est cependant est dressé avec beaucoup de soin, on apprend rapidement à connaitre tous ces passagers, partageant pour quelques heures ce lieu hors du temps qu'est un train avançant dans la nuit. Beaucoup de délicatesse dans la description des interactions entre voyageurs, beaucoup d'empathie pour chacun d'entre eux.

Il m'est cependant resté un gout de trop peu.
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Ayant réservé cet ouvrage pour un lecteur dans la médiathèque pour laquelle je travaille, je me suis dit que je le lirai après lui car j'avais beaucoup entendu parler de celui-ci et même si je n'ai pas lu beaucoup de livres de Philippe Besson, ceux que j'ai lus ne m'ont jamais déçus et la preuve se renouvelle ici. Habitant plus du côté de Briançon que de Paris, le titre d'abord m'a intrigué puis les commentaires de mes lecteurs et ce que j'avais lus dans la presse, puis la couverture (un élément fondamental pour moi lorsque je sélectionne mes lectures), la quatrième de couv' bien sûr...et le texte qui, bien que m'ayant surpris (je ne m'attendais absolument pas à cela), m'a plus qu'enchanté.
A l'heure où l'on nous parle (encore) de distanciation sociale), où les rapports humains sont parfois délaissés pour privilégier l'échange avec des machines, ici, Philippe Besson nous offre une bouffée d'oxygène dans un premier temps dans ce train de nuit - je dis bien dans un premier temps car ce train de nuit n° 5789 marquera les passagers à jamais.

Il y eut de très belles rencontres (moi qui ai toujours voulu voyager dans un train de nuit, j'ignore si les relations se créent réellement comme cal...peut-être dans un certain temps mais qu'en est-il d'aujourd'hui ?),, entre des gens qui n'étaient absolument pas destinés à se rencontrer et qui ne se seraient d'ailleurs peut-être jamais croisés si le hasard ne les avait pas mis sur le même chemin, celui qui va de Paris à Briançon certes mais dans des conditions particulières. La nuit est sources d'angoisses souvent pour certains mais elle peut aussi s'avérer révélatrice pour d'autres et délier les langues ! C'est ce qui se passe notamment ici et ce, toutes générations confondues ! Parmi les passagers que l'on rencontre , il n'y a pas de barrières puisque tous sont entraînés dans la même galère si j'ose dire, à savoir devoir se supporter les uns les autres en raison de cette promiscuité de couchettes durant une nuit entière ! Puis il y aura l'après mais à ce sujet, je ne vous en dit pas plus car cela reviendrait à tout dévoiler de l'intrigue et cela serait extrêmement dommage !

Un roman extrêmement bien écrit, avec des chapitres courts et une écriture fluide, des personnages très différents les uns des autres mais extrêmement attachants, tous autant qu'ils soient et un suspense qui vous tient éveillé...au moins pour une nuit, le temps du voyage quoi ! Une lecture que je vous recommande !
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P. Besson égal à lui-même, ou l'art d'écrire avec justesse sur des moments forts de vies simples, leur vulgarité et médiocrité souvent en miroir. Prenons le train : il leur faut laisser le temps aux uns et aux autres de s'installer dans leur cabine pour y partager une nuit entre deux rails. La nuit, elle vient faciliter les confidences et permet de mettre de côté les urgences. Une pause, dans un monde qui court, qui court. On le sait, la nuit aide aux confidences : sommes-nous tous capable d'oser dire, d'avouer, de livrer sa vie sans maquillage à un inconnu ? Bashung chantait l'inverse : "la nuit, je mens". le hasard fait partager son intimité, les veilleuses du couloir encourageant, protégeant, les délivrances. Et tous nos personnages allant se perdre (!) jusqu'à Briançon. Il y a ces voyageurs qui se racontent, mais aussi ceux qui, au petit matin, vont venir croiser leurs vies modifiées, chahutées, : le retour dans l'adversité quotidienne sera brutal ("Vous avez du réseau, vous ?"). En lisant ce roman, j'ai pensé à cette phrase de Renato Berta : "Appelons ça le hasard, ça rassure tout le monde. Mais quand je pense à ce qu'aurait été ma vie sans ces "hasards"... ça donne le vertige. Je suis convaincu qu'il y a des rendez-vous dans la vie." (Photogrammes - JM Charuau - Grasset)
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Onee s'est dépêchée de sortir du boulot ce soir-là, parce qu'elle avait rendez-vous avec Philippe Besson. Leur précédente rencontre, il y a longtemps, là où de là, on voit la mer, ne s'était pas bien passée. Cette fois, ils avaient rendez-vous à bord de l'intercité n°5789, ce train de nuit Paris-Briançon qui dessert, en passant, sa petite ville à elle. Mais Philippe n'est pas le seul avec qui Onee a rendez-vous. A diverses étapes de cette ligne, une poignée de babélamis doivent la retrouver, avec qui elle a organisé une virée à la montagne, histoire de faire connaissance dans un lieu magique. C'est Patlancien qui a lancé cette idée lors d'une discussion à propos de Malamute. Idée si attrayante qu'ils ont décidé de franchir le pas. Ou plutôt la ligne, celle qui sépare le virtuel du réel et doit les mener de Paris à Briançon. Si tout va bien. C'est plus fort qu'elle, Onee a toujours trouvé que les trajets avaient quelque chose d'angoissant. Comme une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes : Arrivera, arrivera pas ? C'est vrai : Quand on voit tout ce qui se passe chaque jour aux infos, on se demande comment on vit encore. Alors elle se concentre sur l'objectif, l'arrivée. Au programme fous-rires, batailles de boules de neige avec Domm33, balade en traîneaux avec les rennes et malamutes de la fille de Pat, batailles de polochons et crêpes à la guimauve avec Yaena… Onee a même réussi à convaincre Isidoreinthedark de se joindre à eux, lui qui pourtant n'était pas emballé par un séjour dans le froid. Elle se réjouit de ce programme, tout comme de lire durant le trajet le dernier roman de Philippe Besson. Mais pour ça, encore faudrait-il qu'elle arrive à temps pour prendre ce fichu train. Ce qui n'arrivera pas si cette mère de trois enfants continue de les laisser apprendre tout seul à composter leurs billets !


Enfin on démarre, se relâche Domm33 en s'accordant dix secondes pour souffler après avoir poussé sa grosse valise dans le wagon-couchettes où elle s'est affalée. Rapidement, elle se reprend. Se serait-elle trompée de wagon ? Non pourtant. Alors où est Onee, n'étaient-elles pas censées se retrouver ici toutes les deux, après qu'Onee l'ait précédée de quelques gares ? Yaena devrait être la suivante à embarquer. Elles ont réservé un wagon-lit pour elles trois afin de se mettre dans l'ambiance. Domm sort son téléphone lorsqu'un « COUCOU ! » sonore retentit : La tête tout sourire dans l'entrebâillement ne peut être qu'Onee, de retour de sa promenade de reconnaissance. « C'était trop glauque ici toute seule, je suis allée fureter dans les couloirs pour entendre des voix humaines qui ne soient pas des annonces métalliques ; et puis surtout : j'ai repéré le wagon-restaurant en cas de besoin ! » Après une étreinte sincère, Domm finit de se détendre totalement : cette virée entre amis peut commencer. Elle s'attribue la couchette du bas, commence à caser ses affaires pendant qu'Onee dépose les siennes. Ce faisant, elles bavardent comme de vieilles amies qui se retrouvent, alors que c'est leur première vraie rencontre. Leurs échanges virtuels prennent corps dans ce wagon intimiste qui fleure bon l'aventure à l'ancienne et, bien sûr, chacune sort machinalement un bouquin de son sac à main. L'excitation retombée, les babillages s'apaisent au fur et à mesure que la nuit tombe et s'installe. Fatiguées d'avoir trop parlé, elles s'accordent tacitement un moment de calme dans un lieu familier et accueillant : leur lecture. Tiens, Onee lit le dernier Besson qui se déroule dans un train. Ça semble passionnant à la voir le dévorer… Mais il paraît que quelqu'un va mourir à la fin !


« Hey les Girls ! » Deux têtes se tournent, deux livres claquent en se refermant. « Yaena !! Quelle joie ! » C'est vraiment trop drôle de les voir bondir toutes les deux, sourire plaqué sur le visage pendant que leurs yeux s'arrondissent soudain en forme de question. Yaena est fière de sa surprise. C'est Onee qui craque : « Et… une passagère mystère ? » Ni une ni deux, l'intéressée répond du tac au tac : «  je peux m'inviter Onee ? sous la boule de neige pour l'hiver prochain ? je ferais le chien de traîneau :D besoin d'un peu d'exercices pour perdre mon poids d'hiver, à force de siroter du chocolat chaud sous un plaid avec une musique qui me trotte dans la tête 'Lucy in the sky' » C'est alors un concert d'aboiements, ou ce qui y ressemble, qui doit s'entendre à l'autre bout du couloir : « SAM !!! Quelle bonne surprise » Heureusement que Yaena repousse ce petit monde sur les couchettes pour pouvoir fermer la porte et épargner le couple de personnes âgées du compartiment d'à côté. « Bon je vais chercher des chocolats chauds pour tout le monde ? Isidoreinthedark et les autres arrivent après nous c'est ça ? »


Elle n'entendra pas la réponse.


« Les gens vivant dans le proche voisinage assureront qu'ils ont entendu une détonation énorme, certains diront : On a pensé qu'une bombe venait d'exploser. » « Le tout ne dure qu'une poignée de secondes, pendant lesquelles leur vie leur échappe : ils ne décident plus de rien, de rien du tout, ils ne sont plus que des paillettes argentées dans une boule à neige secouée par un enfant turbulent. »


Une deuxième rencontre fracassante avec Philippe Besson dont Onee ne ressortira pas indemne. Elle parvient à penser qu'une « deuxième » signifie qu'il pourrait bien y en avoir d'autres… Derrière ses larmes qui brouillent sa vue, elle voit émerger Domm33, puis Yaena, puis Sam. Elle songe que Dieu merci elles sont vie. Que la vie est fragile, que nous en sommes tous passagers jusqu'à son terminus qui, pour certains, arrive à plus grande vitesse que prévu. Que même quand elle semble sur des rails, elle peut à tout moment en sortir. Qu'il faut la chérir, et en profiter tant qu'il est encore temps… Après ça c'est sûr, son prochain Besson, elle ne le lira pas dans un train ! Mais déjà, tranchant dans le brouhaha confus qui a suivi le silence de mort assourdissant, son portable sonne. Isi s'inquiète de savoir pourquoi le train n'a pas encore desservi sa gare…
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"Paris-Briançon" est un livre que je vois souvent passer depuis sa sortie. Alors quand je l'ai aperçu à la bibliothèque, je n'ai pas hésité longtemps. C'est aussi et à nouveau l'occasion de découvrir un nouvel auteur pour moi, puisque je n'avais encore jamais lu Philippe Besson jusqu'à ce jour.

L'auteur nous emmène dans une sorte de huis-clos, les événements se déroulant essentiellement dans l'Intercités n°5789, train de nuit qui part de Paris et arrive à Briançon, dont le trajet dure douze heures. En ce premier jour des vacances de Pâques, une centaine de voyageurs sont dans ce train. Nous en suivrons une petite dizaine. L'auteur, d'entrée de jeu, nous prévient que tous n'arriveront pas vivants à leur destination.

L'histoire se découpe en deux parties. En premier lieu, Philippe Besson nous présente ses personnages : un médecin, un hockeyeur, une mère célibataire et ses deux enfants, un couple de retraités, un commercial, un groupe d'étudiants. Chacun a son histoire, ses raisons d'avoir choisi ce trajet nocturne. On va les voir se croiser, se rencontrer, faire connaissance, échanger. Si l'auteur ne montre au premier abord que ce qu'il se dégage d'eux, que ce qu'ils veulent bien nous montrer, il pousse un peu plus loin en nous invitant à rentrer petit à petit dans leur vie intime, nous permettant de percevoir ce qui se cache derrière les apparences, leurs secrets, leurs doutes, leurs peurs.

Je ne parlerai pas de la seconde partie, ce serait en dévoiler bien trop, et gâcher le plaisir de la découvrir par vous-même.

De sa fine plume, simple mais délicate, Philippe Besson dépeint subtilement son "contexte ferroviaire" : le trajet de nuit, les paysages qu'on ne peut voir, les différentes étapes, l'exiguïté des compartiments et des couchettes, etc. Les personnages y sont bien implantés, il laisse une empreinte sur chacun d'eux.

L'auteur étant plutôt détaché des événements et des personnages, étant davantage dans l'observation, il m'a fallu un certain temps pour percevoir cette atmosphère, tout comme les ressentiments des protagonistes. Mais au fil de la lecture, je me suis surprise à être de plus en plus sensible par ce qui se déroulait. J'ai commencé à appréhender ce qui allait se passer, puis à espérer un dénouement pas aussi dramatique que l'auteur laissait à penser. Il y a même deux ou trois passages sur la fin que j'ai trouvés plutôt émouvants.

On sait dès le début que certains ne descendront pas du train vivants. L'auteur laisse planer le doute et le mystère sur la tête de ses personnages, et par conséquent chez le lecteur également. J'ai vu venir l'événement en question assez tard (mon esprit tordu avait imaginé tout autre chose et de bien plus malsain... la faute, sans aucun doute, à tous les thrillers psychologiques tortueux que j'ai pu lire...). du coup, j'ai été assez surprise par cet évènement que je n'attendais pas, et qui a rendu la suite un peu plus difficile, plus douloureuse.

Dans l'ensemble, j'ai trouvé que tout filait trop vite, l'auteur ne s'attarde pas assez à mon goût. Je ne me suis pas non plus attachée aux personnages, trop nombreux pour si peu de pages. Mais, même si j'aurais aimé une histoire un peu plus approfondie sur certains aspects, j'ai tout de même passé un agréable moment.
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