Ayant moi-même un trouble du spectre de l'autisme (syndrome d'Asperger selon les classifications antérieures), j'ai trouvé ce livre très intéressant pour comprendre mon fonctionnement. On y découvre que l'autisme est avant tout une question de perception, une question de modalités sensorielles exprimées différemment. On y découvre que ces caractères n'ont rien de secondaires, qu'ils ne sont pas issus de critères premiers par rapport à eux, mais qu'au contraire, même s'il a fallu attendre la 5e édition du DSM pour en faire un critère à part entière, beaucoup d'aspects autistiques prennent leur source de là. On découvre alors les aspects cognitifs et perceptuels avantageux et désavantageux de l'autisme, des moyens de favoriser le diagnostic, l'évaluation et l'accompagnement. On découvre aussi des choses très intéressantes, par la perception même, sur la cognition autistique en tant que telle : par exemple, le rapport de l'analyse et de la synthèse dans l'autisme (les personnes autistes sont très analytiques, mais ont aussi, paradoxalement, une vision d'ensemble - seulement, pour eux, l'ensemble, c'est l'ensemble des détails - d'où l'intolérance au changement), avec les théories neuropsychologiques associées (déficit de cohérence centrale ou non ?). Bref, une référence.
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Une mine de pépites de compréhensions qui se dévore, se rumine et explose en un splendide feu d'artifice intérieur. Même si pour le moment, je suis très loin d'avoir accès à tout, ça bouge vraiment très très vite en moi ce qui prouve amplement ma première phrase.
Merci à toutes les personnes qui m'en ont conseillé la lecture. Il restera longuement à portée de mains et de « chemins de pensées » personnels.
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La mémoire des personnes avec autisme est souvent décrite comme mémoire d'associations (ou mémoire de séries – Williams, 1996). Elle diffère de la mémoire ordinaire (verbale) du fait qu'elle se « déploie ». Alors que la mémoire verbale est linéaire, la mémoire associative est non linéaire, multiforme, spatiale en quelque sorte (Grandin, 1996)
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De nombreux autistes se servent de cette mémoire associative, en série, pour compenser leur incapacité à traiter rapidement l'information au moment où elle arrive, ils répondent à la situation « par leur mémoire » quand quelque chose remémoré dans la série est déclenchée. Souvent ils ne peuvent suivre le fil d'une conversation car, pendant une courte pause entre les deux moitiés d'une phrase, peut se déclencher un nombre considérable de liens, amenant à d'autres liens,et encore d'autres liens... (Williams, 1996).
Quand un enfant est diagnostiqué autiste, les priorités éducatives se centrent prioritairement sur des interventions comportementales destinées à développer les aptitudes sociales et la communication et non sur leurs besoins sensoriels (souvent ignorés). Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les enfants autistes tirent parfois bénéfice d'un mauvais diagnostic de déficient visuel ou auditif. Cela s'applique particulièrement à ceux appelés les « bas-niveaux » ou autistes sévères, enfants dont les problèmes sensoriels sont très lourds. Placés dans un environnement où leurs problèmes sensoriels sont pris en compte, ces enfants peuvent mieux répondre à des interventions de socialisation et de communication que lorsqu'ils sont placés dans des uités pour enfants autistes où l'accompagnement est uniquement centré sur l'apprentissage de comportements sociaux et de communication.
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Le problème avec les difficultés sensorielles et perceptives spécifiques à l'autisme vient de ce qu'elles sont souvent invisibles et non détectées.
La perception autistique est, par bien des aspects, supérieure à celle des neurotypiques. Les personnes autistes, avec leurs sens exacerbés, peuvent souvent apprécier la couleur, le son, la texture, les odeurs, à un plus haut degré que les gens autours d'elles. Leurs dons et leurs talents devraient être entretenus et non ridiculisés comme c'est souvent le cas. Laissons-les explorer le monde à leur façon !
Certaines personnes autistes utilisent le système préconscient pour recueillir l'information. Elles utilisent leurs sens de façon périphérique. Cela leur permet de recueillir une grande quantité d'informations, pouvant cependant être absentes du traitement c'est-à-dire qu'elles ne savent quelles informations elles ont accumulées. Ces dernières peuvent cependant être déclenchées par des stimuli extérieurs ce qui peut souvent nous surprendre (et les surprendre elles-mêmes) par des connaissances insoupçonnables.
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Cependant il y a de sérieux effets secondaires et il apparaît que ceux qui ont subi un tel bombardement du cerveau, ont perdu de nombreuses autres capacités tout en en gagnant quelques autres.
Donna Williams (1996) insiste sur le fait que l'hypersensibilité peut arriver idépendamment de la surcharge d'informations ou bien, comme résultat direct de cette surcharge. La surcharge peut conduire à l'hypersensibilité (avec comme effets physiques la douleur, les crises, les comportements difficiles). Il peut parfois en résulter « une accumulation de connaissances non reconnues ». Dans ce cas, l'information est traitée hors de la conscience de la personne. Celle-ci ignore alors ce qu'en fait elle sait. De ce fait, elle n'est pas capable, consciemment ou non, d'accéder à ce savoir. Pourtant, parfois, ce savoir peut être déclenché ou invoqué par un élément venant de l'extérieur (Williams, 1996).