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Critique de kielosa


Après Isaac Bashevis Singer, voici une seconde histoire d'amour écrit par un Prix Nobel Littérature, celle de Mitia pour Katia, de Ivan Bounine, que j'ai grand plaisir à vous présenter.
Bizarrement ce livre existe en 2 versions en Français : une fois comme "L'amour de Mitia", avec 3 critiques favorables sur Babelio et une fois en tant que "Le sacrement de l'amour", avec 1 critique favorable. Signalons que la première version est une traduction fidèle du titre original en Russe : "Mitina lioubov".

L'édition que j'ai en main est par ailleurs également bizarre, dans le sens positif du terme : elle a les dimensions d'un magazine et contient des illustrations sympathiques. Les illustrations sont l'oeuvre de Maryjo Alinéa, qui recueille et illustre des contes pour enfants. Ceci est notamment le cas pour son fort apprécié "Contes d'ailleurs". Comme son nom figure sur la couverture, séparé seulement par une virgule de celui du premier Nobel russe, j'ai d'abord pensé (bêtement) qu'elle en était la traductrice ! Grosse erreur évidemment, car j'ai découvert qu'outre écrivaine elle est professeur de reiki à Nîmes. le reiki est une méthode de soins non conventionnelle d'origine japonaise. En plus, elle a écrit sur ce thème, il y a 2 ans, une "Initiation gratuite au Reiki Usui 1er degré ".
Et comble de mes surprises, j'ai finalement découvert que Maryjo Alinéa est une des nôtres sur Babelio, sous le pseudo de "cleopatra6" ! Décidément Babelio est un site riche de talents.

Mon épouse m'a expliqué que toutes les jeunes filles de Saint-Pétersbourg à Vladivostok ont lu cette oeuvre de Ivan Bounine de 1925. Et déjà la toute première page m'en fait comprendre la raison : Mitia est heureux comme une cigaĺe (à ce qu'on dit en Provençal) et fier comme un paon que la belle Katia le prend par le bras lors de leur promenade sur le boulevard Tverskoi en direction de la statue de Pouchkine à Moscou. le lecteur démarre donc en plein charme romantique. Et elle ajoute que c'est pour son sourire qu'elle l'aime et pour ses "yeux byzantins". Quoique ce dernier compliment me déroute un tantinet, car elle évoque chez moi l'aveuglement comme punition, comme sur le tableau célèbre de Rembrandt "L'aveuglement de Samson". Mais ce châtiment est certainement loin de ses pensées.

C'est le dernier jour que ce couple de 18 printemps est ensemble, car Mitia doit entreprendre le long périple ferroviaire vers sa famille dans un petit village près d'Orel à 325 kilomètres au sud de Moscou. Heureusement qu'ils doivent se retrouver, à la fin de l'été, pour des vacances en Crimée, sinon cette longue séparation de sa bien-aimée serait à Mitia totalement insupportable.
Comme Orel n'est pas trop loin de Voronej, le lieu natal de l'auteur, cela permet à Ivan Bounine de parler, avec amour et dans une langue singulièrement poétique dont il a le secret, de la nature (en toutes saisons) et de la vie à la campagne russe d'avant la Révolution d'Octobre.

On comprend aisément qu'il fut le premier Russe à être honoré à Stockholm par le prix numéro un en littérature, en 1933, 15 ans avant Boris Pasternak (1958), 22 avant Mikhaïl Cholokhov (1965) et 37 ans avant Alexandre Soljenitsyne (1970). Auxquels il convient d'ajouter, puisque écrivant en Russe, Joseph Brodsky résidant aux États-Unis (1987) et Svetlana Aleksievitch de Biélorussie, en 2015.

Arrivé chez sa mère, Olga Petrovna, son séjour est vite dominé par sa passion pour sa Katia à l'autre bout du monde : inquiétudes, douleurs métaphysiques, mauvaises pensées, souffrances du coeur, sombres sentiments envahissants de pure jalousie ! Comme le note l'auteur (à la page 34) : "... tout c'était transformé comme si la fin du monde était proche, et le charme du printemps, de son éternelle jeunesse, devint misérable et triste. Cela dura longtemps, cela dura tout le printemps..."
Même les petites avances des beautés locales, Sonka et Paracha, flattent l'orgueil de notre héros, mais ne réussissent pas à le sortir de sa longue torpeur de jalousie.

C'est frustrant que je ne puisse continuer mon petit résumé, car j'éprouve des difficultés à tempérer mon enthousiasme pour cette brève perle.
De Ivan Bounine j'avais lu "Le calice de la vie " (1915), "Jours maudits" (1925-1926) et "Les Allées sombres" , un de ses derniers récits autobiographiques, écrit en 1946, 7 ans avant sa mort, à Paris en 1953, la même année que son souffre-douleur Staline et son ami, le grand compositeur Sergueï Prokofiev (tous 2 morts curieusement le même jour d'ailleurs : le 5-3-1953).

Si ces oeuvres précitées m'ont plu, je trouve que "Le sacrement de l'amour" se situe encore à un étage supérieur !
Sans hésitation aucune, je peux donc recommander cette oeuvre à toute lectrice et tout lecteur jeunes ou qui ont gardé le coeur et l'esprit jeunes et qui apprécient une prose si superbement poétique.


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