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Citations sur Le Disciple (86)

Il y a des créatures qui reviennent du mal au bien, qui tombent et se relèvent, qui déchoient et se reconstituent dans leur moralité. Oui, mais il y faut l'illusion du repentir qui suppose l'illusion de la liberté et celle d'un juge, d'un père céleste. Pouvait-il, lui, Adrien Sixte, écrire au jeune homme : "Repentez-vous," quand sous sa plume de négateur systématique, ce mot signifiait : "Cessez de croire à ce que je vous ai démontré comme vrai ?" Et pourtant c'est affreux de voir une âme mourir sans rien essayer pour elle.
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Elle l'a subi (la bourgeoisie) ce suffrage universel, la plus monstrueuse et la plus inique des tyrannies, car la force du nombre est la plus brutale des forces, n'ayant même pas pour elle l'audace et le talent.
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Ce qui distingue essentiellement le philosophe-né des autres hommes, c'est que les idées, au lieu d'être pour son intelligence des formules plus ou moins nettes, sont vivantes et réelles, comme des êtres. La sensibilité chez lui se modèle sur la pensée au lieu que chez nous tous il s'établit un divorce, plus ou moins complet, entre le cœur et le cerveau. Un prédicateur chrétien a marqué admirablement la nature de ce divorce quand il a prononcé cette phrase étrange et profonde : « Nous saisons bien que nous mourrons, mais nous ne le croyons pas. »

Le philosophe, lui, quand il l'est par passion, par constitution, ne conçoit pas cette dualité, cette vie dispersée entre des sensations et des réflexions contradictoires. Aussi n'étaient-ce pas pour M. Sixte de simples objets de spéculation que cette universelle nécessité des choses, que cette métamorphose indéfinie et constante des phénomènes les uns dans les autres, que ce colossal travail de la nature sans cesse en train de se faire et se défaire, sans point de départ, sans point d'arrivée, par le seul jeu de la cellule primitive, que ce travail parallèle de l'âme humaine reproduisant, sous forme de pensées, d'émotions et de volontés, le mouvement de la vie physiologique. Il se plongeait dans la contemplation de ces idées avec une espèce de vertige, il les sentait avec tout son être, en sorte que ce bonhomme assis à sa table, servi par la vieille bonne qui cuisinait à côté, dans un bureau garni de rayonnages encombrés, la mine chétive, les pieds dans sa chancelière, le torse pris dans un paletot râpé, participait en imagination au labeur infini de l'univers. Il vivait la vie de toutes les créatures. Il revêtait toutes les formes, sommeillant avec le minéral, végétant avec la plante, s'animant avec les bêtes rudimentaires, se compliquant avec les organismes supérieurs, homme enfin et s’évanouissant dans les amplitudes d'un esprit capable de refléter le vaste monde.

Ce sont ces délices des idées générales, analogues à celles de l'opium, qui rendent ces songeurs indifférents aux menus accidents du monde extérieur, et aussi, pourquoi ne pas le dire? presque absolument étrangers aux affections ordinaires de la vie. (pp. 18-20)
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Un silence régnait dans cette pièce, coupé par le bruit des papiers froissés et par le craquement de la plume du greffier. Ce dernier se préparait à noter l’interrogatoire avec l’impersonnelle indifférence qui distingue les hommes habitués à jouer le rôle de machines dans les drames de la cour d’assises. Un procès pour eux ne se distingue pas plus d’un autre que pour un employé des pompes funèbres un mort ne se différencie d’un mort, ou pour un garçon d’hôpital un malade d’un malade.
— “Je vous épargnerai, monsieur”, dit enfin le juge, “les questions habituelles… Il y a des noms et des hommes qu’il n’est pas permis d’ignorer…” Le philosophe ne s’inclina même pas sous le compliment. — “pas d’usage du monde, pensa le magistrat ; “ce sera un de ces hommes de lettres qui croient devoir nous mépriser. ” Et tout haut : “J’arrive au fait qui a motivé la citation que j’ai dû vous adresser… Vous connaissez le crime dont est accusé le jeune Robert Greslou.
— “Pardon, monsieur”, interrompit le philosophe en quittant la position qu’il avait prise instinctivement pour écouter le juge, le coude sur le fauteuil, le menton sur la main et l’index sur la joue, comme dans les minutes de ses grandes méditations solitaires, “je n’en ai pas la moindre notion.”
— “Tous les journaux l’ont cependant rapporté, avec une exactitude à laquelle ces messieurs de la presse ne nous ont guère habitués…” répondit le juge, qui crut devoir répondre au dédain de la littérature pour la robe diagnostiqué chez le témoin par un peu de persiflage ; et à part lui : “Il dissimule… Pourquoi ?... Pour jouer au plus fin ?... Comme c’est bête !”
— “Pardon, monsieur”, dit encore le philosophe, “je ne lis jamais aucun journal.”
Le juge regarda son interlocuteur en faisant un “Ah ! ” où il entrait plus d’ironie que d’étonnement. “Bon”, pensa-t-il, “tu veux me faire poser, toi ; attends un peu…” Ce fut avec une certaine irritation dans la voix qu’il reprit :
— “Hé bien, monsieur, je vous résumerai donc l’accusation en quelques mots, tout en regrettant que vous ne soyez pas plus au courant d’une affaire qui peut intéresser gravement, très gravement, sinon votre responsabilité légale, au moins votre responsabilité morale…” Ici le philosophe dressa la tête avec une inquiétude qui réjouit le cœur du juge : “Attrape, mon bonhomme”, se dit-il.
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— « Non, mon père, » reprit le comte André, qui reconnut l’accent du marquis, et qui se tourna vers le vieillard comme écroulé sur son banc. « Je ne suis pas fou… J’ai fait ce que l’honneur exigeait… J’espère, monsieur le président, que l’on m’épargnera d’en dire davantage.

Chapitre VI. Le comte André
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Midi allait sonner à la pendule de cuivre doré, à sujet mythologique, dont s’ornait cette pièce que chauffait à grand’peine un feu allumé dans une cheminée qui fumait. Au dehors, c’était sur la ville une pesée d’un ciel de neige, un de ces ciels d’Auvergne où passe par instant le vent glacial des montagnes.

Chapitre VI. Le comte André
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Il se promenait au Jardin des Plantes, par un après-midi de cette fin de février, tiède comme un printemps. Il s’assit sur un banc, dans son allée favorite, celle qui longe la rue Buffon, et au pied d’un acacia de Virginie, étayé de béquilles de fer, garni de plâtras comme un mur, avec des branches nouées comme les doigts d’un géant goutteux. L’auteur de la Psychologie de Dieu aimait ce vieux tronc desséché de toute sève, à cause de la date inscrite sur la pancarte et qui constituait l’état civil du pauvre arbre… « Planté en 1632… » 1632, l’année de la naissance de Spinoza !

Chapitre V. Tourments d'idées
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Comme elle était jolie dans sa robe de drap clair, et fine, et presque idéale avec sa taille mince, son corsage frêle, son visage un peu long qu’éclairaient ses yeux d’un gris pensif ! Elle ressemblait à une Madone gravée d’après Memling, dont j’avais tant admiré autrefois la silhouette, fervente, gracile et douloureuse, à la première page d’une grande Imitation appartenant à l’abbé Martel.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. IV. Première crise
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J’arrivai à cette conclusion que le trait essentiel de ma nature, la caractéristique de mon être intime avait toujours été, comme je l’ai marqué en commençant le présent travail, la faculté de dédoublement. Cela signifiait une tendance constante à être tout ensemble passionné et réfléchi, à vivre et à me regarder vivre.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. III. Transplantation
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Qu’il était paisible, ce salon, éclairé par les lampes aux larges abat-jour, avec le feu qui brûlait gaiement dans la cheminée !

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. III. Transplantation
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