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EAN : 9782889496624
246 pages
5 sens éditions (15/04/2024)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Issus d’un mouvement anabaptiste, Ivan, Rachel et leur fils Mikhaïl, paysans épris de vérité, engagés dans le mouvement pacifiste tolstoïen, fuient la guerre civile en Russie pour trouver une terre de paix. De rencontres en péripéties, ils vont au-delà de la liberté à laquelle ils aspirent : ils découvrent la voie turquoise de la réconciliation, l’arbre de vie planté jadis par les grand-mères.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Penchée sur un champ de myrtillier, la bouche barbouillée de noir, les pieds nus tachés de bleu et les mains tenant le seau, Eireann écrasait les fruits en riant. La fillette d’un an et demi exigeait l’attention de son frérot encore
incapable de marcher. Mikhaïl, assis ou en rampant, la surveillait pendant que ses parents ramassaient des bleuets. Loin dans la forêt, dans un endroit très reculé, la famille avait établi le camp pour leur premier emploi en terre canadienne. Un mois à peigner ou griffer les baies, tôt le matin et tard dans la soirée, pour se faire un peu d’argent autant que pour soulager leurs hôtes de bouches inutiles. Pour le fiston, l’école commencerait dans une institution religieuse de la ville ; des cours à confesse. Mikhaïl avait trouvé des amis dans le clan Boivin et leurs voisins. Un univers communautaire l’enveloppant déjà de réconfort. Dévoués, garçons et filles se relayeraient pour aider leur camarade à consolider ses jambes ; dans des timides randonnées ou sur le chemin des écoliers. La pauvreté ne permettait pas à leurs parents de se payer une automobile, un poste radio ou un quelconque appareil électroménager ; ni même de sortir dans la grande ville pour des achats ou des séances de cinéma. Locataires de leur ancienne propriété, les Boivins parvenaient à peine à joindre les deux bouts. Rachel cousait et confectionnait des vêtements qu’elle revendrait pour contribuer au loyer et la nourriture. À la fin des travaux agricoles, Ivan bûcheronnerait dans un camp éloigné.
Mikhaïl aimait sa petite sœur. Née dans une collectivité soudée, joyeuse et musicale, elle semblait blasée de paroles en trop. Son œil vif attrapait le moindre détail et, après une longue observation, reflétait la demande qu’elle ne pouvait pas encore exprimer. Lui, en revanche, il le savait, saoulait
les gens par un flot de questions et donnait les réponses avant qu’elles ne se soient formulées. Avec diligence et complicité, il transmettait à sa protégée son pays de naissance, à travers les légendes peuplées d’animaux.
« Tu entends, lui dit-il en commençant comme en Russie, je vais te raconter l’histoire de Macha. »
Le bambin vint s’asseoir sur les genoux de son idole.
« Comme toi maintenant, commença Mikhaïl, elle s’en- fonça seule dans les bois. Jusqu’à une maisonnette vide d’habitants. Elle s’y installa. »
Eireann se régalait déjà du conte tant de fois entendu. Elle vit compère ours réveiller Macha et lui proposer de l’aider à retourner chez elle ; à la condition de chauffer le fourneau, préparer à manger et faire le ménage quotidiennement. Elle échafauda avec la fillette le plan pour se libérer de l’esclavage ; seule dans l’isba et la peur au ventre. Tandis qu’elle confectionnait avec Macha le gâteau que son geôlier apporterait chez ses grands-parents, la persuadant qu’elle le surveillerait du haut d’un arbre alors qu’elle était cachée sous la pâtisserie, dans le grand panier, Eireann vit la bête fourrer son museau dans les myrtilliers ; en vrai et à quelques pas de là. Elle le désigna du doigt en riant. Son frère se figea.
L’imposant ursidé, trop occupé à se remplir la panse ou se rouler dans les arbustes pour chasser la vermine de son épaisse fourrure, semblait ignorer leur présence. Mikhaïl se souvint de ce que ses camarades lui avaient appris en cas de mauvaise rencontre : marcher bruyamment, s’éloigner sans fixer l’ours des yeux, jamais de face, simuler la mort, surtout ne pas courir et, lors d’une attaque, monter sur un arbre. Tant de choses à retenir et si peu de temps pour l’accomplir. En voyant la créature sauvage se mettre debout et
lui lancer ses perles noires, il crut défaillir. Il ne pouvait ni crier, ni carapater ; ses pattes l’enchaînant sur place. Il n’eut alors d’autre choix que de serrer sa sœurette de toutes ses forces et d’attendre que sonnât l’heure du jugement. Après une tentative d’intimidation par un effroyable grognement
à arracher les tripes et le cœur, l’agresseur retomba sur ses griffes et abandonna le combat. Mikhaïl, en reprenant son souffle, s’engagea solennellement à ne plus jamais raconter de légendes.
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