Les données sensibles, plus immédiates et passives, permettent d’appliquer des raisonnements par induction dont la pertinence logique est tout aussi incertaine que ceux de la déduction. Ce qui nous fait soupçonner que les erreurs des sens pourraient parfois être des illusions de la raison elle-même. Cette dernière n’est-elle qu’un artifice ?
Passer de l’idée d’avoir raison à la raison met en lumière l’importance de l’activité proprement argumentative de la raison. On peut en gros distinguer trois acceptions principales du mot raison : 1) la raison est la faculté qui nous rend capable de réfléchir, de penser, de raisonner. 2) Elle est le motif d’une action, l’argument d’une idée, ou la cause d’un fait. 3) « Raison »
apparaît enfin dans « avoir raison », qui indique une conformité – du reste assez problématique – entre le sentiment de certitude et la vérité.
Le plus souvent, avoir raison, c’est s’imaginer que l’on dispose d’une opinion certaine ou que l’on peut l’imposer par la persuasion ou la force : « avoir le dernier mot ». Mais une telle conviction apparaît vite comme peu solide et nous conduit au relativisme : chacun a raison s’il croit avoir raison. D’où la tentation de chercher dans la sensation un critère plus fiable de la vérité. Hélas la sensibilité ne nous permet pas davantage d’échapper au relativisme. En tout ceci, la raison risque de prendre l’apparence d’une opinion parmi d’autres. Toutefois, comme en science, l’idée de prouver ou de démontrer peut nous sauver de l’incertitude, bien que là encore le vrai puisse souvent devenir faux.
Argument : élément de raisonnement ayant pour finalité la mise en évidence de la vérité ou la fausseté d’une proposition.
Scepticisme : attitude contraire, qui considère que rien ne peut être affirmé avec certitude. En conséquence, toutes nos opinions doivent en permanence être remises en question et réexaminées.
Oscar Brenifier | Quatre enfants philosophent