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Critique de Titine75


Face aux bruits et à l'urgence du monde contemporain, Geneviève Brisac a décidé de se plonger dans ses livres préférés. Elle y cherche rêverie et réflexion. Cette dernière se tourne vers un sujet qui lui est cher : les femmes écrivains. Peut-on parler de littérature féminine ?

La question se pose en effet lorsque l'on voit le mépris de grands théoriciens de la littérature envers les femmes. Geneviève Brisac choisit comme exemple le misogyne Nabokov. Ce dernier rechignait à lire Jane Austen. Une fois la chose accomplie, il reconnaît le talent de la demoiselle mais en le minimisant : "De ce panier à ouvrages, écrit-il, sort un exquis travail au petit point, il y a chez cet enfant quelque chose de merveilleusement génial. " le vocabulaire employé par Nabokov parle de lui-même. Pour essayer de répondre à la question de départ, Geneviève Brisac fait appel aux grandes dames de la littérature: Jane Austen, Virginia Woolf, Jean Rhys, Alice Munro, Karen Blixen, Sylvia Townsend Warner, Flannery O'Connor, Marine Tsvetaïeva, Ludmila Oulitskaia ou d'autres moins connues comme Grace Paley ou Rosetta Loy.

Pour Geneviève Brisac, la particularité de la littérature féminine ne tient pas dans le style. La syntaxe et les figures de style ne sont ni l'apanage des hommes ni celui des femmes. En revanche, les thèmes traités sont sans doute différents. Les femmes écrivains n'hésitent pas à parler de ce qui fait leur quotidien. Grace Paley, par exemple, écrit tout simplement sur ce qu'elle voit autour d'elle : les enfants au square, une promenade dans la rue, ce qu'elle aperçoit de sa fenêtre. Rien que de très ordinaire mais elle cherche à percer le mystère, la vérité de la vie à travers ces scènes. La vie est toujours plus complexe et agitée qu'il n'y paraît. Les femmes observent tout cela en faisant un pas de côté, c'est la fameuse marche du cavalier. C'est un terme employé par Nabokov pour décrire l'un des procédés stylistiques de Jane Austen. Il s'agit d'un décalage, d'un recul par rapport à l'action, à ce qui est décrit afin de percevoir la réalité différemment. La littérature féminine explore cela : chercher ce qui constitue l'âme, la conscience, les sentiments. Geneviève Brisac donne une très belle définition de ce que représente écrire pour elle et certainement est-ce le point commun des écrivains dont elle parle : "Écrire : nommer ce que nous vivons d'innommé et d'innommable, de confus. Écrire : interroger cet état somnambule qu'est presque toute vie. Nous ne savons ce que nous faisons, et sommes bouts de bois ramés flotillant sur la mer. L'enfant en nous le sait." Cette définition colle parfaitement au travail de Virginia Woolf qui cherchait à capter les milliers de sentiments qui nous traversent.

A travers ce court mais passionnant essai, Geneviève Brisac rend hommage à la littérature au féminin, à ces voix libres et sincères qui tentèrent de décrire la matière de la vie. Un essai brillant qui donne envie de découvrir tous les romans cités !
Lien : http://plaisirsacultiver.wor..
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