Le benêt du village

Les remords le minaient de l'intérieur. Il en voulait à la terre entière d'être aussi crétin. Il le savait pertinemment qu'il avait joué la comédie pendant des années, afin qu'on le laisse tranquille. Le fait d'être considéré l'idiot, l'étrange, c'était comme une carapace derrière laquelle il se protégeait. Bien entendu, il n'avait pas entièrement inventé ce rôle, on l' avait poussé dès sa plus jeune enfance. Personne n'avait désiré le soutenir et l'en fer sortir. Boiteux et timide vous font rapidement devenir un personnage à part.

André devait avoir du cran : Pour la première fois de sa vie, on lui demandait de prendre des responsabilités, de s'occuper de quelqu'un. Il se devait de réagir positivement, à la fois par obligation, mais surtout par souci familial. Il lui fallait, à son âge, modifier son existence.

Il prit son vélo et s'en alla jusqu'à la rivière. Cela n'allait pas l'empêcher de vivre. En chemin, il pensa que ce serait même la première fois que quelqu'un viendrait manger chez lui depuis le décès de ses parents. Janine et son cher mari n'avaient jamais voulu déjeuner en sa compagnie, lors de leurs courtes visites. Il avaient toujours quelques chose d'urgent à faire.

Le plus dur était passé. André n'en revenait pas, il y était arrivé, il pouvait maintenant souffler. Il s'en voulait énormément de ne pas avoir eu un peu plus d'audace pour aborder avec une conversasion sérieuse avec sa soeur. Il découvrait sa soeur. Que de temps perdu ! Que de mots qui blessent, qui auraient pu être ainsi évités !