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EAN : 9782738130303
275 pages
Odile Jacob (02/01/2014)
2.43/5   7 notes
Résumé :
« Aujourd'hui plus qu'hier encore, l'argent gouverne en maître. J'ai voulu comprendre pourquoi. J'ai cherché et me suis lancé sur les traces de cette énigme. L'argent, on l'adore et on le maudit tout à la fois. J'ai découvert le règne de l'argent fou, de l'argent roi, de l'argent dieu. Et aussi un secret que, vers la fin, je me hasarde à délivrer. » J.-C. C.
Une grande enquête, riche et documentée, où le talent de l'écrivain se conjugue au souffle du pamphlét... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Voilà un curieux petit livre, très malicieux, tout en étant très documenté. Jean-Claude Carrière nous parle de quelque chose que nous côtoyons tous les jours, qu’on utilise quotidiennement, qu’on appréhende d’un point de vue mathématique, mais très rarement de façon philosophique : l’auteur nous raconte une histoire de l’argent.

L’idée de départ est originale : imaginer l’argent comme un personnage.
Un personnage qui naît, vit, se cache, croît et embellit et … meurt ?

Le livre de Jean-Claude Carrière s’ouvre sur ce drame contemporain : il est fini, le temps des amateurs. Les bibliophiles, les amateurs d’art ou de grand vin n’existent plus : ils ont été remplacés par des spéculateurs et des financiers. Aujourd’hui on achète un grand cru pour le mettre dans un coffre et le revendre – surtout pas pour le boire.

Seul Shakespeare avait prophétisé son avènement dans Timon d’Athènes. Et Marx ne s’y est pas trompé qui l’a longuement commenté dans le Capital.

Qui sont les riches ? Que font-ils ? D’un côté l’insatiabilité (Mobutu …), des excès visibles, de l’émulation, de l’admiration qui peut aller de l’autre jusqu’à la vanité ostentatoire et de la pure goujaterie, suscitant alors haine et mépris. C’est même « l’excrément du diable » selon l’expression que lui donna Roman Prodi devant les représentants du Vatican.
Et les pauvres ? Faut-il des pauvres pour que les riches existent ? Ont-ils choisi d’être pauvres ? Faut-il les plaindre ou les blâmer ?
De toute façon, et tout le monde le sait, « l’argent ne fait pas le bonheur ».

L’argent, selon l’auteur, se garderait d’étaler ses succès, il se dissimulerait presque, s’effacerait pour ne pas faire de bruit, et même on peut l’affirmer de manière provocante : « l’argent est notre ami. Il vient à nous en bienfaiteur – et cela, depuis qu’il existe, depuis que nous l’avons créé. Car il est notre enfant, nous ne devons pas l’oublier ».
Iconoclaste, Jean-Claude Carrière ?

S’ensuit donc l’histoire de « l’Etre-argent » comme l’appelle désormais Jean-Claude Carrière, qui commence par les premières banques à Venise, à la fin du Moyen-âge et par une histoire de tulipes en Hollande au début du XVIIème siècle. On va donc croiser John Law, les Fugger, le Maharabharata, le Veau d’or, Job ou encore Adam Smith. En France on croisera Necker et Jacques Cœur. Un banquier ne peut pas être plus riche que son suzerain, sinon il provoque son malheur. Plus tard, on découvre Fourier et Proudhon.
Et enfin Marx. Son principal opposant.

Mais l’argent « laisse dire, laisse écrire ». Et au XIXème siècle, il va trouver son apogée aux Etats-Unis, avec la production d’un vocabulaire qui fera bientôt le tour de la planète : « businessman, best-seller, box-office, blockbuster, deal, bargain, discount. » Et produire alors un nombre impressionnant de milliardaires.

Mais c’est en Russie (et non pas en Allemagne comme l’avait prévu Marx) que l’argent va être attaqué. Ici il est honni et combattu comme emblème de l’ennemi qui porte les valeurs de la démocratie et de l’économie de marché.
Puis va venir la Seconde Guerre Mondiale, et son besoin de reconstruction – donc d’argent. Mais aussi marquer la scission entre deux blocs, avec la guerre froide.

Pourtant, et contre toute attente, l’argent triomphe. Quand le mur de Berlin finit par tomber, l’économie de marché pénètre très vite dans les anciens pays de l’Est.

« C’est alors – mais les commencements de l’entreprise sont sensiblement plus anciens – que l’argent se mit à tisser sa toile sur l’ensemble de la planète, afin de s’y déplacer à l’aise, sans surprise ni obstacle, et même sans bruit, comme une araignée glissant sur ses fils. »
Puissance de l’argent qui va dominer alors toute la planète.

L’auteur dénonce alors l’avidité américaine des années 80, où « Greed is good » avec une lumineuse apologie du cynisme. « L’être-argent » est à son apogée.

Enfin, dans la dernière partie, il est question de la crise qui agite les vieux pays. Que se passe-t-il en Amérique en 2008, et bientôt par contagion en 2009 ? Pourquoi des robots prennent-ils des décisions en une microseconde sans l’intervention humaine ? Pourquoi les économistes n’ont-ils rien vu venir ? Et comment un banquier de Goldman Sachs peut-il reconnaître sans scrupule que : « Nous prenons l’argent aux pauvres. Ils n’en ont pas beaucoup, mais ils sont les plus nombreux. » ?
Quelque chose, à partir de cette date, ne fonctionne plus.

La fin est des plus surprenantes, des plus audacieuses aussi. Mais on laissera les lecteurs la découvrir. Iconoclaste, pétillant et malicieux, Jean-Claude Carrière sait réveiller nos consciences.

L’originalité de son approche réside dans la personnification de l’argent : l’argent qui s’interroge sur sa situation, qui interagit avec les hommes, qui parfois se cache, parfois jubile ou peut même tomber malade.

Scénariste, conteur, romancier, traducteur, éditeur, Jean-Claude Carrière réussit là un essai précis et précieux, qui nous donne à voir une société peut-être à bout de souffle, et nous fait nous interroger sur la posture qui nous anime face à cet « être-argent ». Et c’est édifiant.

Lien : https://www.biblioblog.fr/po..
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L'écrivain héraultais soliloque sur l'argent, sa morale, en a-t-il une ?, sa place dans notre société. En avons-nous fait une sorte de Dieu, est-ce une entité autonome douée d'intelligence ? Il dresse une sorte de théologie de l'argent dans les 80 premières pages de son essai, répond par la négative à la question de la personnalisation et de la déification de la monnaie et construit tout le reste de son livre....comme s'il avait répondu par l'affirmative. Ce qui est grave car en donnant une âme au capitalisme, il occulte voire exonère de leurs responsabilités tous les grands argentiers qui font et défont les crises. Parcourant l'histoire de l'argent, du coquillage aux flux informatiques, il raconte les étapes de sa montée en puissance, oublie curieusement l'importance de la découverte et de la colonisation de l'Amérique du sud dans la naissance du capitalisme moderne, résume rapidement les crises qui ont jalonné l'histoire récente : chute du mur de Berlin, crack boursier de 2008... Mais Carrière n'est pas économiste et ne sait pas décrire les mécanismes financiers à l'origine de ces secousses qui ébranlent nos sociétés modernes. Alors, il tente de philosopher, mais comme il n'en a pas le bagage, il parle de lui...et on s'en fiche. L'écrivain a accouché ici d'un petit pamphlet un peu narcissique dont la lecture se termine en diagonale...A oublier.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
je suis perdu dans une ville inconnue. Je demande mon chemin à un passant. S'il est un habitant de cette ville, s'il connaît le quartier, il me renseigne à la va-vite, avec quelques gestes. Il le fait selon ses propres repères, et je suis de nouveau perdu.
S'il s'agit d'un étranger, d'un touriste, qui a pris soin de consulter un plan avant de se lancer dans les rues de la ville, il me renseigne avec précision (s'il est aimable) et je trouve mon chemin.
Ce livre s'adresse aux voyageurs perdus dans la vaste cité de l'argent, pleine de souterrains, d'impasses, de buildings élevés, de circuits inconnus, de ruelles étranges. Ils y rencontreront un autre voyageur, au départ tout aussi égaré qu'eux-mêmes, mais qui s'est efforcé de se renseigner. Il leur fournira, à leur demande, quelques détails pittoresques sur les détours du labyrinthe et même, sait-on jamais ?, le récit d'une aventure fabuleuse à laquelle ils n'avaient peut-être jamais pensé.
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Longtemps nous l’avons dit volage, indifférent, instable même, s’accumulant toujours sur les mêmes têtes, pas forcément les plus dignes de le recevoir. Nous l’avons dit aveugle (comme l’amour), incapable de discerner et de récompenser la qualité véritable de ses favoris (autrement dit, un peu bête), indifférent, insensible à toute beauté, sans âme, sans cœur et même sans esprit. Nous l’avons dit corrupteur et malfaisant, capable de pourrir les intentions des meneurs de ce monde, cruel et arrogant, fermé à toute pitié, en un mot « inhumain ».
Tout en confondant, en permanence, l’argent et les possesseurs de l’argent, tout en attribuant à l’un les défauts et perversions des autres, nous avons, reconnaissons-le, largement médit de notre ami. Peut-être même l’avons-nous calomnié. Nous avons dit aussi, et nous continuons à dire, qu’il est le plus souvent très mal distribué (comme s’il en était responsable), allant plus volontiers vers la canaille que vers la vertu. Un point qu’il serait vain de discuter.
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Semblable à toutes les divinités qui se sont vainement succédé dans vos sanctuaires, je ne me manifeste jamais tel que je suis, je ne prends jamais directement la parole, je n’apparais pas, je n’impose, de vive et claire voix, aucune sorte de commandement. Je sais que le passage à la forme humaine est la mort des dieux. C’est pourquoi je persiste à me tenir dans l’obscurité et le silence. La transcendance dont on veut m’affubler, je la rejette. Je préfère donner l’impression de ne pas être. En conséquence, je me fais passer pour un simple instrument entre vos mains, un mécanisme de transmission, un outil, un papier, une carte.
Un outil à votre disposition, comme le serait une pince, une machine à coudre.
Rien de plus.
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L'argent est la seule puissance à rester debout dans les décombres de l'Occident. Vers lui nos mains se tendent. En lui nos cœurs et nos idées se perdent"... Cette victoire de l'argent, nous l'acceptons tous sans murmurer. Nous tombons dans le même piège les uns avec les autres, pareils aux aveugles de Bruegheil. Comme tous les goûts sont dans la nature (dans notre nature), comme les critère de qualité et de durée d'une oeuvre varient, se contredisent, se bouleversent et se détruisent, il nous semble normal que l'argent impose les siens.
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Si j’ai décidé, nous dit l’argent, après des origines fumeuses, après des millénaires de modestie et d’échecs variés, de prendre en main votre destin, c’est parce que vous en êtes décidément incapables.
Regardez-vous calmement, attentivement. A votre âge, vous lancez des pyramides de nuages, des palais d’illusion, vous persévérez à vous prosterner devant des fantômes, des dieux, des prophètes, des chats noirs, des nombres idiots, des astres égarés dans le ciel, alors que je suis là, moi, concret, palpable, pratique et amical. Et vous ne me voyez pas tel que je suis, vous dites souvent du mal de moi, vous me prenez encore pour ce que je ne suis pas, raison pour laquelle j’ai choisi la voie souterraine pour m’imposer, et pour travailler à votre bien presque à votre insu.
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Vidéo de Jean-Claude Carrière
Louis Garrel est toujours où on ne l'attend pas ! Avec La croisade qui, avant sa sortie en salles le 22 décembre, fait partie de la section éphémère "Le cinéma pour le climat" du Festival de Cannes, il s'aventure, avec bonheur, dans le conte écologique, insolent et juvénile.
Abel (Garrel lui-même) et Marianne (Laetitia Casta) découvrent que leur fils Joseph (Joseph Engel, déjà à l'affiche de L'homme fidèle) a vendu en douce leurs objets les plus précieux. Comme d'autres enfants à travers le monde qui se sont donnés pour mission de sauver la planète. ils sont des parents modernes, compréhensifs, qui veulent bien faire le tri entre poubelle bleu et verte, certes, mais tout de même : « Quoi ??? Tu as vendu toutes mes montres de collection ! » hurle papa. « Tu n'as tout de même pas vendu ma petite robe Dior ??? » se désespère maman…
Dernier scénario du grand Jean-Claude Carrière (déjà à l'oeuvre sur L'homme fidèle), cette Croisade débute en chronique anticonsumériste hilarante et riche en autodérision pour fuguer vers une vraie carte ( verte) du tendre où une foi, certes candide, mais vitale, dans l'engagement écologique mènera un groupe d'enfants et Laetitia Casta (décidément magnifique quand elle est filmée et joue au naturel, 100% bio) en plein désert … Une petite bouffée d'oxygène avec de vrais particules de cinéma.
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