Les récits […] traversent et […] organisent des lieux ; ils les sélectionnent et les relient ensemble ; ils en font des phrases et des itinéraires. Ce sont des parcours d’espaces.
[…] Ces lieux sont liés entre eux de façon plus ou moins serrée ou facile par des « modalités » qui précisent le type de passage conduisant de l’un à l’autre […] Tout récit est un récit de voyage, - une pratique de l’espace.
Le style, cette manière de marcher, geste non textuel, organise le texte d'une pensée.
Seule la fin d'un temps permet d'énoncer ce qui l'a fait vivre, comme s'il lui fallait mourir pour devenir un livre.
La recherche publiée partiellement en ces deux volumes est née d'une interrogation sur les opérations des usagers, supposés voués à la passivité et à la discipline.
Cet essais est dedié à l'homme ordinaire. Héros commun. Personnage disséminé. Marcheur innombrable. En invoquant, au seuil de mes récits, l'absent qui leur donne commencement et nécessité, je m'interroge sur le désir dont il figure l'impossible objet. A cet oracle confondu avec la rumeur de l'histoire, que demandons-nous de faire croire ou de nous autoriser à dire lorsque nous lui dédions l'écriture que jadis on offrait aux divinités ou aux muses inspiratrices ?
Cet héros anonyme vient de très loin. C'est le murmure des sociétés. De tout temps, il prévient les textes. Il ne les attends même pas. Il s'en moque. Mais dans les représentation scripturaires il progresse. Peu à peu il occupe le centre de nos scènes scientifiques. Les projecteurs ont abandonné les acteurs possesseurs de noms propres et de blasons sociaux pour se tourner vers le choeur des figurants massés sur les côtés, puis se fixer enfin sur la foule du public. Sociologisation et anthropoligisation de la recherche privilégient l'anonyme le quotidien où des zooms découpent des détails métonymiques - parties prises par le tout. lentement les représentants hier symbolisateurs de familles, de groupes, et d'ordres s'effacent de la scène où ils régnaient quand c'était le temps du nom. Le nombre advient, celui de la démocratie, de la grande ville, des administrations, de la cybernétique. C'est une foule souple et continue, tissée serré comme une étoffe sans déchirure ni reprise, une multitude de héros quantifiés qui perdent noms et visages en devenant le langage mobile de calculs et de rationalités n'appartenant à personne. Fleuves chiffrés de la rue.
Pourquoi écrire, sinon au titre d'une parole impossible ? Au commencement de l'écriture, il y a une perte. Ce qui ne peut se dire - une impossible adéquation entre la présence et le signe - est le postulat du travail toujours recommençant qui a pour principe un non-lieu de l'identité et un sacrifice de la chose.
arts de faire se propose de décrire les pratiques quotidiennes qui produisent sans capitaliser c'est-à-dire sans maîtriser le temps; point de départ car foyer exorbité de la culture contemporaine et de sa consommation : la lecture. Notre société cancérise la vue; épopée de l'oeil, pulsion de lire.
prolifération "disséminée" de créations anonymes et périssables qui font vivre et ne capitalisent pas
sa pensée essaie de trouver sa voie et son objet, déjà elle a identifié sa question véritable "la question indiscrète" : "comment se créer ?" substitué à ce qui avait été l'impérieuse urgence "créer quoi et comment ?"
Le quotidien s'invente avec mille manières de braconner.