Je le redirai à chaque tome, pour apprécier la série "Vasco" à sa juste valeur il faut accepter les us et coutumes de la BD franco-belge à l'ancienne ici version
Hergé (et/ou être passionné d'Histoire, franchement ça aide beaucoup), donc pas la peine de râler sur tel ou tel truc qui appartiennent à une autre époque de la bande dessinée où les auteurs n'avaient guère leur mot à dire face aux préjugés d'une autre époque encore plus ancienne à laquelle appartenaient leurs éditeurs… Voilà pour la mise au point !
Ce 5e tome intitulé "Les Barons" et paru en 1987 aurait pu être nommé « Les Maîtres-chanteurs de Nuremberg »… Pour des raison de confidentialité, le Burgrave Hohenzollern a préféré emprunter aux banquier italiens plutôt qu'allemands mais le voici à cours de liquidités et de bijoux de famille à solder. Vasco est donc missionné pour évaluer si leur client est encore solvable vu que celui-ci se refuse à vendre ses terres et ses titres alors que ce dernier est victime de chantage depuis des années et des années (ses fils Frédéric et Rudolf étant accusés d'avoir brûlé vif un trentaine de villageois pour des motifs aussi égotiques aussi futiles que vulgaires). Dès les premières pages il est abandonné en pleine forêt par ses hôtes et est sauvé d'une meute de loup par Jorg le braconnier censément être le présumé maître-chanteur de la famille Hohenzollern…
Un tome bien rempli et bien construit : le Burgrave est antipathique à souhait, ses fils sont trop bêtes pour être de fins criminels, Jorg fait tellement figure d'intermédiaire voire de menu-fretin qu'il y a forcément un commanditaire derrière lui, et ce n'est pas Birgitt la fille du forgeron devenue muette suite au drame qui va renseigner notre enquêteur italien. Pour ne rien gâcher la tension monte entre l'aristocratie et la bourgeoisie quand le Burgrave convoqué par les élites autoproclamées de Nuremberg fait quasiment le siège de la ville, et on entre dans la lutte des classes quand le Burgrave fait entrer le prolétariat dans le conflit ! Et puis nous sommes en plein carnaval où toutes les valeurs et toutes les hiérarchies sont inversées avec des gens masqués qui déambulent et chahutent dans toutes les rues de la ville, et puis il y a un Roméo noble et une Juliette roturière qui essayent de convaincre leurs familles respectives de les laisser vivre leur amour au grand jour… Et au final on se doute bien que derrière tant de haine il y a forcément une histoire de vengeance ! Alors évidemment en 48 pages on ne peut pas multiplier inconsidérément les personnages pour créer des fausses-pistes génératrices de suspens supplémentaire, donc fatalement on finit par deviner plus ou mois tôt l'identité du véritable maître-chanteur, le bourreau qui cache encore plus de lourd secrets que sa victime pour la simple raison que les événements l'ont fait passer de victime à bourreau…
Dégoûté par la vérité, Vasco quitte les lieux du drame en pleine révolution sociale. Quel gâchis pour les personnages mais quel album pour lecteurs, sans doute l'un des meilleurs de la série !
PS : le fait que sur Babelio Sachenka soit le seul en plus d'être canadien à avoir chroniqué cette série historique à tous les sens du terme de la BD franco-belge est à la limite du scandale !