La Chambre est le premier roman que j'ai lu de
Françoise Chandernagor. Dès les premières pages, j'ai ressenti l'irrésisitible envie de découvrir ce récit: l'auteur a plus d'une corde à son arc, et adopte la plume d'une historienne, d'une romancière et d'une chroniqueuse.
La Chambre, c'est l'autopsie d'une destruction, de l'anonymat. Au coeur de la Révolution française, Louis-Charles, le plus jeune enfant de
Louis XVI et de
Marie-Antoinette, emprisonné dans la prison du Temple, vit reclut dans une pièce exiguë. Et voici comment débute une inextricable descente aux enfers: l'enfant bénéficie d'abord de la surveillance de gens qui se soucient à peine de lui. C'est le prélude à la solitude. Puis vient le temps ignominieux de l'infâmie, lorsque l'on découvre que l'enfant a des occupations autoérotiques. On décide d'exploiter cette trouvaille afin de compromettre sa propre mère, qui fut lâchement accusée d'inceste. Puis le temps s'écoule et accompli son office inéluctable. Cloîtré dans la pénombre, seul, l'enfant régresse vers un état végétatif. Il "hiberne", expliquent ceux qui vivent à quelques pas de sa chambre. L'enfant perd son langage, et vit dans les immondices. Il ne grandit plus. D'ailleurs, a-t-il encore un future, ce malheureux que l'on a privé de son enfance?
Françoise Chandernagor explique dans sa postface que son objectif était de "parler du mal -le mal ordinaire, celui que commettent distraitement , presque inocemment, des hommes comme tout le monde- et parler des chambres: nos murs, nos haines, nos solitudes, nos tombeaux". L'écriture de l'auteur est puissante. J'en suis arrivé à visualiser cette chambre "au papier fleuri", dotée des gravures sur ses murs. Après avoir lu ce récit, j'ai voulu en savoir plus sur cet enfant fantôme dont personne, jadis, ne soupçonnait la déchéance. Aussi ai-je fureté ça et là afin de récolter des ouvrages afin d'en apprendre davantage. Bien que romancé, le récit de
Françoise Chandernagor abrite une part indénibale de vérité qui vous donne à réfléchir une fois que vous en avez achevé la lecture. Je crois que nous devrions tous le lire afin de prendre conscience de la barbarie que fut la Révolution française, surtout lorsqu'on sait sur quoi elle aboutit (je veux parler du temps de la Terreur, de la fin de
Robespierre et de
Saint Just)...