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Africa Dreams tome 2 sur 4
EAN : 9782203034280
48 pages
Casterman (22/02/2012)
3.84/5   40 notes
Résumé :
1897. Dans le port d’Anvers, on charge et on décharge les vapeurs qui "font le Congo". Cargaisons d’ivoire et de caoutchouc d’un côté, d’armes et de chaines de l’autre… Car en dépit du nom officiel de cette lointaine possession africaine – E.I.C., pour Etat Indépendant du Congo –, c’est bien le Roi Léopold qui en est l’unique propriétaire légal. Et sa consigne est claire : rentabiliser au mieux et au plus vite cette immense colonie, quitte à y faire régner l’arbitra... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Et comme me disait mon père, c'est à armes égales qu'il fallait se battre contre les hypocrites.
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Ce tome est le deuxième d'une tétralogie, indépendante de toute autre. Il fait suite à Africa Dreams, tome 1 : L'ombre du roi (2010) qu'il faut avoir lu avant. Sa parution originale date de 2012. Il a été coscénarisé par Maryse & François Charles, dessiné et mis en couleurs par Frédéric Bihel. Il comprend quarante-six pages de bande dessinée.

En 1897, dans le port d'Anvers, un navire décharge sa cargaison pour l'État indépendant du Congo, l'entreprise qui exploite les ressources de ce pays. Il s'agit de nombreuses caisses contenant des chaînes. L'opération est inspectée par Edmund Dene Morel, un employé de l'entreprise britannique Elder Dempster. Il est observé à la dérobée depuis les fenêtres d'un bureau, par monsieur Stuurewagen, haut dirigeant de l'EIC. Ce dernier interroge son assistant : qui est vraiment ce Morel et pourquoi Liverpool l'a choisi malgré sa jeunesse ? le secrétaire répond : son employeur a toute confiance en Morel et l'envoie régulièrement pour contrôler le chargement et le déchargement des vapeurs qui font le Congo. Stuurewagen décide de le recevoir dans son bureau. Il lui demande si tout va comme il veut. Morel répond qu'il est étonné. Elder Dempster reçoit du caoutchouc et de l'ivoire, envoie des soldats et des armes pour maintenir l'ordre, et aussi des chaînes. À quoi servent les chaînes ? Son interlocuteur essaye de détourner son attention en lui suggérant qu'il pourrait prétendre à un poste plus en rapport avec ses compétences, un poste qui lui permettrait de rester plus souvent auprès des siens en Angleterre, et qui doublerait son salaire.

Au Congo belge, Niundo avait accepté d'accompagner Paul Delisle, jeune missionnaire, jusqu'au nord-ouest du lac Tanganyika où se trouvait Kibanga, la mission des Pères Blancs d'Alger. Puis, ne désirant pas rencontrer les démons blancs, il s'en était retourné vers la plantation M'Bayo. La mission vivait en complète autarcie. Son potager, ses champs de maïs, de sorgho et de tabac, son élevage de poules et de bétail, en faisaient un des établissements les plus prospères de la région. Paul se présente au père Camille, et se confesse quelques temps après. le père l'admoneste : il ne comprend pas comment Paul peut calomnier leur ordre et leur roi. le jeune missionnaire a été appelé par le Seigneur pour évangéliser les sauvages d'Afrique et non pour critiquer les méthodes employées par la Force Publique. le père Camille continue : les nègres sont de race inférieure et Paul sait comme lui qu'ils sont paresseux, indolents, chapardeurs, retors, sans aucune morale. En un mot, ce sont des païens indignes de confiance. Certains d'entre eux pratiquent encore le cannibalisme, c'est tout dire ! le père lui pardonne et l'absout de ses péchés, mais il faudra que Paul prie beaucoup et faire jeûne pour retrouver la pureté de son âme. Ils sortent dans la cour, au grand soleil. le père Camille accueille une expédition qui est de retour. Deroo, le responsable de l'expédition rend compte : beaucoup de pertes cette fois, près des trois quarts des enfants africains sont morts, les fièvres, un trajet pénible semé d'embûches.

Une superbe illustration en pleine page pour ouvrir ce récit : une vue en élévation d'un quai du port d'Anvers, la capitainerie, les grues en train de débarquer le chargement, les charrettes à cheval venant prendre les caisses, les cargos amarrés, les voiliers, un navire avec son bateau pilote, quelques mouettes ou goélands. Au fil des séquences, l'artiste consacre du temps à composer des images mémorables. le bureau principal de l'EIC avec son parquet, ses tentures ses grandes vitres, ses pupitres avec des registres, un poêle à charbon au centre, une maquette de trois-mâts, des tableaux accrochés au mur dont un du roi Léopold II, le lecteur prend le temps parcourir toute la pièce du regard. le bureau de monsieur Stuurtewagen dispose de sa propre décoration, avec des meubles plus luxueux, une grande carte murale du Congo, une pendulette, un coffre-fort, un fauteuil cuir, des statuettes africaines, une lampe de bureau ouvragée, etc. L'artiste compose également de magnifiques paysages, par exemple la première vision du Congo, au bord du fleuve avec un ciel allant de l'ocre au gris et des rives verdoyantes, en fort contraste avec la grisaille du port d'Anvers dans la page précédente. La représentation de l'intérieur des serres royales de Bruxelles coupe le souffle par leur hauteur. le lecteur se dit qu'il aurait bien accompagné à vélo le roi Léopold se rendant en tricycle adulte chez son amante la baronne de Vaughan, parcourant la promenade le long de la plage et de l'océan à Ostende. Il savoure également la chaleur de l'éclairage artificiel des Folies Bergères à Paris.

L'artiste semble avoir gagné en confiance par rapport au premier tome avec une narration visuelle disposant de découpages très équilibrés, entre les moments descriptifs, les moments focalisés sur les personnages en gros plan, et les moments d'atmosphère. L'histoire continue de se focaliser sur l'exploitation du peuple congolais par le gouvernement du roi des Belges, une main d'oeuvre bon marché réduite au travaux forcés, un euphémisme pour un esclavage de la pire espèce. le dosage des éléments visuels et la conception des plans de prise de vue racontent admirablement bien chaque moment en fonction de sa nature. En planches seize et dix-sept, l'artiste montre d'abord les consignes du roi Léopold II pour améliorer la production et limiter les investissements, des images dans les serres royales, et l'évocation des travaux de voies de chemin de fer au Congo, puis il montre un pont métallique franchissant une rivière, les ouvriers pelletant dans de petits wagonnets, de type Deauville, à flanc de montagne et enfin la locomotive qui progresse tirant lesdits wagonnets, répondant au modèle réduit dans la page en vis-à-vis, se trouvant dans les serres. Les scénaristes consacrent également des passages à Paul Delisle : l'artiste réalise une planche dépouillée, avec des camaïeux reprenant les couleurs de la chapelle, quand il se confesse au père Camille, focalisant ainsi l'attention du lecteur sur ce qui joue dans l'esprit des deux hommes. Plus loin, le lecteur partage la détresse du frère Lucien-Marie entamant une relation amicale avec Paul, une forme de souffrance émotionnelle dans le regard. À Ostende, le lecteur n'en croit pas ses yeux en découvrant la lueur égrillarde dans le regard du roi Léopold quand son secrétaire mentionne son rendez-vous avec la baronne de Vaughan. Il sent les larmes lui monter aux yeux quand il voit Roger Casement avec le regard embué, ne pouvant émettre aucune objection au spectacle des chefs de tribus des environs et de leur famille, contraints et forcés de danser pour lui, sous peine qu'ils soient affreusement punis. Régulièrement, le lecteur se sent emporté par une atmosphère particulière : la lumière grise du port d'Anvers au-dessus de la Mer du Nord, l'horreur de l'eau teintée de sang du fleuve Congo après qu'un hippopotame ait été abattu, la douceur d'une forêt du pays de Galle, celle d'un feu de cheminée dans un appartement de Londres. L'agitation de la mer d'Irlande au large du port de Liverpool. La majesté d'un vieil éléphant, réduit à une petite silhouette dans un paysage embrumé d'Afrique.

La narration visuelle apporte une identité très particulière à cette reconstitution historique de la colonisation du Congo belge. Les auteurs ont construit leur récit en une quinzaine de séquences, dont celles mettant en scène le frère Paul Delisle qui continue de découvrir l'étendue des atrocités commises par les colons, ainsi que des personnages historiques. le lecteur retrouve le roi Léopold II qui est mis en scène comme le décideur responsable de cette exploitation où seul compte le profit capitaliste. Il découvre Edmund Dene Morel (1873-1924, écrivain et journaliste), Roger Casement (1864-1916, diplomate britannique au Congo), et le révérend William Henry Sheppard (1865-1927), missionnaire presbytérien, américain de l'Alabama. Par ces trois hommes, et certainement d'autres dans la réalité historique, les exactions commises par la Force Publique et par les autorités belges au Congo commencent à être portées à la connaissance du grand public.

Les époux Charles se sont basés sur une quarantaine d'ouvrages pour relater le mode d'exploitation des ressources du Congo belge (importation d'ivoire et de caoutchouc, les gisements de cuivre à ciel ouvert, et peut-être d'or), les responsabilités de Léopold II (1835-1909) dans cette politique de colonisation, les mécanismes de décision permettant aux entreprises d'exploiter la main d'oeuvre sur place, de piller les ressources, de faire fonctionner l'exportation, d'importer les produits nécessaires au Congo belge, un banquier s'extasiant auprès du roi des Belges d'un taux de 700% de bénéfices annuels. En parallèle, Paul Delisle assiste, et parfois participe à l'esclavage de la population africaine, faute de savoir dans quelle situation il se trouve, appartenant à une mission. D'un côté se trouvent des individus engagés dans une entreprise capitaliste, faisant de leur mieux pour satisfaire leurs commanditaires, pour se montrer efficaces avec les moyens que le système met à leur disposition. de l'autre côté, des individus ne se sentent pas légitimés par le système pour considérer les peuples autochtones comme des êtres humains de seconde zone. Il leur est alors impossible de concilier la souffrance humaine avec les diktats capitalistes, avec un objectif de profit à tout prix, en particulier au prix de vies humaines.

Le premier tome commençait par l'émerveillement d'un enfant visitant le musée royal de l'Afrique centrale, de Tervuren en 1960, pour ensuite raconter cette colonisation avec des yeux d'adulte. Ce deuxième tome commence par transporter le lecteur dans chaque lieu, auprès de personnages incarnés, montrant clairement les situations et les actions, avec une narration visuelle d'une qualité exceptionnelle. Progressivement, le lecteur voit se cristalliser l'horreur ressentie par plusieurs occidentaux de la société civile qui alertent petit à petit l'opinion publique. Formidable.
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A cheval sur le XIXème et le XXème siècle :

« Paul… Comment osez-vous calomnier notre ordre et notre roi ?!... Vous avez été appelé par Notre Seigneur pour évangéliser les sauvages d'Afrique et non pour critiquer les méthodes employées par la Force Publique !... Les nègres sont de race inférieure et vous savez comme moi qu'ils sont paresseux, indolents, chapardeurs, retors, sans aucune morale. En un mot, des païens indignes de confiance ! Certains d'entre eux pratiquent encore le cannibalisme !... C'est tout dire !...
« Paul, vous avez fait fi de vos voeux d'obéissance ! Et tout ça pourquoi ?!... Pour essayer de retrouver votre père et ses idées subversives !... Vous voulez devenir comme lui ? Un homme sans foi ni loi ? Un mécréant ? Un criminel ?!...
« Par égard pour votre jeunesse et pour madame votre mère qui a toujours soutenu notre travail missionnaire, je vous pardonne vos égarements et vous donne une chance de vous racheter : je vous absous de vos péchés… Mais il faudra beaucoup prier et faire jeûne pour retrouver la pureté de votre âme. J'y veillerai. »

« C'est le caoutchouc qui est responsable de tout cela. Il vous en faut toujours plus ! Alors, les Noirs, au lieu d'inciser les lianes, les fendent profondément pour recueillir plus de sève, ce qui tue la plante et les oblige à toujours s'enfoncer plus loin dans la forêt pour en trouver d'autres… Savez-vous que le travail forcé leur prend 25 jours par mois ? Comment voulez-vous qu'ils s'occupent de leurs cultures ? »

Pendant ce temps, le roi Léopold II de Belgique :
« - Hum… trop mûre pour moi, mon cher Auguste !.. – Voyons, Léo, elle n'a que 23 ans !... – C'est bien ce que je disais… »
Ou encore :
« Des mains coupées ?! C'est idiot ! Je leur ferais bien couper tout le reste mais pas les mains. Comment pourraient-ils alors travailler pour moi ? »
Enfin :
« 700% de bénéfices annuels à ce que l'on raconte !... Sacré Léo ! Et vous vous étonnés d'avoir des ennemis ! Mais… ce que dit la presse sur toutes ces atrocités qui auraient été commises là-bas… Est-ce que ce n'est pas un peu gênant ? – Ernest, dans la vie, il faut savoir ce que l'on veut !... »

1960 – L'instituteur à ses élèves (tome 1)
« C'est notre grand roi Léopold II, dit le roi bâtisseur, qui a donné le Congo à la Belgique… Il l'avait d'abord acheté, de ses propres deniers, pour apporter la civilisation à ceux qui étaient alors des sauvages… et aussi pour entreprendre chez nous des travaux colossaux qui allaient embellir notre petite patrie… En nous offrant ce pays 80 fois plus grand que le nôtre, Léopold II a légué à la Belgique un nouvel essor économique et une véritable prospérité. »

Merci à Maryse et Jean-François Charles de rappeler aux Belges ce qui s'est réellement passé au Congo.

Merci à Frédéric Bihel pour ses splendides aquarelles.
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J'avais précisé, lors du commentaire sur le premier album, que je n'irai pas plus loin dans la série, mais il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis. J'ai du coup relu le premier tome dont j'avais conservé un souvenir très noir. Ce souvenir s'est un peu éclairé avec le temps, mais on est plus proche du "Au coeur des ténèbres" de Conrad que de "la ferme africaine de Blixen". Dans ce second tome tr-ès accusateur vis à vis du colonialisme, on découvre que le diable n'est pas forcément là où l'on croit et que les religieux ont pu cautionner un pouvoir et des méthodes ignobles pour de basses raisons. le graphisme, bien que noir est très élégant et l'intrigue bien construite. Cette dernière est assez politique.
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Au Congo Belge, après un passage à la plantation de son père, voilà Paul qui retourne à la mission. Et quand il décrit les horreurs dont on lui a parlé, le père le rabroue aussitôt. Non, lui dit-il, les noirs ne subissent pas mauvais traitements. Mais il va être témoin d'une tout autre réalité... En Europe aussi les conscience commence à s'éveiller et des voix dénonçant ces exactions vont d'élever contre la politique du roi Léopold.
Cette bande dessinée, bien que romancée, est un terrible témoignage sur la colonisation du Congo avec toutes ses dérives, toutes ses personnes qui ferment les yeux ou pire qui les favorisent, et les quelques courageux qui tentent de faire changer les conscience.
A une lecture agréable nous racontant l'histoire de ce pays africain, s'ajoute de superbes aquarelles.
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Comme le laisser entendre le premier tome, celui-ci est plus politique sur la situation au Congo. Sur ce qui se passe sur place, sur les décisions du roi et les premiers défenseurs des indigènes. Très instructif et prenant.
Pour aborder les différents aspects, on suit différents personnages pour un récit complet. On délaisse un peu Paul qui n'est plus le centre de cette histoire.
Les dessins sont vraiment très beaux. Les paysages sont poétiques. Les visages expressifs. Il y a un beau travail de lumière qui rend le tout spectaculaire.
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critiques presse (3)
BDGest
27 mars 2012
Cet album au réalisme saisissant et aux couleurs directes judicieusement exploitées par Frédéric Bihel, sait créer une atmosphère pesante et lourde, comme peut l’être le climat équatorial ou… le malaise suscité par ce capitalisme outrancier !
Lire la critique sur le site : BDGest
ActuaBD
26 mars 2012
Tout en présentant dans le même temps les débuts d’une dénonciation bien faible en comparaison aux exactions imposées à la population congolaise, l’album profite d’un merveilleux graphisme, qui tranche avec la noirceur de sa thématique.
Lire la critique sur le site : ActuaBD
Sceneario
27 février 2012
Si la bande dessinée reste romancée, elle ressemble plus à un documentaire qu’à un récit d’aventure.
Lire la critique sur le site : Sceneario
Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Les véritables travaux de construction avaient commencé en juillet 1890, après une minutieuse recherche sur les différentes façons d’aborder les cols et la traversée des rivières tout en respectant à la lettre les consignes de la Compagnie en plein accord avec les desiderata du roi. Si l’on se passait de viaducs et de tunnels, le trajet ne pouvait être que sinueux. Il ne faudrait donc pas rouler à trop grande vitesse, construire une voie à fiable écartement, ce qui réduirait la charge utilise mais aussi de façon appréciable, les dépenses. Dans son palais de Laeken, Léopold pouvait être satisfait : 15 millions de francs avaient été réunis par les banques belges, trois banques allemandes et quelques financiers britanniques. À cela s’ajoutaient 10 millions de francs investis par le gouvernement. Deux ans plus tard, même si l’on avait franchi la Mpozo, il n’y avait encore que 8km de voie ferrée construits. Pourtant, les techniques employées s’étaient adaptées à la réalité du terrain. Une voie était posée provisoirement au fur et à mesure du déblaiement et permettait le passage d’une petite locomotive avec ses wagons, tous légers et démontables, de type Deauville, de façon à évacuer les terres ou amener des roches de remblai. On procèderait ensuite au placement définitif de la voie. Sur le plan humain, le chantier se révélait être une hécatombe. Près d’un millier d’hommes était mort depuis le début des travaux des suites d’accidents, de fièvres et de mauvais traitements.
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Il y avait à la mission un autre jeune séminariste, Lucien-Marie. Chaque fois que je le rencontrais, il me souriait et me saluait de quelques mots aimables, tandis que moi, je gardais mes distances comme me l’avait conseillé le père Camille. Lucien-Maris semblait toujours souffrir exagérément de la chaleur et était fréquemment en proie à de fortes fièvres. Pourtant le climat de Tanganyika, exceptée la zone du marais située à l’extrême nord, était l’un des plus salubre de tout le Congo, sans doute à cause de l’altitude de cette région et de la fréquence de ses vents. Alors que je venais de donner classe à mes petits nègres indisciplinés, un bruit terrible et insolite se fit entendre. On aurait dit un chariot lourdement chargé lancé à folle allure. […] Soudain le bruit s’intensifia, et je compris. La terre grondait. J’avais entendu parler de ces tremblements de terre, principalement en Asie, qui anéantissaient des populations entières en quelques minutes. Je recommandai mon âme à Dieu.
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Les Africains ne sont pas, comme on le pense, des sauvages reconnaissants envers nos états pour leur avoir apporté la civilisation. Ce sont des hommes vivant comme nous, dans des sociétés organisées, bien que différentes des nôtres et que certains colons et missionnaires, font voler en éclats. Pire encore, ces pauvres gens déstabilisés se voient contraints au travail forcé qui n’est rien moins qu’un esclavage déguisé, pour servir un capitalisme absolu. Nous parlerons aujourd’hui des indigènes de l’État indépendant du Congo, état fondé sur l’utilisation de cette main-d’œuvre réduite en esclavage pour la collecte du caoutchouc. Et maintenant, je laisse la parole à celui que vous attendez tous, Edmund Dene Morel.
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Tous les chefs des tribus des environs et leurs familles étaient venus, contraints et forcés pour danser devant moi. Si j’émettais la moindre objection, je savais qu’ils seraient affreusement punis. Alors je me taisais, mais j’en avais les larmes aux yeux. Il y avait deux Congo : celui que j’avais connu jadis et celui d’aujourd’hui, vivant dans la terreur du caoutchouc. Partout, ce n’étaient que des villages abandonnés, détruits, incendiés. De pauvres hères à qui l’on prenait la dignité et la vie. Autrefois, j’avais été témoin de quelques exactions, mais ceci dépassait en horreur tout ce que l’on pouvait imaginer… et c’était devenu monnaie courante. Six mois plus tard, je m’embarquai à Boma pour regagner l’Europe et préparer mon rapport. Je savais que, pour moi, rien ne serait jamais plus comme avant.
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Dès le retour de Stanley en 1884, le roi Léopold avait envisagé la construction d’un chemin de fer reliant l’embouchure du Congo à son immense bassin navigable. On éviterait ainsi les pontages nécessaires le long de la partie du fleuve entravée de rapides et de rochers, et gagnerait un temps appréciable pour livrer le caoutchouc au port de Matadi.
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Vidéo de Jean-François Charles
Dans le 152e épisode du podcast Le bulleur, on vous présente La sage-femme du roi, album que l'on doit au scénario d'Adeline Laffitte, au dessin d'Hervé Duphot et c'est édité chez Delcourt dans la collection Mirages. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec : - La sortie de l’album Deviens quelqu’un ! Que l’on doit à Daniel Blancou et aux éditions Sarbacane - La sortie de l’album Dehors ! que l’on doit au scénario de Ludovic Piétu, au dessin de Jika et c’est sorti aux éditions Rouquemoute - La sortie du cinquième tome de la série Stern que l’on doit au scénario de Frédéric Maffre, au dessin de son frère Julien Maffre, un cinquième tome baptisé Une simple formalité qu’édite la maison Dargaud - La sortie de l’album L’animateur que l’on doit à Juanungo et aux éditions Delcourt dans la collection Shampooing - La sortie de L’incroyable histoire de la bière que l’on doit au scénario de Benoist Simmat, au dessin de Lucas Landais et c’est sortie aux Arènes BD - La sortie de l’intégrale de War ans dreams que l’on doit au scénario conjoint de Maryse et Jean-François Charles dont ce dernier en signe aussi le dessin, une intégrale sortie chez Casterman.
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