Lorsque nous nous parlons,
Le rêve est à venir:
Lorsque nous nous taisons,
Il est là, à cueillir.
Au crépuscule, la nature exténuée
S'abandonne. Quelques corbeaux affamés
Picorent encore les restes du jour
Dans l'assiette ébréchée du couchant.
Le chat …
Le chat a enjambé le muret,
Le merle a survolé le peuplier,
L’homme s’est souvenu de la démarche
D’une femme... Une vie sur terre est passée.
Toute la patience terrestre…
Toute la patience terrestre,
Toute la pression marine,
Pour que se change en toi, perle,
Une lointaine larme de lune.
Qui accueille s’enrichit, qui exclut s’appauvrit.
Qui élève s’élève, qui abaisse s’abaisse.
Qui oublie se délie, qui se souvient advient.
Qui vit de mort périt, qui vit de vie sur-vit.
Un iris,
et tout le créé justifié;
Un regard,
et justifiée toute la vie. (p. 106)
Entre tous les départs, choisissons le retour,
Au centre des retours, refaisons le voyage.
Dans les sillons de cent soleils perclus d'amour,
La source du regard fixera nos visages.
à Mohammed
Ton âme, tu la sais sans la voir, mais tu vois
Celle d'un autre quand il s'émeut ou se confie.
Miracle des regards croisés, fenêtre ouverte :
Voyant l'âme de l'autre, tu vois la tienne propre.
L'immense nuit du monde
semée de tant d'étoiles,
Prendrait-elle jamais sens
hors de notre regard.
Scintillement de l'être. par la fente
d'un volet mal fermé ;
Bruissement de l'être, par le trou
d'une mémoire en jachère.
p. 139