Le mafieux américain figure de la Yiddish Connection Meyer Lansky , alias Mastermind of the Mob, le cerveau de la Mafia, fait non seulement partie de la culture populaire, mais aussi de l'histoire cubaine.
Incarné de nombreuses fois au cinéma, par Lee Strasberg dans le Parrain II, par James Woods dans Il était une fois en Amérique, ou encore par Ben Kingsley dans Bugsy , personnage de nombreuses oeuvres de fiction, Lansky a longtemps séjourné à Cuba durant l'ère pré-Castro.
Associé avec Lucky Luciano, Gaydon Sebastien, Bugsy Siegel et Frank Costello , il développa les jeux aux Etats-Unis (Las Vegas), en Angleterre, aux Bahamas et surtout à Cuba.
Lors de la Conférence de la Havane qu'organisa Lucky Luciano à sa sortie de prison en 1946 à l'Hotel Nacional en présence des familles mafieuses de New York, du New Jersey, de Buffalo, de Chicago, de la Nouvelle-Orleans et de la Floride (avec Sinatra pour pousser la chansonnette), la Mafia décida d'investir des sommes colossales dans les casinos de la Havane, grâce à des relations très privilégiées et tarifées avec le dictateur Batista.
Dans l'ouvrage La Vida secreta de Meyer Lansky en La Habana, le romancier et essayiste Enrique Cirules a recueilli les souvenirs de Jaime Casielles qui fut en 1957 et 1958, le chauffeur et garde du corps de Lansky .
« The Cuban bodyguard of American mobster Meyer Lansky » livre ses souvenirs, raconte comment dans les années 50 il tombe par hasard dans un restaurant chic de Chicago sur son copain d'enfance « El Polaco », fils d'un juif polonais réfugié à Cuba lors de la seconde guerre mondiale, qui lui suggère de quitter son boulot de commercial pour travailler comme croupier dans les casinos. C'est par ce biais qu'il rencontre Lansky qui cherche un chauffeur pour un long séjour à La Havane.
L'ouvrage est un témoignage intéressant et vivant sur les dernières années du Mastermind dans l'île d'avant la Révolution. Casielles évoque son quotidien auprès "d'El Viejo", le vieux, qui ressemble davantage à un retraité paisible qu'à un ponte de la Mafia. Ils sillonnent Cuba, vont de casinos en hôtels, de bars en bordels chics, rencontrent les membres du gouvernement, et ses "collègues" Santo Trafficante et Joe Stasi.
Nous avons droit aussi au récit du petit séjour de Lansky à Saint-Domingue sous la protection du dictateur Trujillo. La fête s'achève en 1959 pour Lansky et ses acolytes. Casielles refuse de les suivre.
Cité par T.J. English dans l'excellentissime Nocturne à La Havane, l'ouvrage de Cirules se lit avec grand plaisir et fait revivre La Havane d'autrefois. Trente pages de photographies en fin de volume complètent cette incursion dans le passé. Meyer Lansky garde malgré tout sa part de mystère. Etait-il un génie du crime ou un homme dont on a surestimé les pouvoirs et la fortune? Il aura déclaré: « J'ai appris trop tard qu'il est beaucoup plus facile et plus rentable de voler de l'argent aux gens de manière légale que de manière illégale ». En tout cas, j'ai appris que sa boisson favorite était, cocorico, du Pernod, breuvage mystérieux pour son chauffeur et pour certains cubains qui croyaient qu'il contenait de la morphine…
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