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Citations sur Au coeur de ce pays (26)

Le monde est plein de gens qui veulent créer leurs propres vies mais hors du désert, rares sont ceux qui bénéficient d'une telle liberté. Ici, au milieu de nulle part, je peux aussi bien atteindre l'infini que prendre la taille d'une fourmi. Je manque de bien des choses mais pas de liberté.
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J’entends des voix. C’est mon commerce avec les voix qui m’a empêchée de devenir un animal. Je suis sûre, en effet, que si les voix ne me parlaient pas, j’aurais abandonné il y a longtemps ce charabia articulé, pour me mettre à hurler, à mugir, à feuler (…) Ce n’est pas la parole qui fait de l’homme un homme, mais la parole des autres.
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Les histoires que l'on tisse avec des écheveaux de réminiscences, dans le secret d'un esprit somnolent, ne me conviennent pas. Ma vie ne se conjugue pas au passé : mon art ne saurait être celui de la mémoire. Ce qui m'arrivera n'est pas encore survenu. Je suis une tache aveugles qui se jette, les yeux ouverts, dans la gueule béante de l'avenir. Le mot de passe : "Et maintenant?"
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Brûlant de trouver les mots qui me transporteraient au pays des mythes et des héros, je reste quelconque, et la chaleur lourde de l'été refuse de se transcender. Que me faut-il? Je pleure, je grince les dents. Est-ce simplement de la fureur? Est-ce la vision d'une seconde existence assez passionnée pour m'entrainer loin du domaine vulgaire de l'être, vers la dualité de la signification? Chacun de mes pores ne frémit-il pas de rage? Manquerais-je de volonté? Ne suis-je pas, en dépit de ma colère, qu'une vieille fille campagnarde qui se laisse enfermer avec complaisance au piège de ses fureurs?
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La victime innocente ne peut connaitre le mal que sous forme de souffrance. Ce qui n'est pas senti par le criminel constitue son crime. Ce qui n'est pas senti par la victime innocente constitue son innocence.
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J'aurais dû être un homme. Je ne serais pas aigrie. J'aurais passé mes journées au soleil, à faire ce que font les hommes - creuser des trous, poser des clôtures, compter des moutons. Que m'apporte la cuisine? Le bavardage des servantes, les commérages, les maladies, les bébés, la fumée, les odeurs de nourriture, les pantoufles fourrées en peau de chat - quelle vie puis-je bâtir sur de telles fondations?
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Mon père gît sur le dos, nu ; sa main droite et la main gauche de sa compagne sont entrelacées. Sa mâchoire est relâchée. Les paupières cachent la foudre des yeux sombres. Un crépitement liquide monte de sa gorge. Le poisson aveugle, cause de tous mes malheurs, repose mollement entre ses jambes. [...] La hache monte au-dessus de mon épaule. Ce geste, nombreux sont ceux qui l’ont accompli avant moi : épouses, fils, amants, héritiers, rivaux. Je ne suis pas seule. Entraînée par son poids, l’arme descend au bout de mon bras comme une boule au bout d’une ficelle, s’enfonce dans cette gorge qui s’offre à moi. Soudain tout est tumulte. La femme se dresse dans le lit, les yeux écarquillés, inondée de sang, affolée par les crachements et les halètements furieux de son compagnon. Il est heureux qu’en de telles circonstances, l’action trouve d’elle-même toute son ampleur, et que l’individu qui l’orchestre n’ait besoin que de présence d’esprit. Pudiquement, elle fait glisser sa chemise de nuit le long de ses hanches. Je me penche et j’agrippe au hasard - je tombe, me semble-t-il, sur un genou. Forte de cette prise, j’enfonce ma hache dans le crâne de la femme. Elle s’abat vers l’avant et bascule sur la gauche, roulée en boule, mon tomahawk tragique plongé dans sa chair. (Qui m’aurait prêté une telle force ?) [...]
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Je ne suis pas une paysanne épanouie. Je suis une misérable vierge noire, et mon existence reste mienne, même si elle paraît misérable, et ennuyeuse, et sombre - histoire stupide, en cul-de-sac, qui ignore tout de sa signification et de ses variantes heureuses qui auraient pu la remplacer. Je est je. La personnalité est le destin. L'histoire est dieu. Pique, pique, rage.
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Ce pays est plein de vieilles filles mélancoliques qui me ressemblent, coupées de l'histoire, cafards noirs dans les demeures ancestrales, vouées à astiquer les cuivres et à mettre les confitures en bocaux. Courtisées dans l'enfance par nos pères dominateurs, nous restons d'amères vestales, gâchées pour la vie. L'enfance violée : quelqu'un devrait étudier le noyau de vérité au coeur de ce fantasme.
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J'ai beau avoir l'air d'une mécanique à pouces opposables, adaptée aux tâches ménagères, je suis en vérité une sphère agitée d'énergies violentes, prête à éclater à la première fêlure.
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