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3,65

sur 796 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Benjamin Constant n'est plus guère en odeur de sainteté de nos jours. Viré de La Pléiade, il me semble qu'il n'est pas non plus tellement étudié, non plus que cité, dans les amphis de facs de Lettres. Quant à Adolphe, écrit début XIXème, qu'on ne peut véritablement ranger ni dans la case Romantisme, ni dans celle du XVIIIème siècle, il souffre peut-être justement de ce statut d'entre-deux.

L'histoire de ce jeune homme qui tombe amoureux d'une femme, Ellénore, plus âgée que lui, vivant en concubinage avec un autre homme, qui parvient à la séduire et qui passera ensuite son temps à vouloir la quitter sans jamais passer à l'acte, cette histoire tient donc en deux lignes. Roman de la procrastination, des velléités, des indécisions, des atermoiements, Adolphe se distingue essentiellement par l'utilisation de la technique de narration. Introduit par deux préfaces de l'auteur à partir de la troisième édition, il débute par un "Avis de l'éditeur", l'éditeur en question étant un personnage fictif et présentant l'ouvrage comme émanant d'un jeune homme taciturne qu'il a rencontré par hasard dans une auberge. Je vous passe les détails, vous connaissez sans doute le procédé. Là-dessus commence un récit à la première personne, a priori écrit bien longtemps après la survenue des événements relatés.

La qualité principale d'Adolphe tiendra donc à la façon dont Benjamin Constant manipule le procédé de narration. Car on constatera que le récit fait par Adolphe, de temps en temps contrebalancé par des citations de lettres écrites par des tiers (dont le père du jeune homme et Ellénore), est toujours, mais ce qui s'appelle toujours, sujet à caution. Exemple frappant : une fois sur deux il écrit qu'il a aimé Ellénore mais que ça n'a pas duré, une fois sur deux il écrit qu'il a cru l'aimer. Surtout, il nous présente Ellénore, parfois en l'écrivant tout net, parfois de façon plus sournoise, comme une sorte de tyran de la passion amoureuse, qui lui rend la vie insupportable (certes, Ellénore semble avoir le chic pour se fourrer toute seule dans des situations intenables). Or la lettre, ou plutôt le fragment de lettre d'Ellénore qu'il nous est donné à lire à la fin du roman nous laisse à penser qu'Adolphe nous a offert, tout au long de son récit, un point de vue hautement biaisé. Et que cette lettre ne soit pas rendue dans son intégralité est particulièrement emblématique du roman. Rien ne sera vraiment clair pour le lecteur, rien ne sera entièrement donné, et surtout pas les motivations d'Adolphe, qui jusqu’au bout resteront plus ou moins obscures, bien qu'il explique à longueur de pages qu'il ait toujours été dirigé par la volonté de ne pas blesser Ellénore. Car on voit bien que, n'optant jamais pour la rupture, il passe justement son temps à la faire souffrir - et à souffrir lui-même, c'est un comble, de son indécision permanente. Le roman se clôt d'ailleurs de manière astucieuse, sous la forme de deux lettres (l'une de "l'éditeur", l'autre d'un correspondant anonyme, ami d’Adolphe et d'Ellénore) qui se répondent en se contredisant, l'éditeur ayant tout de même le dernier mot. C'est ce dernier mot qui donnera à Adolphe sa tonalité finale tout empreinte de moralité.

Il me semble donc que Benjamin Constant se montrait alors véritablement novateur dans ce roman. En revanche, je l'avoue, le côté moralisateur d'Adolphe n'est pas forcément ma tasse de thé. Les caractères des deux personnages, qui ne donnent franchement pas dans la demi-mesure, l'un aussi doué pour la procrastination que Hamlet (ce qui n'est pas peu dire), l'autre ne vivant que pour sa passion, peuvent aussi, j'imagine, facilement agacer un lecteur d'aujourd'hui. C'est, je crois, ce qui donne un côté un peu daté au roman et qui a tendance à en masquer les qualités.

Je note pour finir qu'il peut être intéressant de le lire dans le cadre d'un corpus de textes allant de Werther à Eugène Onéguine, en passant par René.
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L'histoire est assez banale. Adolphe est un perpétuel indécis qui ne peut rompre avec la femme qu'il a séduite et n'aime plus. C'est bien écrit, mais en quoi faudrait-il crier au classique incontournable.

En refermant ce petit livre, les questions se sont bousculées, me poussant à le relire. Par exemple, la justification d'une préface à un texte aussi court serait-il implicitement l'aveu d'un roman à clefs.

Ce texte prend la forme d'un journal intime, ne nous offrant que le point de vue du personnage principal. Adolphe nous décrit notamment la vie ‘mondaine' de cette époque et la critique acerbe qu'il en fait, ou les relations qu'il entretient avec son père. Son amour pour Ellénore est ambigu. Benjamin Constant nous dépeint surtout une femme tyrannique qui tient sous son joug son amant et se meurt d'amour pour Adolphe. Adolphe serait-il ainsi l'amant veule et faible dont on nous fait le portrait.

Une histoire d'amour à méditer.



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Le roman s'inscrit dans cette lignée des romans d'analyse psychologique.

Pour moi c'était un ancêtre romantique de l'insoutenable légèreté de l'être (l'idée plutôt que le roman de Kundera). Un jeune qui croit aimer une femme qui est de dix ans son aînée, se trouve dans l'obligation de la laisser par les instances de son père. Tout le roman que B. Constant se plaît à nommer anecdote, est une analyse méticuleuse, jamais ennuyeuse, des sentiments d'Adolphe (le roman est à la première personne), amour et amour-propre, timidité, sens du devoir de ce personnage isolé, seulet, triste, irascible, égocentrique et excentrique mais aussi sensible, tendre, magnanime (c'est paradoxal je sais mais c'est un personnage romantique). le roman décrit ce tiraillement d'Adolphe entre sa responsabilité envers sa maîtresse qui a tout laissé pour lui ( fortune, réputation, …) et son devoir de fils obéissant et raisonnable qui veut une place confortable dans la société comme son rang et ses études l'exigent. Adolphe s'analyse lui-même pour faire ressortir cette perplexité insurmontable et ses velléités. On admirera ces méditations dans ses promenades aux bois près de Varsovie.

J'ai lu ce roman il y a des années (six ans). J'aimais à cette époque les romans où le héros est un jeune homme plus ou moins romantique. Une chose est sûre, ce roman garde toute sa modernité car son sujet principal est cette insoutenable légèreté de l'être, une fois Adolphe se libérant de son faix pesant qui l'étouffait par l'exigence de cette relation, il est damné. Il se sent terriblement libre car il avait brisé ce coeur, compagnon du sien ! Par ailleurs, l'écriture est sublime.
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Que d'hésitations avant de me décider à relire ce roman qui m'avait beaucoup plus à l'adolescence ! Certes la langue et le style, heureusement plutôt sobres, sont d'un autre temps, mais cela reste pour moi une oeuvre très représentative du romantisme, et qui permet de comprendre le contexte de la naissance du mouvement romantique. Adolphe raconte et surtout analyse en long, en large et en travers la relation amoureuse entre lui et Ellénore. Je pense que ce qui m'avait beaucoup plus à l'adolescence était l'observation fine du comportement d'Ellénore face aux conventions sociales de son temps et l'analyse psychologique des réactions des uns et des autres. C'est de ce point de vue un chef d'oeuvre de roman psychologique ! Mais à l'heure actuelle ce que j'apprécie encore plus, c'est le point de vue narratif avec Adolphe en narrateur pas très fiable (tantôt il a cru être amoureux mais ne l'était pas, tantôt il a été amoureux, mais ne l'est plus), le tout précédé d'une fausse double préface, d'abord celle du découvreur du document, puis celle du soi-disant éditeur, ainsi que suivi de fragments d'une lettre d'Ellénore qui achèvent de semer le doute sur la fiabilité du narrateur. C'est très novateur et malin. Ce qui l'est moins, du moins selon nos critères actuels, c'est que le récit est évidemment autobiographique et que, même si elle n'en est pas l'unique modèle, il est difficile de ne pas voir Germaine de Staël dans le personnage d'Ellénore, ce qui n'est pas très sympa. Mais au final, d'abord Mme de Staël est plus célèbre que Benjamin Constant, et deuxièmement deux siècles après, tout le monde s'en fout et de toute façon elle avait dit de lui qu'il était « un homme qui n'aime que l'impossible ». Un roman un peu trop oublié à redécouvrir.
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Adolphe ou les intermittences du coeur...

Adolphe aime ou croit aimer, parce que celle qu'il convoite est à un autre. Alors il la lui vole. Elle succombe, rend les armes, est à sa dévotion. Comme le disait si bien Don Juan:" Mais lorsqu'on en est maître une fois, il n'y a plus rien à dire, ni rien à souhaiter, tout le beau de la passion est fini." Plus Ellénore aime Adolphe, plus il s'en détache.

Mais il est aussi lâche qu'il est narcissique: il n'ose lui dire qu'il n'a aimé que la conquérir, qu'il n'a aimé que lui-même, au fond, dans le rôle du séducteur...

Ellénore en meurt. Adolphe traine sa culpabilité comme il a traîné sa jalousie, sa lâcheté, son hypocrisie.

Le parangon du héros romantique, analysé sans complaisance et sans empathie par un Benjamin Constant au scalpel.

On déteste les personnages, on adore le roman.

Ce livre de feu et de glace a été le faire-part de naissance du héros romantique, qui n'hésitera pas à en remettre une sérieuse couche dans le nombrilisme odieux et dans le narcissisme apitoyé.

A côté, Adolphe paraît la mesure et l'altruisme incarnés...
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Est-ce concevable de vivre auprès d'une personne que l'on n'aime pas ? Cette question correspond très bien à Adolphe, le héros de ce roman majestueusement écrit par Benjamin Constant. Notre héros donc, mène au début de cette histoire une vie rêveuse, ne cherchant pas la compagnie et ne pensant pas à l'avenir, mais cette vie va soudainement changer avec une idée farfelue d'Adolphe : celle de séduire une femme. Malheureusement, aucune de celles qu'il rencontre ne lui convient et c'est en vain qu'il recherche l'heureuse élue. Toutefois, au cours d'une soirée passée en compagnie du célèbre comte de P***, Adolphe croise la maitresse de celui-ci, une polonaise du nom d'Ellénore et se met à rêver d'elle. Petit à petit, il en tombera amoureux. Ellénore, follement éprise, abandonne tout ce qu'elle possède -enfants, fortune, réputation, et même jusqu'au comte- pour pouvoir vivre avec Adolphe...Ainsi, nous suivons le destin de ces deux jeunes gens qui n'auraient jamais dû se rencontrer et qui seront hélas conduits vers le malheur, les disputes et la jalousie que seule la mort pourra effacer...

Adolphe n'est pas un héros comme les autres, non, c'est un jeune homme que le désir emporte vers des chemins tellement contraires à sa nature, lui qui est si indépendant et fier de sa liberté, soudain pris dans les filets de l'amour dont il ne peut plus se libérer ; Adolphe est touchant et tendre même s'il ne parait pas ainsi ; son amour disparu, il continue tout de même à protéger Ellénore, la défendant contre les injures, la consolant après maintes disputes et surtout dissimulant ses vrais sentiments envers elle. En ce qui concerne Ellénore,c'est une femme passionnée, qui répond à ses désirs immédiatement ne se doutant pas de leurs conséquences, ainsi, elle est seule pour affronter les moqueries de la société mais les ignore avec courage ; c'est une femme combattante, mais son amour pour Adolphe la rend quelque peu lâche aux yeux du lecteur. Toutefois, j'ai beaucoup apprécié cette pauvre femme qui se battra jusqu'au bout pour plaire à celui qu'elle aime par dessus tout et qui ne la quittera finalement jamais.

Un livre sublime, une écriture magique, en un mot, merveilleux.

A lire !
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Adolphe est un jeune homme avec une très haute opinion de lui-même, conforté en cela par les nombreuses louanges qui lui promettent un avenir radieux. Incapable de s'intégrer dans une société qu'il juge d'esprit étriqué et vulgaire, il ne fait pourtant rien pour concrétiser ces belles promesses et mène une vie oisive et vide de sens. Un jour, intrigué par les confidences d'un camarade qui vient de nouer une relation avec une jeune fille, il décide de devenir amoureux à son tour. Son choix se portera sur Ellénore, la maîtresse d'un ami de son père, en recherche d'une certaine légitimité dans la bonne société après un début de vie tumultueuse.

La conquête se passera si bien qu'Ellénore accepte de jeter sa fragile bonne renommée tout juste acquise pour vivre avec son nouvel amant. Adolphe, déjà lassé de cette liaison depuis qu'aucune difficulté n'y fait plus obstacle, s'effraie de ce sacrifice démesuré. Sa moralité lui interdit de rompre, ce qui signifierait la mort sociale définitive de son amante ; l'image qu'il renvoie, celle d'un homme prêt à braver toutes les convenances pour la femme qu'il aime, le flatte et le conforte dans sa décision de poursuivre la relation. Toutefois, chaque pas dans cette direction lui donne l'impression de s'enchaîner un peu plus à une personne qui n'aime plus (et n'a d'ailleurs sans doute jamais aimée). Ellénore devient également dans son esprit la cause de sa carrière avortée (qui n'avait pourtant jamais démarré avant elle).

Le roman présent l'amour sous un jour peu engageant. Tout d'abord en soulignant la part très narcissique d'Adolphe, qui n'aime Ellénore que pour l'image flatteuse qu'elle lui renvoie de lui-même dans un premier temps. Et ensuite, en montrant à quel point les doux souvenirs d'une complicité pourtant perdue, ainsi que le poids des conventions sociales et du regard des autres peuvent nous enchaîner dans une relation toxique en dépit du bon sens.

Si le thème n'est pas très réjouissant, Benjamin Constant découpe admirablement les motivations de ses personnages au scalpel, et va chercher les vérités enfouies au fond de leur âme, qui sont bien éloignées des belles paroles qu'ils proclament en public.
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Les préoccupations de nantis qui se créent des passions et des problèmes pour se sentir vivre ou mourir ont de quoi donner envie de hurler : "bandes de cons, bande de cons, bande de cons..."
Mais quoi que j'en pense, je ne peux pas ne pas reconnaitre et être ébloui par la force d'analyse, la subtilité des sentiments narrée, et un style qui colle parfaitement à ce contenu...
J'ai donc bien aimé détester ce livre.
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Début du 19è siècle, en plein romantisme naissant, avec sa cohorte de sentiments exacerbés,
le jeune Adolphe traîne son ennui, on pourrait dire sa Sehnsucht ou bien sa Saudade, dans une ville provinciale, au sein d'une petite principauté allemande, comme il y en avait tant au 18è et 19è siècle.
Alors, envieux de l'élan amoureux de l'un de ses amis, il se découvre (s'invente) une passion pour la maîtresse du Comte de P ..., de dix ans son aînée, jeune femme éblouissante et inaccessible, digne, à ses yeux, d'accueillir ses transports amoureux.
Pour lui, Ellenore devient l'inaccessible idole, placée sur un piédestal et devant laquelle on se prosterne .... jusqu'au moment où, ayant cédé aux instances de l'amoureux, elle devient une femme comme toutes les autres ! .... certes avec son charme, mais, aux yeux d'Adolphe, avec aussi ses humeurs, sa jalousie, ses caprices ....

Alors cette liaison, au début ardente, va peu à peu se consumer et les transports de la passion vont dériver vers la tiédeur des sentiments. "Je me plaignis de ma vie contrainte, de ma jeunesse consumée dans l'inaction, du despotisme qu'elle exerçait sur toutes mes démarches." gémit Adolphe.
Enfin arrive le désamour et puis l'ennui et Ellenore n'inspire plus "qu'une pitié mêlée de fatigue".

Benjamin Constant scrute avec précision les émois de ce jeune homme assez antipathique, tourmenté, indécis, excessivement imbu de lui-même, égoïste, alors même qu'il se croit altruiste.
Il décortique les humeurs et les sentiments d'Adolphe et détaille avec finesse les déchirements, les disputes, les incompréhensions mutuelles séparant peu à peu ces êtres qui n'osent pas ou ne savent pas exprimer le fonds exact de leurs sentiments.

Ellenore, quant à elle, se jette à corps perdu dans cet amour qui illumine sa maturité et n'hésite pas à tout sacrifier à Adolphe, son protecteur, ses enfants, et sa position sociale pour vivre intensément les feux de ce qu'elle sait être le dernier grand amour de sa vie.

Entre errements et égarements de l'âme, tout cela finement conté, remarquablement disséqué, le lecteur se prend d'affection pour Ellénore, cette femme si mal aimée, et prend en grippe Adolphe, dont les atermoiements finissent non seulement par le lasser, mais lui font détester ce lamentable héros, qui, comme il le dit lui-même : "Nous sommes des créatures tellement mobiles que les sentiments que nous feignons, nous finissons par les éprouver."

Le lecteur, quant à lui, tout ébloui qu'il soit par le talent de Benjamin Constant à décrypter et transcrire si parfaitement les tourments du jeune Adolphe, finit par être exaspéré par ce jeune homme et referme ces confessions avec soulagement !
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Un récit confidence dévoilant la passion amoureuse vécue par Adolphe, un jeune homme tombé amoureux d'Ellénore, une femme de dix ans plus âgée que lui. le personnage raconte le déroulé de ses sentiments, qui évoluent, changent au cours du temps, ses problèmes avec son père… ses disputes avec Ellénore… et il semble être essentiel pour lui d'exorciser par le monologue cette obsession amoureuse. J'ai trouvé ce récit intéressant grâce aux belles pages revêties de sincérité sur l'évolution de l'histoire du couple. Un joli moment de romantisme tout en délicatesse.
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