Un roman policier qui se produit dans l'immensité semi désertique du coeur de ce pays -continent qu'est l'Australie, indication fournie par le titre. C'est ce à quoi je m'attends à l'ouverture de cette première lecture de
Kenneth Cook, par simple référence à
Arthur Upfield dont j'ai lu quelques ouvrages.
Une fois lu l'excipit « en quittant l'ascenseur, ils sortirent dans la rue » Out !, des questions se bousculent alors au portillon. En écrivant cette critique, je devrais pouvoir lever quelques points d'interrogation.
D'abord, le sticker apposé sur la tranche du bouquin m'a signalé lors de l'emprunt que j'avais bien à faire à un polar !
Effectivement, le roman commence par le cambriolage d'une bijouterie qui débouche hélas, sur l'assassinat d'un jeune policier, suivi de celui d'une vieille prostituée.
Si le décès de la péripatéticienne usée ne semble que dommage collatéral,
Kenneth Cook ne s'attarde que sur le sort du tueur de flic ; tu penses un défenseur de l'ordre moral !
Le fait divers austral tourne alors à la fuite en avant de ce malfrat.
En vrai, un animal agressif dès qu'il se sent en danger. Un faible, peureux, qui ne peut arrêter de cogner tant sa peur est forte « dominé par le désir de la frapper encore, de la brutaliser, de la tuer … tout vibrant de haine, les dents découvertes en un rictus brutal ».
Et puis, le récit change de registre pour nous emmener, loin de l'
outback, dans l'aridité d'une salle de rédaction télévisuelle où il ne semble être question que de quête de pouvoir : qui sera le futur rédac-chef de prod. ?
Et le texte nous enlise alors dans la fange de cette rivalité entre les différents personnages (j'ai failli arrêter ma lecture tant l'histoire me paraissait loin du roman policier).
Mais le reporter de terrain s'en va suivre, pour BFM -:)), la traque de l'assassin !!! Ouf !
Par sa manière de nous conter,
Kenneth Cook vulgarise donc, ce journalisme télévisuel naissant, c'est à dire comment s'élabore un reportage (nous sommes dans les années soixante) où le reporter est pris en sandwich entre sa soif de scoops et les impératifs « vertueux » du financeur publicitaire.
Cette situation m'a fait penser à la course poursuite en île de France des frères Kouachi lors des assassinats de
Charlie Hebdo.
Ce qui, aux débuts de la TV n'était qu'un balbutiement, est devenu d'une banalité plus qu'affligeante aujourd'hui.
De mon point de vue, ce n'est donc pas un polar que nous livre ici
Kenneth Cook, mais bien une étude de moeurs, car son écrit nous décrit le milieu journalistique télévisuel et sa part d'immoralité. Il nous propose une vision non idéalisée de l'univers journalistique de l'image.
Une fois sorti de la salle de rédaction avec l'équipe de reportage, nous quittons ENFIN la ville, la salle de rédac' et les bordels de vieux, pour l'
outback. Cet arrière-pays semi-aride de l'Australie, situé au-delà du bush. Grand comme les deux tiers de l'Europe, il n'est pas très peuplé. Cependant, dans la description succincte que nous propose l'auteur, on ne sent pas la différence entre l'
Outback et le bush, parce qu'il y en une. Une histoire de végétation et donc de faune.
https://moicameleon.fr/
outback-et-le-bush-australien-entre-mort-et-desolation/
Par saint
Arthur Upfield ! Au secours !
Comment faire pour participer à la traque ?
L'auteur ne nous donne qu'un seul repère géographique. Qui plus est, une fausse information (page 74) : « au sud d'Ulverston ». le seul UlverstonE trouvé par Googlemaps se situe en Tasmanie, séparé de la ville d'Adélaïde, au nord, par la mer de Tasman ! Ma soif géographique n'a pas été étanchée.
Suerte !
Les chemins de notre reporter et du bandit finissent par se croiser.
Johnson, qui n'a rien d'un
François Villon, avec sa cervelle d'oiseau à l'imagination rudimentaire d'un gosse demeuré et vicieux, va se trouver pris au piège de l'image.
Ce môme idiot, pas courageux, habité par la peur, nourri de films policiers va croire au miroir en jouant l'alouette, il accepte l'entretien filmé.
Ce document incommode le PDG de la société pharmaceutique qui finance la TV, le fugitif finit sous les balles de la police, le reporter reçoit les lauriers mérités sans oseille à la clé et démissionne. Out sans retour possible !
Pour toutes ces réponses, je me dis que j'ai bien fait d'aller au bout de ce récit. Je connais désormais le journaliste
Kenneth Cook.
Entre trois et quatre étoiles
Ancelle, le 27 avril 2024