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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
"Mendiants et orgueilleux" est le titre qui m'a fait découvrir l'oeuvre de Cossery
J'ai apprécié le livre mais ce titre, d'abord ; cette association "intolérable" pour les 3/4 de l'humanité, je pense...
(Pour moi, c'est un oxymore sensé)

Que l'on soit pauvre, passe encore.. mais qu'on n'ait pas la décence de s'humilier sous cette pauvreté, ça ne sera jamais vu d'un bon oeil pour qui s'honore de travailler, de prospérer, enfin de vivre quoi !, selon l'étroite définition que s'en font les possédants.. (pas tous très riches, loin de là)

Dans ce roman donc, ainsi que dans ce recueil des "Hommes oubliés de Dieu" ; j'y ai trouvé cette charge (très précieuse), ce renversement des valeurs.. tout un arsenal prêt à dynamiter un monde de représentations
Mais l'on s'en tient là, avec l'auteur (quelque peu "radin" tout de même, il faut le dire..)
L'explosif, c'est toujours pour plus tard ; quand on aura fini de dormir, quand on aura fini de fumer, quand il n'y aura plus rien à voir
Dans sa philosophie à lui, il faudrait se tenir au bord du manque, pour ne pas cesser d'espérer (en toute lucidité) de "merveilleux" lendemains
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- La fête n'est pas pour nous, mon fils, dit-il. Nous sommes pauvres.
L'enfant pleura, pleura amèrement.
- Que m'importe, je veux un mouton
- Nous sommes pauvres, répéta Chaktour
- Et pourquoi sommes-nous pauvres ? demanda l'enfant.
L'homme réfléchit avant de répondre. Lui-même, après tant d'années d'indigence tenace, ne savait pas pourquoi ils étaient pauvres. Cela venait de très loin, de si loin que Chaktour ne pouvait pas se rappeler comment cela avait débuté. Il se disait que, sans doute, sa misère n'avait jamais eu de commencement. C'était une misère qui se prolongeait au-delà des hommes.
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Il s'agit d'un recueil de 5 nouvelles, très noires car évoquant une misère extrême, et là au contraire des Mendiants et Orgueilleux, en aucun cas choisie par les protagonistes. Comme celle de ce petit garçon qui comprend que son père ne pourra pas acheter le mouton de la fête car il est trop pauvre, que la fête ce sera pour les autres et pas pour eux, et qui suffoque écrasé par cette injustice imméritée.

C'est aussi la misère de ces balayeurs des beaux quartiers dont les salaires ne suffisent pas pour vivre et qui tentent de se révolter avant d'être écrasés.

Misère extrême, mort qui rôde, c'est très noir, mais jamais complètement sans lueur d'humanité, grâce à l'écriture d'Albert Cossery, et grâce à son regard tendre et compatissant, même s'il n'est pas complaisant sur ces déshérités.
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Cinq nouvelles pour parler de ces hommes et ces femmes oubliés de Dieu : Zouba, le facteur, qui supporte la violence parce qu'il se croit supérieur à ceux de son quartier, car lui sait lire et connait donc tout leurs secret ; Faiza qui pense que le désir et le plaisir qu'elle sent au fond d'elle sont l'oeuvre du démon ; Chaktour qui subit sa misère mais comprend que son enfant refusera cet héritage et sent un vent nouveau arriver ; Abou Chawali qui possède une école de mendicité et se bat pour que les traditions perdurent, que les mendiants continuent à montrer la misère sous son pire aspect ; Sayed Karam, ancien acteur, qui voulait réaliser de grandes choses pour étonner les hommes et se rend compte finalement qu'il vaut mieux réaliser de grandes choses pour les aider et les conduire vers une vie meilleure.

C'est un de ces livres qui ne vous lâche pas. de ceux qui restent en tête longtemps après l'avoir refermé. « Il n'y a pas de phrases pour rien dans mes livres », disait celui qui pouvait prendre plusieurs jours pour trouver le bon mot, lors d'une interview pour le Magazine Littéraire. Il en reste des textes denses de personnages se trouvant dans le dénuement le plus total, mais digne au-delà de tout. Des personnages qui s'échappent dans le sommeil ou le haschich, mais où on sent la possibilité de révolte encore bien présente. Il ne suffirait parfois que d'un tout petit élément pour la déclencher.
(lire la suite...)
Lien : http://www.tulisquoi.net/les..
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Écrivain égyptien francophone, Albert Cossery situe les cinq nouvelles de son recueil dans les quartiers pauvres du Caire de la première moitié du XXe siècle. Bien qu'indépendantes les unes des autres, elles se combinent pour former un tableau de la misère qui régnait alors dans la population indigène de la capitale égyptienne alors que la zone européenne de cette dernière bénéficiait de tout le confort moderne. « La civilisation se fait sentir comme ça, aux lumières qu'elle prodigue autour d'elle pour aveugler les gens. » Toutes les histoires se déroulent dans les rues oubliées de la ville, à la périphérie de la civilisation, périphérie sombre avec sa vie traditionnelle à l'écart du progrès. Là, les gens ont faim, souffrent et se battent dans l'oppression et la servitude, sans présent ni avenir décents tandis que le désespoir prospère. C'est une galerie de portraits d'humbles et d'inadaptés qui chacun à sa manière résiste à la tragédie de la vie. Dans la nouvelle intitulée « Le coiffeur a tué sa femme », l'enfant du ferblantier qui ne peut que pleurer pour « se révolter contre l'injustice du monde » demande à son père pourquoi ils sont pauvres. Incapable de lui fournir d'explications, ce dernier n'a d'autre réponse que celle qui donne son titre au recueil. Dans « Le facteur se venge », des personnages oisifs et paresseux méprisant la civilisation moderne luttent contre l'oppression de la modernité occidentale et ses tentatives de rééducation. « Danger de la fantaisie » est une satire sociale dans laquelle le mentor d'une école de mendiants soupçonne qu'un de ses anciens disciples se prépare à créer une autre école de mendicité avec des idées plus fantaisistes qui vont « révolutionner l'art de demander l'aumône ». Travailleurs analphabètes, mendiants et toxicomanes sont les visages auxquels Albert Cossery donne une voix et une conscience sociale. Il décrit leur combat quotidien pour survivre et raconte les choses directement, sans embellir les situations, sans balayer la laideur ou la saleté sous le tapis. Il n'hésite pas à changer de style de langue pour s'adapter aux situations décrites, ne daigne pas l'utilisation d'un vocabulaire cru ou grossier comme de tournures plus poétiques, voire surréalistes. Il glisse même régulièrement des traits d'humour dans son récit réussissant à faire sourire le lecteur malgré la tristesse et la gravité du propos. Cet incroyable mélange des genres et des thèmes m'a rendu la lecture de ces nouvelles poignante et fascinante. D'autant plus que ses récits restent pertinents aujourd'hui dans un monde qui n'a guère changé et où beaucoup souffrent encore de faim et d'oppression en essayant de survivre dans les plus grandes villes du monde. Partout où l'injustice sociale prospère, les lumières de la civilisation et de la modernité nous aveuglent et tentent de nous faire oublier le sans-abri dormant dans la rue ou la mère célibataire bénéficiant de l'aide sociale.
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