Quand le réel est terrifiant, le rêve est un espoir de le surmonter.
La poésie est une arme de survie quand le réel est insupportable.
L'oxymoron fait apparaître le contraste de celui qui, recevant un grand coup, s'y adapte en se clivant. La partie de la personne qui a reçu le coup souffre et se nécrose, tandis qu'une autre mieux protégée, encore saine mais plus secrète, rassemble avec l'énergie du désespoir tout ce qui peut donner encore un peu de bonheur et de sens à vivre. La gangrène et la beauté, le fumier et la fleur se trouvent ainsi associés lors de l'adaptation au fracas.
Notre rire est une arme. Nous sommes plus forts que le désespoir.
Quand les enfants sortent de l'horreur, non seulement ils en sont encore imprégnés, mais ils n'ont pas pu apprendre les rituels de leur culture.
La poésie, c'est de transformer la souffrance en oeuvre d'art.
Les fabricants de mythe sculptent avec leurs récits une sorte de totem culturel auquel s'identifie le groupe. Ils utilisent l'Histoire de manière perverse pour fabriquer un liant clanique. Les Américains ont inventé les rustiques cow-boys et les sympathiques nordistes. Ils ont utilisé des morceaux d'histoire réelle et ont mis dans l'ombre ce qui pouvait gêner, de façon que tous les immigrants puissent s'identifier à cette chimère.
Si nous disions constamment ce qui nous passe par la tête, aucun couple, aucun groupe ne pourrait continuer à vivre ensemble. La brutalité serait quotidienne. Au contraire, l'amputation d'une part de notre personnalité permet la coexistence. Le handicap alors devient une métaphore de la vie en société.
La notion de maltraitance a été mise en lumière dans les années 1970. Si elle a pu entrer dans nos débats, c'est probablement grâce à quelques adultes résilients, anciens enfants maltraités, qui ont œuvré pour que ça cesse. L'idée de résilience vient de naître, mais elle existe vraisemblablement dans le réel depuis l'origine de l'humanité.
L'oxymoron décrit le monde intime de ces vainqueurs blessés.
Si vraiment nous voulons soutenir ces enfants blessés, il faut les rendre actifs et non pas les gaver. Ce n'est pas en donnant plus qu'on pourra les aider, mais bien au contraire, en leur demandant plus qu'on les renforcera.