Dans l'anthologique Allô maman ici bébé, John Travolta a cette phrase définitive : "Le rôle du père, c'est de rendre la mère heureuse, pour qu'elle ne rende pas fous les enfants."
Systématiquement, à la vue d'une personne de notre entourage, le bébé se met à pleurer, et nous embarrasse tous, avec une sorte de génie.
Que les enfants soient mortels, c'est ce que l'Occident ne supporte plus. C'est l'ultime lieu du scandale.
Je suis la mère d'un garçon ; en face, sur l'autre rive : les mères de filles.
Que l'espace brutalement se creuse, que la surface tranquille sur laquelle il jouait manque ainsi : le choc d'adrénaline doit être à la hauteur de la trahison. Nous le couvrons de baisers ; nous auscultons et caressons la rougeur sur son front ; nous exagérons - pensons-nous - ses souffrances, nous le plaignons avec emphase : pour que dans ce théâtre de la peur et de la consolation il trouve l'assurance que le monde n'est pas un traquenard. Sans cesse il cherche ; même en mangeant, il éprouve la consistance de la cuillère, de la nourriture, il palpe le biberon, essaie de la saisir - depuis qu'il y parvient il estime d'ailleurs qu'il est plus agréable de se laisser servir.
Mon pouvoir sur lui est stupéfiant.
Merveille de ses mains miniatures.
Le soulagement du bébé quand son père rentre, le soir, quand il n’en peut plus de moi.
C'est quand on n’en peut plus qu’il commence à sourire, au bout d’un tunnel de semaines, lait, rot, pipi, caca. Il sourit juste à temps, pour nous séduire, pour qu’on le garde.
Une puéricultrice sur deux est favorable à la tétine.