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EAN : 9782378340223
394 pages
Stéphane Marsan (17/10/2018)
4.35/5   93 notes
Résumé :
Forough Farrokhzad a grandi à Téhéran dans les années 1930, au sein d'une famille de sept enfants. Dans la maison règne une discipline de fer, et les enfants n'appellent pas leur père "papa", mais "général". Très tôt, Forough manifeste un vif intérêt pour la poésie persane et dévore les recueils que ses frères étudient, eux qui ont la chance d'aller à l'école. À l'âge de seize ans, Forough épouse son amour de jeunesse, Parviz, sur décision du général qui tient à évi... >Voir plus
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C'est la triste mais passionnante histoire de la poétesse iranienne Forough Farrokhzad, grande figure du féminisme iranien, morte à 32 ans dans un accident de voiture. Née en 1935 à Téhéran, dans une famille plutôt aisée de sept enfants, alors qu'une bonne fille iranienne se doit d'être pieuse, modeste et soignée, elle est impulsive, raisonneuse et désordonnée. Elle se considère l'égal de ses frères, avec l'esprit et l'audace qu'il faut pour répondre aux leurs. Ce qui n'est ni dû goût de sa mère, ni de la société iranienne de l'époque. Quand au père, colonel du Shah, il se contente d'engendrer et de veiller superficiellement à une discipline de fer dans sa famille. Son destin basculera avec sa rencontre avec Parviz Shapour, son cousin et poète, connu en 1950.....une première rencontre avec l'amour et la poésie.....d'autres suivront.....pour le meilleur ou le pire....

Racontée à la première personne, jalonnée de sa poésie, Jasmin Darznik nous offre ici une superbe biographie romancée de Farrokhzad, grande poétesse iranienne méconnue du grand public, en occident. Un livre qu'on lit la gorge serrée, face a tant d'injustices faites à la femme dans l'Iran chiite et à son courage, qui défiera tout interdit. Calvaire chez le père, calvaire chez le mari, une vie de captive basée sur des règles absurdes d'une société, régit par une religion vécue et pratiquée d'une manière encore plus absurde. Au nom de Dieu, tout est désamour, frustrations, cruautés et violences, au point qu'on se demande où et quel Dieu se trouve dans cet enfer ?
Finalement, c'est par le biais de la littérature et surtout de la poésie qu'arrivera le salut, pour cette femme libre dans son corps, libre dans son esprit. Comme quoi encore une fois la preuve que la volonté ne connaît pas de limites, et que même en milieu hostile, quand on s'y accroche, on peut réaliser tout ses rêves, ou presque...
Un livre passionnant qui révèle aussi plusieurs pans tragiques de l'Histoire iranienne, des années 40 à 60 et qui débouchera directement sur la dictature des mollahs qui sévit aujourd'hui le pays; dont celui de la lutte du pétrole entre l'Iran et le couple Etats-Unis / Angleterre , qui se l'approprieront pour un temps, en faisant chuter Mossadegh, le premier ministre iranien de l'époque.....
Lu d'une traite, magnifiquement traduit de l'anglais, un roman splendide sur une femme devenue une icône dans son pays !
Un coup de coeur !

Un grand merci à NetGalley et aux Éditions Stéphane Marsan pour l'envoie et la découverte de ce superbe livre !

“Tout mon être n'est qu'un verset obscure
Qui te célébrera jusqu'à l'aube des éclosions
Et floraisons éternelles.
D'un soupir, dans cette mélopée, je te fais surgir;
A l'arbre, à l'eau, au feu
Je te greffe.”
( Une autre naissance )
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Même avant la révolution islamique des mollahs en 1979, même du temps où l'Iran était relativement moderne sous le régime du Shah dans les années 1940-1960, la vie des femmes était compliquée dans ce pays. Étouffées sous un carcan de traditions religieuses et patriarcales, elles n'avaient pas beaucoup d'autres choix que de se soumettre à la volonté de leur père, de leur mari, de leurs frères, sans protestation possible et en faisant bonne figure, tant qu'à faire. Alors quand, dès l'enfance, vous avez le malheur de développer un tempérament turbulent, contestataire, et qu'en plus vous vous fichez de votre apparence de garçon manqué, vous êtes prédestinée à souffrir. Tel a été le sort de Forough Farrokhzad, née en 1935 dans une fratrie de sept enfants. Une famille aisée de Téhéran, avec un père militaire et fidèle colonel du Shah, inflexible et impitoyable, et une mère obsédée par les apparences et le qu'en-dira-t-ton, tétanisée par la dureté de son mari.

A quinze ans, Forough s'éprend de son cousin Parviz, 25 ans. Tous deux sont férus de poésie, il en écrit et est publié, elle dévore tous les recueils qu'elle peut dénicher. Ils s'écrivent et se retrouvent en cachette, mais sont rapidement découverts. Pour éviter un scandale, on les force à se marier. Forough, amoureuse, croit faire un mariage romantique. Ce n'est hélas que le début d'un cruel désenchantement, qui passera entre autres par son internement forcé en hôpital psychiatrique. Entre-temps Forough s'est mise elle aussi à écrire des poèmes qui, après bien des difficultés, sont publiés. Et qui provoquent un tollé, tant ils sont révolutionnaires : pour la première fois en Iran, une femme écrit explicitement sur l'amour, le désir, le plaisir charnel des femmes. Désormais précédée d'une réputation sulfureuse de femme dépravée, Forough essuie d'innombrables critiques, sarcasmes et réflexions sexistes, mais commence également à susciter une certaine admiration. Encouragée sur la voie de l'émancipation et de la liberté, elle ne s'arrêtera plus. Elle poursuivra son exploration de la poésie, mais découvrira aussi le cinéma, nourrie et touchée, pour le meilleur et pour le pire, par les événements qui secouent l'Iran à cette époque : la montée du communisme, sa répression brutale par le régime, l'éternel conflit pétrolier entre nationalisation et privatisation (mais appropriation par les compagnies pétrolières US et UK). Un contexte chaotique qui ouvre une voie royale à la prise de pouvoir de Khomeini en 1979, que Forough n'aura pas le malheur de connaître, puisqu'elle meurt dans un accident de voiture en 1967.

Biographie romancée de la grande poétesse iranienne, décédée à l'âge de 32 ans, « L'oiseau captif » dresse le portrait d'une jeune femme courageuse, opiniâtre, qui n'a jamais renoncé à sa liberté en dépit de toutes les cruautés et les blessures qu'on lui a infligées. Un livre passionné et passionnant, une écriture sensible qui donne chair et vie à un personnage marquant, devenue une icône dans son pays, et dont la tombe continue à être fleurie encore aujourd'hui.
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En ce joli mois de mars, se perpétue la journée internationale des droits de la femme et s'ouvre, sur la beauté, le printemps des poètes. L'oiseau captif fait partie des magnificences qu'il faut saisir avant de le laisser s'envoler vers son destin.
Pour dire la femme, pour dire la poésie, pour dire la liberté et pour crier la liberté de la femme poète et iranienne voici venir l'histoire de l'audacieuse, de l'opiniâtre Forough Farrokhzad.
Une maman conventionnelle, obsédée par le rangement et le regard de Dieu ; un père militaire et intransigeant, une haute stature éloignée de ses enfants et de leur éducation, mais un colonel qui parle de poésie persane avec ses amis.
C'est dans ce créneau que va s'insinuer Forough, celui de la création poétique, pour accrocher le regard paternel.
Forough Farrokhzad détonne dans cette société entravée par le carcan des traditions et la soumission féminine. Les rencontres parfois malveillantes, souvent condescendantes et humiliantes, rarement amicales vont la hisser sur le faîte de la notoriété au prix de renoncements inimaginables et douloureux.
Jasmin Darznik agite sa plume avec détermination pour rendre hommage au courage et à la persévérance de la jeune poète. Elle reconstitue avec fougue et inspiration cette chaîne de souffrances et de concessions, cette force d'indépendance farouche, cette créativité poétique nouvelle et audacieuse.

(…)Il est une rue là-bas
Où des garçons qui étaient de moi amoureux, encore
Avec les mêmes cheveux en bataille, leurs cous graciles
et leurs jambes grêles,
Pensent aux sourires innocents d'une fillette qu'une nuit
le vent a emportée avec lui.
Il est une ruelle
Que mon coeur a volée aux quartiers de mon enfance. (…)

Une biographie romancée avec élégance, une écriture magnétique qui ravira même les réfractaires à la poésie.

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Ô ciel ! Si un jour je décidais de fuir
cette prison sombre, que pourrais-je dire
devant les yeux de cet enfant en larmes ?
Laissez-moi car je suis un oiseau captif.

Je suis la lampe qui illumine une ruine,
du feu de mon coeur,
si je décidais de l'éteindre,
je détruirais une famille.

« La Captive » - Forough Farrokhzad.

Je ne suis habituellement pas portée sur les biographies romancées mais je suis bien contente d'avoir lu celle-ci. Elle m'a permis de découvrir la poétesse iranienne Forough Farrokhzad (1935-1967) - qui m'était jusqu'alors inconnue.

Ecrit à la première personne, comme une autobiographie, Jasmin Darznik dresse un magnifique portrait de femme, celle d'une femme éprise de liberté et de poésie, qui avait juste envie de vivre intensément sa vie et goûter à toutes les nuances d'un monde que les hommes et les traditions tentaient de lui dissimiler.

« J'apprenais à marcher dans les rues de Téhéran comme si elles m'avaient toujours appartenu, et à mesure que je découvrais le plaisir d'observer le monde, je me rendais compte que les restrictions de mon enfance n'étaient pas simplement destinées à nous cacher, nous les filles, de la vue des autres, mais aussi à nous dissimuler l'ampleur du monde. »

Elle n'a eu de cesse à travers sa poésie de porter la voix des femmes, de mettre en poèmes l'amour et le désir des femmes. Cela lui a valu bien des ennuis et des sacrifices. La poésie aura été, à la fois sa croix et son salut.

« Écrire m'avait tant coûté, mais c'était aussi la seule chose qui m'avait sauvée, m'avait permis de vivre. »

Un livre poignant à l'écriture délicate sur une femme audacieuse et volontaire, décédée bien trop jeune. Il est agrémenté de quelques-uns de ses poèmes, judicieusement choisis pour répondre aux moments charnières de sa vie, et donnent une furieuse envie de découvrir plus en profondeur son oeuvre.
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Comment vivre libre, lorsqu'on est un oiseau captif? Comment s'épanouir dans son art quand on est une femme iranienne? Même à l'époque de modernisation du pays, sous le règne du Shah, cela paraît impossible. Forough Farrokhzad y est pourtant parvenue, mais à quel prix...

Jasmin Darznik, née à Téhéran et vivant aux Etats-Unis, dans un narration à la première personne, nous fait entrer dans l'intimité de cette femme poète au destin courageux, déchirant et symbolique du désir de libération des femmes de son pays, toujours en proie aux archaïsmes, au patriarcat exacerbé, à la religion sectaire.

Forough, dont le prénom signifie " halo de lumière" était pourtant vouée à mener une vie sombre, retranchée, au service de sa belle-famille, une fois mariée et mère. Elle, la rebelle dès l'enfance, qui ne comprenait pas pourquoi ses frères pouvaient jouer dans la rue et pas elle, pensait échapper à ce parcours féminin cruel et humiliant , en épousant à 16 ans son cousin, dont elle est très amoureuse. Mais elle déchante vite, prisonnière , en dépit de son caractère fort, des traditions, et c'est la poésie qui la sauve du désespoir, cette poésie qu'elle écrit depuis l'âge de 11 ans.

Elle envoie ses poèmes à des éditeurs et commence à être publiée dans des revues, malgré le mépris masculin. Vue comme une femme dépravée osant parler du désir féminin, elle sejournera de force dans une cilnique psychiatrique, et surtout elle sera contrainte de divorcer et douleur inouïe, d'être séparée de son fils, dont son mari aura la garde absolue...Elle s'initiera également au cinéma et réalisera un film. Elle jouera aussi. Quels talents artistiques!

L'auteure nous la rend terriblement vivante, son écriture est sensible, inspirée, entrecoupée des magnifiques poèmes de Forough Farrokhzad, tourmentés souvent et vibrants, sensuels:

" Dans cette retraite sombre et sans voix
Dévastée à ses côtés je m'asseyais
Ses lèvres ont versé sur mes lèvres la tentation
Me délivrant de la tristesse d'un coeur fou."

( extrait du " Péché")

Un destin fascinant , foudroyé trop tôt, conté avec beaucoup d'empathie et de passion. Que nous partageons. A lire!



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Citations et extraits (50) Voir plus Ajouter une citation
« Mon pays est de ceux où l’on estime qu’une femme est par nature pécheresse, où l’on affirme que les voix féminines ont le pouvoir de pousser les hommes à la luxure et à les détourner tant des questions célestes que terrestres. Pourtant, quand je feuilletais les revues et ouvrais des recueils de poésie, j’y trouvais des hommes qui décrivaient toujours leurs amours et leurs maîtresses avec une franchise et une liberté consommées. Pendant des milliers d’années, les hommes ont comparé leurs bien-aimées à ce qui leur plaisait, dépeint sur tous les modes leurs requêtes et supplications amoureuses, décliné tous les états que l’amour leur procurait. Et les gens lisaient cette poésie dans la sérénité la plus totale. Personne n’élevait de protestation. Personne ne s’écriait : « Ô mon Dieu, les fondations de la moralité ont été ébranlées ! La pudeur et la pureté sont des valeurs sur le point de s’effondrer. Cet auteur va dévoyer la morale de notre jeunesse ! Nous sommes voués à la damnation ! »

Parce que j’étais une femme, on a voulu me bâillonner et m’asphyxier. Mais je ne pouvais me contenir. Il m’était impossible de jouer les modestes, les pures ou les bonnes filles. Non. J’étais une femme et ne pouvais m’exprimer avec la voix d’un homme, car ce n’était pas la mienne, c’eût été malhonnête et illégitime. Mais il y avait plus : en écrivant en tant que femme, je voulais également affirmer qu’une femme était, elle aussi, un être humain. Proclamer que nous avions nous aussi le droit de respirer, de nous récrier ou de chanter. »

Chapitre 14
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La fin de mon enfance venait de sonner, même si je l’ignorais encore. Si j’avais eu conscience de ce qui allait m’arriver, aurais-je pénétré à la suite de ma mère dans cette pièce, enfouie dans les bas-fonds de la ville ? Si j’avais deviné l’objet de la visite, aurais-je fait demi-tour pour prendre la fuite avant que ma mère ne frappe le heurtoir en laiton contre la porte ? J’en doute. J’avais quinze ans et, aux dires de tous, j’étais déjà une fauteuse de troubles, mais en ces instants où ma sœur et moi nous étions tenues dans la lumière couleur de miel du Téhéran de cet automne-là, je n’avais pas la moindre idée du sort qui m’attendait et j’étais trop pétrifiée pour prendre la fuite.
(Incipit)
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-Dieu est partout, me dit un jour ma mère alors que je n’étais encore qu’une fillette.
Plissant des yeux , elle me cloua du regard et ajouta:
-Il est partout, il voit tout ce que tu fais.
Bien qu’elle ne fût pas voilée, sa vie serait toujours un tapis de prière devant l’autel de la peur.
( Iran années 40)
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Les pièces de la maison familiale étaient réparties selon la tradition en une andaroon, aile destinée aux femmes, et une birooni, réservée aux hommes. Un long et étroit couloir reliait les deux parties de la maison et de hauts murs en briques barricadaient la résidence sur tous ses côtés. C’était une maison qui se détournait du monde pour jeter ses regards vers l’intérieur ; une maison dans laquelle les femmes pensaient que les murs étaient à l’affût du péché ; une maison où la vérité se devait d’être chuchotée ou était tout bonnement tue.
Chapitre 2
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Je suis née en Iran, pays s'étirant sur 4800 kilomètres et juché sur un plateau rocailleux bordé de tous côtés par de hautes montagnes. Au nord, des forêts de pins, de bouleaux et de trembles longent la mer Caspienne; au sud, s'élèvent des mosquées aux dômes de turquoise, se déploient des villages sculptés dans la pierre couleur de miel ainsi que les vestiges des jardins et palais de Pasargades, Susa et Persépolis. De vastes déserts de sel et de sable s'étendent d'est en ouest. Chaque jour de l'année, les quatre saisons se déclinent à l'intérieur des frontières iraniennes. Ici, sous une surface en perpétuel changement où fleurs sauvages, sable, roc et neige se côtoient, les veines noires du pétrole plongent au coeur de la terre.
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