« Je suis riche et elle est pauvre. C'est pour ça que je vais gagner. C'est obligatoire. Les riches gagnent toujours. Et les pauvres crèvent toujours. Ce n'est pas ma faute. (…) Je suis riche sans un kopeck. Sans appart. Riche à dix euros par jour clopes comprises. Riche sans rien, mais si riche que je m'en fous d'être pauvre. Techniquement à la rue mais ontologiquement pétée de thunes. On n'a pas besoin d'argent quand on est riche. »
Dans ce premier roman, autofiction au vitriol,
Constance Debré envoie tout balader. Elle bazarde son mari, l'hétérosexualité, sa profession d'avocat, la plupart de ses possessions, sa relation à son fils, ce qu'il restait de celle à son père. Elle brûle le terrain car plus rien n'y pousse. Elle a coupé ses cheveux, changé ses fringues, multiplie les tatouages. Elle vomit sa bourgeoisie, méprise la société et se fout un peu de tout. Elle est pourtant à un tournant, change de vie comme de paradigme. Pourtant, elle est autant désabusée que consumée de nouvelles passions. Bloquée dans l'entre-deux, étreinte par une colère viscérale, éternelle et indomptable. Sur le fil de ce rasoir, elle hurle ce bref roman cathartique, anti-récit initiatique puisqu'il s'agit d'abord de démolir. Pour le reste, on verra.
« À quatre ans j'étais homosexuelle. Je le savais très bien et mes parents aussi. Après c'est un peu passé. Aujourd'hui ça revient. C'est aussi simple que ça. »
De la violence qu'elle extériorise, les haines et les blessures tout autant vives, nait une écriture unique, acérée, sans concession. Une langue qui crache à la gueule. Un sens de la formule comme un talent pour la narration la plus ramassée, solide et percutante.
« Au début j'y passais des jours entiers dans son appart. Puis seulement les nuits. Je n'arrive plus à dormir maintenant. »
Une véritable découverte. Elle remue, elle intrigue. Et mérite d'être lue et suivie.