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EAN : 978B0000DM3G6
(30/11/-1)
3.83/5   3 notes
Résumé :
Le capitaine Roberts et le lieutenant Nicholson sont tête à tête dans un fortin menacé, à la frontière des Indes. Par hasard, ils découvrent qu'ils ont aimé la même femme pendant leur permission en Europe, fascinante Alba de Nogalès. Bien qu'ils n'ignorent rien de sa dépravation, la jalousie les rend fous. Mais le poste est attaqué et, au risque de sa vie, Roberts sauve son jeune lieutenant de la torture et de la mort. Le souvenir d'Alba de Nogalès semble exorcisé..... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Classique triangle amoureux, en Inde, époque britannique, atmosphère "les trois lanciers du Bengale", aux confins de l'Afghanistan...

La nostalgie impériale nous saisit et l'Angleterre domine l'univers civilisé !

Maurice Dekobra nous dépeint l'armée des Indes, des combats, une tragédie, une amitié virile entre militaires. Amitié que la perverse Alba se fera un malin plaisir à éprouver... un scénario banal, en apparence, mais une conclusion improbable, comme l'auteur sait les provoquer.

Une analyse psychologique d'une grande finesse fait de ce roman méconnu, un chef d'oeuvre.
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« le Sphinx A Parlé » marque un très net changement de ton et d'esprit de la part de Maurice Dekobra. Ce dernier a vu sa vie grandement changer suite au succès planétaire de sa « Madone des Sleepings ». Son élégance, son indéniable séduction, vont lui ouvrir bien des portes, dont notamment celles de la diplomatie. Bombardé attaché d'ambassade, Maurice Dekobra va donc voyager, aux frais de l'État, aux quatre coins du monde où il puisera de nouvelles inspirations pour ses romans.
Les années 30 marquent à la fois l'aboutissement de la carrière de Maurice Dekobra, enfin reconnu comme un estimable écrivain, et le déclin progressif de ces très frivoles Années Folles dont il fut une plume emblématique. Publié pile en 1930, « le Sphinx A Parlé » acte la transformation du style Dekobra en une littérature presque convenable, dépouillée de cet hédonisme lyrique et décadent qui fit tout le charme de cet auteur, mais aussi de son ironie, de son amour du "nonsense" britannique et donc de ses "dekobrades", répliques et punchlines aux métaphores volontairement ampoulées qui font ici cruellement défaut. Véritablement conçu, pensé, rédigé pour devenir un best-seller international, au point même de ne plus inclure un seul personnage français, « le Sphinx A Parlé » est un Dekobra pour tous publics, dont le formatage aurait pu être facilement désastreux, mais qui se révèle au final bien plus intéressant qu'on pouvait le supposer.
Rompant avec ses traditionnelles héroïnes décadentes et collectionneuses d'hommes, Maurice Dekobra fait de son « Sphinx » un roman d'hommes et d'amitié virile, où la femme passe relativement au second plan, nimbée de plus d'une ambiguïté suspecte. Par ailleurs, l'intrigue est tout à fait déconcertante :
le capitaine Edward Roberts appartient à l'armée coloniale britannique, détaché dans l'armée des Indes. Lors d'une permission en Angleterre, il fait connaissance avec Alba, la jeune épouse fort libertine d'un riche et vieillissant salonnier de Londres, Miguel de Nogualès. le couple est tout à fait libre, et Alba n'hésite pas à choisir ouvertement ses amants parmi les invités de son mari. Mais néanmoins, la passion charnelle qui s'empare d'Edward et d'Alba les amène bientôt à une relation de plus en plus étroite, ce qui embarrasse le mari. Miguel de Nogualès, pour autant, sait comment se débarrasser des importuns : son salon est aussi le plus célèbre tripot clandestin de Londres, et d'un air amical, Miguel de Nogualès invite Edward à une partie de poker enfiévrée durant laquelle, avec l'aide de complices et de cartes truquées, il dépouille non seulement Edward de tout son argent, mais lui ouvre un royal crédit pour qu'il tente de se refaire. Au bout de la nuit, Edward se retrouve avec une dette de jeu de près de 200 000 £.
Pour autant, fort riche, Miguel de Nogualès ne compte que modérément sur cet argent, et laisse tout le temps à Edward d'économiser longuement afin de le rembourser. Cependant, en tant que soldat ruiné et criblé de dettes, Edward ne sera plus le bienvenu au salon des Nogualès. Quant à Alba , bien que le procédé de son mari l'écoeure, elle trouve déjà beaucoup moins de charme à Edward à présent qu'il est pauvre, et rompt brutalement avec lui.
Cette double forfaiture est un coup rude pour le capitaine Roberts, qui s'était profondément attaché à Alba. Miné par le chagrin et la dépression, se sentant incapable de retourner en Inde et de faire face à ses camarades, il demande et obtient une mutation dans l'endroit le plus dangereux de l'empire britannique : l'avant-poste de Karam, non loin de Kaboul, en Afghanistan. Bâti au flanc d'une montagne, cerné par des steppes désertiques, parsemées de rocs calcaires, ce petit fort est régulièrement attaqué par des hordes de rebelles sanguinaires. Edward espère bien ne pas y faire long feu, et y mourir rapidement en soldat. Mais lorsqu'après un long voyage jusqu'à Kaboul, il entre en fonctions à Karam, l'ambiance est plus calme que prévu, les attaques des rebelles sont rares et désorganisées, et finalement Edward prend son parti d'une existence solitaire et relativement morne.
Un an plus tard, Edward Roberts apprend par télégramme qu'on va lui adjoindre un sous-fifre, le lieutenant Fred Nicholson, qui lui aussi a effectué une demande pour venir moisir dans cet avant-poste aux confins du monde civilisé.
Dès l'arrivée de Fred Nicholson, Edward sent chez son nouvel assistant une blessure secrète et ne tarde pas à lui faire avouer que sa demande de mutation a été aussi motivée par un chagrin d'amour, suite à une romance vécue avec une lady britannique rencontrée en Égypte. Mais autant Edward, bouleversé et entreprenant face à cette détresse si proche de la sienne, voudrait en savoir plus, autant Fred Nicholson, pudique et ayant cette méfiance obstinée des jeunes hommes face à des aînés trop familiers, se refuse à en dire plus long et se mure dans une affliction autiste. Cédant à une curiosité malsaine, peut-être aussi mû par un instinct secret, Edward profite d'une absence de Nicholson pour fouiller sa chambre et découvre ébahi, dans la valise de Nicholson, une photo d'Alba de Nogualès.
Dès lors qu'ils apprennent qu'ils ont eu le coeur brisé par la même femme, Edward et Fred se vouent aussitôt une haine et une jalousie féroce, d'autant plus qu'ils sont contraints de vivre et de travailler ensemble. La tension entre eux devient de plus en plus violente, jusqu'à ce qu'Edward, informé de la présence d'une vingtaine de rebelles dans une passe à quelques kilomètres, y envoie Nicholson, sous un prétexte de mission de routine, seul et insuffisamment armé, afin qu'il périsse sous les balles ennemies.
Mais au fur et à mesure que le soir descend et que la certitude de savoir son rival bientôt mort apaise la colère d'Edward, ce dernier réalise soudainement la monstruosité de ce qu'il vient de faire, et au coeur de la nuit, muni de plusieurs armes, il part sur les traces de Nicholson. Il le retrouve à l'endroit même où il l'avait envoyé. Les rebelles semblent s'être déplacés, mais l'un d'eux est resté pour torturer le prisonnier anglais. Au moment où Edward tombe nez à nez avec lui, l'Afghan se préparait à achever Nicholson. Une balle l'arrête net, mais la détonation allant certainement être entendue de ses complices, Edward se hâte de charger le corps supplicié de Nicholson sur son dos, et rentre précipitamment au fort, échappant de justesse aux balles ennemies des rebelles lancés à sa poursuite.
Ce sauvetage héroïque scelle une amitié fidèle entre les deux hommes, amitié renforcée par le fait que leur courage est récompensé par leur hiérarchie sous la forme d'une double montée en grade, suivie d'une très longue permission à Calcutta en attendant une nouvelle affectation pour l'un, une complète rémission pour l'autre.
Durant ces nombreux mois, les deux hommes s'offrent une vie de patachons bien méritée, car Calcutta, au temps de la colonisation, offrait une vie nocturne particulièrement intense. le major Stead, un des plus vieux amis d'Edward, leur présente un soir une ravissante indoue, qui n'est autre que la belle-soeur du Maharadjah de Bangamer. Séduite par les deux hommes, elle les invite à un séjour au palais de Bangamer pour une initiation à la chasse au tigre. Les deux hommes acceptent, mais s'étant rendu au palais quelques semaines plus tard, ils y découvrent deux invités inattendus : le prince de Zorren, et sa compagne… Alba de Nogualès.
Car en effet, à Londres, le tripot clandestin de Miguel de Nogualès, grâce auquel il dépouillait certains prestigieux invités, a vu un jour la police londonienne débarquer sans aménités. La tricherie du richissime homme d'affaires étant révélée, celui-ci a été condamné à une lourde peine de prison, et à une confiscation de ses biens. Afin de ne pas être arrêtée elle aussi, Alba s'est enfuie en Égypte, où elle avait quelques relations sûres. C'est là qu'elle rencontra Fred Nicholson, qui ne fut pour elle en réalité qu'une passade. Puis on lui présenta, au cours d'une soirée, le prince de Zorren, richissime monarque oriental, pour lequel elle quitta sans un remords le jeune Nicholson.
le prince de Zorren est un grand voyageur, dont la vie se résume à séjourner chez d'autres monarques du Moyen-Orient. Mais c'est un homme peu sensuel, qui ne s'est entiché d'Alba que pour le prestige d'avoir une compagne occidentale avec laquelle s'afficher. Alba espère mieux, et lorsqu'elle se retrouve en présence d'Edward, elle se jure de profiter de ce séjour de chasse pour le reconquérir. Edward, lui, est évidemment gêné : il ressent toujours du désir pour Alba, et apprécie d'apprendre que la tricherie et l'arrestation de Miguel de Noguarès le délivrent de son douloureux endettement. Mais il n'est plus amoureux d'Alba, et tient d'autant moins à renouer avec elle que son ami Fred ne le supporterait pas. Peu habituée à être repoussée, Alba est furieuse de constater la force de l'amitié qui unit ses deux anciens amants. Aussi va-t-elle profiter de ce séjour à Bangamer pour essayer de pousser ces deux hommes à piétiner leur amitié et à s'entretuer pour elle…
« le Sphinx A Parlé » frappe par le sérieux et le romantisme de son intrigue et de sa narration. Si un siècle plus tard, ce roman ambitieux accuse tout de même son âge, il reste passionnant, envoûtant, soigneusement rythmé et évoque volontiers les ambiances des romans de Claude Farrère ou de Pierre Benoît. L'influence de « L'Atlantide » est d'ailleurs tangible, même si Dekobra ne pouvant en reprendre le climat fantastique, « le Sphinx A Parlé » reste un mélodrame colonial plus ordinaire, quoique un peu tiré par les cheveux sur le plan scénaristique.
Maurice Dekobra n'en sort pas moins sa plus belle plume pour rédiger ce drame avec soin, sans aucune des fioritures mondaines auquel il était habitué, prouvant par l'exemple qu'il pouvait faire des romans tout à fait académiques, voire modernes, même si la modernité de ce roman est tout de même bien loin derrière nous.
L'essentiel et le plus remarquable, c'est avant tout que Maurice Dekobra ait aussi bien réussi une métamorphose littéraire dans laquelle il aurait pu véritablement se perdre. Si « le Sphinx A Parlé » n'a pas l'ampleur féroce et jouissive de ses romans des années 20, Maurice Dekobra n'en signe pas moins un ouvrage de belle facture, assez bien documenté, et qui, en dépit du lissage de toutes les aspérités d'un style jusque là libre et insolent, parvient à n'être ni bâclé, ni raté, ni même quelconque. Cela reste du Dekobra, avec tout ce que cela peut impliquer comme "bricolage littéraire". Seulement, le drame ici offre des qualités nouvelles et une atmosphère particulièrement cinétique, qui font oublier à la fois l'absence des qualités anciennes et l'intrigue tantôt rocambolesque, tantôt prévisible. Et contre toute attente, on se laisse volontiers embarquer dans cette étrange mélodrame…
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