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Une femme avec personne dedans
Chloé Delaume
Seuil

Isabelle Bordelin, dite Silence Majuscule, rêve de devenir Chloé Delaume. Celle-ci refuse de publier le texte qu'elle lui envoie, son style n'étant qu'une grossière caricature du sien ; en réaction elle se suicide.
Voilà comment débute le nouveau Chloé Delaume. C'est à la fois un roman et un essai. le texte nous propose une analyse de son Moi pluriel (+ Sur-moi + Ça...) et de ses variantes ainsi qu'une tentative de définition de l'autofiction - obsession delaumienne -.
Dès le début le livre joue cartes sur table : « Je m'appelle Chloé Delaume. Je suis un personnage de fiction. Livre et vie s'entremêlent, mon Moi en trois parcelles, auteur, narratrice, héroïne. [...] J'écris et je m'écris. »
On suit le parcours déconstruit de Chloé Delaume au-delà de sa bipolarité clinique, à travers sa tripolarité fictionnelle.
Le récit interpelle par la difficulté de sa lecture. le texte est exigeant d'un point de vue littéraire, assez opaque au premier abord, le lecteur - tour à tour confident, témoin, ennemi - peut s'y perdre - ou s'ennuyer... -, mais les qualités stylistiques sont indéniables.
L'auteure joue sans cesse sur la construction et la déconstruction, tant du texte que de sa personne parfois avec humour ou dérision, parfois avec cynisme.
Rappelons que Chloé Delaume est un pseudonyme, ou plutôt une nouvelle personnalité/identité qu'elle s'est fabriquée pour réécrire sa vie ; ainsi, le travail d'autofiction, le désir de « s'écrire » prend un autre relief, tout comme la mise en scène/en écriture de sa vie, en représentation - littéraire - permanente.
Une femme avec personne dedans est aussi un pamphlet contre un certain type de féminisme, de conception de la femme, celui qui lutte contre la prostitution comme choix de vie, celui qui réserve aux femmes le devoir et non le droit de s'épanouir à travers la maternité. Chloé Delaume fait la nique à cette vision consensuelle, hypocrite et formatée de la femme. Elle est une militante farouche de l'anti-enfantement. Cette position explique en partie le titre du livre : être, devenir ou se penser « femme » ne consiste pas à avoir quelqu'un dedans, à enfanter, à donner la vie ; d'ailleurs l'auteure assume le droit de donner la mort dans ses livres - ce prolongement de la vie -, elle tue - parfois tente de se tuer sans succès -, elle assassine, revendiquant ce pouvoir suprême que confère l'écriture.
Une femme avec personne dedans demeure un livre dérangeant et inquiétant qui laisse toute sa place à l'écriture.
L'aspect obsessionnel de son auto-analyse à travers l'autofiction devient au bout d'un moment pesant. On sent un goût prononcé pour l'exhibitionnisme sans concession. On glisse un peu trop souvent dans la masturbation intellectuelle à sens unique.
L'écriture prend aussi une dimension chamanique, proche de la magie noire ; le discours narratif devient alors incantatoire, mais il s'agit d'une incantation de la destruction de la norme, du moule littéraire et humain.
La richesse philosophique, politique et sociologique du livre le dessert aussi, notamment lorsqu'il prend l'aspect d'un fourre-tout ; on assiste aux réflexions de Chloé Delaume sur l'amour, le sexe, la prostitution, le couple, la pensée straight, la maladie, le suicide, etc.
Le roman propose des envolées lyriques de haut-vol mais également des passages plus drôles et légers, néanmoins tout parait trop contrôlé, l'architecture narrative est trop voyante ; la trinité « auteur, narratrice et héroïne » perd de son humanité, s'enfermant dans une tour de lettres où elle pratique - avec ou sans plaisir ? - l'onanisme littéraire. L'obsession de maîtriser le récit pour contrôler sa vie a ses limites...
Une femme avec personne dedans demeure certes une curiosité littéraire, mais l'écriture de l'intime exhibée à outrance n'est pas toujours convaincante.

http://faranzuequearrieta.free.fr
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Dans ce nouveau roman, Chloé Delaume continue son travail de déconstruction totale : déconstruction de la langue, de son histoire familiale, de sa genèse en tant que Chloé Delaume, personnage de fiction.

Ce livre est un roman d'amour autant que le récit d'une Apocalypse individuelle. Ceux qui ont aimé ses précédents romans « Les Mouflettes d'Atropos », « le cri du sablier », « Certainement pas », « Dans ma maison sous terre » aimeront tout autant si ce n'est plus cette femme avec personne dedans. Personne, c'est vite dit, pour une des voix les plus singulières de la littérature française contemporaine. Chloé Delaume, c'est une voix grave de petite fille orpheline, un rythme syncopé, un sillon douloureux qu'elle creuse. Dans ce roman, il est question d'un trio amoureux qui tente de trouver une alternative au couple hétérosexuel et au modèle bourgeois.

La suite sur le blog : http://lepandemoniumlitteraire.blogspot.com/2012/01/une-femme-avec-personne-dedans-de-chloe.html
Lien : http://lepandemoniumlitterai..
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Impossible de classifier cette écriture déroutante, tellement déroutante qu'il m'a fallu 5 semaines pour lire les 40 premières pages et que finalement, par curiosité, j'ai visionné "La Grande Librairie" où elle était invitée et c'est cette anecdote sur les chaussures des putes qui m'a conquise ainsi que son courage à affirmer qu'elle se veut nullipare!
Une femme pareille ne peut écrire qu'un texte pareillement percutant!
Je viens tout juste de le terminer après l'avoir repris du début.
Je le conseille donc à tous les lecteurs qui ne craignent pas la langue abrupte, violent et pourtant riche d'un élan vital: l'amour!
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Une femme avec personne dedans. Une héroïne, une narratrice, un auteur. Un récit autofictif. Nul besoin de répéter encore la trame, ce qui sous-tend l'arrivée de l'écriture. Qu'importe le déclencheur. Chloé Delaume, son écriture intelligente, rebrousse-poil, ne cesse de scander la responsabilité de l'écrivain. Ne cesse de démontrer que de la souffrance ne nait pas forcément l'oeuvre. Elle chante par sa plaie, oui, mais ce n'est pas la plaie qui fait art. de lyrisme en quizz biba_jeune-fille_dégotter_couillidé. Se frotter au réel, se cogner au réel, pour que le personnage autofictif, la réinvention, fasse fi de la fiction.
Une question alors. Est-ce par ce qu'il y a plaie que l'on est lecteur ? Pourquoi ce récit nous touche-t-il ? Parce qu'il a émotion ? Parce qu'il y a écho, au-delà du tissu narratif et biographique ? Parce que l'on se prête à ce jeu littéraire, parce que l'on explore ainsi son propre je ? Et le moi dans tout ça ?
J'aime l'idée d'une écriture performative. Que les mots puissent faire advenir. Qu'ils soient faits acte. Mais la lecture est-elle performative ? Est-ce que parce que je m'identifie, je deviens lecteur ? Non, sinon l'autobiographie suffirait. Est-ce que moi aussi, parce que je suis une femme avec personne dedans, je parviendrais à me sentir seule et libre ? En allant plus loin, la lecture fait-elle de moi une femme avec personne dedans, où le révèle-t-elle seulement ?
Beaucoup de questions, qu'importent les réponses. L'oeuvre est là, hic et nunc.
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Un texte expérimental bousculant toutes conventions de genre. Entre Antonin Artaud, Boris Vian et Virginie Despentes, un texte explosif et inclassable. Une écriture qui coupe le souffle.
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«Une femme avec personne dedans», un titre évocateur : une femme qui refuse la maternité. Chloé Delaume, l'auteure, semblait être une féministe enthousiaste dans les deux interviews lues au moment de la promotion de l'ouvrage. Reste que se fier à l'étiquette roman apposée sur la couverture est une mauvaise idée : c'est bien de l'autofiction dont s'il s'agit et si vous n'avez guère le goût des choses morbides, il vaut mieux passer son chemin. Il est, je trouve, très délicat de parler d'un livre dans lequel l'auteure se proclame auteur-narrateur-personnage, parce que les auteurs d'autofiction parlent d'eux avec une impudeur extraordinaire.

Si on se tient au livre, la promesse d'un féminisme joyeux doit être vite écarté. le texte semble constitué de fragments, souvent assez ennuyeux et pédants, sans que l'on voit vraiment où l'auteure veut en venir. Finalement, elle en vient justement à un questionnaire, qui permet en quelques questions de décider qui vous êtes, ce que j'ai trouvé un comble pour quelqu'un qui a écrit une pile de livres d'auto-analyse. Mais sans doute écrivain et lecteurs ont des intériorités d'un intérêt très variable. le meilleur passage est celui où Chloé Delaume passe en revue les raisons invocables pour refuser d'enfanter.
Pour le reste, disons que le monde se divise en deux catégories : ceux qui apprécient l'autofiction, et ceux qui ont des difficultés avec ce genre littéraire. Pour cette seconde catégorie, dans laquelle je me situe, j'ai une fois de plus senti cette drôle d'impression d'être acculée à un voyeurisme pas toujours ragoûtant, et au moment d'en sortir, d'être jugée par quelqu'un (l'auteure, la narratrice ? Mais cela a-t-il une importance ?) qui cite Lacan mais indique frapper son psy lorsqu'il émet une idée qu'elle désapprouve.
Lien : http://www.vivelaroseetlelil..
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Un livre très brutal, probablement le plus brutal que j'ai pu lire de cette autrice.
La plume est géniale : on retrouve son adresse pour glisser des vers blancs, des assonances et allitérations à foison... On est souvent emportés par la poésie du texte mais l'histoire est réelle (comme toujours avec Choé Delaume) et, ATTENTION, elle sera dérangeante pour certains lecteurs sensibles !
Nous parlons bien de deux folies qui se heurtent au sein d'un triangle amoureux et qui mènera l'une des amoureuses au suicide. La survivante qui écrit ses livres se déresponsabilise du drame et si l'on comprend aisément pourquoi car elle ne cache pas ses troubles psychiatriques et qu'il est facile de comprendre qu'elle a besoin de se déresponsabiliser pour survivre au drame, ses mots sont parfois durs pour la mère endeuillé qui cherche à comprendre et à trouver un responsable.
D'autre part, il s'agit d'une diatribe très violente sur la maternité où toute mère se sentira jugée de s'être "reproduite"
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« Ah ! On a le droit d'écrire comme ça » disait Nina Yargekov dans une interview, au sujet de ses coups de coeur littéraires, faisant référence à Chloé Delaume. Alors moi, comme j'apprécie beaucoup le travail de Nina Yargekov, j'ai voulu lire Chloé Delaume. Oui, je ne voulais pas passer à côté d'une lecture vitale, vous comprenez ? le premier Delaume qui me soit tombé sous la main est « Une femme avec personne dedans », publié en 2012.

Que dire ? le mot convenu, d'abord : OVNI. Ou plutôt OLNI, mais ça revient au même.

Chloé Delaume adopte une écriture résolument expérimentale en compressant la phrase, procédant par juxtaposition, accumulation, s'affranchissant des verbes et de la ponctuation interne, provoquant des chocs poétiques d'une incroyable fulgurance. Quant au sens du propos... il se révèle difficile à appréhender, à vrai dire. Hypersexualisé, le texte aborde, de façon tout à tour conceptuelle ou très crue, les thématiques de la violence, de la mort, de l'amour, de la liberté, de la construction de soi...

Mais au-delà, il faut dire que cette oeuvre est tout autant une autofiction savante et parabolique qu'une réflexion performative sur la création littéraire. Et là je me demande bien comment je peux vous donner envie de lire ce texte après avoir écrit ces mots passablement barbares. Alors peut-être, plus simplement (mais sans garantie) : éléments autobiographiques, fictifs, mythologiques, théoriques (et plus si affinités) se mêlent et forment un joyeux gloubi-boulga résolument expérimental, une quête du Je qui pousse le genre romanesque dans ses derniers retranchements.

C'est peut-être, paradoxalement, ce qu'on reprochera principalement à ce roman, alors que c'est l'essence même de l'écriture de Chloé Delaume : ce côté élitiste, fumeux, artificiellement complexifié, au point d'en délaisser l'avancée de l'intrigue, au point peut-être de perdre en cours de route un lecteur pourtant conquis par la voix originale et percutante de l'auteur.

(Par parenthèse, majorité de b, talonnée par les a , et très peu de c ; ceux qui liront jusqu'au bout comprendront...)

La lecture d'une autre oeuvre de Chloé Delaume, d'ici quelques semaines (le temps de me remettre de cette drôle d'aventure), me permettra de confirmer ou d'infirmer mes premières impressions.

Oui, je suis très consciencieux, je sais.
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Époustouflant ! Un style inimitable, une écriture à jalouser allègrement, une littérature à part, je ne me lasse pas de dévorer tant de génie. Chloé Delaume est un personnage qu'on ne peut oublier.
C'est le deuxième ouvrage que je lis de cette auteure et je reste toujours aussi admirative.
A lire à coeur ouvert.
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roman, prose poétique, exercice d'écriture automatique???? à vrai dire je n'ai pu dépasser le chapitre 3. au début je me suis dit : "ça va me plaire!" et j'ai vite déchanté. l'auteure colle des mots les uns après les autres, en trifouillant bien onb peut toujours interpréter un sens mais bon, faut pas exagérer... l'époque des surréalistes est révolue, hein, faut passer à autre chose ;-)
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