Il nous libérait de toutes les entraves que l’idée de copier apportait à nos instincts de peintre. À l’atelier où le réalisme le plus grossier avait succédé à l’académisme falot des derniers élèves d’Ingres ; où l’un de nos professeurs, Doucet, nous conseillait de relever l’intérêt d’un sujet d’esquisse, emprunté à la Passion de J.-C., en utilisant des photographies de Jérusalem ; — nous aspirions à la joie de « s’exprimer soi-même », que réclamaient si instamment aussi les jeunes écrivains d’alors. La théorie des équivalents nous en fournissait les moyens, nous l’avions tirée de son imagerie expressive ; il nous donnait droit au lyrisme ; et par exemple, s’il était permis de peindre en vermillon cet arbre qui nous avait paru, à tel instant, très roux, pourquoi ne pas traduire plastiquement en les exagérant ces impressions qui justifient les métaphores des poètes : affirmer jusqu’à la déformation la courbure d’une belle épaule, outrer la blancheur nacrée d’une carnation, raidir la symétrie d’une ramure que n’agite aucun vent ?
Incidemment la question se pose : faut-il restaurer ? Maintenant que les Musées, les sociétés d’amis des monuments, les catalogues et les archéologues ont tari ou à peu près notre faculté créatrice, faut-il faire l’éloge du vandalisme ? Nos pères, au XVIIe et au XVIIIe siècles, se croyaient permis d’ajouter, dans le goût de leur temps, des ornements, des autels, des transepts, des façades aux vieilles nefs des cathédrales. Une verrière tombait en ruines : ils la remplaçaient sans scrupules, ou simplement la consolidaient de plombs quelconques, au hasard des cassures. Leur style à eux, croyaient-ils, était toujours préférable aux styles du passé. Cette illusion féconde nous manque, définitivement.
« De toute part, disait Albert Aurier dans l’article-manifeste de la Revue Encyclopédique, on revendique le droit au rêve, le droit aux pâturages de l’azur, le droit à l’envolement vers les étoiles niées de l’absolue vérité. La copie myope des anecdotes sociales, l’imitation imbécile des verrues de la nature, la plate observation, le trompe-l’œil, la gloire d’être aussi fidèlement, aussi banalement exact que le daguerréotype ne contente plus aucun peintre, aucun sculpteur digne de ce nom ».
Qu’est-ce qui distingue entre eux les peintres modernes ? C’est souvent la vision (comme je l’ai expliqué plus haut) : plus souvent le procédé, le sujet plus souvent encore.
Quelles imaginations identiques ! Ils suivent tous la même mode. Et si l’un s’avise de révéler une fantaisie nouvelle, — au lieu de modifier, oh ! très peu, comme il convient, l’éclairage ou le modelé de l’autre, — le beau scandale !
(Définition du Néo-traditionnisme, page 12)
Incidemment la question se pose : faut-il restaurer? Maintenant que les Musées, les sociétés d'amis des monuments, les catalogues et les archéologues ont tari ou à peu près notre faculté créatrice, faut-il faire l'éloge du vandalisme?
A la fin des années 1880, en réaction contre l?académisme et l?imitation illusionniste du réel, un groupe d?artistes se faisant appeler « les Nabis » veut abattre la frontière entre beaux-arts et arts appliqués. Les plus connus sont Bonnard, Vuillard et Maurice Denis. Isabelle Cahn, co-commissaire de l?exposition « Les Nabis et le décor », revient sur le parcours de cette exposition exceptionnelle qui réunit une centaine de peintures, dessins, estampes et objets d?art et présente aux visiteurs des ensembles décoratifs aujourd?hui dispersés.
« Les Nabis et le décor. Bonnard, Vuillard, Maurice Denis, ? » du 13 mars au 30 juin 2019 au Musée du Luxembourg.
Cette exposition est organisée par la Réunion des musées nationaux - Grand Palais et les musées d?Orsay et de l?Orangerie, Paris.
« Les Nabis et le décor. Bonnard, Vuillard, Maurice Denis, ? » du 13 mars au 30 juin 2019 au Musée du Luxembourg.
#ExpoNabis
La billetterie est ouverte : https://museeduluxembourg.fr/expositions/les-nabis-et-le-decor
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