Citations sur Blade Runner (Les androïdes rêvent-ils de moutons électriqu.. (139)
(Devant La Flûte enchantée de Mozart)
Cette répétition, puis le spectacle, vont prendre fin, les chanteurs vont mourir, et en fin de compte la dernière partition de sa musique sera détruite d'une manière ou d'une autre. Un jour, le nom même de Mozart aura été oublié, la poussière aura gagné. Sinon sur cette planète, du moins sur une autre. On peut y échapper quelque temps. Tout comme les andros peuvent m'échapper et s'accorder un court répit. Mais on finit toujours par les avoir, moi ou un autre chasseur de primes. D'une certaine façon, comprit-il, je fais partie du processus entropique de destruction de la matière. La fondation Rosen crée des choses que moi je défais.
On exigera de toi que tu fasses le mal où que tu ailles. C'est le fondement même de l'existence, d'être forcé à aller l'encontre de sa nature. Chaque créature vivante doit le faire un jour ou l'autre. C'est l'ombre ultime, la défaite de la création. C'est la malédiction à l’œuvre, la malédiction qui se nourrit de toute vie. Partout dans l'univers.
Quelques citations/extraits du livre Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? (Blade Runner) (1968) de Phillip K. Dick (Édition J’ai lu, 2012), traduit de l’anglais par Sebastien Guillot :
• « De plus, plus personne à présent ne se rappelait pourquoi la guerre avait éclaté, ni même qui l’avait gagnée — pour peu qu’il y ait un gagnant. » p. 27.
• « Et pourtant, ici et là, il y en avait encore pour refuser d’émigrer ; ce qui, même pour les individus concernés, représentait quelque chose de fondamentalement irrationnel. En tout logique, la moindre personne normale aurait déjà dû émigrer. Peut-être la Terre demeurait-elle un lieu familier à leurs yeux, en dépit de ses cicatrices. À moins que les réfractaires ne s’imaginent que le linceul de poussière recouvrant ce monde auquel ils s’accrochaient allait finir par se lever. » p. 27-28.
• « Debout devant son récepteur de télé inerte, le pauvre hère avait l’impression que le silence était devenu visible, et à sa manière vivant. Vivant ! Ce n’était pas le première fois, loin de là, qu’il ressentait son austère approche ; quand il arrivait, le silence entrait en trombe sans la moindre subtilité, manifestement incapable d’attendre. Le silence du monde ne pouvait retenir son appétit. Plus maintenant. Pas alors qu’il avait pratiquement gagné. » (en parlant d’Isidore) p. 32.
• « L’empathie, avait-il un jour décidé, devait être réservée aux herbivores, ainsi qu’aux omnivores capables de départir d’un régime carné. Parce que, en fin de compte, le don d’empathie brouillait les frontières entre chasseur et chassé, entre vainqueur et vaincu. […] Il suffisait qu’une seule créature éprouve de la joie pour que toutes les autres en reçoivent un fragment. Mais le souffrance d’un seul être suffisait aussi à en faire planer l’ombre sur tous les autres. Un animal grégaire tel que l’homme en tirait un surplus de chance de survie ; une chouette ou un cobra n’y aurait pas survécu. Le robot humanoïdes était manifestement un prédateur solitaire. » p. 45.
• « Ceux qui sont morts ne pouvaient rien emporter, et ceux qui ont émigré ne voulaient rien emporter. » (Isidore à Pris) p. 82.
• « (en italique) Ça vient peut-être de moi, se dit Isidore en son for intérieur. (en italique) Peut-être que quand on se détériore, on redégringole l’échelle de l’évolution — comme je l’ai fait moi-même, quand on sombre dans l’abîme du monde du tombeau, du fait d’être un spécial. » p. 90.
• « (en italique) Cette répétition, puis le spectacle, vont prendre fin, les chanteurs vont mourir, et en fin de compte la dernière partition de sa musique sera détruite d’une manière ou d’une autre. Un jour, le nom même de Mozart aura été oublié, la poussière aura gagné. Sinon sur cette planète, du moins sur une autre. On peut y échapper quelque temps. Tout comme les andros peuvent m’échapper et s’accorder un court répit. Mais on finit toujours par les avoir, moi ou un autre chasseur de primes. D’une certaine façon, comprit-il, je fais partie du processus entropie de destruction de la matière. » p. 116. (Rick avant de tuer l’androïde Luba)
• « Apparement, nous sommes privés d’un talent spécifiquement humain — on appelle ça l’empathie, si je ne m’abuse. » (L’androïde Garland à Rick) p. 143.
• « — Quand le chasseur de primes n’est pas là, fit Resch sur un ton sans humour, les androïdes dansent. » p. 145.
• « Je commence à comprendre ce que ressentent les androïdes. Je crois que tu comprends ce que ça signifie. Tu l’as dit toi-même ce matin — « Ces pauvres andros ». Donc tu sais de quoi je parle. C’est pour ça que j’ai acheté la chèvre. Je n’avais rien ressenti de tel. C’est peut-être juste une dépression, comme celle que tu as. Je comprends maintenant à quel point tu dois souffrir quand tu es déprimée. J’ai toujours cru que tu aimais ça, que tu aurais pu te secouer à n’importe quel moment, sinon seule du moins avec l’orgue d’humeur. Mais plus rien ne vous importe quand on est à ce point déprimé. On devient apathique, on a l’impression que plus rien ne vaut la peine. On se désintéresse de son propre état, puisque plus rien n’a d’importance… » (Rick à sa femme) p. 195-196.
• « — On exigera de toi que tu fasses le mal où que tu ailles. C’est le fondement même de l’existence, d’être forcé à aller à l’encontre de sa nature. Chaque créature vivant doit le faire un jour ou l’autre. C’est l’ombre ultime, la défaite de la création. C’est la malédiction à l’œuvre, la malédiction qui se nourrit de toute vie. Partout dans l’univers. » (Mercer à Rick pendant qu’il est dans la boîte à empathie) p. 200.
• « (en italique) La marche du temps. Le cycle de la vie. Qui se termine ici, au dernier crépuscule. Avant le silence de la mort. Il percevait dans tout cela un univers en miniature, complet. » (Rick avant d’aller tuer les trois androïdes restants) p. 206.
• « Est-ce une perte ? répéta-t-elle. Je l’ignore. Je n’ai aucun moyen de le savoir. Qu’est-ce que ça fait d’avoir un enfant ? Et qu’est-ce que ça fait de naître, d’ailleurs ? Nous ne naissons pas, nous ne grandissons pas… Au lieu de mourir de vieillesse ou de maladie, nous nous usons comme des fourmis. Des fourmis… voilà ce que nous sommes. Pas vous, moi, je veux dire. Des machines réflexe chitineuses qui ne sont pas vraiment vivantes. » p. 215.
« Je n’arrive pas à supporter cette façon dont vous autres, les androïdes, parvenez à accepter votre sort. » (Rick à Rachael qu’il ne tue pas finalement) p. 221.
« Dans l’obscurité de l’habitacle, l’extrémité de sa cigarette rougeoyait comme l’abdomen de quelque luciole en mal d’amour ; un signe immobile, indéfectible, de la victoire de Rachael Rosen. De sa victoire sur lui. » p. 223.
• « Il referma la porte de l’habitacle, envoya un baiser à Iran de la main et s’envola dans la nuit. À une époque, j’aurais vu des étoiles. Mais maintenant, il ne reste plus que la poussière ; ça fait des années que personne n’a vu la moindre étoile, pas sur Terre en tout cas. Je vais peut-être aller là où on peut en voir, se dit-il tandis que son véhicule prenait de la vitesse et gagnait de l’altitude. Il s’éloignait de San Francisco, pour se diriger vers la désolation inhabitée du Nord. Là où aucun être ne se serait jamais rendu. À moins de sentir approcher la fin. » p. 251.
• « Je monte en roulant, songea-t-il. Comme les pierres. Je fais ce qu’elles font, sans volonté. Et sans que ça ait la moindre signification. » (Rick pendant son ascension de la colline) p. 256.
• « Mercer n’est pas un escroc. Ou alors c’est toute la réalité qui est une escroquerie. » (Rick) p. 259
- Quand le chasseur de primes n'est pas là, fit Resch sur un ton sans humeur, les androïdes dansent.
"Je me demande ce que ça fait d'embrasser une androïde", songea-t-il. S'inclinant de quelques centimètres vers l'avant, il posa un baiser sur ses lèvres sèches. Rien. Rachel demeura impassible. Comme si cela ne lui faisait rien. Et pourtant Rick avait l'intuition du contraire. Mais peut-être prenait-il ses désirs pour des réalités.
Nous comptons trop... je vais te dire, Roy, sur quoi nous comptons trop : sur une notre fichue intelligence supérieure!
S'il était un androïde, dit Roy, débonnaire, il nous balancerait dès demain matin dix heures. Il partirait pour le boulot, et terminé. Je suis baba d'admiration.
La planète tout entière se transformait peu à peu en dépotoir, et pour qu'elle continue d'être habitable par la population restante, il fallait, de temps en temps, faire disparaître une certaine quantité de débris de toute sorte. Sinon... comme aimait à le dire l'Ami Buster, la Terre ne disparaîtrait pas sous les retombées radioactives, mais sous les ordures ménagères...
Un instant de lecture suffit à le convaincre que pour une fois miss Marsten avait dit la vérité : le Nexus-6 était bel et bien muni de deux trillions de constituants et pouvait choisir entre dix millions de combinaisons d'activité cérébrale possibles. En moins de trois quarts de seconde, un androïde ainsi équipé pouvait adopté l'une des quatorze attitudes de réaction dont il disposait. Aucun test d'intelligence ne concernait un andro pareil. Et puis quoi? Ça faisait des années qu'on n'utilisait plus les tests d'intelligence pour les coincer, depuis les modèles rudimentaires du début des années 80.
Comme la plupart des gens, il s'était parfois demandé pourquoi les androïdes réagissaient n'importe comment aux tests de mesure de l'empathie. De toute évidence, l'empathie appartenait en propre à l'esprit humain, alors que l'intelligence se retrouvait, avec des différences de degré, à tous les échelons de l'évolution, jusque chez les arachnides. D'abord, la faculté empathique ne pouvait appartenir qu'à un animal social. Un organisme solitaire, comme celui de l'araignée, n'en avait aucun besoin. Bien au contraire, l'empathie amoindrirait probablement les chances de survie de l'araignée qui en serait dotée. Elle deviendrait consciente du désir de vivre de sa proie. Avec une telle faculté, tous les prédateurs, y compris les mammifères les plus évolués, les félins, crèveraient de faim...