Jean-Pierre Digard, étudiant le phénomène social qu'est l'intérêt croissant pour la cause animale, confirme par le titre même de son ouvrage l'existence d'un autre phénomène social : le fait que la promotion de l'humanisme ne soit plus que négative. Il corrobore le bon mot du philosophe
Rémi Brague, qui soutenait que "l'humanisme n'est plus qu'un anti-anti-humanisme" - en s'en prenant à une proie facile (en vertu de la trichotomie humaniste, bien connue : bêtes- animaux non humains -dieu(x)).
Son argumentation est peu convaincante à mes yeux, et le fait de présenter l'intérêt croissant pour le respect de la vie animale comme un phénomène social est un bien malin détour pour le discréditer.
"- Il est végétarien ? c'est qu'il est "fils de son temps"", pour reprendre la formule hégélienne.
En réalité, Monsieur Digard ne serait-il pas lui-même, plus encore que l'animaliste, fils de son temps ? N'a-t-il pas eu vent de tous les arguments pro-végétarisme (écologiques, sociaux, éthiques) qu'il balaie tantôt sophistiquement, tantôt du tout (ne prenant pas la peine de les évoquer) ?
Il me semble que l'humanisme qui a acquis que toute vie humaine se valait (ce qui n'est pas le cas d'humanismes bien exclusifs, très européano-centrés, hétérosexuello-centrés, très etc. etc.), nécessairement, est appelé à être dépassé et à s'étendre à tous les animaux non-humains : ce que
Jean-Pierre Digard, semblerait-il, se refuse à concevoir.
Je croyais que l'appartenance de Monsieur Digard au CNRS était gage d'un écrit qui pourrait m'apporter un sérieux contrepoint : il n'en a rien été.
Ce livre est même dangereux à mes yeux, car la lectrice ou le lecteur s'y reportant sans avis préalable sur le sujet s'expose à n'avoir qu'un point de vue partiel (et partial) sur la question.
Déçu de ma lecture, donc.