Bon, soyons tout à fait objectifs. Si vous cherchez un bouquin pour vous marrer, prenez plutôt le dernier BHL, mais SURTOUT ne choisissez pas "
Entre la source et l'estuaire" de
Grégoire Domenach.
Pas que ce soit un mauvais livre. Oh non, que nenni ! Bien au contraire, c'est une petite pépite.
Mais le moins qu'on puisse dire, c'est que l'histoire de Lazare ne prête pas vraiment à se taper une bonne et franche barre de rire.
C'est pas comme si l'actualité était glauque également en ce moment. La guerre en Ukraine, une fête d'halloween qui fait 150 morts en Corée du Sud, un pont suspendu qui s'écroule en Inde avec 100 morts, ...
C'était bien le moment de m'envoyer une bonne rasade de tristesse en plus. Mais bon, ce roman m'est tombé dessus par hasard. On dira que le hasard est ... taquin. Et après tout, en comparaison des Coréens et des Indiens, je suis assis confortablement dans mon fauteuil et la seule chose que je risque, c'est de renverser ma bière. Faut pas pousser le caddie dans la choucroute non plus.
Donc, c'est l'histoire de "Lazare". Cette histoire est racontée par un jeune homme dont on ne connaît ni le nom, ni l'âge exact. Pour faciliter la lecture de la chronique, nous l'appellerons Justin. On sait juste qu'il vogue sur le Doubs avec son père sur un rafiot qu'ils ont retapé pour essayer de le vendre. Ils vivent comme ça, le père et le fils.
Un beau jour, ils s'arrêtent dans un port bordant un petit village de la France dite "profonde" (de manière péjorative par les bobos citadins) et il se décide à flâner sur les quais, les cheveux dans le vent. Mais soudain, lui prend une folle envie de bière fraîche. Et ça tombe bien, il y a le bar de Capitainerie en face. Il va donc y entrer pour boire Justin petit coup (jeu de mot ...)
Et c'est là que Justin va rencontrer Lazare : "[...] il claudiqua laborieusement jusqu'au comptoir où il dispersa quelques pièces. J'aperçus les cicatrices qui fendillaient la moitié de son visage : une balafre, notamment, partait du sommet de son crâne, descendait en équerre sur la tempe et lui traversait l'oreille. le lobe était morcelé, comme si on l'avait mordu, et, sur la partie supérieure de la nuque, la peau était criblée de trous plus ou moins gros. Au niveau de la mâchoire et du menton, c'était pire encore [...]"
Lazare, ce n'est pas son vrai prénom, mais juste son surnom. le surnom que les gens du village lui donnent suite aux "évènements" qui se sont produits ils y a de nombreuses années maintenant. Lazare ... car c'est un revenant. La résurrection de Lazare, le miracle de Jésus, tout ça, raconté dans l'évangile selon
Saint Jean, pour ceux qui aiment le vin de messe.
Justin va être intrigué, voire subjugué par ce personnage atypique qui ne semble pas faire l'unanimité dans le village. Ah, ça y va les rumeurs sur son compte. Il y a autant de versions que d'habitants (une centaine). Il va donc tenter d'en savoir plus. Et quoi de mieux que de demander directement au principal intéressé pour assouvir sa curiosité.
Et voilà mon Justin qui se lance dans une approche tactique de Lazare. Et il s'y prendra plutôt bien puisque Lazare l'invitera à faire un tour de barque sur le Doubs, lors duquel ce dernier lui racontera l'histoire.
Sa version de l'histoire.
L'histoire de sa vie. Je dirais même la triste histoire de sa vie.
Je n'irai pas plus loin car cette histoire mérite d'être découverte au fil des pages. C'est un roman merveilleusement écrit, qui nous immerge dans des flots de mélancolie. le premier roman de
Grégoire Domenach, qui en appellera, je l'espère, d'autres.
Pour conclure cette chronique, je vous soumets une citation, issue du livre, qui finalement illustre plutôt bien le ton et la morale de l'histoire de Lazare.
Page 84 : "Seule manière de consolider son couple, de s'offrir une descendance qui l'accompagnera dans ses vieux jours. N'est-ce pas, après tout, le but du mariage ? Ne pas finir tout seul et faire en sorte qu'il y ait un peu de monde aux funérailles..."