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New York Trilogie tome 3 sur 3
EAN : 9782756009537
112 pages
Delcourt (08/10/2008)
4.15/5   67 notes
Résumé :
Muets ou diserts, instantanés ou développés en plusieurs planches, les portraits que dresse Will Eisner dans New York Trilogie révèlent toute la finesse et l'intelligence de ce grand maître de la bande dessinée contemporaine. Dans ce troisième et dernier tome de sa trilogie consacrée à New York, Will Eisner pose un regard compatissant sur les visages anonymes qui peuplent les grandes métropoles; ces "gens invisibles" avec qui nous partageons, au mieux, un sentiment ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Ce tome contient trois histoires complètes et indépendantes de toute autre. Dans la bibliographie de son auteur, il est paru entre Au coeur de la tempête (1991) et Dropsie Avenue : Biographie d'une rue du Bronx (1995). La première édition date de 1993. Il a entièrement été réalisé par Will Eisner (1917-2005) : scénario et dessins, avec des nuances de gris. Cette histoire comporte 110 pages de bande dessinée.

Sanctuaire (32 pages) - Dès son plus jeune âge, Pincus Pleatnik avait appris à se cacher pour éviter d'être vu, d'être trouvé, pour vivre tranquillement. Il avait instinctivement compris qu'être invisible fait partie des compétences primordiales dans l'art de la survie en milieu urbain. En marchant sur le trottoir, il évitait de poser le pied sur les fissures. Il donnait toujours une petite pièce aux mendiants. Il était tellement dépourvu de tout trait remarquable que les filles à la fac n'arrivaient pas à se souvenir de son nom, que les caissiers des magasins ne le remarquent jamais. Il exerce un métier de repasseur blanchisseur dans l'arrière-boutique, n'ayant jamais de contact avec les clientes ou les clients. Mais un matin en lisant son journal, il constate que la rubrique nécrologique fait état de son décès.

Will Eisner n'en est pas à son coup d'essai pour raconter la vie d'individus banals. En plus il annonce dès le titre de l'ouvrage qu'il va s'intéresser à des gens en rien remarquable, qui n'existent pas aux yeux des autres. Pincus Pleatnik est un cas d'école : il fait tout pour ne pas être remarqué avec une efficacité telle que personne ne se soucie de lui. Il n'y a que son employeur qui connaisse son nom et qui le reconnaisse. Par la force des choses, le lecteur a sa vision sur sa propre existence, et a une conscience plus ou moins aiguë du nombre d'êtres humains ayant vécu avant lui, dont il n'a jamais entendu parler et dont il ne saura jamais rien, sans parler des milliards d'êtres humains vivant en simultanéité avec lui dont il ne connaîtra jamais qu'une poignée. Il est fort vraisemblable que lui-même ne laissera aucune trace dans L Histoire ou à l'échelle de l'humanité. Il sourit en découvrant cet individu que personne ne remarque, qui peut aller à sa guise dans le monde urbain sans craindre son agressivité parce qu'il s'y est adapté au point de développer une banalité qui le rend invisible. Il suffit d'une erreur administrative le déclarant mort pour que cette sécurité vole en éclat et que sa vie bascule dans une suite de drames loufoques. le lecteur peut penser à la folle nuit de Paul Hackett dans After Hours (1985) de Martin Scorcese.

Dès la première page, le lecteur est séduit par la personnalité narrative de l'auteur. Il lui conte une histoire qui relève à la fois du drame réaliste, à la fois de la fable. En 2 pages et 9 cases, le lecteur a l'impression d'avoir toujours connu Pincus Pleatnik, de le comprendre, de savoir comment il fonctionne, juste avec quelques remarques du narrateur omniscient et des dessins comme posés sur la page, sans bordure de case. Dans la première page, il (re)trouve la façon dont Eisner sait lier des dessins en les apposant sur un fond noir, comme des images apparaissant en blanc au travers du noir de la scène. le lecteur se rend compte qu'il dévore chaque page, sans se soucier de la manière dont elles sont dessinées, et qu'il ressent une proximité extraordinaire avec chacun des personnages. Il lui suffit de regarder Pincus se raser, arroser sa plante, enfiler son pardessus, pour voir son absence de toute prétention, le plaisir qu'il prend dans son quotidien, sa banalité. Il faut prendre du recul pour comprendre comment Will Eisner insuffle une telle vie dans ses personnages. le lecteur peut voir les vêtements tous confortables et un peu informes de Pincus Pleatnik, leurs plis qui montrent à la fois qu'ils sont un peu lâches, à la fois déjà portés de nombreuses fois. de la même manière, il peut regarder les petits gestes : les expressions de son visage, sa manière de tenir le journal sous son bras pendant qu'il suspend son manteau humide, la manière d'enfiler son pull, ses postures un peu résignées tout en conservant une énergie sous-jacente. Will Eisner ne représente pas n'importe qui : ses dessins donnent l'impression de regarder un individu qui existe vraiment. Il en va de même pour les autres personnages : la confiance en ses compétences professionnelles de la rédactrice des avis de décès, la capacité à prendre des décisions du propriétaire de son appartement pour qui ses locataires ne sont que des noms dans un exercice comptable, la contenance inquiète et séductrice à la fois du propriétaire du pressing, etc. Aucun d'entre eux n'est un stéréotype, chacun est un individu pleinement développé, unique.

S'il essaye de regarder les techniques d'enchaînement de cases, le lecteur a du mal à croire à ce qu'il observe. À la lecture, il éprouve la sensation d'être aux côtés de chaque personnage, à chaque fois dans la même pièce qu'eux. En relisant, il s'aperçoit que Will Eisner gère les arrière-plans avec une dextérité quasi surnaturelle, ne les représentant qu'en cas de besoin. Or le lecteur serait près à jurer qu'il y en a dans plus de 80% des cases, ce qui est loin du compte. Pourtant chaque endroit présente une ambiance unique, plausible au point d'en être plus réaliste qu'une photographie. En parcourant à nouveau les pages, le lecteur remarque également une forme discrète d'humour sans pitié : la silhouette de Pincus dans la vapeur du pressing le rendant effectivement invisible, le fait qu'il renverse sa tasse de café en découvrant l'annonce de sa mort dans la rubrique nécrologique, la façon dont Pincus embrasse un poteau, les mimiques du propriétaire du pressing en train de se lamenter sur son sort, etc. Effectivement en arrière-plan, se dessine également le portrait d'une partie de la société : les petits boulots, les personnes à la rue, l'administration inflexible, la cupidité des uns et des autres, les sans-abris, les manoeuvres d'intimidation musclées. Sous des dehors de récit léger et rapide, Will Eisner réalise un drame à l'humour noir, brossant le portrait d'une partie de la société, avec un épilogue aussi joyeux qu'horriblement noir.

-
Le pouvoir (40 pages) - de manière inexpliquée, Morris dispose d'un don. Il se manifestait occasionnellement quand il était enfant. Il suffisait qu'il serre sont chat contre lui pour que celui-ci guérisse, ou qu'il se tienne proche de son père alité, pour que celui-ci guérisse aussi. Mais ces occurrences étaient peu nombreuses, et Morris finit par oublier son don. Après la mort de ses parents, devenu adulte, il se mit à la recherche d'un boulot qui le satisfasse. Il est embauché comme aide-soignant, mais il gêne les médecins. Il occupe ensuite un emploi d'aide à la ferme, mais finit par être attiré par un cirque et vouloir devenir un magicien. Comprenant que tout n'est que truc et artifice, il devient l'assistant de Lil, la diseuse de bonne aventure.

Au départ, le lecteur est décontenancé par le don de Morris, se disant que ce n'et pas compatible avec une forme d'invisibilité dans la société. Mais en fait ce don est montré de manière prosaïque sans effet surnaturel, sans explication religieuse ou scientifique. Ce don ne transforme pas Morris en un messie ou un individu extraordinaire. le lecteur retrouve des individus tout aussi ordinaires que dans la première histoire, tout aussi remarquables par leur unicité, leur humanité, en tout point différents de ceux de la première histoire, et tout aussi banals, plausibles et palpables. Il remarque que cette histoire comprend 6 pages muettes d'une incroyable expressivité. Il reste ébloui par la manière dont Eisner compose ses pages : des cases sans bordure qui s'entremêlent naturellement alors qu'elles montrent des choses très disparates, la façon dont la pluie trempe les vêtements et les individus jusqu'à l'os, la descente d'un escalier par 2 personnages qui acquiert une dimension métaphorique, etc. Plus encore que dans le premier récit, le lecteur voit comment le créateur parvient à combiner des techniques de mise en scène cinématographiques avec des techniques théâtrales pour un amalgame uniquement réalisable en bande dessinée. Les personnages de papier se révèlent être d'incroyables comédiens au jeu de scène un peu appuyé, mais totalement réaliste. le lecteur s'attache tout autant à Morris qu'à Pincus et comprend ses choix, partage ses valeurs, ressent ses déceptions, se résout à son anonymat avec lui.

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Combat Mortel (31 pages) - Toute sa vie d'adulte, Hilda s'est occupée de son père alité et cacochyme, sans relation amoureuse, aux dépens de sa vie professionnelle. Elle a maintenant 40 ans, et son père rend l'âme dans un dernier râle. Il est temps pour elle de se construire une vie. À la bibliothèque municipale où elle travaille, elle remarque Herman, un célibataire d'une cinquantaine d'années. Elle se renseigne : il vit seul avec sa mère dont il s'occupe.

Avec cette troisième histoire, Will Eisner commence par un drame, mais ajoute bien vite une pincée de gentille moquerie qui inscrit le récit dans le registre de la comédie dramatique. À nouveau le lecteur prend partie pour Hilda dès la première page, sensible à ses valeurs morales qui l'ont menée à se sacrifier pour prendre soin de son père. Il sourit à sa réaction quand son père exhale son dernier soupir, et à sa détermination pour mettre la main sur un mari, un individu quelconque sans rien de remarquable, mais avec une histoire personnelle particulière et unique. Il sourit franchement quand le combat (mortel) s'engage entre Hilda et la mère d'Herman pour capter ses attentions matérielles et affectives. Bien sûr, le lecteur peut trouver qu'Hilda est un peu manipulatrice, que la mère d'Herman est très possessive, et qu'Harry aurait bien besoin d'une colonne vertébrale. Dans le même temps, il comprend aussi que ces personnages aient adopté cette façon de vivre, et il ressent de l'empathie pour cette femme qui ne souhaite pas gâcher les années qui lui reste, pour cet homme qui a accepté sa condition, et pour sa mère qui continue de veiller sur son poussin.

Comme dans les 2 histoires précédentes, le lecteur voit que Will Eisner continue d'utiliser les mêmes outils pour construire ses pages (case sans bordure, dessin sur fond noir, mise en scène de théâtre) et qu'il aboutit à des pages qui n'ont rien de semblables à celles des 2 autres récits. À nouveau, il suffit de voir évoluer Hilda, Herman et sa mère pour avoir une idée claire de leur personnalité respective, et que celle-ci n'est pas la même que celle des personnages précédents. À nouveau, l'artiste gère les arrière-plans avec une élégance sophistiquée, faisant de la clarté de sa narration la priorité, ce qui n'empêche pas le lecteur de pouvoir se projeter dans chaque lieu. À nouveau, il savoure des cases uniques : l'expression du chagrin d'Hilda à la mort de son père, la délicatesse avec laquelle Herman lave les pieds de sa mère, les simagrées de la mère d'Herman face à Hilda, la bougie qui se renverse, etc. Cette fois-ci encore, Will Eisner fait preuve d'un humour cruel et malicieux, maltraitant ses personnages avec autant de sadisme que d'affection.

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Ce recueil de trois histoires qui s'apparentent à autant de copieuses nouvelles est à savourer comme autant de perles de comédie humaine, d'une rare justesse et d'une rare finesse, permettant des côtoyer des personnages banals qui révèlent toute leur saveur, dans des drames très humains, faisant ressortir leurs qualités et leurs défauts, toute la richesse de la condition humaine, sans une once de méchanceté ou de mépris, avec un humanisme sans limite.
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Après la Ville, l'Immeuble, au tour des Gens d'avoir la part belle dans ce dernier volet de la Trilogie de New York. Will Eisner prend le parti de raconter la ville des invisibles, de ceux qui passent dans les rues sans que l'on ne les remarque au milieu du bouillonnement de la vie des grandes métropoles, de ceux qui ont des existences de prime abord banales, auxquelles personne ne semble s'intéresser, le tout dans un style graphique toujours aussi riche, dans une narration toujours aussi sensible et tendre, non dénuée d'une petite pointe d'humour qui les dédramatise, sans en ôter le caractère parfois ironiquement tragique.

C'est le portrait de l'Humain, dans toute sa réalité, tout autant commune qu'exceptionnelle, faite de petits riens qui changent tout, pour le meilleur comme le pire, à travers les portraits de ces Gens, qui nous est dépeint, tout simplement.

Un dernier volet qui clôt avec réussite la trilogie, que je suis ravie d'avoir lu, et qui m'a permis de découvrir le travail de Will Eisner, que je vais continuer de découvrir par d'autres de ses oeuvres désormais.
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J'ai découvert le coup de crayon de Will Eisner lors du Challenge New York pour lequel j'avais emprunté à la biblio le tome 2 : L'immeuble du triptyque New York. Cette fois c'est le tome 3 que je découvre (faute d'avoir trouvé le tome 1) et il s'agit cette fois des gens, trois personnes en particulier que la société va "manger". Pincus est repasseur, il a passé sa vie à tenter de passer inaperçu à tel point qu'un jour il trouve dans le journal sa nécrologie, il est mort et malheureusement pour lui il sera très vite remplacé et oublié.
Puis vient l'histoire de Morris, il ressent depuis longtemps ce besoin d'accomplir une chose importante, le souci c'est qu'il ignore ce que c'est, il enchaîne les petits boulots jusqu'à sa rencontre avec une voyante avec qui il mettre sur pied une petite arnaque mais au bout de quelques années sa morale prend le dessus, quitte tout et finit dans la rue avant de mettre à profit un soit disant don de guérison, malheureusement pour lui aussi la société n'accepte as l'échec, s'il ne sait pas trouver sa place autant qu'il disparaisse.
Enfin c'est l'histoire d'Hilda que l'auteur nous conte, bibliothécaire de 40 ans, vieille fille qui s'est occupé de son père malade jusqu'au bout, maintenant qu'il n'est plus là il est temps qu'elle pense à elle et finira par trouver l'amour en la personne d'un vieux garçon qui prend soin de sa vieille mère possessive. La pauvre Hilda n'aura pas de chance.
Ces trois personnages auront un destin tragique.
Le drame ponctue donc ces trois "fables" et avec force ironie l'auteur met en scène ces trois bougres que la vie n'épargne pas. Leur sort ne nous attriste pas au contraire on en rit (ce n'est pas très gentil de rire du malheur d'autrui) mais la réalité est telle que ce genre de situation ne nous étonnerait guère. le dessin en noir et blanc apporte de nombreux détails aux scènes, les sentiments des personnages sont clairement identifiables sur leur visage et les décors sont parfois suggérés de quelques traits. le tout me fait penser au cinéma muet dans lequel la parole n'est souvent pas nécessaire, ici les dessins suggèrent l'histoire à eux-seuls.
Lien : http://stemilou.over-blog.co..
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Dans la trilogie de Will Eisner on lit des histoire tragiques, des histoires tristes, des histoires absurdes, des histoires de solitude, des histoires drôles … tel NY on y retrouve un melting pot d'émotions. En quelques cases, quelques détails dans le dessin Will Eisner arrive à nous transporter dans la Grande Pomme. On entend les bruits, on s'imagine les odeurs … en lisant cette BD j'avais l'impression de me retrouver dans une nouvelle de Damon Runyon.
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Une superbe trilogie, de la grande bande dessinée, un plaisir absolu
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
- Allô... Allô ! Allô ! Le Daily News ? Passez-moi le service nécrologique. Je voudrais signaler une erreur... Je ne suis pas mort ! [...]
- Pas la peine de hurler, monsieur ! Nous imprimons ce qu'il y a dans les fiches ! Je ne me trompe jamais... en plus... mon boulot est de publier les listes telles qu'on nous les envoie... Je ne suis pas responsable de qui meurt !
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Hmpf... Je ne me trompe jamais... En plus... Mon boulot est de publier les listes telles qu'on nous les envoie... Je ne suis pas responsable de qui meurt!
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- S'il vous plaît, j'ai un problème temporaire ! Je ne sais pas où aller et je ne sais pas quoi y faire !
- La vie entière est temporaire, mon pote !
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Bientôt il parvint à se rendre réellement invisible, s'épargnant ainsi les risques de l'implication des relations amoureuses. Puis, c'est le reste du monde qui finit par lui devenir invisible ! Pincus avait appris l'art urbain de l'évitement.
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— Alors...?? T'en penses quoi?
— Je sais pas... C'que j'pense, c'est qu'on devrait se mêler de nos affaires!
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LE FEUILLETON DE FRANÇOIS PENEAUD - Une Page à la fois (2) : The Spirit de Will Eisner
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