Ce tome contient les épisodes 60 à 65 de la série, parus en 2012. Il fait suite à Comme à la fête foraine. le tome 17 le fils du boulanger correspond à la minisérie dédiée au récit d'origine de Billy Butcher.
Butcher a du mal à se remettre du décès survenu dans le tome précédent. Mother's Milk vient de découvrir une nouvelle information qui le touche personnellement et le met dans une fureur folle au point qu'il envoie le mobilier balader par la fenêtre du bureau des Boys. le président Robert Schaeffer reçoit des enfants venus lui montrer leurs animaux domestiques qui sortent de l'ordinaire dont un carcajou (en anglais "wolverine"). Homelander a enfin aperçu la configuration qu'il attendait pour mettre en branle son plan. Un nouveau groupe de
superhéros Paralactic (une parodie réussie de Cyberforce de
Marc Silvestri) attaque The Boys. James Stillwell (le représentant impassible de Vought American) se place sous la protection rapprochée de Team Titanic (avec un rabbi prononçant des formules magiques à l'envers), et étend cette protection à Jessica Bradley, son adjointe. Comme l'indique la pluie de sang sur la couverture, les machinations des différentes factions ont atteint leur point critique et ça va saigner.
Le temps est venu pour Garth Ennis de clore son récit et de donner à ses lecteurs ce qu'ils attendent depuis le début : un affrontement en bonne et due forme entre Butcher et son équipe d'un coté, Homelander et les Seven (ou presque de l'autre), et le gouvernement américain (plus Susan
Rayner) et Vought American qui ne se limitent pas à faire de la figuration. Toutefois, ce tome ne peut pas être réduit à une grosse baston qui tâche, entre hémorragie et carnage.
Pour commencer
Garth Ennis recommence à taper franchement sur les
superhéros. Cela commence avec la parodie succulente de Cyberforce (l'équipe créée par
Marc Silvestri lorsqu'il a cofondé Image Comics, avec
Todd McFarlane,
Erik Larsen, Jim Lee et les autres). Il est vrai que cette référence est un peu pointue et à destination des lecteurs de comics des années 1990. Cela continue avec les improbables gugusses de Team Titanic et en particulier Muzzeltov, un homme habillé comme un rabbin qui parle à l'envers comme Zatanna (en anglais, DC Comics). Il y a également un personnage dont la coiffure et la stature évoque Wolverine qui porte une sorte de slip sur la tête du plus bel effet.
Ensuite Ennis continue à s'occuper de ses personnages qu'il a tellement développés et étoffés dans les tomes précédents. Mother's Milk perd les pédales du fait d'une découverte qui a du sens si le lecteur se souvient des tomes précédents. Billy Butcher conserve toute sa dimension tragique, sans rien perdre de son coté violent et sadique, dépourvu d'empathie. Même Female a droit à un moment personnel. Ennis utilise un dispositif qu'il avait déjà employé dans le dernier tome de Preacher : utiliser le dialogue entre 2 personnages pour montrer qu'il a fait le tour des thèmes qu'il souhaitait aborder et développer. Ici c'est Billy Butcher qui montre à Hughie Campbell que leur relation fonctionne suivant des cycles. Il livre les dernières clefs de compréhension du comportement des personnages, en particulier Homelander.
Enfin, il prend soin de déclencher le grand combat final (ou presque, puisqu'il reste encore 1 tome) en montrant bien pourquoi il intervient à ce moment du récit et pas avant. le récit permet de comprendre pourquoi chaque faction préférait maintenir un fragile statu quo, plutôt que de précipiter la confrontation. Évidemment les combats réservent des moments de sadisme, de gore et d'humour noir et trash, grande spécialité d'Ennis.
Les couvertures sont dessinées par
Darick Robertson qui franchit un nouveau palier dans la provocation et le mauvais goût pour les numéros 62, 63 et 65 (cette dernière étant utilisée comme couverture du présent recueil). Les illustrations intérieures sont réalisées par
Russ Braun,
John McCrea et
Keith Burns, sans précision de qui a dessiné quel épisode (à la lecture il me semble que
Russ Braun a quasiment tout dessiné, sauf quelques scènes de batailles). le lecteur retrouve donc son style descriptif un peu fade, mais facilement lisible. Braun utilise une mise en page basée sur des cases sagement rectangulaires, en moyenne au nombre de 5 par page. Tous les personnages sont aisément identifiables et leur apparence est fidèle à celle conçue par Robertson au début de la série. Les expressions des visages sont relativement nuancées, assez pour transcrire des états émotionnels différenciés, pas assez pour les rendre comiques ou horribles. Chaque action et chaque coup porté est posé factuellement, sans que le lecteur ne puisse se tromper sur l'horreur de l'éviscération représentée, mais avec une paucité de détails qui atténue l'horreur de ce qui est dessiné. Ce n'est que lorsque que Tony Aviña (le metteur en couleurs) se lâche un peu que les images finissent par devenir vraiment immondes (tout ce sang sur Homelander qui se comporte comme si de rien n'était dans le bureau ovale).
Ce tome devrait ravir les lecteurs qui attendaient un affrontement gore et sanglant et la résolution du conflit entre Billy Butcher et Homelander, et qui attendaient également le retour de la satire acerbe des
superhéros (à condition qu'ils acceptent un petit dispositif narratif sous la forme d'un personnage très opportun). le niveau des illustrations est satisfaisant, mais elles manquent toujours d'une personnalité affirmée.