Court roman jeunesse d'à peine 120 pages,
L'île au Manoir est une petite lecture plaisante, nous emmenant le temps d'une heure ou deux sur une petite île de Bretagne. Aucun nom, aucune véritable localisation, juste un décor pittoresque esquissé grâce à quelques détails et des noms très « couleur locale », mais qui suffisent amplement, le récit étant basé essentiellement sur des faits. de toutes façons, le jeune lectorat à qui se destine le bouquin n'aurait pas forcément accroché à des descriptions plus étoffées...
Car, c'est un fait, s'il est des lectures jeunesse qui parviennent sans mal à faire oublier qu'elles sont des lectures jeunesse aux lecteurs ayant dépassé la date de péremption (
Le Diable et son Valet d'
Anthony Horowitz, Bartiméus de
Jonathan Stroud...), ce n'est pas le cas de
L'île au Manoir. Les explications données en début de volume sur le statut de cul-entre-deux-chaises volontaire de la collection (et toutes les complications qui vont avec) le justifient sans mal, mais reste qu'au niveau de la plume comme de l'intrigue, on a sans cesse l'impression qu'
Estelle Faye a dû prendre un soin particulier à « rester simple » à tout prix et en toutes circonstances, dans une volonté de clarté un peu forcée.
C'est particulièrement flagrant au début du livre, avec des phrases courtes, des chapitres de quelques pages à peine et un vocabulaire ultra-accessible. Heureusement, soit on s'y habitue, soit ça s'améliore nettement au fur et à mesure, car la narration devient plus naturelle au fil des chapitres, tandis que l'histoire se complexifie légèrement et se double d'un second niveau de lecture. Derrière son joli enrobage fantastique,
L'île au Manoir parle en effet de parentalité toxique et d'émancipation. le message est délivré en toutes lettres au bout d'un moment, justifiant même certains choix narratifs de façon très maligne. Bref, c'est réussi et ça fait le job.
Et au premier degré ? Eh bien, on a là une histoire sympathique baignant dans le surnaturel, dotée d'un certain suspense malgré une prévisibilité globale (on devine très rapidement qui est réellement la mystérieuse jeune fille tant les indices sont énormes). Les péripéties sont bien menées et l'on suit sans déplaisir la progression d'Adam et ses amis dans leur quête de vérité. A défaut de surprendre, c'est fluide, bien construit et même un peu dépaysant, à condition d'aimer la pluie et la mer agitée !
Bref, si
L'île au Manoir ne réinvente rien du tout, le lectorat visé appréciera sans le moindre doute cette histoire. le lectorat pas visé sera lui beaucoup plus sensible à ses défauts, mais l'essentiel, à savoir le plaisir de lecture, est néanmoins bien là.
A noter également la chouette maquette que nous offrent les éditions Scrineo, avec des filigranes sur toutes les pages, faisant de ce petit livre un très bel objet !