C'est une époque trouble : Révolution française et liquidation des nobles. C'est un homme qui en rencontre un autre dans une sorte de tour, en Bretagne, avec le sel, le vent, la bruyère, les ajoncs et le silence.
Jean Verdier a 20 ans et n'est plus très à l'aise dans son rôle "d'inquisiteur". Justinien de Salers, marquis des Eaux-Mortes, est un reclus, un type étrange qui fait le bien autour de
lui, mais reste un noble. La confrontation Verdier/Salers va prendre l'aspect d'une confession entre un puriste et un individu revenu de tout, couvert de fourrure et consommateur de café.
Tout commence avec une expédition commandée par Claude Gendron, magouilleur/trafiquant local comprenant :
- Salers, jeune aristocrate en déroute, alcoolique, éloigné de son père austère d'abord à Paris et ensuite aux Amériques en Terre Neuve,
- Clément Veneur, botaniste, maudit car seul rescapé d'une expédition dans les terres du grand Nord,
- Gabriel, jeune homme mutique et fracassé intérieurement,
lui aussi rescapé d'une expédition pour cartographier la côte,
- Marie, une coureuse de bois, sang mêlé et fin fusil.
L'expédition sera l'occasion pour Justinien de rembourser ses dettes sauf que le bateau fait naufrage et que seuls en réchappent, les individus cités précédemment ainsi qu'un pasteur presbytérien Ephraïm Jessup, missionnaire et sa fille, Pénitence, un gabier, Jonas, un coureur des bois nommé François qui vient de Beaubassin et un officier anglais, un redcoat, Thomas Burrow.
La suite, c'est qu'ils vont tous mourir dans de terribles circonstances comme dévorés/déchiquetés par un monstre car ils ont tous en commun quelque chose qui les tourmentent et c'est le moment de payer l'addition.
Magnifique roman, puissant, aux très belles références culturelles.
Widjigo, m'a fait bien sûr penser au Wendigo, créature surnaturelle, maléfique et anthropophage, issue de la mythologie des Premières Nations algonquiennes du Canada, mais aussi à Taltos, ce
lui qui naît coiffé et qui fait l'intermédiaire entre les hommes et les dieux. Les noms des personnages sont parfaitement choisi et on le comprend au fur et à mesure de la lecture. J'ai beaucoup pensé à
Edgar Alan Poe ou au Horla de
Maupassant en lisant ce roman. Encore un très beau choix d'Albin Michel Imaginaire, merci à eux.