Ce texte de
Mélanie Fazi m'intéressait particulièrement : le titre m'a tout de suite interpelée, et l'autrice est bien connue dans le monde des littératures de l'imaginaire. Je la connaissais pour ma part grâce à sa nouvelle dans Bal Masqué que j'avais beaucoup aimée. La magnifique couverture est signée
Stéphane Perger, artiste que j'avais adoré avec le premier tome de Dark Museum, quelques-unes de ses illustrations se trouvent dans le récit, en noir et blanc, et ajoute une dimension symbolique aux mots de l'autrice.
Ce court texte prend sa source dans un article réflexion du blog de Mélanie, publié en juin 2017 et intitulé « Vivre sans étiquette ». Il est disponible à la fin du livre, et j'ai pour ma part commencé par le lire pour me plonger dans le contexte. C'est une bonne introduction au sujet, et je pense même que je l'aurais mis en introduction du texte principal plutôt qu'en annexe.
Mélanie ne souhaite pas vivre en couple. Elle n'en éprouve ni l'envie ni le besoin. Elle se pose beaucoup de questions sur son identité (sexuelle ou non) et ne trouve pas de terme pour se décrire, se définir, et cela lui donne l'impression de ne pas exister. Autour d'elle, les gens adoptent des comportements qui essayent de la faire entrer dans une case, de lui coller une étiquette, mais cela ne fait qu'empirer les choses. Ce livre est le témoignage de comment elle s'est construite autour de cette absence d'étiquette pour la définir, des difficultés qu'elle a rencontrées, mais aussi des moments de joie qu'elle a vécus.
Ce texte m'a choquée : pour moi, la différence est une force et une grande richesse. C'est elle qui permet au monde de se construire et de prospérer. Voir que l'autrice a tant de mal à trouver des gens qui n'essaient pas de la changer ou de lui dire ce qu'elle doit ou ne doit pas faire pour « aller mieux » est tellement triste et désespérant. Son décalage n'a pourtant rien de choquant ou de révoltant : elle souhaite juste vivre seule, sans qu'on lui impose la vision dominante de notre société du rôle de la femme qui doit absolument chercher à se poser avec un homme, se marier et procréer.
Cette différence, qui ne devrait pas être grand-chose, lui pèse cependant au quotidien : dans des discussions (au cours desquelles le sujet de la vie amoureuse revient toujours), des questionnements indiscrets, et même dans son rapport à l'écriture. Les gens devraient essayer d'arrêter de se formater à un modèle existant et plutôt vivre leurs passions, leurs pulsions et leurs besoins à eux, sans jugement d'eux-mêmes et des autres, pour accéder au bonheur. le monde irait beaucoup mieux si chacun apprenait à se connaitre, à s'écouter et à se respecter sans se soucier du regard des autres. Soyons bienveillants !
Ce livre est très intime, et l'autrice le dit dès le départ : il la concernera elle,
Mélanie Fazi. Une mise à nu sincère et osée, mais essentielle pour avancer dans sa quête d'identité. Sur plusieurs aspects, je me suis sentie proche des ressentis de l'autrice – dans son rapport aux gens et à la solitude surtout – mais aussi parfois outrée par les comportements de certains.
L'autrice écrit majoritairement des nouvelles, souvent axées fantastique. Elle reçoit beaucoup de soutien de ses collègues auteurs lors de ses recherches. Je crois aussi que c'est pour cela que j'aime tant les littératures de l'imaginaire : ce sont des genres de fiction qui prônent la différence et son acceptation finale au terme de la quête d'un personnage au départ marginal. C'est un monde littéraire qui me semble bienveillant. C'est d'ailleurs le seul dans lequel j'ai vu des maisons d'édition « adverses » créer un collectif pour faire face ensemble aux difficultés du marché, car ensemble, on est plus forts.
La quête d'identité de l'autrice n'est cependant pas terminée. Bien qu'elle ait trouvé le chemin, elle doit encore en parcourir une partie, sans s'égarer à nouveau. J'espère qu'elle écrira encore sur la suite de son parcours, sur son blog ou dans un autre livre d'ici une dizaine d'années !
Faut-il entrer dans une case pour exister aux yeux du monde ?
Mélanie Fazi répond à cette question avec sincérité, dévoilant ses questionnements, ses réflexions, ses émotions, ses expériences heureuses et malheureuses. Une mise à nu nécessaire dans sa quête d'identité, mais aussi une ouverture à la réflexion pour le lecteur, concerné ou non par cette différence.
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