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Ce roman m'a été offert, et au vu de son synopsis, il était la promesse d'une brillante expérience, à la découverte d'un auteur siégeant à l'Académie française et dont l'une des spécialités est l'histoire de l'art italien, un domaine qui m'est également cher.

En effet, aimant passionnément l'Italie et ses 1001 merveilles, je m'attendais en toute légitimité à un beau et grand voyage dans la Florence des Médicis, sauf que... si voyage il y a eu, il ne m'a malheureusement pas dépaysée, et si découverte il y a eue, ce fut celle d'un style que je suis au regret de qualifier de nombriliste et d'approximatif.

Dominique Fernandez n'est hélas pas le premier académicien à faire naître en moi l'impression désagréable que l'auteur "se regarde écrire" comme d'autres s'écoutent parler. Sa maîtrise indéniable de la période (Renaissance italienne), sa réelle érudition sur les thèmes de la peinture florentine et plus généralement de l'art italien, ne suffisent pas à occulter une certaine suffisance, et son insistance à placer non pas l'art mais l'homosexualité au coeur de son roman a rapidement freiné mon enthousiasme.

En toute justice, c'était annoncé d'emblée puisque le titre, "La Société des mystères" ne fait pas référence à une assemblée d'artistes comme j'ai eu la naïveté de le croire en débutant ma lecture, mais à la communauté homosexuelle de l'Italie du XVIème siècle, période où il ne faisait certes pas bon se proclamer émule de Ganymède. Or, même si j'ai trouvé intéressants les développements sur ce thème, je me suis vite lassée en constatant qu'ils étaient en réalité le but ultime de l'auteur. Dominique Fernandez étant lui-même homosexuel, étant également le premier écrivain homosexuel élu par les Immortels (il assume tellement bien son homosexualité qu'il a fait sculpter Ganymède sur son épée), il me donne l'impression de faire de son homosexualité un statut à part entière. Or personnellement, j'ai un problème avec les personnes qui se définissent (ou semblent se définir) d'abord par leur sexualité, quelle qu'elle soit, comme si la sexualité influait sur le talent ou était une sorte de marque de distinction.

Partant de là, j'ai rapidement eu tendance à m'agacer au fil de ma lecture, et j'ai eu maintes occasions de regretter que cette obsession pour le sexe mâle nuise au style à proprement dire, truffé d'expressions qui m'ont semblé incongrues sous la plume d'un narrateur de la première moitié du XVIème siècle, telles que "pots de peintures", "paquets de cellulite" (terme apparu au XIXème siècle), "Il me gonflait de cette rengaine", des seins comparés à "des gants de toilette" (sic), un croquis jeté "à la corbeille" et des "boîtes à chaussures" qui s'empilent chez le cordonnier...

Ceci mis à part, dans les rares intervalles où il n'est question ni de queues ni de double-sens salaces dissimulés dans des tableaux ou des poèmes, et pendant lesquels l'auteur parvient à se détacher de la question des moeurs, on apprend avec plaisir une foule de détails sur la vie des artistes à la Renaissance, sur la politique des cités italiennes, sur la peinture et les arts, sur les artisans et commerçants, bref sur cette Florence que j'aime passionnément.

Je conclus par un conseil : roman à lire avec les reproductions des oeuvres décrites à portée de main, merci Google.


Challenge MULTI-DÉFIS 2018
Challenge PAVES 2018
Challenge ABC 2017 - 2018
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Le portrait d'Eléonore de Tolède et de son fils Giovanni par Bronzino, que l'on peut voir en ligne en tapant ces premiers mots, est époustouflant de réalisme jusque dans le plus infime détail. Il est caractéristique de ce que la renaissance italienne pouvait produire de figuratif. Style de peinture qui se suffit à lui-même pour prévaloir du talent de son auteur, lorsque celui de notre époque qui se prévaut quant à lui de l'abstrait doit avoir recours à des promoteurs pour investir ses productions improbables en chefs d'oeuvre.

Dominique Fernandez a choisi d'aborder cette période de faste de l'art avec un artiste devenu peintre officiel de la famille Médicis, Agnolo Bronzino. Protégé du dénuement donc par les maîtres de Florence, mais pas seulement, de l'Eglise aussi qui veillait sur les consciences mais surtout sur ses propres prérogatives, protégé encore des jaloux cette fois et de tout ce que la société florentine du 16ème siècle pouvait comporter de soudards impécunieux, inconséquents de priver la postérité d'un de ses virtuoses.

Dominique Fernandez a choisi ai-je dit, mais peut-être cette fresque de la société florentine qu'il nous dresse du temps de Cosme de Médicis s'est-elle imposée à lui à la découverte chez un antiquaire de la ville d'un ouvrage attribué à Bronzino lui-même. Ce dernier y relate sa vie, son apprentissage, ses débuts dans la peinture auprès de son maître Jacopo de Pontormo. Et Dominique Fernandez de nous prévenir en préambule avoir dû édulcorer le langage du 16ème siècle tant il eut pu sembler cru à l'édition de nos jours. Ce qu'il nous en rapporte est d'ailleurs déjà suffisamment évocateur quand on apprend que le maître ne l'était pas que dans le domaine artistique, que son élève, donc Bronzino, lui a emboité le pas dans ce penchant, et perpétué cette « tradition » avec son propre élève Sandro Allori par la suite. A croire que le talent faisait fi des lois de la nature pour se perpétuer.

Il faut dire que cette description des moeurs de l'époque que nous dresse Dominique Fernandez doit rester en accord avec les oeuvres figuratives de ce temps où la représentation des corps dans leur nudité, leur enchevêtrement, leurs poses lascives qui, si elles faisaient éclater le talent de leurs auteurs, ne laissaient pas de place non plus au doute quant à leurs penchants. Encore devaient-ils se réfréner et avoir recours au pouvoir de leur protecteur pour ne pas subir la censure ecclésiale laquelle veillait au grain afin de ne pas exposer aux yeux de tous ce qui ne la choquait nullement dans l'intimité de l'alcôve. La nudité dans les oeuvres avait quant à l'esthétique une prédilection pour le corps masculin, le corps féminin étant cantonné à faire référence à la fécondité, la maternité, voire la rigueur morale quand l'école espagnole pénétrait les familles. Aussi fallait-il parfois jeter un voile pudique sur les attributs du genre, souvent a posteriori. Les oeuvres qui décorent les murs et plafonds des chapelles, basiliques et autres palais foisonnent de ces corps dénudés sur lesquels le voile ne s'accroche que par le miracle de la brosse de l'artiste.

Et pour se dédouaner d'une censure prétextant de pudeur et respect des saintes écritures, une conversation rapportée par Bronzino lui-même avec Don Agostino Lupini, parlant au nom de l'Eglise, tentait de lui faire admettre que le talent a besoin de la contrainte pour produire ses chefs-d'oeuvre, lesquels resteraient dénués d'âme dans la permissivité. Un bel exemple de ces prédispositions suggestives est le portrait de Guidobaldo della Rovere par Bronzino, accessible aussi en ligne, lequel sujet voulait afficher sa puissance et dont l'observateur occasionnel comprendra aisément qu'elle n'était en l'occurrence ni militaire ni politique.

Cet ouvrage de Dominique Fernandez, très accessible au profane, a en outre le grand avantage de pouvoir être éclairé par la vision de toutes les oeuvres mentionnées que l'on trouve facilement sur le net. Il faut rendre aux technologies modernes justice de leurs avantages quand elles sont souvent décriées pour l'usage qui en est fait, méprisant le culturel. Par la retranscription d'un témoignage contemporain des faits rapportés, dont Dominique Fernandez s'est convaincu de l'authenticité, il favorise l'immersion dans une province et une époque bénie des arts, sous la tutelle d'une famille qui a présidé à une large part de l'histoire florentine, et française puisque Catherine puis Marie ont marqué notre histoire de leur sévérité. Superbe ouvrage à la documentation et l'écriture dignes d'un immortel, puisque locataire de la coupole.
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J'avais énormément aimé La course à l'abîme du même auteur, aussi cette Société des mystères et sa promesse de plonger le lecteur dans les coulisses de l'Art Florentin à travers la vie du peintre Bronzino, m'a semblée parfaite pour préparer mon voyage en Toscane. J'ai retrouvé toute l'érudition de Dominique Fernandez et apprécié tout ce que j'ai appris gràce à lui à travers l'analyse de multiples oeuvres. Par exemple, le tableau de Bronzino le christ en croix qui permet d'accéder à des notions comme le "valdésiarisme" qui affirme l'invulnérabilité du Seigneur ce qui est un crime pour l'Inquisition. Ou l'explication de la création de Persée par Cellini avec, d'une part, la façon spectaculaire dont il a sauvé son oeuvre en une nuit, mais aussi la polémique qu'elle a soulevée entre les adeptes de "l'Antiquité des écritures" et "l'Antiquité païenne" ou encore les différentes interprétations autour de la similitude du visage de Persée et celui de la méduse. Ce livre regorge de savoir , pour ceci j'aurais facilement attribué les cinq étoiles ...Mais voilà, j'ai été très dérrangée par la place envahissante qui est faite à l'apologie de l'homosexualité au point d'en devenir presqu'obsessionnel. du moins est-ce ainsi que je l'ai ressenti.Le corp de l'homme est sublimé mais au prix d'une dévalorisation totale de celui de la femme avec un réel mépris n'y voyant que " formes molles" et en affirmant qu'en s'abaissant à négliger les nus masculin au profit des nus féminins "l'art adipeux succéderait à la peinture et à la sculture maigre". Cet aspect que j'ai nommé obsessionnel m'a particulièrement irrité à la relecture de certains tableaux comme les Madones du Parmigianino dont les longs cous seraient une allusion à "la queue"! "...pareil étirement,Parmigianino en a fait la mesure du bonheur. le cou est la partie qui ressemble le plus à une queue érigée..."
Bref, sans être une sainte Nitouche cet omniprésence du de l'homosexualité comme fil conducteur dans le roman a gâché ma lecture.
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Editions Grasset

Je ne connaissais pas encore la plume de Dominique FERNANDEZ. le partenariat Netgalley/Editions Grasset m'a permis de gommer cette imperfection avec la mise à disposition de son tout dernier roman en version e-book, et je les en remercie.

Tout commence avec cette citation de Stendhal extraite de son "Journal" du 18 septembre 1811 dans l'Eglise Santa Croce à Florence : "On m'avait dit que ce tableau était du Guerchin : j'adorais ce peintre au fond du coeur. Point du tout ; on me dit deux heures après qu'il était d'Agnolo Bronzino, nom inconnu pour moi." En ouvrant ce roman, j'étais comme Stendhal, je ne connaissais pas Agnolo BRONZINO, ce peintre florentin !

J'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir sa vie. Et comme "Les plus belles découvertes cesseraient de me plaire si je devais les garder pour moi, je vous emmène avec moi en Italie. Nous allons remonter le temps et partir à la découverte du XVIème siècle, celui-là même qui a donné lieu à la production de nombreuses oeuvres de peintres d'un immense talent.

Le petit Agnolo BRONZINO est né d'un père boucher à Monticelli et d'une mère aide-bouchère mais aussi brodeuse la nuit au service de Julien de Médicis. Depuis sa plus tendre enfance, il a reçu une éducation du beau, de l'art, et c'est dans cette voie qu'il va envisager son avenir. Sur son chemin, il va rencontrer Jacopo PONTORMO, ce peintre florentin, très tôt orphelin de parents emportés par la peste. L'apprenti va partager sa vie avec son maître et l'accompagnera avec fidélité jusqu'à ses funérailles.

Ce roman historique est tout simplement une pépite.

Particulièrement fouillé, il fait référence à de nombreux événements ayant ponctué l'Histoire de l'Italie. le dernier roman de Dominique FERNANDEZ nous permet d'aborder toute une page du passé de ce territoire. j'ai beaucoup appris à sa lecture !

C'est en prenant appui sur ce contexte historique et notamment le régime de l'Inquisition que l'auteur du roman nous fait prendre conscience de l'incontournable liberté pour permettre à l'artiste de s'exprimer et être à son apogée.

"Nul ne peut devenir un grand artiste s'il n'est pas d'abord un homme libre." P. 132

Côté artistique, ce roman constitue un véritable catalogue d'oeuvres réalisées au XVIème siècle, depuis "L'Assomption de la Vierge" de Rosso ou bien de Titien jusqu'à "David" ou "Judith" de Donatello, en passant par "Sacra Conversazione" de Jacopo PONTORMO...

Dominique FERNANDEZ va plus loin en nous exposant les rivalités entretenues entres les différentes villes d'Italie, chacune ayant son genre. Alors que les peintres florentins s'évertuaient à représenter des hommes avec des visages tristes, voire blafards, les peintres vénitieux, quant à eux, se focalisaient sur des femmes bien en chair, gaies, radieuses, qu'ils dénudaient à l'envi.

"Leurs modèles sont presque tous féminins. [...] En outre, ils ne craignent pas de les montrer toutes nues et de face. Très peu d'hommes, et jamais d'hommes nus." P. 44

Les échanges entre clans et la compréhension mutuelle ne semblent pas de mise.

"La vision équilibrée, robuste, optimiste des Vénitiens, leur manière de peindre des visages invariablement sereins, invariablement lumineux, non seulement lui étaient étrangères, mais encore lui répugnaient." P. 46

Il ne me reste plus qu'à aller les voir en vrai, mon sac à dos est prêt pour le mois de juin, la vie est bien faite, non ?

J'ai beaucoup apprécié aussi d'aborder le travail de l'artiste et tout particulièrement le lent cheminement qui mène de la création à la réalisation :

"Tout peintre est à la fois esprit - par le regard pensif qui médite, en retrait - et matière - par la main qui exécute. D'abord la contemplation, longue, attentive, réfléchie, qui se fait à distance, puis le geste, rapide, immédiat, rapproché." P. 140

C'est aussi la portée de l'art en général qui m'a transportée, le pouvoir des oeuvres d'offrir de nouveaux horizons :

"A quoi bon les artistes, s'ils cessaient de fournir par des sensations agréables un contrepoids aux misères de la vie ?" P. 51

Mais, sujet plus singulier, Dominique FERNANDEZ va nous faire découvrir l'intimité des peintres, la face cachée de leur existence. Et là, j'avoue avoir également eu quelques surprises. J'étais loin de soupçonner effectivement que les Maîtres abusaient sexuellement de leurs Apprentis et que les hommes forniquaient ensemble à n'en plus finir. Les oeuvres de Jacopo PONTORMO se voulaient représentatives de ces moeurs perverses au risque de déplaire au régime en place et de mourir dans la plus grande solitude. Michel-Ange, lui, auraient eu quelques soutiens pour ne pas entacher sa notoriété...

C'est un magnifique roman historique sur l'art. Il m'a rappelé avec beaucoup de plaisir "Le Turquetto" de Metin ARDITI.

Impossible de vous quitter sans faire l'éloge de ma liseuse. Et oui, elle a réussi à remplacer un pavé de 555 pages par quelques centaines de grammes, une vraie prouesse. Je crains fort que cette petite chose-là soit un peu addictive !
Lien : http://k6.re/YYAyw
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Excellent ouvrage, qui est une autobiographie fictive, de Bronzino. La fresque historique parcourt la période de la Renaissance Italienne, de Pontormo à Allori, de l'Italie à la France, à l'Espagne, et à l'Autriche, de Florence à Venise, Parme, Chenonceaux, des Médicis à Charles Quint, François 1er, et nous parle de Michel-Ange, Léonard de Vinci, Vasari.
Nous suivons Bronzino avec ses parents, ses maitres Pontormo, Cellini, ses débuts dans la peinture, ses voyages, son initiation sexuelle, sa vie avec Allessandro Allori,.
Il y est question de l'éducation, des amours homosexuels, de la religion et des mœurs de la Renaissance.
C'est surtout une histoire de la peinture avec de nombreuses références, et une interprétation d’œuvres majeures de la Renaissance Italienne., le David de Donatello, l'autoportrait de Parmigianino, le Persée de Cellini, le Déluge de Pontormo, ....et tout ce que nous devons aller voir à Florence et aux Offices.
J'aime ces ouvrages qui nous transportent dans cette époque de création et nous invitent à aller regarder les peintures de plus près Les Offices, La chapelle Sixtine, et d'autres lieux si nombreux
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Un flâneur découvre par hasard dans une librairie florentine un ouvrage rare où l'«un des deux peintres italiens de la renaissance qu' [il] aime le plus raconte la vie de l'autre, et par contrecoup, la sienne».
Le premier se nomme Pontormo. Figure de proue du maniérisme, il fut le maître du second, le non moins génial Bronzino.
Le très érudit écrivain et essayiste Dominique Fernandez plonge ses lecteurs dans la vie trépidante des génies du XVIe siècle italien. et leur ouvre les portes secrètes de la société du mystère, celle de ces artistes qui surent contourner les interdits de la religion catholique et de l'autoritaire famille des Médicis pour permettre à leur génie de s'exprimer librement,
offrant au passage à histoire de l'art quelques-uns de ses plus beaux chefs-d'oeuvre.

Beaux Arts magazine 398 août 2017
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Par quel bout aborder cette passionnant psychobiographie de Dominique Fernandez ? Peut être déjà, en précisant que ce concept de "psychobiographie" dont il est l'un des principaux utilisateurs, voire, dit-on, l'inventeur, se définit comme une " biographie alliée à une étude psychique" ( selon le dictionnaire). J'en vois quelques uns froncer le sourcil. le procédé est simple. En partant des archives d'un artiste et de sa production, de ce que l'on a écrit sur lui, de ses courriers aussi, un écrivain créé une vie, remplissant les zones d'ombres, les pensées, les dialogues supposés voire même, comme dans ce roman, des pans entiers de sa vie.
En prenant comme personnage principal, Agnolo Bronzino, peintre florentin du 16ème siècle, le jeu littéraire s'avère passionnant pour un romancier à l'imagination débordante et ...militante.
Le Bronzino, qualifié de maniériste, a été l'élève de Jacopo Pontormo, artiste qui a mieux traversé l'histoire picturale. de sa vie, on ne connaît pas grand chose à part ses oeuvres. En débutant le roman par une prétendue découverte de ses mémoires chez un antiquaire, Dominique Fernandez ouvre une large porte pour retracer, à sa façon, la vie de cet homme qui fut quand même le peintre officiel des Médicis pendant plus de trente ans.
L'érudition, la verve de l'auteur de "Porporino ou les mystères de Naples" nous emportent dans un romanesque flamboyant. En plus du fond historique précis ( la puissance de l'église romaine, l'arrivée d'Espagne de l'inquisition, la rivalité Florence /Venise), d'une galerie de portraits d'artistes mythiques ( Michel-Ange en tête), nous plongeons dans la vie intime de Bronzino et donc au coeur de la création. Nous assistons à l'élaboration de ses tableaux, aux codes qui régissent le genre mais aussi aux influences diverses qui président à leurs créations. C'est une véritable balade dans l'art florentin à laquelle nous sommes invités. Grâce au roman mais aussi à internet qui nous permet d'admirer les oeuvres en simultané, nous découvrons comment, dans un univers ultra formaté où l'église a regard sur tout, les artistes souvent hérétiques, glissent leurs pensées, leurs fantasmes, leur regard critique.
Pour Bronzino, et c'est là où l'on retrouve le militantisme de Dominique Fernandez, en plus d'être incroyant, il était homosexuel ( selon l'auteur).
La fin sur le blog
Lien : http://sansconnivence.blogsp..
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Il y a dans ce roman le meilleur et le pire de Dominique Fernandez.
On se délecte de son érudition, de la qualité de son écriture, de sa passion pour l'art. Fernandez excelle quand il entreprend de nous conter les joies et les déboires de ces peintres contraints par les hypocrisies de leur époque. On le suit d'atelier en atelier. On s'interrompt souvent pour chercher ces tableaux lumineux pour lesquels il s'enflamme. On est littéralement transporté dans un autre temps.
Malheureusement sa quête du beau est obnubilée par… la quéquette. Toutes les pensées, toutes les descriptions, toutes les considérations se tournent vers la queue – c'est ainsi qu'il nomme l'objet de son désir.
On ne critique pas ici ses orientations sexuelles. Grand bien lui fasse. On en conteste le caractère répétitif. Il n'y a que ça qui intéresse ses personnages, il n'y a que ça qui l'intéresse. Cela en devient parfois ridicule.
Pour garder toute objectivité, j'ai relu le roman en imaginant que la vulve ait remplacé la verge, que les jeunes femmes soient portées aux nues. L'effet eut été le même. Certes, étant plus intéressé par la gente féminine, mon attention aurait été plus grande mais l'impression de déjà vu serait restée.
En fait, c'est comme si Fernandez utilisait la même recette à chacun de ses livres : une ville d'Italie pour décor (Venise, Rome, Florence, Naples), un peintre pour héros (Caravaggio, Bronzino) et une intrigue bâtie autour de l'impossibilité d'exprimer librement sa passion du sexe masculin.
Il n'en reste pas moins que Fernandez se lit avec un immense plaisir. On lui pardonne volontiers son irrépressible goût de la chose.
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C'est toujours un plaisir de trouver sur l'étal d'une librairie un nouveau livre de Dominique Fernandez. D'abord parce que cela fait chaud au coeur de savoir que le monsieur n'arrête pas l'écriture (malgré son âge), mais surtout parce qu'on devine instantanément qu'on va apprendre beaucoup de la vie d'un peintre (ou autre : poète, auteur, etc.), accompagné de quelques bonnes anecdotes croustillantes. On sait également d'avance que l'écriture, toujours la même, sera fluide, simple mais profonde, au goût du jour avec ce qu'il faut d'érudition pour ne pas tomber dans la facilité. C'est cela qui fait de Dominique Fernandez un très bon écrivain français, et cela depuis de nombreuses années. Il y a ce qu'il faut de connaissances, de curiosité, de bonheur d'écrire et de partager, de recherche et de liberté.
La liberté, Fernandez l'use avec férocité. Il l'use essentiellement dans l'écriture (et j'imagine dans sa propre vie également -mais cela ne nous regarde pas), son écriture, qui est libre : libre de ses sujets, libre de ses désirs et de ce qu'elle expose. Pour le dire plus franchement et avec moins de fioritures : Fernandez n'hésite pas à parler de ce qu'il veut. Et disons-le encore plus clairement : il aime et il veut parler des garçons. Parfois excessivement, selon ma propre opinion. Loin de moi d'avoir de quelconques préjugés ou répugnances sur ce sujet (au contraire, j'admire Fernandez pour ceci également qu'il parle sans détours d'amours et de sexes masculins, ce n'est pas si désagréable, même pour une femme hétérosexuelle), mais il semblerait que l'on tombe, de temps en temps, dans le trop-dit, dans l'excès, dans le "je remets encore ça sur le tapis au-cas-où-vous-n'auriez-pas-compris". Fernandez aurait du suivre de plus près ce qu'il nous enseigne dans ce livre (et dans d'autres plus anciens aussi), à savoir que les choses cachées ont parfois plus de force et de puissance pour ceux à qui elles sont destinées. Si sa plume était restée un petit peu plus mystérieuse et codée le livre aurait redoublé d'intérêt et de pouvoir.

N'empêche que l'histoire d'Agnolo Bronzino racontée ici est passionnante (moins passionnante de mon point de vue que celle du Caravage dans La course à l'abîme, plus ancienne, mais d'une portée et d'une voix plus énergique). On se trouve projeté dans la société florentine. C'est toujours une grande émotion que de trouver un livre capable de nous retranscrire avec singularité les mondes anciens. Fernandez en est capable, il nous l'a déjà prouvé par le passé, notamment quand il s'agit de l'Italie. Plongés que nous sommes dans la Renaissance d'après Léonard, pendant le règne de Michel-Ange (qui travaille à Rome pour sa part), nous voguons entre les tribulations d'un Bronzino d'abord jeune, sous l'égide d'un Jacopo Pontormo, un petit peu fêlé, mais non moins attachant. Notre petit Bronzino timide évolue dans cette sphère artistique flamboyante et marginale, aux côtés d'Andrea del Sarto, de Parmigiano, ou de Rosso Fiorentino. Viendront s'ajouter par la suite des aventures avec Giorgio Vasari, Allessandro Allori (dont la relation avec Bronzino est émouvante si on se laisse prendre au jeu) et bien sûr, Benvenuto Cellini, dont le caractère ne cesse de surprendre.
Ne dévoilons pas ici les intrigues, les amours et les rebondissements, ce serait gâcher au plaisir de la lecture. Restons sur ce point positif, qui est selon moi le mérite du livre, de nous retranscrire un monde perdu aujourd'hui, dont Fernandez rêve avec ardeur ; d'un rêve si vigoureux qu'il nous entraîne avec lui dans sa vision merveilleuse et exaltée.
Lien : https://jusdereglisse.blogsp..
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J'avais lu il y a quelques temps Porporino ou les mystères de Naples de Dominique Fernandez , je me suis plongée avec beaucoup de plaisir dans ce pavé consacré cette fois à l'art florentin du XVIème siècle, plus particulièrement centré sur trois artistes, Pontormo, Agnolo Bronzino et Alessandro Allori.

J'ai eu pourtant un peu de mal à entrer dans l'ouvrage, le narrateur contemporain n'apportant à mes yeux pas grand chose. Une fois arrivée dans la Florence de l'époque, plus de réticence. On suit les artistes dans leur vie quotidienne, avec une multitude de détails, de leur nourriture à leurs vêtements, on s'y croirait vraiment!

L'auteur centre son analyse sur la sexualité des artistes, la représentation du corps dans l'art, et permet ainsi de redécouvrir de nombreuses oeuvres et les liens entre elles

Mais tout ceci va se heurter à l'église, l'inquisition, la contre réforme, les tableaux sont de véritables enjeux théologiques ou politiques et la place de l'artiste est particulièrement délicate.
Alors pour certains, les détails minuscules de leurs oeuvres deviennent l'occasion d'affirmer leur véritable opinion, plus ou moins dissimulée dans un nuage ou l'ombre d'un recoin de la peinture.

L'analyse des oeuvres est passionnante, telle celle de Allégorie avec Vénus et Cupidon d'Agnolo Bronzino, que de symboles!

Et si les soucis ne viennent pas de l'église, c'est du côté des puissants qu'ils arrivent.
Une Italie en guerre, Charles Quint, les rivalités entre familles, la Renaissance est loin d'être une période de paix, et être peintre de cour se révèle être une charge redoutable!

Sans parler des rivalités entre artistes (la jalousie d'un Vasari par exemple), la dépendance par rapport aux mécènes, ou leur non acceptation par leur famille, ou encore des exils ou autres procès, la vie d'artiste est loin d'être un long fleuve tranquille !

A travers ces trois générations d'artistes, on visite Florence, Rome, et Venise, on glisse de la renaissance vers le maniérisme, jusqu'aux funérailles de Michel Ange.

De nombreux tableaux sont évoqués, un fourmillement d'anecdotes fait découvrir de multiples détails qui échappent totalement au premier regard!

Bref, une plongée intéressante dans l'art florentin! Et une lecture à prolonger impérativement par une observation détaillée des tableaux cités!

Lien : http://lecture-spectacle.blo..
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