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La Dame à la licorne" est une aventure légendaire et artistique.
L'album donnera l'occasion de se repencher sur un artisanat médiéval, celui de la tapisserie.
Les dames savaient coudre, chers jeunes lecteurs, mais les hommes aussi.
En effet, les hommes ont su à une époque raconter leur quotidien, sur les murs des grottes avec de la peinture et d'autres ont eux-aussi immortalisé des légendes et des croyances dans les fils d'une tapisserie plus tard. Ces témoignages nous restent encore aujourd'hui dans les musées, preuve d'un art élégant, mais perdu avec le temps. Oui, les hommes et les femmes étaient capables de cela.
La fin de l'album reviendra sur les cycles de tapisserie qui servirent d'inspiration à l'histoire de
Béatrice Fontanel: les tapisseries du Musée français de Cluny, "
la Dame à la licorne" et " La chasse à la licorne" du Musée américain de New York, le Metropolitan Museum of Art. Nous ignorons aujourd'hui l'identité des tisseurs, les spécialistes s'accordent sur des ateliers célèbres de l'époque tel qu'Aubusson.
La première de couverture en lettres d'or imité donnera dans l'écrin somptueux pour la créature verte et faite nature qui s'y cabre. Ca sera la première bonne accroche.
La troisième sera probablement le style graphique de l'illustratrice Vanessa Hié, empruntant la manière décorative et stylisée des tapisseries. Cela permettra de faire le lien avec les oeuvres artistiques d'origine pour les lecteurs et d'y prolonger la magie de la légende, celle brodée par l'esprit de l'auteure
Béatrice Fontanel.
La deuxième accroche sera l'histoire donc.
Installez-vous et laissez vous porter.
L'auteure nous ramènera à une époque où fabuleux et ordinaire cohabitait dans le même monde mais où le fabuleux, très rare et prudent, se tenait invisible, à l'abri de la convoitise des hommes.
Les hommes n' auront pas un bon rôle.
Il ne faudra pas oublier que cette histoire sera avant tout une allégorie, une idée et non une généralité.
Ayant su comment découvrir et traquer la licorne, les fées et les autres créatures fabuleuses, de riches seigneurs poursuivront aux grands galops et sans relâche les bêtes magiques.
La licorne intéressait plus que les autres puisque sa corne d'immortalité soignait tout.
Au destin de la licorne, se superposera celui d'autres animaux sauvages plus ordinaires, on le comprendra.
La traque mettra en évidence une cruauté dans la chasse sportive.
Mais pas que, l'allégorie fera aussi la leçon sur un angle écologique, puisque pour rattraper le cheval cornu, les seigneurs n'hésiteront pas à abattre les arbres, à piétiner plus que de raison et à polluer les eaux par leur passage, nous dit-on.
Arriveront-ils à la capturer?
La licorne est réputée pour être insaisissable.
Les tapisseries d'origine autour de la licorne ont ceci d'intéressant qu'il est possible de les interpréter de plusieurs manières et donc de se raconter plus ou moins l'histoire que l'on veut.
L'image de la dame et sa licorne dégageront, d'une part, sur ces oeuvres une association tendre, faisant rivaliser de grâce la femme et l'animal fabuleux. C'est très délicat et flatteur.
Une autre image montrera la licorne pourchassée près d'un ruisseau en chasse-à-cour.
On nous racontera à la fin de l'histoire que cette oeuvre était la métaphore de la capture... amoureuse. Certaines lectrices s'indigneront probablement de cette perspective de la cour amoureuse, de ce flirt associé virilement à une course de bons seigneurs.
Et pourtant, n'était-ce pas cela que nous admirions dans ces grandes productions hollywoodiennes sur grands écrans, des chevaliers se disputant mortellement la main d'une princesse lors d'une joute armée et à cheval. Que le meilleur gagne.
C'était sans nul doute à l'époque les qualités musclées et valeureuses pour prétendre au rang d'une princesse et d'un royaume. L'époque réclamait ses chefs de guerre.
Sinon, quoi d'autres?
Un vaillant petit tailleur capable de tuer 100 mouches?
L'album est intéressant, riche de découvertes et d'interprétation, les jeunes lecteurs pourront continuer par la suite à se renseigner si il le désire avec des grands lecteurs, sur l'art de la tapisserie pour savoir si elle se pratique toujours par exemple ou pour en découvrir plus précisément la technique sur des métiers à tisser.
Il sera aussi possible de se renseigner pour en admirer de vraies dans un musée.
"...Le musée des Arts décoratifs à Paris conserve une collection de 130 tapisseries européennes datant de 1400 à 1600..." et celle de Bayeux est aussi très connue.