Il faut convaincre les gens de la nécessité de donner davantage de poupées aux petites filles pour jouer. Il faut que quelqu’un décide de ce qu’il convient de faire en ce qui concerne la pénurie d’air dont souffre le monde. Et ainsi de suite.
Évidemment, les gens qui font ce genre de travail doivent demeurer chez eux, comme je le fais, de façon à pouvoir suivre ce qui se passe dans le monde en se branchant sur ce dernier, parler à tous ceux avec lesquels ils ont besoin de s’entretenir, et être en contact avec toutes leurs machines pensantes et manufacturières.
À notre époque, les animaux à quatre pattes n’accomplissent généralement aucun travail. Il n’y a que les bipèdes qui puissent parler et penser comme nous.
D’un bout de l’année à l’autre, les gens ne sortiront pas, et le monde extérieur n’entrera pas chez eux. Cela ne sera plus nécessaire, les aliments et les médicaments et la bijouterie et les jouets s’obtiendront en ouvrant le robinet des canalisations ; tout ce dont ils pourraient avoir besoin parviendra à la maison en empruntant le réseau de tuyaux et de tubes et de fils et de rayons électromagnétiques qui s’enchevêtrent dans la forêt. Leurs désirs s’achemineront vers l’extérieur au long des fils et des rayons. Ils seront comblés par retour et par les mêmes voies.
Selon une légende à eux et à laquelle ils croient, il existe quelque part une porte secrète donnant sur le monde extérieur. Ils en chuchotent ensemble dans les coins, et dressent des plans, et tâtent et scrutent et sondent les moelleuses surfaces des murs et des plafonds. Pour Sulpice, cette quête est purement métaphysique ; ce n’est pas un enfant imaginatif, et l’idée ne lui vient jamais que la recherche pourrait réellement aboutir. Si tel devait être le cas, il n’aurait jamais songé à y prendre part.
Le monde extérieur, découvre-t-elle, est bordé de tous côtés par des murs, un plancher et un plafond.
(en anglais). A propos de son livre Skios