Les châteaux de la Loire

CHINON, démoli au début du XIXe siècle, n'est plus aujourd'hui qu'une ruine grandiose, dont les parties subsistantes – sauf deux ou trois croisées refaites dans le Logis du Roi, et la robuste tour d'Argenton, sur le flanc nord -sont notablement antérieures au XVe siècle. Mais le sol est ici celui même qu'a foulé Jeanne d'Arc aux heures les plus pathétiques de sa vie, dans les premiers jours de mars 1429, quand, après deux jours d'attente « en son logis, chez une bonne femme près du chastel », le duc de Vendôme vint la chercher pour la conduire à Charles VII.

Les quelques indication historiques précédentes nous permettent de définir ce qu'il faut entendre par « Châteaux de la Loire » : ce sont les demeures princières ou seigneuriales élevées dans les provinces riveraines du fleuve à l'époque où la Cour de France résidait en ces contrées, c'est à dire théoriquement entre les années 1418 (où le dauphin Charles s'enfuit de Paris) et 1524 (où François Ier se mit en route pour la campagne de Pavie).

Au contact des nombreux italiens qui peuplaient Fontainebleau et particulièrement de Serlio, la société française sentit ce qu'avait de barbare la façon dont les maçons indigènes pratiquaient l'art de bâtir. On vit s'élever alors, tout à la fin du règne de François Ier, quelques demeures particulières où l'imitation de l'antique ne se borne plus à la copie superficielle de tel profil de moulure, mais qui témoignent chez leurs bâtisseurs d'une science accomplie des proportions harmonieuses, fondement véritable de l'architecture classique.

Le calme revenant dans le royaume, non pas toutefois sans avoir été encore troublé par l'orage de la Ligue du Bien public, et le Roi continuant de résider principalement en Touraine, la seconde moitié du XVe siècle vit s'épanouir dans le Val de Loire une floraison de châteaux neufs.
Nombreux d'entre ceux-ci, continuant la tradition médiévale, sont essentiellement emprunts de caractère militaire ; et parmi eux le plus puissant et le plus féodal est à coup sûr LANGEAIS.

(Chapitre II Les derniers châteaux forts)

Alors même que le théâtre des opérations de guerre se fut éloigné des rives de la Loire, nul ne pouvait songer à bâtir, sinon quelque ouvrage militaire, quand la France entière était encore la proie des Écorcheurs.